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01/06/2016 | FRANCE | N°15PA01593

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 01 juin 2016, 15PA01593


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La Société Transportes Canto Da Capela a demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, des rappels de droits de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que des majorations correspondantes auxquels elle a été assujettie au titre des années 2006 à 2009 et des amendes prévues par les dispositions de l'article 1759 du code général des impôts qui lui ont été assignées au titre des mêmes années.

Par un jugement n° 13071

51 du 19 janvier 2015, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La Société Transportes Canto Da Capela a demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, des rappels de droits de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que des majorations correspondantes auxquels elle a été assujettie au titre des années 2006 à 2009 et des amendes prévues par les dispositions de l'article 1759 du code général des impôts qui lui ont été assignées au titre des mêmes années.

Par un jugement n° 1307151 du 19 janvier 2015, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 13 avril 2015 la Société Transportes Canto Da Capela, représentée par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1307151 du 19 janvier 2015 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et amendes contestées devant ce tribunal ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme à préciser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- en application des stipulations de la convention conclue entre la France et le Portugal destinée à éviter les doubles impositions et signée le 14 janvier 1971 elle n'est pas imposable en France, dès lors, qu'elle n'y dispose pas d'un établissement stable au sens de ces stipulations qui, notamment, excluent, de la notion d'établissement stable, le recours aux services d'un courtier ou de tout autre intermédiaire bénéficiant d'un statut indépendant ;

- les bases d'imposition retenues par l'administration sont inexactes, ses résultats étant en réalité déficitaires ; le taux de marge retenu ne correspond pas au taux existant dans son secteur d'activité ;

- elle a déclaré au Portugal les sommes encaissées sur le compte bancaire ouvert en France ;

- les rappels de TVA sont infondés, dès lors que la plupart des opérations de transport ont été effectuées à partir du Portugal à destination de France ;

- c'est à tort que l'administration a fait application de l'amende prévue par les dispositions de l'article 1759 du code général des impôts dès lors que l'administration connaissait l'identité des bénéficiaires des revenus réputés distribués.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 septembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la Société Transportes Canto Da Capela ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Par ordonnance du 14 mars 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 4 avril 2016 à

12 heures.

Vu :

- la convention conclue entre la France et le Portugal destinée à éviter les doubles impositions, signée le 14 janvier 1971 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Legeai,

- les conclusions de M. Egloff, rapporteur public.

1. Considérant que la Société Transportes Canto Da Capela, société de transport, de droit portugais ayant son siège social au Portugal, relève régulièrement appel du jugement n° 1307151 du 19 janvier 2015 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des rappels de droits de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre des exercices 2006 à 2009, ainsi que des amendes prévues par les dispositions de l'article 1759 du code général des impôts ; que, suivant avis en date du 21 mai 2010, l'administration a procédé à la vérification de la comptabilité de ladite société, à l'issue de laquelle a été établie, le 20 décembre 2010, une proposition de rectification ; que les rectifications opérées, ont été établies selon la procédure de taxation d'office ;

Sur les conclusions à fin de décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés :

En ce qui concerne le principe de l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés :

2. Considérant que, d'une part, aux termes de l'article 209 du code général des impôts : " I. Sous réserve des dispositions de la présente section, les bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés sont déterminés (...) en tenant compte uniquement des bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France ainsi que de ceux dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions " ; qu'termes de l'article 7 de la convention franco portugaise signée le 14 janvier 1971 : " (...) Les bénéfices d'une entreprise d'un Etat contractant ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que l'entreprise n'exerce son activité dans l'autre Etat contractant par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé. Si l'entreprise exerce son activité d'une telle façon, les bénéfices de l'entreprise sont imposables dans l'autre Etat, mais uniquement dans la mesure où ils sont imputables audit établissement stable. " ; qu'aux termes de l'article 5 de la même convention : " 1. Au sens de la présente convention, l'expression " établissement stable" désigne une installation fixe d'affaires où l'entreprise exerce tout ou partie de son activité. 2. L'expression "établissement stable " comprend notamment : a. Un siège de direction ; b. Une succursale ; c. Un bureau ; d. Une usine ; (...)4. Une personne agissant dans un Etat contractant pour le compte d'une entreprise de l'autre Etat contractant, autre qu'un agent jouissant d'un statut indépendant, visé au paragraphe 6, est considérée comme " établissement stable " dans le premier Etat si elle dispose dans cet Etat de pouvoirs qu'elle y exerce habituellement lui permettant de conclure des contrats au nom de l'entreprise, à moins que l'activité de cette personne ne soit limitée à l'achat de marchandises pour l'entreprise (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment, du procès verbal d'audition du

