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09/06/2016 | FRANCE | N°14PA05366

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 09 juin 2016, 14PA05366


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association de défense des riverains du Port Despointes Faubourg Blanchot a demandé au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler la délibération n° 2013/1127 du 26 novembre 2013 par laquelle le conseil municipal de Nouméa a autorisé, sous réserve de certaines conditions suspensives, l'échange sans soulte d'une parcelle municipale avec un terrain appartenant à la société Mobil International Petroleum Corporation.

Par un jugement n° 1400087 du 2 octobre 2014, le tribunal administra

tif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par un...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association de défense des riverains du Port Despointes Faubourg Blanchot a demandé au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler la délibération n° 2013/1127 du 26 novembre 2013 par laquelle le conseil municipal de Nouméa a autorisé, sous réserve de certaines conditions suspensives, l'échange sans soulte d'une parcelle municipale avec un terrain appartenant à la société Mobil International Petroleum Corporation.

Par un jugement n° 1400087 du 2 octobre 2014, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 31 décembre 2014 et un mémoire complémentaire enregistré le 26 octobre 2015, l'association de défense des riverains du Port Despointes Faubourg Blanchot, représentée par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400087 du 2 octobre 2014 du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;

2°) d'annuler la délibération n° 2013/1127 du 26 novembre 2013 par laquelle le conseil municipal de Nouméa a autorisé, sous réserve de certaines conditions suspensives, l'échange sans soulte d'une parcelle municipale avec un terrain appartenant à la société Mobil International Petroleum Corporation ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Nouméa et à la charge de la société Mobil International Petroleum Corporation le versement, chacune, de la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a intérêt à agir et sa requête est recevable ;

- la délibération litigieuse est entachée d'un vice de procédure, faute de réalisation d'une étude d'impact ;

- elle devra être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la délibération n° 2013/1126 du même jour qui emporte déclassement du domaine public de la parcelle municipale, également contestée devant le tribunal administratif ; la décision de déclassement est illégale en l'absence de désaffectation de la parcelle et faute de justification de l'intérêt général de l'opération en cause, qui vise à créer une sixième station-service dans une zone pourtant destinée aux loisirs selon le plan d'urbanisme directeur de la commune ;

- la délibération litigieuse est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; la commune ne démontre pas de projet sur le terrain qu'elle acquiert ; le terrain acquis est surévalué et les obligations mises à la charge de la société quant à sa dépollution trop imprécises ; le terrain cédé est sous-évalué.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 septembre 2015, la commune de Nouméa, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce que le versement de la somme de 4 000 euros soit mis à la charge de l'association requérante sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- aucune disposition législative ou réglementaire n'impose la réalisation d'une étude d'impact avant une cession d'immeubles ou un échange de parcelles ;

- la légalité de la délibération n'est pas conditionnée par celle de la délibération n° 2013/1126 du même jour, qui n'en constitue pas le fondement et dont elle n'est pas une mesure d'application ou de mise en oeuvre ; en tout état de cause, la parcelle échangée, qui est un terrain vague ne relevait pas du domaine public et n'étais pas affectée à l'usage du public, faute d'être viabilisée ou entretenue et faute de manifestation de volonté de la commune en ce sens ; le déclassement est en outre indépendant du zonage opéré par les règlement d'urbanisme ; il est conforme à l'intérêt général faute pour la parcelle de présenter un intérêt local fort ;

- la délibération n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; l'estimation du service des domaines, qui relève de l'État, est un document préparatoire dont il n'appartient pas à la commune de justifier la pertinence ; les conditions de l'échange sont suffisamment précises ; l'échange est parfaitement proportionnel et équitable, et conforme à l'intérêt général.

Par un mémoire enregistré le 31 juillet 2015, la société Mobil International Petroleum Corporation, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et à ce que le versement la somme de 2 600 euros soit mis à la charge de l'association requérante sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la demande de l'association requérante devant le tribunal administratif était irrecevable, faute d'intérêt à agir ;

- aucune disposition législative ou réglementaire n'impose la réalisation d'une étude d'impact avant une cession d'immeubles ou un échange de parcelles ;

- la délibération litigieuse n'est pas illégale du fait de l'illégalité de la délibération n° 2013/1126 du même jour, dès lors que l'illégalité de cette dernière n'est pas démontrée ; la parcelle en cause n'était pas affectée à l'usage du public ; son déclassement répond à un but d'intérêt général ;

- la délibération litigieuse n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi organique n° 99-209 du 19 mars 2009 relative à la Nouvelle-Calédonie ;

- le code des communes de Nouvelle-Calédonie ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Diémert,

- les conclusions de M. Romnicianu, rapporteur public,

- et les observations de Me Asika, avocat de la commune de Nouméa.

