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23/02/2016 | FRANCE | N°15PA03335

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 23 février 2016, 15PA03335


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler la décision du 30 décembre 2014 par laquelle le préfet de police de Paris lui a retiré sa carte professionnelle de conducteur de taxi pour une durée ferme de 365 jours, subsidiairement de réformer cette sanction en raison de sa disproportion avec les faits reprochés, d'autre part, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 300 euros par jour à compter du 30 décembre 2014 en réparation de son manque à gagner professionnel, enfi

n, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler la décision du 30 décembre 2014 par laquelle le préfet de police de Paris lui a retiré sa carte professionnelle de conducteur de taxi pour une durée ferme de 365 jours, subsidiairement de réformer cette sanction en raison de sa disproportion avec les faits reprochés, d'autre part, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 300 euros par jour à compter du 30 décembre 2014 en réparation de son manque à gagner professionnel, enfin, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n°1501861/6-1 du 12 juin 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 août 2015 et 18 septembre 2015 M. A..., représenté par Me C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 12 juin 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler la décision du 30 décembre 2014 par laquelle le préfet de police de Paris lui a retiré sa carte professionnelle de conducteur de taxi pour une durée ferme de 365 jours, subsidiairement, de réformer cette sanction en raison de sa disproportion avec les faits reprochés ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 300 euros par jour à compter du 30 décembre 2014 en réparation de son manque à gagner professionnel ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision litigieuse est entachée d'un vice de procédure en ce qu'il n'a pas été convoqué devant la commission de discipline des conducteurs de taxis dès lors que la préfecture n'établit pas par une pièce illisible produite en première instance lui avoir adressé la convocation à son adresse habituelle ;

- la décision litigieuse est insuffisamment motivée et fait apparaître un défaut d'examen réel et sérieux du dossier ;

- la décision litigieuse est fondée sur deux plaintes anonymes qui émanent d'une cellule chargée de lui nuire ;

- la sanction est manifestement disproportionnée au regard des faits reprochés et le prive de sa seule source de revenus ;

- la décision litigieuse est entachée d'un détournement de pouvoir.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 octobre 2015, le préfet de police conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. A...de la somme de 350 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens développés par M. A...ne sont pas fondés.

Par un mémoire en réplique enregistré le 26 janvier 2016, M. A...représenté par Me C...conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979,

- le décret n° 95-935 du 17 août 1995,

- l'arrêté interpréfectoral n° 01-16385 du 31 juillet 2001 relatif aux exploitants et aux conducteurs de taxi dans la zone parisienne modifié,

- l'arrêté n° 2007-21253 du 15 novembre 2007,

- l'arrêté préfectoral n° 2014-00409 du 21 mai 2014 relatif à la création, à la composition et au fonctionnement de la commission de discipline des conducteurs de taxi,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Julliard,

- les conclusions de M. Roussel, rapporteur public,

- et les observations de MaîtreC....

1. Considérant que M.A..., qui exerce la profession de conducteur de taxi, relève appel du jugement du 12 juin 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 30 décembre 2014 par laquelle le préfet de police de Paris lui a retiré sa carte professionnelle pour une durée ferme de 365 jours, subsidiairement à la réformation de cette sanction à raison de sa disproportion avec les faits reprochés, d'autre part, à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 300 euros par jour à compter du 30 décembre 2014 en réparation de son manque à gagner professionnel, enfin, à la mise à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

Sur la légalité externe de l'arrêté du 30 décembre 2014 du préfet de police :

