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10/06/2016 | FRANCE | N°15PA03594

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 10 juin 2016, 15PA03594


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 10 août 2015 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français en fixant le pays de destination, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et l'a placé en rétention administrative ;

Par un jugement n° 1513745 du 13 août 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de police de procéder

à un nouvel examen de la situation de M. A... ;

Procédure devant la Cour :

Par une requ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 10 août 2015 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français en fixant le pays de destination, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et l'a placé en rétention administrative ;

Par un jugement n° 1513745 du 13 août 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de police de procéder à un nouvel examen de la situation de M. A... ;

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée les 14 septembre et 5 octobre 2015, le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de M.A....

Le préfet de police soutient que :

- c'est à tort que le premier juge a annulé son arrêté du 10 août 2015 au motif qu'il était entaché d'un défaut d'examen particulier de la situation de M.A... ;

- M. A...a fait l'objet le 19 août 2014 d'un refus de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, de sorte qu'il entrait dans le champ d'application des dispositions du 3° de l'article L. 511-1 I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au profit desquelles il demande une substitution de base légale ;

- l'arrêté en litige est suffisamment motivé ;

- l'obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M.A... ;

- la décision lui refusant un délai de départ volontaire n'est entachée ni d'une erreur de fait ni d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision plaçant M. A...en rétention administrative est suffisamment motivée.

La requête a été communiquée à M.A..., qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Boissy a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.A..., de nationalité algérienne, entré en France le

11 octobre 2010 sous couvert d'un visa de long séjour, a été interpellé puis placé en garde à vue le 10 août 2015 ; que, par un arrêté du 10 août 2015, le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français en fixant le pays de destination, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et l'a placé en rétention administrative ; que le préfet de police relève appel du jugement du 13 août 2015 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé l'arrêté du 10 août 2015 et, d'autre part, lui a enjoint de procéder au réexamen de la situation administrative de M.A... ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne le moyen d'annulation retenu par le premier juge :

2. Considérant que M. A...a fait valoir, lors de son interpellation le 10 août 2015, qu'il était entré en France en 2010 sous couvert d'un visa de long séjour " étudiant ", qu'il avait été en possession d'un titre de séjour " étudiant ", qu'il exerçait la profession de psychiatre et qu'il s'apprêtait à déposer une nouvelle demande de titre de séjour dans la mesure où il avait obtenu l'équivalence lui permettant d'exercer sa profession en France ; que si le préfet de police a, par erreur, indiqué, dans l'arrêté en litige, que l'intéressé ne pouvait " justifier être entré régulièrement sur le territoire français ", il ressort toutefois des autres mentions figurant dans cet arrêté qui sont, pour leur part, exactes, ainsi que des autres pièces du dossier, et en particulier du " procès-verbal saisine contrôle d'identité " établi le 10 août 2015 et des mentions manuscrites portées par M.A..., que le préfet de police a bien procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressé ; que, par suite, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le premier juge a annulé son arrêté du 10 août 2015 en se fondant sur ce motif ;

3. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M.A... ;

En ce qui concerne les autres moyens :

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens

des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) ; / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce qu'indiquent les motifs de l'arrêté en litige, M. A...est entré régulièrement sur le territoire français le

11 octobre 2010 sous couvert d'un passeport muni d'un visa valable du 4 octobre 2010 au

2 janvier 2011 ; que, par suite, la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ne pouvait pas être prise sur le fondement des dispositions précitées du 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

6. Considérant, toutefois, que lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée ; qu'une telle substitution relevant de l'office du juge, celui-ci peut y procéder de sa propre initiative, au vu des pièces du dossier, mais sous réserve, dans ce cas, d'avoir au préalable mis les parties à même de présenter des observations sur ce point ;