1. Considérant que, par une délibération n° 2013/1126 du 26 novembre 2013, le conseil municipal de Nouméa a prononcé le déclassement du domaine public communal d'une parcelle provenant du lot n° 1 Partie situé section Faubourg Blanchot ; que, par la délibération n° 2013/1127 adoptée le même jour, il a autorisé, sous réserve de certaines conditions suspensives, l'échange sans soulte de ce terrain municipal avec un terrain situé en centre ville de Nouméa et appartenant à la société Mobil International Petroleum Corporation ; que l'association de défense des riverains du Port Despointes Faubourg Blanchot a demandé au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, par deux requêtes distinctes, l'annulation de ces deux délibérations ; que, par deux jugements n° 1400087 et n° 1400088 lus le 2 octobre 2014, le tribunal administratif a rejeté ses demandes ; que l'association relève par la présente requête appel du jugement n° 1400087 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande d'annulation de la délibération n° 2013/1127 du 26 novembre 2013 autorisant l'échange des terrains ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande de première instance ;

Sur la légalité externe de la délibération du conseil municipal de Nouméa :

2. Considérant que, pour écarter le moyen tiré de ce que la délibération litigieuse serait entachée d'un vice de procédure au motif qu'elle aurait dû être précédée d'une étude d'impact, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie s'est fondé sur l'absence de toute obligation en ce sens pesant sur la commune, faute de disposition législative ou réglementaire l'instituant ; que, devant la Cour, l'association requérante se borne à articuler de nouveau ce moyen, en termes presqu'identiques et sans l'assortir d'une argumentation ou de précisions complémentaires qui seraient de nature à conduire à infirmer l'appréciation des premiers juges ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs du jugement attaqué ;

Sur la légalité interne de la délibération du conseil municipal de Nouméa :

S'agissant de l'exception d'illégalité de la délibération n° 2013/1126 du 26 novembre 2013 et de la demande d'annulation par voie de conséquence :

3. Considérant que l'exception d'illégalité d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, ne peut être utilement invoquée à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative que si cette dernière a été prise pour son application ou s'il en constitue la base légale ;

4. Considérant, d'une part, que, même si l'intervention d'une décision préalable de déclassement de la parcelle communale était nécessaire pour permettre qu'il soit procédé à l'échange de terrains faisant l'objet de la délibération litigieuse, cette dernière n'est pas prise pour l'application de la décision de déclassement ; que, d'autre part, la délibération portant déclassement du domaine public de la parcelle provenant du lot n° 1 Partie situé section Faubourg Blanchot ne constitue pas la base légale de celle décidant l'échange des parcelles ; que ces deux opérations ne constituent pas une opération administrative unique comportant un lien tel que les illégalités qui affecteraient la décision de déclassement pourraient être régulièrement invoquées par la voie de l'exception, alors même que le juge aurait rejeté le recours pour excès de pouvoir formé contre elle ; qu'il s'ensuit que le moyen fondé sur l'exception d'illégalité de la délibération n° 2013/1126 du 26 novembre 2013 doit être écarté ;

5. Considérant que si la requérante fait également valoir que la délibération n° 2013/1127 autorisant l'échange des terrains doit être annulée en conséquence de l'annulation de la délibération n° 2013/1126 du même jour autorisant le déclassement du terrain communal, la cour confirme, par un arrêt n° 14PA05367 de ce jour, le jugement n° 1400088du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ayant rejeté pour irrecevabilité la requête dirigée contre cette délibération ;

S'agissant de l'erreur manifeste d'appréciation :

6. Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'échange entre la commune de Nouméa et la société Mobil Internatonal Petroleum Corporation, qui porte sur deux parcelles respectivement situées en centre-ville et entourée de terrains municipaux, pour celle appartenant à cette société, et sur le rivage de la baie de Sainte-Marie, pour celle appartenant à la commune, dans le but, d'une part de permettre un réaménagement du centre-ville à proximité immédiate de l'hôtel de ville, et d'autre part, d'installer une nouvelle station-service, ne reposerait pas sur des motifs d'intérêt général, compte tenu tant des nécessités liées à la modernisation et à la redynamisation du centre-ville, d'ailleurs prévues par le plan d'aménagement et de développement rural communal, que des besoins des conducteurs d'automobiles en carburant ou en services divers, dont il n'est pas démontré qu'ils seraient déjà entièrement satisfaits, en cette partie du territoire communal très utilisée par les véhicules à moteur, par la présence des stations-services existantes ; que la première branche du moyen doit donc être écartée ;

7. Considérant, en second lieu, que, si une collectivité publique ne peut céder un élément de son patrimoine à un prix inférieur à sa valeur à une personne poursuivant un intérêt privé que lorsque la cession est justifiée par des motifs d'intérêt général et comporte des contreparties suffisantes, l'association requérante n'apporte pas, devant la Cour, d'arguments ou d'éléments nouveaux lui permettant d'infirmer, en ce qui concerne la valeur des parcelles échangées et la suffisance des obligations mises à la charge de la société, l'appréciation portée sur ce point par les premiers juges ; qu'il y a lieu, par adoption des motifs du jugement attaqué, d'écarter cette branche du moyen ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'association requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la délibération n° 2013/1127 du 26 novembre 2013 ;

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Nouméa et la société Mobil International Petroleum Corporation, qui ne sont pas parties perdantes, versent à la requérante la somme qu'elle demande au titre des frais de procédure qu'elle a exposés ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la commune de Nouméa et de la société Mobil International Petroleum Corporation fondées sur les mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'association de défense des riverains du Port Despointes Faubourg Blanchot est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Nouméa et de la société Mobil International Petroleum Corporation tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association de défense des riverains du Port Despointes Faubourg Blanchot, à la commune de Nouméa et à la société Mobil International Petroleum Corporation.

Délibéré après l'audience du 12 mai 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- Mme Amat, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 9 juin 2016.

Le rapporteur,

S. DIÉMERTLa présidente,

S. PELLISSIER

Le greffier,

E. CLEMENTLa République mande et ordonne au haut commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA05366


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 14PA05366
Date de la décision : 09/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Stéphane DIEMERT
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : CHASSARD

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-06-09;14pa05366 ?
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