2. Considérant que M. A...soutient que la décision litigieuse est entachée d'un vice de procédure en ce qu'il n'a pas été convoqué devant la commission de discipline des conducteurs de taxis et que la préfecture n'établit pas, par une pièce illisible produite en première instance, lui avoir adressé la convocation à son adresse habituelle ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier, parfaitement lisibles contrairement à ce que soutient M.A..., que la convocation à la séance du 18 décembre 2014 de cette commission, lui a été notifiée par lettre recommandée avec accusé de réception à la dernière adresse de l'intéressé connue de l'administration, soit 8 avenue Balzac 77270 Villeparisis, adresse également indiquée par M. A...dans sa requête de première instance, et que ce pli a été renvoyé à l'expéditeur avec la mention " défaut d'accès ou d'adressage " ; que si M. A...soutient que plusieurs plis lui ont été distribués à cette même adresse et qu'il n'a jamais déménagé, il ressort également des pièces du dossier que sur sa requête d'appel, la mention " bâtiment B " a été ajoutée à son adresse, comme sur de nombreux autres documents postérieurs à la décision attaquée produits par l'appelant lui-même ; qu'ainsi M. A..., qui n'établit pas avoir, comme il lui incombait de le faire, communiqué son adresse complète à l'administration ni pris les précautions nécessaires pour que son courrier puisse être présenté à cette adresse, ne saurait soutenir que l'administration n'aurait pas régulièrement notifié cette convocation ; qu'il n'est dès lors pas fondé à soutenir que la sanction qui lui a été infligée aurait méconnu le principe du contradictoire et les droits de la défense ;

3. Considérant qu'en vertu de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " (...) doivent être motivées les décisions qui infligent une sanction (... ) ", qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; que l'arrêté litigieux du 30 décembre 2014 par lequel le préfet de police de Paris a retiré la carte professionnelle autorisant M. A... à exercer la profession de conducteur de taxi pour une durée de 365 jours ferme, mentionne les dispositions législatives et réglementaires applicables et après avoir visé la convocation de M. A...devant la commission de discipline des conducteurs de taxis du 18 décembre 2014 et l'avis émis par cette dernière, énumère les infractions reprochées à l'intéressé ; qu'il est par suite, suffisamment motivé tant en droit qu'en fait ; qu'en outre, il ne ressort pas dudit arrêté que le préfet de police n'aurait pas sérieusement examiné la situation personnelle de M. A...avant de prendre sa décision ;

Sur la légalité interne de l'arrêté du 30 décembre 2014 du préfet de police :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 3121-10 du code des transports : " L'exercice de l'activité de conducteur de taxi est subordonné à la délivrance d'une carte professionnelle par l'autorité administrative " ; qu'aux termes de l'article L. 3124-2 du même code : " En cas de violation par un conducteur de taxi de la réglementation applicable à la profession, l'autorité administrative peut lui donner un avertissement ou procéder au retrait temporaire ou définitif de sa carte professionnelle. " ; qu'en outre, aux termes de l'article 20 de l'arrêté inter-préfectoral modifié du 31 juillet 2001 relatif au exploitants et aux conducteurs de taxis dans la zone parisienne, dans sa version applicable à la date des faits litigieux : " La carte professionnelle de conducteur de taxi peut être retirée à titre temporaire ou définitif, par le préfet de police, après avis de la commission de discipline des conducteurs de taxi, en cas de violation par le conducteur de la réglementation applicable à la profession ou en cas d'accomplissement d'un crime ou d'un délit mentionné à l'article 6 du décret n° 95-935 du 17 août 1995 modifié susvisé relatif à l'accès à l'activité de conducteur et à la profession d'exploitant de taxi, dès lors qu'il est établi, qu'il ait ou non été suivi d 'une condamnation pénale." ; qu'aux termes de son article 24 : " Le conducteur de taxi, lorsqu'il est en service, doit (...) 9° Mettre le compteur en mouvement dès le début de la course en appliquant le tarif réglementaire ou le mode tarifaire correspondant ; si la course fait l'objet d'une commande préalable par appel radio, borne d'appel ou autre, le compteur ne peut être mis en mouvement que lorsque le conducteur se rend sur le lieu de la course (...) / 10° Conduire les clients à l'adresse indiquée et les rejoindre en cas de commande préalable, par le chemin le plus direct, sauf si ceux-ci en indiquent un autre. " ; qu'aux termes de son article 25 : " II est interdit au conducteur de taxi en service : (...) 13° de se montrer impoli, grossier ou brutal envers quiconque et notamment envers la clientèle (...)" ; qu'en application de l'article 2 de l'annexe à l'arrêté n° 2007-21253 du 15 novembre 2007 susvisé, qui rappelle notamment le principe de progressivité des sanctions, les infractions de la troisième catégorie, parmi lesquelles figurent le cumul d'infractions, peuvent être sanctionnées par un retrait de la carte professionnelle pouvant aller de trois mois à un retrait définitif ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment du courrier du 18 avril 2014, qu'un client s'est plaint de ce que le 14 avril 2014, lors d'une course au départ de l'aéroport de Roissy-Charles De Gaulle, M. A...aurait appliqué le tarif C au lieu du tarif B et se serait montré grossier et insultant envers ses clients ; que par un second courrier du 1er septembre 2014, une cliente s'est plainte de ce que, le jour même, M. A...aurait refusé de suivre l'itinéraire qu'elle lui avait indiqué et se serait comporté de façon grossière et brutale ; qu'à ces deux témoignages, qui, contrairement à ce que soutient M.A..., ne sont pas anonymes, sont joints des photos dont il est constant qu'elles sont celles de son taxi, et les références de l'immatriculation de son véhicule et un numéro d'identifiant professionnel qui est le sien ; qu'en se bornant à présenter une version différente des faits et prétendre que ces plaintes émanent d'une cellule chargée de lui nuire, sans en apporter le moindre commencement de preuve et alors qu'il a fait l'objet de nombreuses sanctions pour des faits similaires depuis 2006, M. A...n'établit pas que la décision litigieuse serait entachée d'une erreur de fait ;