7. Considérant qu'en l'espèce, la décision litigieuse trouve son fondement légal dans les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui peuvent être substituées à celles du 1° du I de l'article L. 511-1 précité, dès lors en premier lieu que, s'étant maintenu sur le territoire français alors que la délivrance d'un titre de séjour lui a été refusée le 19 août 2014, M. A... se trouvait dans la situation où, en application du 3° du I de l'article L. 511-1, le préfet de police pouvait décider qu'il serait éloigné du territoire français, en deuxième lieu que cette substitution de base légale, demandée par le préfet, n'a pour effet de priver l'intéressé d'aucune garantie et, en troisième lieu, que l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation pour appliquer l'une ou l'autre de ces deux dispositions ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que la décision portant obligation de quitter le territoire français comporte l'exposé des motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement, alors même que la base légale de cette décision se trouve, comme il a été dit ci-dessus, non pas dans les dispositions du 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile mais dans celles du 3° de ce même article ; que, dès lors, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision doit être écarté ;

9. Considérant, en dernier lieu, que M. A...fait valoir qu'il est entré en France en 2010, qu'il exerce la profession de psychiatre au sein d'un hôpital de la région parisienne ; que, toutefois, sa demande d'autorisation de travail en qualité de praticien, attaché associé, a été rejetée par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi le 8 juillet 2014 ; que, s'il fait valoir qu'il a obtenu, le 28 décembre 2014, l'équivalence lui permettant d'exercer sa profession en France, il n'établit ni même n'allègue avoir obtenu ou même demandé une autorisation de travail au cours des sept mois qui ont précédé son interpellation ; que M.A..., qui est célibataire et sans charge de famille, n'établit pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 34 ans ; qu'il n'établit ni même n'allègue être dans l'impossibilité de se réinsérer en Algérie où il travaillait déjà en milieu hospitalier ; que, par suite, M. A...n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

S'agissant de la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire à M. A... :

10. Considérant, d'une part, que, pour les motifs exposés aux points 2 à 9, M. A...n'est pas fondé à exciper, au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, de l'illégalité de la décision par laquelle le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français ;

11. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2. " ;

12. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement édictée à son encontre le 19 août 2014 ; qu'en outre, à la date de la décision attaquée, l'intéressé n'était pas en mesure de justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, son passeport étant périmé depuis le 1er juillet 2015 ; que si l'intéressé fait valoir qu'il a obtenu l'équivalence lui permettant d'exercer sa profession en France, cette circonstance ne saurait être considérée comme une circonstance exceptionnelle au sens de du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de police, en refusant d'accorder à M. A...un délai de départ volontaire pour quitter le territoire, aurait commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions précitées, doit être écarté ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

13. Considérant que, pour les motifs exposés aux points 2 à 9, M. A...n'est pas fondé à exciper, au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination, de l'illégalité de la décision par laquelle le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français ;

S'agissant de la décision de placement en rétention administrative :

14. Considérant, en premier lieu, que, pour les motifs exposés aux points 2 à 12, M. A... n'est pas fondé à exciper, au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision le plaçant en rétention administrative, de l'illégalité de la décision par laquelle le préfet de police lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français ;

15. Considérant, en deuxième lieu, que la décision contestée comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et répond ainsi aux exigences de motivation des actes administratifs prescrites par la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

16. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : / (...) / 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé ; / (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 561-2 du même code : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation (...) " ;

17. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 12 que M. A...faisait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise depuis moins d'un an et pour laquelle le délai pour quitter le territoire était expiré ; que s'il fait valoir qu'il a spontanément remis son passeport à l'administration le lendemain de sa rétention, ce passeport était périmé ; qu'ainsi, en décidant que, compte tenu du risque qu'il se soustraie à la mesure d'éloignement, l'intéressé devait être placé dans les locaux du centre de rétention pendant le temps strictement nécessaire à son départ de France, le préfet de police n'a en l'espèce ni commis d'erreur manifeste d'appréciation ni méconnu les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

18. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 10 août 2015 et l'a enjoint de procéder au réexamen de la situation de M. A...et à demander l'annulation de ce jugement et le rejet de la demande de M.A... ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1513745 du 13 août 2015 du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 27 mai 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Driencourt, président de chambre,

- Mme Mosser, président assesseur,

- M. Boissy, premier conseiller.

Lu en audience publique le 10 juin 2016.

Le rapporteur,

L. BOISSYLe président,

L. DRIENCOURTLe greffier,

F. DUBUY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N°15PA03594 3


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA03594
Date de la décision : 10/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme DRIENCOURT
Rapporteur ?: M. Laurent BOISSY
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : VINAY

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-06-10;15pa03594 ?
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