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17/03/2016 | FRANCE | N°14PA01442

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 17 mars 2016, 14PA01442


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...A...a demandé au Tribunal administratif de Mata-Utu d'annuler la " décision de radiation des cadres de l'administration du territoire à la date du 1er juillet 2012 " notifiée par lettre du 17 octobre 2011, la " décision n° 2012-1224 du 27 novembre 2012 rappelant que l'activité de M. A...s'arrêtait au 29 janvier 2013 " et la " décision du 16 janvier 2013 par laquelle le préfet, administrateur supérieur des îles Wallis et Futuna rappelait l'application des dispositions de l'article 32 de l'arr

té 76 du 23 septembre 1976 modifié et la mise à la retraire de M. A... à c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...A...a demandé au Tribunal administratif de Mata-Utu d'annuler la " décision de radiation des cadres de l'administration du territoire à la date du 1er juillet 2012 " notifiée par lettre du 17 octobre 2011, la " décision n° 2012-1224 du 27 novembre 2012 rappelant que l'activité de M. A...s'arrêtait au 29 janvier 2013 " et la " décision du 16 janvier 2013 par laquelle le préfet, administrateur supérieur des îles Wallis et Futuna rappelait l'application des dispositions de l'article 32 de l'arrêté 76 du 23 septembre 1976 modifié et la mise à la retraire de M. A... à compter du 1er février 2013 " et de faire injonction à cette autorité de faire procéder à la reconstitution de sa carrière et à sa réintégration dans ses précédentes fonctions.

Par un jugement n° 1360001 du 30 octobre 2013, le Tribunal administratif de Mata-Hutu a rejeté sa requête comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 4 avril 2014, M.A..., représenté par Me de Chastelier, avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1360001 du 30 octobre 2013 du Tribunal administratif de Mata-Utu ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision de radiation des cadres de l'administration du territoire à la date du 1er juillet 2012 notifiée par lettre du 17 octobre 2011, la décision du 27 novembre 2012 rappelant que son activité s'arrêtait au 29 janvier 2013 et la décision du 16 janvier 2013 par laquelle le préfet, administrateur supérieur des îles Wallis et Futuna, a rappelé l'application des dispositions de l'article 32 de l'arrêté 75 du 23 septembre 1976 modifié et sa mise à la retraire à compter du 1er février 2013 ;

3°) d'enjoindre au territoire des îles Wallis et Futuna, en application des articles L. 911-1 et L. 911-3 du code de justice administrative, de procéder à la reconstitution de sa carrière et à sa réintégration dans ses précédentes fonctions, sous astreinte de 700 000 francs CFP par mois de retard ;

4°) de mettre à la charge du territoire des îles Wallis et Futuna la somme de 300 000 CFP sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal administratif s'est reconnu à tort incompétent, la loi n° 52-1322 du 15 décembre 1952 ne s'appliquant pas à un agent du territoire dont le lieu de fonction était à Paris lors de la prise des décisions dont il demandait l'annulation ;

- en l'absence de mention des voies et délais de recours, le délai contentieux fixé à l'article R. 421-1 du code de justice administrative n'a pas couru contre la lettre du 17 octobre 2011 informant M. A...qu'en application des dispositions de l'article 32 de l'arrêté n° 76 du 23 septembre 1976 qu'il serait procédé à sa radiation des cadres de l'administration du territoire des îles Wallis et Futuna à la date de l'âge légal de départ à la retraite le 1er juillet 2012 ;

- cette décision lui fait grief dès lors qu'elle affecte sa carrière professionnelle et ses droits à la retraite ;

- les décisions attaquées violent les dispositions de l'article 2 de l'arrêté n° 253 du 17 juillet 2008 dès lors que du fait de l'adhésion de M. A...au régime de retraite français, les conditions de mise à la retraite devaient respecter les règles métropolitaines fixant l'âge de la retraite à 62 ans et faisant obstacle à ce que l'employeur décide de sa mise à la retraite de son agent avant qu'il ne remplisse les conditions pour bénéficier d'une retraite à taux plein ;

