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29/07/2016 | FRANCE | N°15PA04313

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 29 juillet 2016, 15PA04313


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 23 septembre 2014 par laquelle le préfet de police a refusé son admission provisoire au séjour au titre de l'asile ainsi que l'arrêté du 26 janvier 2015 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1428316 du 6 juillet 2015, le Tribunal administratif de

Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregist...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 23 septembre 2014 par laquelle le préfet de police a refusé son admission provisoire au séjour au titre de l'asile ainsi que l'arrêté du 26 janvier 2015 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1428316 du 6 juillet 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 novembre 2015, M.A..., représenté par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1428316 du 6 juillet 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de police du 26 janvier 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, pendant cet examen, une autorisation provisoire de séjour.

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'irrégularité dès lors que les premiers juges n'ont pas répondu aux moyens de légalité externe ;

- la décision portant refus de séjour en litige est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français en litige méconnaît le droit d'être entendu garanti par l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- elle a été prise en méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le pays de renvoi en litige méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée le 9 décembre 2015 au préfet de police, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 15 octobre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Bonneau-Mathelot a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant ivoirien, a présenté une demande d'asile sur le fondement des dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par une décision du 30 septembre 2013, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a refusé de lui reconnaître la qualité de réfugié. Par une décision du 26 mars 2014, la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) a confirmé cette décision. En conséquence, par un arrêté du 26 mai 2014, le préfet de police a refusé de délivrer à M. A...la carte de résident qu'implique la reconnaissance de la qualité de réfugié et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination. Par la suite, l'intéressé a, le 31 juillet 2014, sollicité le réexamen de sa demande d'asile. Par une décision du 23 septembre 2014, le préfet de police a refusé son admission provisoire au séjour au titre de l'asile au motif que cette nouvelle demande constituait un recours abusif aux procédures d'asile et un moyen de faire échec à une mesure d'éloignement. Sa demande d'asile a, alors, fait l'objet d'un traitement par priorité et par décision du 27 octobre 2014, l'OFPRA lui a, de nouveau, refusé la qualité de réfugié. Par un arrêté du 26 janvier 2015, le préfet de police à refusé de délivrer à M. A... une carte de résident en qualité de réfugié et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de renvoi. M. A...doit être regardé comme relevant appel du jugement du 6 juillet 2015 en tant que le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 janvier 2015.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : / ; [...] ; / 8° A l'étranger qui a obtenu le statut de réfugié en application du livre VII du présent code [...] ". Aux termes de l'article L. 313-13 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue à l'article L. 313-11 est délivrée de plein droit à l'étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire en application de l'article L. 712-1 du présent code, [...] ". Aux termes de l'article L. 711-1 du même code figurant dans le livre VII de ce code : " La qualité de réfugié est reconnue à toute personne persécutée en raison de son action en faveur de la liberté ainsi qu'à toute personne sur laquelle le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés exerce son mandat aux termes des articles 6 et 7 de son statut tel qu'adopté par l'Assemblée générale des Nations unies le 14 décembre 1950 ou qui répond aux définitions de l'article 1er de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés. [...] ". Aux termes de l'article L. 712-1 dudit code : " Sous réserve des dispositions de l'article L. 712-2, le bénéfice de la protection subsidiaire est accordé à toute personne qui ne remplit pas les conditions pour se voir reconnaître la qualité de réfugié mentionnées à l'article L. 711-1 et qui établit qu'elle est exposée dans son pays à l'une des menaces graves suivantes : / a) La peine de mort ; / b) La torture ou des peines ou traitements inhumains ou dégradants ; / c) S'agissant d'un civil, une menace grave, directe et individuelle contre sa vie ou sa personne en raison d'une violence généralisée résultant d'une situation de conflit armé interne ou international ". Enfin, aux termes de l'article L. 713-1 de ce code : " La qualité de réfugié est reconnue et le bénéfice de la protection subsidiaire est accordé par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides dans les conditions prévues au chapitre III du titre II du présent livre ". Il résulte de ces dispositions qu'il n'appartient qu'à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et, le cas échéant, à la Cour nationale du droit d'asile, de se prononcer sur le droit des intéressés à l'octroi de la qualité de réfugié ou de la protection subsidiaire.

3. Il ressort des pièces du dossier que la décision portant refus de délivrance de titre de séjour contestée fait suite à la demande d'admission au séjour au titre de l'asile présentée par M. A.... Dès lors que la reconnaissance de la qualité de réfugié avait été refusée au requérant par deux décisions de l'OFPRA puis par une décision de CNDA, le préfet de police était tenu de refuser de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans avoir à porter une appréciation sur les faits de l'espèce. Le préfet de police, qui n'était saisi d'aucune demande à un autre titre et n'était pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si M. A...pouvait prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une disposition autre que le 8° de l'article L. 314-11 précité, se trouvait, ainsi, en situation de compétence liée pour refuser le titre de séjour sollicité par M. A...dans le cadre de sa demande d'asile. Par suite, M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont écarté comme inopérants les moyens dirigés contre la décision portant refus de séjour.

Sur les conclusions dirigées contre la décision portant refus de séjour :

4. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 ci-dessus que les moyens tirés de l'insuffisance de motivation, du défaut d'examen et de l'erreur manifeste d'appréciation ne peuvent être utilement invoqués à l'encontre de la décision portant refus de séjour.

Sur les conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français :

5. D'une part, le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Toutefois, dans le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de titre de séjour. Le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour.

6. Il ressort des pièces du dossier que le préfet de police a obligé M. A...à quitter le territoire français après lui avoir refusé la délivrance du titre de séjour qu'il sollicitait. Dès lors, si le préfet ne l'a pas, préalablement à l'édiction de cette mesure d'éloignement, de sa propre initiative, expressément informé qu'en cas de rejet de sa demande, il serait susceptible d'être éloigné du territoire, en l'invitant à formuler ses observations sur cette éventualité, cette circonstance ne permet pas de regarder l'intéressé comme ayant été privé du droit à être entendu, qui a valeur de principe général du droit de l'Union européenne, alors qu'au demeurant M. A...n'apporte aucune précision sur les éléments qu'il aurait souhaité faire valoir auprès du préfet de police avant l'édiction de la décision l'obligeant à quitter le territoire. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu ne peut qu'être écarté.

7. D'autre part, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / [...] ; 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, [...] ".

8. M. A...fait valoir qu'il souffre d'une hépatite B dont le traitement n'est pas disponible dans son pays d'origine. Toutefois, les documents médicaux qu'il verse au dossier ne sont pas suffisamment circonstanciés pour établir que le défaut de prise en charge médicale pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que le traitement approprié à son état de santé n'existerait pas dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 doit être écarté.

Sur les conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination :

9. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " [...]. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Ce dernier texte énonce que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ".

10. Si M. A...fait valoir que son retour dans son pays d'origine entraînerait pour lui une privation de soins, il n'établit pas, ainsi qu'il a été dit plus haut, que sa pathologie nécessite un traitement dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui serait indisponible dans son pays d'origine. Dès lors, en fixant la Côte d'Ivoire comme pays de destination, le préfet de police n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention susvisée ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 20 juin 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Luben, président assesseur,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 juillet 2016.

Le rapporteur,

S. BONNEAU-MATHELOTLe président,

J. LAPOUZADE

Le greffier,

A. CLEMENTLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA04313


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA04313
Date de la décision : 29/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Sonia BONNEAU-MATHELOT
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : MBONGUE MBAPPE

Origine de la décision
Date de l'import : 09/08/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-07-29;15pa04313 ?
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