La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/02/2016 | FRANCE | N°14PA00843

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 01 février 2016, 14PA00843


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 21 décembre 2012 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé son licenciement pour inaptitude.

Par un jugement n° 1302362/3 du 8 janvier 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en production de pièces, enregistrés le 26 février et 7 avril 2014, MmeB..., représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler

le jugement n° 1302362/3 du 8 janvier 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 21 décembre 2012 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé son licenciement pour inaptitude.

Par un jugement n° 1302362/3 du 8 janvier 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en production de pièces, enregistrés le 26 février et 7 avril 2014, MmeB..., représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302362/3 du 8 janvier 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 21 décembre 2012 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé son licenciement pour inaptitude ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son employeur n'a pas sérieusement respecté son obligation de reclassement en ce qu'il n'a effectué aucune recherche individualisée sur un poste équivalent indiquant l'existence de ses mandats ainsi que les préconisations du médecin du travail ni aucune recherche au sein des structures nationales ou internationales du groupe ;

- la mesure de licenciement prise à son encontre est en lien avec le mandat qu'elle a exercé au sein de l'entreprise compte tenu des pressions qu'elle a subies, du dénigrement et de l'agressivité de son employeur à son encontre ainsi que de l'entrave de ce dernier dans l'exercice de son mandat ayant conduit à une dégradation sensible de ses conditions de travail et de son état de santé ;

- l'attitude discriminatoire de son employeur, qui s'est concrétisée dans son refus systématique d'appliquer les préconisations du médecin du travail, est à l'origine de son inaptitude.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mai 2014, la société CetA France, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de Mme B...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par un mémoire, enregistré le 15 juillet 2014, le ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social conclut au rejet de la requête et soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par ordonnance du 6 janvier 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 9 février 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bonneau-Mathelot,

- les conclusions de M. Sorin, rapporteur public,

- et les observations de MeD..., représentant la société CetA France.

Considérant ce qui suit :

1. MmeB..., recrutée par la société CetA France à compter du 31 août 1988 en qualité de conseillère de vente sur le magasin de Nantes, et titulaire du mandat de délégué du personnel, a, le 24 mars 2010, déclaré une épicondylite gauche ainsi qu'une tendinite de l'épaule gauche qui ont été reconnues comme maladie professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie de Loire-Atlantique. Le 1er août 2012, le médecin du travail a conclu à l'inaptitude de Mme B...à la reprise de son poste. Lors de la seconde visite médicale de reprise, le 20 août suivant, le médecin du travail a conclu à l'inaptitude de l'intéressée audit poste et à l'aptitude sur un autre poste " ne comportant pas de manutention ni de gestes répétitifs des membres supérieurs ni de mouvements au-dessus du niveau des épaules ", et s'est prononcé en faveur d'une aptitude sur un " poste administratif assis ". Mme B...ayant refusé la proposition de reclassement dans un poste d'employé administratif au magasin des " Quatre Temps " à La Défense, la société CetA France a, par courrier du 29 octobre 2012, sollicité de l'inspecteur du travail l'autorisation de la licencier. Par une décision du 21 décembre 2012, l'inspecteur du travail a autorisé le licenciement de Mme B...pour inaptitude. Mme B...relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

2. En vertu du code du travail, les salariés protégés bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle. Lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par l'inaptitude physique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge, si cette inaptitude est telle qu'elle justifie le licenciement du salarié compte tenu des caractéristiques de l'emploi exercé à la date à laquelle elle est constatée, de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé, des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi, et de la possibilité d'assurer son reclassement dans l'entreprise et, le cas échéant, dans les entreprises du groupe, ainsi que selon les modalités et conditions définies par le code du travail.