17 septembre 2009 et du procès verbal n° 1/2010 du 13 janvier 2010 établis par l'URSSAF, obtenus par l'administration dans le cadre de l'exercice de son droit de communication prévu à l'article L. 81 du livre des procédures fiscales, que M. A...C..., représentant légal de l'appelante, a précisé que les marchandises transportées au bénéfice de clients établis en France étaient commandées depuis son domicile à Pontault-Combault ou du restaurant qu'il exploite depuis 2009, que les commandes des clients en France étaient passées auprès de lui, et qu'il disposait seul du pouvoir d'effectuer les ordres de transport ; que les factures présentées par la requérante lors de la vérification de comptabilité mentionnaient l'existence d'une filiale en France à l'adresse personnelle de M. A...C..., laquelle correspondait également à l'adresse mentionnée au répertoire Sirene ; que, par ailleurs, la société appelante disposait, au cours des années en litige, d'un compte bancaire auprès de la BCP à Pontault-Combault sur lequel étaient crédités les règlements effectués par les clients établis en France ; qu'il en résulte que l'intéressée devait être regardée comme disposant en France d'une installation fixe et y exerçant un cycle complet d'opérations détachables de son activité de transport, notamment au sens des stipulations précitées de l'article 5 de la convention fiscale bilatérale qu'elle invoque ; que, la circonstance, au demeurant non démontrée, que les bénéfices réalisés et imposés en France auraient également été imposés au Portugal est, en toute hypothèse, sans incidence, les bénéfices d'un établissement stable devant être assujettis en France ;

En ce qui concerne le bien fondé des impositions à l'impôt sur les sociétés :

4. Considérant que les impositions mises à la charge de la société Transportes Canto Da Capela en application des dispositions des articles 38 et 39 du code général des impôts ont été établies selon la procédure de taxation d'office en application du 3° de l'article L. 68 du livre des procédures fiscales ; que, dès lors, en application des dispositions de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, l'appelante supporte la charge de la preuve du caractère exagéré des impositions auxquelles elle a été assujettie ;

5. Considérant que le rapprochement des copies de chèques obtenues dans le cadre du droit de communication avec les écritures comptables ressortant des grands livres clients, a permis de mettre en évidence l'absence de comptabilisation de nombreuses sommes ; que, dans ces conditions, le montant du résultat imposable de la société Transportes Canto Da Capela a été déterminé par l'administration à partir du montant des encaissements sur le compte ouvert dans les livres de la BCP à Pontault-Combault ; que ledit montant a fait l'objet, afin de parvenir à un résultat hors taxe, d'un retraitement reposant sur une ventilation entre les opérations taxables à la valeur ajoutée en France, estimé par l'administration à 75% de ces encaissements, et, pour le surplus, celles non taxables à la taxe sur la valeur ajoutée en France, correspondant aux encaissements effectués par des clients non assujettis établis en France pour des transports au départ du Portugal à destination de la France ; que l'administration a, faute de toute production de factures de charges, ensuite appliqué aux résultats obtenus un coefficient de charges d'exploitation de 80% ; que si la société appelante conteste cette détermination, elle ne produit aucun élément de nature à la remettre en cause ; que la circonstance qu'elle invoque selon laquelle, dans son secteur d'activité, le pourcentage de résultats serait compris entre 2 et 6 % est, par suite, inopérante ; qu'il en résulte que l'exposante n'est pas fondée à soutenir que les impositions auxquelles elle a été assujettie sont exagérées ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions de la société Transportes Canto Da Capela à fin de décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie doivent être rejetées ;