- elles sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'il a été placé à la retraite à une date à laquelle il ne pouvait pas bénéficier d'une retraite à taux plein et ne pourra percevoir la pension de retraite métropolitaine qu'à partir de l'âge de 62 ans en 2017.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 décembre 2014, le préfet, administrateur supérieur des îles Wallis et Futuna, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête est irrecevable en vertu des dispositions de l'article R. 222-1 du code de justice administrative dès lors qu'elle ne relève manifestement pas de la compétence de la juridiction administrative ;

- le tribunal administratif était incompétent, dès lors qu'il résulte de l'article 1er de la loi n° 52-1322 du 15 décembre 1952 modifiée et des articles 179 et suivants de la même loi et de la jurisprudence du Tribunal des conflits que les agents des services du territoire des îles Wallis et Futuna qui n'ont pas la qualité de fonctionnaires relèvent de la compétence du Tribunal du travail de Mata-Utu et, en appel, du Tribunal de première instance de Mata-Utu ; M.A..., qui relève du statut d'agent permanent du territoire régi par l'arrêté n° 76 du 23 septembre 1976 n'appartient pas à un cadre de l'administration au sens des dispositions de la loi du 15 décembre 1952 et n'a donc pas la qualité de fonctionnaire ; le statut de l'agent s'attachant à sa personne quelle que soit son affectation, M. A...restait régi par l'arrêté du 23 septembre 1976 bien qu'affecté en métropole ;

- la requête est irrecevable dès lors que M. A...n'a pas interjeté appel dans le délai prévu aux articles R. 811-2 et R. 811-4 du code de justice administrative et qu'elle a été enregistrée plus de trois mois après le 16 décembre 2013, date la plus tardive à laquelle il a présenté une demande d'aide juridictionnelle et date la plus tardive à laquelle il a pu avoir connaissance du jugement ;

- la demande est irrecevable en ce qu'elle n'a pas été dirigée contre des décisions en méconnaissance des dispositions de l'article R. 421-1 du code de justice administrative ; la lettre du 17 octobre 2011 ne comporte pas de décision de radiation des cadres mais une simple information du requérant sur sa situation administrative et sa prochaine radiation des cadres à l'âge légal de départ à la retraite ; la lettre du 16 janvier 2013 se borne à rappeler les effets d'une décision antérieure n° 2012-124 lui accordant une prolongation d'activité d'un mois à sa demande et à lui transmettre une décision n° 2013-049 du même jour le radiant des cadres ; M. A...n'ayant pas joint la décision n° 2012-1224 à sa requête en méconnaissance des dispositions de l'article R. 412-1 du code de justice administrative, la demande est en tout état de cause irrecevable à son égard ; M. A... n'a pas demandé l'annulation de la décision n° 2013-049 du 16 janvier 2013 le radiant des cadres et prononçant son admission à la retraite à compter du 1er févier 2013 ; les décisions n° 2012-1224 de prolongation d'activité et n° 2013-049 de radiation des cadres étaient accompagnées de la notification des voies et délais de recours ;

- aucun des moyens du requérant n'est fondé.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 20 février 2014 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 52-1322 du 15 décembre 1952 instituant un code du travail dans les territoires et territoires associés relevant des ministères de la France d'Outre-mer ;

- la loi n° 61-814 du 29 juillet 1961 modifiée conférant aux îles Wallis et Futuna le statut de territoire d'outre-mer ;

- l'arrêté de l'administrateur supérieur, chef du territoire des Iles Wallis et Futuna, n° 76 du 23 septembre 1976, portant statut des agents permanents de l'administration du territoire ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Notarianni,

- et les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public.