3. En premier lieu, il ressort des pièces versées au dossier que la société CetA France a, par un courrier du 24 août 2012, invité Mme B...à lui faire part de ses souhaits en matière de reclassement et, notamment, l'étendue de sa mobilité géographique. En réponse, Mme B...s'est borné à produire un curriculum vitae sans apporter aucune précision sur sa mobilité géographique. Compte tenu des éléments ainsi portés à la connaissance de la société CetA France, celle-ci a, sur la période du 30 août au 25 octobre 2012, recensé les postes à pourvoir au sein de l'ensemble des établissements du territoire national, et proposé successivement à MmeB..., les 17 et 21 septembre 2012, deux postes d'employé administratif situés au sein des magasins de Maine-Montparnasse à Paris et des " Quatre Temps " à La Défense. Les circonstances que la première proposition de reclassement a été retirée avant le délai imparti à Mme B...pour se prononcer sur celle-ci au motif qu'elle avait été acceptée par un autre salarié et que, s'agissant de la seconde, par ailleurs proposée à un autre salarié de la société devant également bénéficier d'un reclassement, elle n'avait disposé que d'un délai de cinq jours pour donner sa réponse ne sont pas de nature à établir que ces propositions étaient dépourvues de caractère sérieux. En outre, il est constant que la seconde proposition de reclassement, qui comportait essentiellement des tâches d'accueil, de suivi, de réception et des tâches purement administratives, était conforme aux prescriptions du médecin du travail. Si le référentiel afférent audit poste faisait mention, dans le cadre du fonctionnement général de l'établissement, d'une participation à des activités de surface de vente - caisses / service client -, celle-ci demeurait exceptionnelle et non significative par rapport aux autres attributions du poste. En tout état de cause, cette participation ne pouvait être de nature, à elle seule, à faire regarder ledit poste qui avait été proposé à Mme B...comme incompatible avec son état de santé ou comme n'étant pas approprié à ses nouvelles capacités. Par ailleurs, et contrairement à ce que soutient MmeB..., son classement en invalidité 1ère catégorie à compter du 1er août 2012 par une décision du 13 août 2012 de la caisse primaire d'assurance maladie ne pouvait davantage justifier une incompatibilité du poste proposé à titre de reclassement avec son état de santé dès lors que le médecin du travail, qui s'était prononcé en toute connaissance de cause sur son aptitude postérieurement à cette décision, n'avait formulé aucune restriction sur le volume horaire de son activité. Dans ces conditions, dès lors que Mme B...avait refusé cette seconde proposition de reclassement, elle n'est pas fondée à soutenir que la société CetA France n'aurait pas sérieusement recherché à la reclasser en son sein. Par suite, son employeur n'était pas tenu de rechercher une possibilité de reclassement au sein du groupe Cofra Holding AG, auquel appartient la société CetA France, et notamment dans des établissements situés à l'étranger.

4. En second lieu, il ressort des pièces versées au dossier que, d'une part, les relations avec la direction du magasin de Nantes étaient parfois difficiles et tendues et, d'autre part, plusieurs signalements avaient été opérés par la fédération de la Loire-Atlantique de la C.F.D.T., dont Mme B... était la représentante, s'agissant des difficultés qu'elle avait pu rencontrer pour exercer son mandat en ce qui concerne, notamment, les modalités d'exercice des métiers et de l'amélioration des conditions de travail. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces difficultés auraient dépassé le cadre normal des relations employés / employeur alors que l'inertie de la société a nui à l'ensemble du personnel du magasin de Nantes, lequel a pu se retrouver en situation de stress, de fatigue, de harcèlement moral, d'absentéisme ou d'inaptitude sans que Mme B...ait été plus particulièrement concernée. En outre, Mme B...a pu bénéficier, comme d'autres salariés de la société, de plusieurs formations ainsi que d'un bilan de compétences et de la mise en place d'un mi-temps thérapeutique en conséquence de la dégradation de son état de santé. En tout état de cause, Mme B...ne peut utilement soutenir que l'attitude discriminatoire de son employeur, qui s'est concrétisée dans son refus systématique d'appliquer les préconisations du médecin du travail, serait à l'origine de son inaptitude. Par suite, Mme B...n'est pas fondée à soutenir que la demande d'autorisation de son licenciement était en lien direct avec l'exercice de son mandat.

5. Il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter les conclusions qu'elle a présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, également, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter les conclusions formulées sur le même fondement par la société CetA France.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société CetA France au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B..., à la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à la société CetA France.

Délibéré après l'audience du 18 janvier 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Luben, président,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller,

- Mme Bernard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er février 2016.

Le rapporteur,

S. BONNEAU-MATHELOTLe président,

I. LUBEN

Le greffier,

Y. HERBER

La République mande et ordonne à la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

3

N° 14PA00843


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA00843
Date de la décision : 01/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-035-02 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Motifs autres que la faute ou la situation économique. Inaptitude ; maladie.


Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Sonia BONNEAU-MATHELOT
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : FOURCADE

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-02-01;14pa00843 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award