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30/06/2016 | FRANCE | N°15PA02504

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 30 juin 2016, 15PA02504


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 17 avril 2014 par lequel le préfet de police a refusé sa demande d'admission au séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois en fixant le pays de destination.

Par une ordonnance n°1428223 du 11 mars 2015, le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 24 juin 2015, M. B...représenté

par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1428223 en date du 11 mars 2015 du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 17 avril 2014 par lequel le préfet de police a refusé sa demande d'admission au séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois en fixant le pays de destination.

Par une ordonnance n°1428223 du 11 mars 2015, le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 24 juin 2015, M. B...représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1428223 en date du 11 mars 2015 du vice-président du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 17 avril 2014 par lequel le préfet de police a refusé sa demande d'admission au séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois en fixant le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de l'expiration du délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, en application des articles L. 911-1 à L. 911-3 du code de justice administrative ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des articles

L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que son conseil renonce à percevoir l'indemnité prévue par l'Etat, ainsi que les entiers dépens.

Il soutient que :

- le délai de recours contentieux a été suspendu par le dépôt de la demande d'aide juridictionnelle ;

- le vice-président du Tribunal administratif de Paris ne pouvait statuer par ordonnance ;

- la décision de la Cour nationale du droit d'asile ne lui a pas été régulièrement notifiée ;

- le préfet a méconnu les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a violé les dispositions de l'article L. 314-11 8° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

La requête a été communiquée au préfet de police, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision n° 2015/021629 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 4 juin 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Julliard a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. B..., ressortissant mauritanien né le 2 septembre 1995, est entré en France le 30 août 2012 ; qu'il a sollicité une carte de résident sur le fondement du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'après que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), dont la décision du 14 août 2013 a été confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 5 février 2014, lui a refusé le bénéfice du statut de réfugié, il a fait l'objet d'un arrêté du préfet de police en date du 17 avril 2014 refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois en fixant le pays de destination ; que M. B...relève appel de l'ordonnance du 11 mars 2015 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté, en application de l'article R. 222-1 7° du code de justice administrative, sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les (...) présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : (...) 7º Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé " ;

3. Considérant que pour rejeter, sur le fondement de l'article R. 222-1 précité du code de justice administrative, la demande de M.B..., le vice-président du Tribunal administratif de Paris a estimé que le moyen tiré de la méconnaissance par l'arrêté attaqué des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'était manifestement pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier que M. B... soutenait devant le Tribunal administratif de Paris que la décision fixant le pays de renvoi, contenue dans l'arrêté du préfet de police du 17 avril 2014, méconnaissait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et faisait valoir qu'étant membre de l'ethnie peule, il avait été persécuté dans son pays par des Maurs blancs, que des militaires lui avaient volé son bétail et fait subir des mauvais traitements pendant dix jours ; qu'il soutenait également avoir été contraint de quitter précipitamment et clandestinement la Mauritanie alors qu'il était encore mineur et qu'il ne pouvait y retourner en raison des risques de mauvais traitements qu'il encourt ; que nonobstant la circonstance que ces faits ont été examinés par la CNDA qui a estimé, dans sa décision du 5 février 2014, que les éléments soumis par M. B...ne permettent pas de tenir pour établis les faits énoncés et de conclure au bien-fondé de ses craintes actuelles et personnelles de persécution en cas de retour en Mauritanie, ce dernier est fondé à soutenir que le vice-président du Tribunal administratif ne pouvait rejeter sa demande par ordonnance prise sur le fondement de l'article R. 222-1 7° du code de justice administrative ; que cette ordonnance est dès lors irrégulière et doit être annulée ;

Sur la légalité de l'arrêté du 17 avril 2014 :

4. Considérant, en premier lieu, que M. B... soutient que le préfet n'apporte pas la preuve que la décision de la Cour nationale du droit d'asile lui a été notifiée ; que toutefois, dans les pièces produites par M. B... au soutien de sa demande en première instance figure une requête d'appel de la décision de la CNDA effectuée en son nom par la Communauté internationale pour la solidarité et le développement et qui indique relever appel " de la décision de rejet de la Cour nationale du droit d'asile en date du 10/02/2014, notifiée par voie administrative le 13/02/2014 " ; qu'ainsi le moyen manque en fait et doit être écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : / (...) / 8° A l'étranger qui a obtenu le statut de réfugié en application du livre VII du présent code (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-13 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue à l'article L. 313-11 est délivrée de plein droit à l'étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire en application de l'article L. 712-1 du présent code (...) " ; qu'aux termes des articles L. 711-1, L. 712-1 et L. 713-1 du même code, qui figurent dans le livre VII de ce code : " La qualité de réfugié est reconnue à toute personne persécutée en raison de son action en faveur de la liberté ainsi qu'à toute personne sur laquelle le haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés exerce son mandat aux termes des articles 6 et 7 de son statut tel qu'adopté par l'Assemblée générale des Nations unies le 14 décembre 1950 ou qui répond aux définitions de l'article 1er de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés. (...) ", " Sous réserve des dispositions de l'article L. 712-2, le bénéfice de la protection subsidiaire est accordé à toute personne qui ne remplit pas les conditions pour se voir reconnaître la qualité de réfugié mentionnées à l'article L. 711-1 et qui établit qu'elle est exposée dans son pays à l'une des menaces graves suivantes : / a) La peine de mort ; / b) La torture ou des peines ou traitements inhumains ou dégradants ; / c) S'agissant d'un civil, une menace grave, directe et individuelle contre sa vie ou sa personne en raison d'une violence généralisée résultant d'une situation de conflit armé interne ou international " et " La qualité de réfugié est reconnue et le bénéfice de la protection subsidiaire est accordé par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides dans les conditions prévues au chapitre III du titre II du présent livre " ;

6. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'il n'appartient qu'à l'OFPRA et, le cas échéant, à la CNDA, de se prononcer sur le droit des intéressés à l'octroi de la qualité de réfugié ou de la protection subsidiaire ; que M.B..., qui a sollicité son admission au statut de réfugié, s'est vu refuser la reconnaissance de cette qualité par une décision de l'OFPRA du 14 août 2013, confirmée par la CNDA le 5 février 2014 ; qu'en conséquence, le préfet de police était tenu de lui refuser la carte de résident qu'il sollicitait en qualité de réfugié sur le fondement des dispositions précitées du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. " ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B... était présent depuis moins de deux années sur le territoire français à la date de la décision litigieuse, qu'il est célibataire et sans charge de famille et n'apporte aucun élément de nature à démontrer une intégration particulière en France ; que, dans ces conditions, l'arrêté attaqué n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

9. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; que toutefois, ainsi qu'il a déjà été dit au point 6, la demande d'asile de M. B...a été rejetée tant par l'OFPRA que par la CNDA ; qu'il ne produit devant la Cour aucun élément nouveau permettant d'établir qu'il serait personnellement et actuellement exposé à des risques de traitement inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées ne peut qu'être écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 17 avril 2014 ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative et celles tendant au remboursement des frais d'instance, ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 1428223 du 11 mars 2015 du vice-président du Tribunal administratif de Paris est annulée.

Article 2 : La demande de M. B...devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 16 juin 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Bouleau, premier vice-président,

- M. Polizzi, président assesseur,

- Mme Julliard, première conseillère,

Lu en audience publique, le 30 juin 2016.

La rapporteure,

M. JULLIARDLe président,

M. BOULEAU

Le greffier,

N. ADOUANE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 10PA03855

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N° 15PA02504


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA02504
Date de la décision : 30/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Marianne JULLIARD
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : GONDARD

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-06-30;15pa02504 ?
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