6. Considérant que les faits reprochés à M.A..., à savoir une application d'un tarif non réglementaire, un refus de conduire les clients à l'adresse indiquée ou de suivre l'itinéraire demandé, ainsi que le fait de se montrer impoli, grossier et brutal envers sa clientèle, constituent des manquements aux dispositions précitées du 9°, du 10° de l'article 24 et du 13° de l'article 25 de l'arrêté préfectoral du 31 juillet 2001 ; qu'eu égard à leur gravité et au comportement de l'intéressé qui a fait l'objet précédemment de plusieurs retraits de sa carte professionnelle pour avoir, à de nombreuses reprises, refusé de prendre en charge des clients, refusé d'effectuer une course au motif que l'itinéraire ne lui convenait pas et surfacturé une course entre Paris et l'aéroport de Roissy Charles de Gaulle, M. A...n'est pas fondé à soutenir que la sanction de 365 jours de retrait de sa carte professionnelle, prise après un avis de la commission de discipline des conducteurs de taxis favorable à l'unanimité à la sanction proposée, serait disproportionnée au regard des faits reprochés ; qu'ainsi le préfet de police n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ;

7. Considérant que le moyen tiré de ce que la décision litigieuse prive M. A...de son unique source de revenus est inopérant ;

8. Considérant, enfin, que le détournement de pouvoir allégué n'est établi par aucune pièce du dossier ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation ou la réformation de la décision du 30 décembre 2014 par laquelle le préfet de police de Paris lui a retiré sa carte professionnelle de conducteur de taxi pour une durée ferme de 365 jours ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins indemnitaires ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. A...la somme que le préfet de police demande au titre de ces mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au préfet de police.

Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 4 février 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Bouleau, premier vice-président,

- M. Polizzi, président assesseur,

- Mme Julliard, première conseillère,

Lu en audience publique, le 23 février 2016.

La rapporteure,

M. JULLIARDLe président,

M. BOULEAULe greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 10PA03855

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N° 15PA03335


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA03335
Date de la décision : 23/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Marianne JULLIARD
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : MBONGUE MBAPPE

Origine de la décision
Date de l'import : 11/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-02-23;15pa03335 ?
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