1. Considérant que M. B...C...A..., agent de l'administration du territoire des îles Wallis et Futuna relevant du statut d'agent permanent de l'administration territoriale résultant de l'arrêté du 23 septembre 1976, applicable en vertu de son article 1er aux employés et ouvriers non fonctionnaires du territoire, a été affecté par une décision du 15 mai 2003 à la délégation du territoire des îles Wallis et Futuna à Paris ; qu'à la suite de sa radiation des cadres de l'administration du territoire, prononcée avec effet au 29 janvier 2013, M. A...a saisi le Tribunal administratif de Mata-Utu d'une demande tendant d'une part à l'annulation de trois décisions relatives à sa radiation des cadres de l'administration du territoire des îles Wallis et Futuna et son placement à la retraite et d'autre part à ce qu'il soit fait en conséquence injonction au préfet, administrateur supérieur des îles Wallis et Futuna de faire procéder à la reconstitution de sa carrière et à sa réintégration dans ses précédentes fonctions ; que M. A...relève appel du jugement du 30 octobre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Mata-Utu a rejeté sa demande comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaitre ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 52-1322 du 15 décembre 1952 instituant un code du travail dans les territoires et territoires associés relevant des ministères de la France d'Outre-mer, applicable à Wallis et Futuna : " La présente loi est applicable dans tous les territoires et territoires associés relevant du ministère de la France d'Outre-mer (...) Est considéré comme travailleur au sens de la présente loi, quels que soient son sexe et sa nationalité, toute personne qui s'est engagée à mettre son activité professionnelle, moyennant rémunération, sous la direction et l'autorité d'une autre personne, physique ou morale, publique ou privée. Pour la détermination de la qualité de travailleur, il ne sera tenu compte ni du statut juridique de l'employeur, ni de celui de l'employé. - Les personnes nommées dans un emploi permanent d'un cadre d'une administration publique ne sont pas soumises aux dispositions de la présente loi... " ; qu'aux termes de l'article 179 de la même loi : " Les différends individuels ou collectifs du travail sont soumis à la procédure instituée au présent titre " et qu'aux termes de son article 180 : " Il est institué des tribunaux du travail qui connaissent des différends individuels pouvant s'élever à l'occasion du contrat de travail entre les travailleurs et leurs employeurs (...) " ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 1er de la loi du 15 décembre 1952, telles qu'interprétées par le Tribunal des conflits, que la loi du 15 décembre 1952 est applicable aux agents du territoire des îles Wallis et Futuna, qu'ils soient employés dans les conditions du droit privé ou soumis à un régime de droit public, par l'État ou par le territoire, à la seule exception des agents nommés dans un emploi permanent d'un cadre d'une administration publique au sens de ce texte, c'est-à-dire de ceux qui ont la qualité de fonctionnaires ; que n'entrent pas dans le champ de cette exception, nonobstant la circonstance qu'ils sont engagés sans limitation de durée, les agents régis par l'arrêté du 23 septembre 1976 susvisé, au demeurant pris au visa de la loi du 15 décembre 1952 et qui est applicable en vertu de son article 1er aux " agents employés et ouvriers, non fonctionnaires, des services administratifs du Territoire ", dès lors que ceux-ci, qui n'appartiennent pas à un corps de la fonction publique, n'ont pas été nommés dans un emploi permanent d'un cadre d'une administration publique aux sens des dispositions susmentionnées ; qu'il résulte de ce qui précède que M.A..., agent public non fonctionnaire de l'administration du territoire des îles Wallis et Futuna, relevant du régime statutaire de l'arrêté du 23 septembre 1976 susvisé, a la qualité de " travailleur " au sens des dispositions de la loi du 15 décembre 1952 ;

4. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées des articles 179 et 180 de la loi susmentionnée du 15 décembre 1952 que le législateur national a entendu confier à des juridictions appartenant à l'ordre judiciaire le jugement de l'ensemble des différends individuels du travail concernant les travailleurs visés à l'article 1er de cette même loi, qu'ils soient de statut public ou privé, parmi lesquels les agents publics non fonctionnaires du territoire des îles Wallis et Futuna ;

5. Considérant qu'il suit de ce qui a été dit au point 4 que la juridiction administrative n'est pas compétente pour statuer sur la demande de M.A..., sans qu'il importe à cet égard qu'à la date des décisions contestées M. A...était en tant que chef de la délégation du territoire des îles Wallis et Futuna à Paris géographiquement affecté en dehors de l'un des territoires mentionnés à l'article 1er de la loi du 15 décembre 1952 ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Mata-Utu a rejeté sa demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...A...et au territoire des îles Wallis et Futuna.

Copie en sera adressée au ministre des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 3 mars 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- M. Dalle, président assesseur,

- Mme Notarianni, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 17 mars 2016.

Le rapporteur,

L. NOTARIANNILe président,

C. JARDIN

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA01442


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA01442
Date de la décision : 17/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

17-03-01-02 Compétence. Répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction. Compétence déterminée par des textes spéciaux. Attributions légales de compétence au profit des juridictions judiciaires.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: Mme Laurence NOTARIANNI
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : DE CHASTELLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-03-17;14pa01442 ?
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