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23/10/2015 | FRANCE | N°15PA02700

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 23 octobre 2015, 15PA02700


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F...C..., veuveD..., a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 21 janvier 2015 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1501999/2-3 du 11 j

uin 2015, le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 21 janvier 2015, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F...C..., veuveD..., a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 21 janvier 2015 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1501999/2-3 du 11 juin 2015, le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 21 janvier 2015, a enjoint au préfet de police de délivrer à Mme C...un titre de séjour portant la mention " salarié " sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et a condamné l'Etat à verser à Mme C...une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 9 juillet 2015, le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1501999/2-3 du

11 juin 2015;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme C...devant le tribunal administratif.

Le préfet de police soutient que le refus de titre de séjour opposé à Mme C...ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 juillet 2015, MmeC..., représentée par MeB..., demande à la Cour de rejeter la requête du préfet de police, d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour sous un délai à déterminer sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou subsidiairement de lui enjoindre de réexaminer sa situation , et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 600 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme C...soutient que :

- en exigeant qu'elle justifie d'un visa de long séjour, sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile le préfet a commis une erreur de droit la demande de titre étant faite sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; le préfet a commis une erreur de fait en estimant qu'elle n'a pas d'expérience professionnelle de garde d'enfants ; il commet une erreur d'appréciation de la situation car ce métier est " en tension " ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; le préfet de police n'a pas examiné sa situation à cet égard ;

- cet arrêté est entaché d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de ses décisions sur sa situation personnelle ;

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

1. Considérant que MmeC..., ressortissante ukrainienne, née le

23 septembre 1972, présente en France, selon ses déclarations, depuis le 20 janvier 2009, a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 21 janvier 2015 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que, par un jugement n° 1501999/2-3 du 11 juin 2015, le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 21 janvier 2015, a enjoint au préfet de police de délivrer à Mme C...un titre de séjour portant la mention " salarié " sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et a condamné l'Etat à verser à Mme C...une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que le préfet de police relève régulièrement appel de ce jugement ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7." ;

3. Considérant qu'il ressort du jugement attaqué que, pour annuler, dans sa totalité l'arrêté litigieux du 21 janvier 2015, le tribunal administratif a estimé que le préfet de police avait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation, en refusant la délivrance à Mme C...d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors qu'il ressortait des pièces du dossier que le métier de garde d'enfant exercé par l'intéressée, qui vivait en France depuis 2009, était en tension et que l'intéressée avait acquis une expérience dans cette activité et su nouer des relations de confiance au fil des années avec son employeur ;

4. Considérant que, quand bien même le métier de garde d'enfant à domicile serait sous tension en région parisienne, MmeC..., qui, selon ses dires, réside irrégulièrement en France depuis 2009, n'a sollicité la régularisation de sa situation administrative que le 2 octobre 2014, alors qu'elle est en France célibataire et sans charge de famille, qu'elle n'établit pas ni même n'allègue être dépourvue de lien privé ou familial en Ukraine, pays dont elle est ressortissante, où elle a vécu jusqu'à l'âge de trente-six ans et où résident son enfant, né le 8 septembre 1992, ainsi que sa mère ; que, dés lors, son séjour en France ne répond pas à des considérations humanitaires ou à des circonstances exceptionnelles ; que, par suite, l'arrêté du préfet de police en date du 21 janvier 2015 n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet de police est, par suite, fondé à contester ce motif d'annulation de son arrêté ;

5. Considérant, toutefois, qu'il appartient ainsi à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés contre l'arrêté litigieux par MmeC..., tant en première instance qu'en appel ;

Sur les conclusions de Mme C...dirigées contre l'arrêté préfectoral du 21 janvier 2015 :

En ce qui concerne les moyens dirigés contre l'ensemble des décisions contenues dans ledit arrêté :

6. Considérant que, par un arrêté n° 2014-00895 du 27 octobre 2014, régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris du 4 novembre 2014, le préfet de police a donné délégation à M. E... A..., chef du 6ème bureau de la sous-direction de l'administration des étrangers à la direction de la police générale de la préfecture de police, délégation pour signer tous les actes dans la limite de ses attributions, au nombre desquelles figurent notamment les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination, en cas d'absence ou d'empêchement d'autorités dont il n'est pas établi qu'elles n'auraient pas été absentes ou empêchées lors de la signature de l'acte attaqué ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué manque en fait ;

7. Considérant, qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que Mme C...fait valoir qu'elle a établi le centre de sa vie privée et familiale en France, où elle réside depuis le 20 janvier 2009, et où elle travaille ; que, toutefois, l'intéressée y est célibataire et sans charge de famille ; qu'elle n'établit pas ni même n'allègue être dépourvue de lien privé ou familial en Ukraine, pays dont elle est ressortissante, où elle a vécu jusqu'à l'âge de trente-six ans et où résident son enfant, né le 8 septembre 1992, ainsi que sa mère ; que, dés lors, par ces décisions, il n'a pas été porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée ; qu'elle n'établit pas davantage de circonstances exceptionnelles ou de motifs humanitaires, nonobstant la circonstance qu'elle dispose d'un contrat de travail à durée indéterminée ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui sont bien, contrairement aux dires de la requérante, visées, doit être écarté ; que, pour les mêmes motifs, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de ses décisions sur sa situation personnelle doit être écarté ;

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

8. Considérant que Mme C...soutient qu'en exigeant qu'elle justifie d'un visa de long séjour, sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile le préfet a commis une erreur de droit, sa demande de titre étant faite sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que toutefois, l'intéressée ayant demandé un titre de séjour salarié, le préfet pouvait examiner librement sa demande, de manière superfétatoire, sur le fondement des dispositions de l'article L.313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en toute hypothèse, la requérante, n'établit pas ni même n'allègue être titulaire d'un visa de long séjour ou d'un contrat de travail visé, ainsi que l'a à bon droit relevé le préfet de police ; que, par suite, ce moyen doit être écarté ;

10. Considérant qu'il y a lieu par les mêmes motifs que ceux visés au point 4 ci-dessus, d'écarter le moyen de Mme C...selon lequel le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

11. Considérant que Mme C...soutient que l'illégalité du refus de séjour rend illégale l'obligation de quitter le territoire français ; que, toutefois, compte tenu de ce qui précède, ce moyen doit être écarté ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à demander l'annulation du jugement n° 1501999 du 11 juin 2015 du Tribunal administratif de Paris annulant son arrêté en date du 21 janvier 2015, lui enjoignant de délivrer à Mme C...un titre de séjour portant la mention " salarié " sur le fondement des dispositions de l'article

L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et condamnant l'Etat à verser à Mme C...la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que la demande présentée par Mme C...devant ce tribunal administratif doit être rejetée, de même que ses conclusions présentées devant la Cour sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'Etat n'ayant pas dans la présente instance la qualité de partie perdante ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1501999/2-3 du 11 juin 2015 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme C...devant le Tribunal administratif de Paris et ses conclusions devant la Cour sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F...C..., veuve D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 7 octobre 2015 à laquelle siégeaient :

Mme Brotons, président de chambre,

Mme Appèche, président assesseur,

M. Legeai, premier conseiller.

Lu en audience publique le 23 octobre 2015.

Le rapporteur,

A. LEGEAILe président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA02700
Date de la décision : 23/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Alain LEGEAI
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : SELARL LFMA

Origine de la décision
Date de l'import : 03/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-10-23;15pa02700 ?
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