Sur les conclusions à fin de décharge des droits de taxe sur la valeur ajoutée :

7. Considérant, d'une part, que pour contester les droits de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie, la société Transportes Canto Da Capela soutient à titre principal qu'elle ne dispose pas d'un établissement stable en France ; qu'eu égard aux motifs qui précèdent, l'exposante n'est pas fondée, par ce seul moyen, à soutenir que c'est à tort que l'administration a soumis les opérations effectuées à la taxe sur la valeur ajoutée ; que, d'autre part, si la requérante fait valoir pour la première fois en appel, sur le fondement des dispositions de l'article 259 du code général des impôts, que les opérations de transport ont été effectuées le plus souvent à partir du Portugal à destination de la France et que par suite une part importante de son chiffre d'affaires n'est pas assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée en France, elle ne produit aucun élément de nature à l'établir ; qu'il en résulte que les conclusions de l'appelante à fin de décharge des droits de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie doivent être rejetées ;

Sur les conclusions à fin de décharge de l'amende prévue par les dispositions de l'article 1759 du code général des impôts :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 1759 du code général des impôts : " Les sociétés et les autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des revenus à des personnes dont, contrairement aux dispositions des articles 117 et 240, elles ne révèlent pas l'identité, sont soumises à une amende égale à 100 % des sommes versées ou distribuées. Lorsque l'entreprise a spontanément fait figurer dans sa déclaration de résultat le montant des sommes en cause, le taux de l'amende est ramené

à 75 % " ;

9. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article 117 du code général des impôts que la circonstance, à la supposer établie, que l'administration connaisse l'identité des bénéficiaires de sommes qu'elle considère comme des revenus distribués par une société ne fait pas obstacle à la mise en oeuvre des dispositions de cet article ;

10. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales que l'amende prévue par les dispositions de l'article 1759 du code général des impôts est au nombre des sanctions qui doivent être motivées ; que dans le cadre de la proposition de rectification du 20 décembre 2010, l'administration a invité la société Transportes Canto Da Capela à désigner, dans un délai de trente jours à compter de la réception de la demande, le bénéficiaire des sommes considérées comme des revenus distribués ; que, par une lettre du 27 janvier 2011, l'administration a informé l'exposante de ce que, faute de réponse dans le délai imparti, elle entendait mettre en oeuvre à son encontre l'amende prévue par les dispositions de l'article 1759 du code général des impôts ; que cette lettre comporte en outre, en précisant les modalités de détermination, le montant des sommes mises à la charge de la requérante à ce titre ; que, par suite, l'appelante n'est pas fondée à soutenir que l'amende à laquelle elle a été assujettie n'aurait pas été motivée ;

11. Considérant, en troisième lieu, qu'ainsi qu'il a été dit, l'administration ayant invité la société Transportes Da Capela à désigner les bénéficiaires des sommes considérées comme distribuées et que l'appelante n'ayant pas procédé à cette désignation, l'administration était fondée à faire application de l'amende prévue par les dispositions de l'article 1759 du code général des impôts ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions de la société Transportes Canto Da Capela à fin de décharge de l'amende prévue par les dispositions de l'article 1759 du code général des impôts à laquelle elle a été assujettie doivent être rejetées ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Transportes Da Capela n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a, rejeté sa demande ; que, par suite, ses conclusions présentées devant la Cour doivent être rejetées, ensemble et par voie de conséquence ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de juridiction administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Transportes Canto Da Capela est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Transportes Canto Da Capela et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Île-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 18 mai 2016, à laquelle siégeaient :

Mme Brotons, président de chambre,

M. Magnard, premier conseiller,

M. Legeai, premier conseiller.

Lu en audience publique le 1er juin 2016.

Le rapporteur,

A. LEGEAILe président,

I. BROTONSLe greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA01593


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA01593
Date de la décision : 01/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Alain LEGEAI
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : DEMARET

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-06-01;15pa01593 ?
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