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23/10/2015 | FRANCE | N°15PA01640

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 23 octobre 2015, 15PA01640


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris :

1°) d'annuler l'arrêté du 6 mai 2014 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de sa reconduite à la frontière ;

2°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer, durant cet examen, une au

torisation provisoire de séjour ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris :

1°) d'annuler l'arrêté du 6 mai 2014 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de sa reconduite à la frontière ;

2°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer, durant cet examen, une autorisation provisoire de séjour ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 1421504/2-1 du 17 février 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 22 avril 2015, MmeB..., représentée par

MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 17 février 2015 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté attaqué ;

3°) d'enjoindre le préfet de police de lui délivrer un titre de séjour et à défaut, de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 199.

EIle soutient que :

- le préfet de police a commis une erreur en ne faisant pas usage de son pouvoir d'appréciation discrétionnaire ;

- la décision querellée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences d'une exceptionnelle gravité ;

- elle méconnaît les stipulations de articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 9 avril 2015.

La présente requête a été dispensée d'instruction en application des dispositions de l'article R. 611-8 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Magnard,

- et les observations de MmeB....

1. Considérant que la demande d'asile présentée par Mme B..., ressortissante ivoirienne née le 1er mai 1990, a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 29 avril 2013, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 18 février 2014 ; que le préfet de police, constatant que l'intéressée ne pouvait se prévaloir de la qualité de réfugiée ou du bénéfice de la protection subsidiaire, lui a refusé la délivrance d'une carte de résident sur le fondement des dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et d'une carte de séjour temporaire sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-13 du même code, l'a obligée à quitter le territoire français, et a fixé le pays de destination par arrêté du 6 mai 2014 ; que Mme B...fait appel du jugement n° 1421504/2-1 du 17 février 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour ... 8º A l'étranger qui a obtenu le statut de réfugié en application du livre VII du présent code... " ; qu'aux termes de l'article L. 313-13 du même code : " la carte de séjour temporaire prévue à l'article L. 313-11 est délivrée de plein droit à l'étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire en application de l'article L. 712-1 du présent code " ;

3. Considérant qu'il ressort des termes de la décision attaquée que le préfet de police, après avoir procédé à l'examen de la situation administrative et personnelle de Mme B... au vu des éléments que celle-ci avait fournis à l'appui de sa demande, a légalement tiré les conséquences du rejet de la demande d'asile de l'intéressée par l'OFPRA et la CNDA ; que, par suite, le préfet de police n'a pas commis d'erreur de droit ni méconnu l'étendue de son pouvoir discrétionnaire en se fondant sur la décision de rejet de la demande d'asile de la requérante pour refuser lui-même de délivrer un titre de séjour à l'intéressée, en application des dispositions précitées du 8° de l'article L. 314-11 et de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il ressort en outre des motifs de l'arrêté, qui indique que, compte tenu des circonstances propres au cas d'espèce, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée à la vie familiale de l'intéressée, que le préfet a procédé à un examen particulier de la demande qui lui était soumise, dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

5. Considérant que Mme B... est célibataire et sans charge de famille ; qu'elle n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales en Côte d'Ivoire, pays dans lequel elle a vécu jusqu'à l'âge de 21 ans ; qu'ainsi, eu égard à la durée de sa présence en France, et alors même que sa mère résiderait régulièrement sur le territoire français, que ses deux soeurs seraient également présentes en France, et qu'elle aurait réussi à un examen de langue française, la décision attaquée ne peut être regardée comme ayant porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'ainsi, le Préfet de police n'a en tout état de cause pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que pour les mêmes motifs le préfet ne peut être regardé comme ayant commis à cet égard une erreur manifeste d'appréciation ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

7. Considérant que si Mme B...fait valoir qu'elle a quitté son pays d'origine en raison des risques d'excision encourus par elle, un tel moyen est inopérant à l'encontre de la décision portant refus de titre de séjour ; qu'en conséquence, et en tout état de cause, le préfet ne peut davantage être regardé comme ayant à cet égard commis une erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant, en premier lieu, qu'en application du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour ; que cette dernière décision, qui comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, qui précise la date de naissance ainsi que la nationalité de Mme B..., tout comme sa date d'entrée supposée en France, qui mentionne que la requérante n'entre pas dans le champ d'application des dispositions du 8° de l'article L. 314-11 et de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sa demande d'asile ayant été rejetée par l'OFPRA et la CNDA, et qui ajoute qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale et qu'elle n'établit pas être exposée à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine, étant suffisamment motivée, le moyen tiré du défaut de motivation de l' obligation de quitter le territoire français doit être écarté ;

9. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité qui entacherait la décision de refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté ; qu'il en résulte également que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;

10. Considérant, en troisième lieu, que le moyen tiré de ce que Mme B...a quitté son pays d'origine en raison des risques d'excision encourus par elle dans son pays d'origine et de la méconnaissance en résultant de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

11. Considérant que Mme B..., dont la demande de reconnaissance du statut de réfugiée a été rejetée par l'OFPRA et la CNDA, ne démontre pas la réalité des risques d'excision qu'elle soutient encourir en cas de retour dans son pays d'origine ni qu'elle ne peut obtenir la protection des autorités de son pays en cas de menace de cette sorte ; que, par suite, Mme B... ne soutient pas à bon droit que la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l 'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

12. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

13. Considérant que le présent arrêt n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme B...ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative:

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que Mme B...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B....

Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 7 octobre 2015 à laquelle siégeaient :

Mme Brotons, président de chambre,

Mme Appèche, président assesseur,

M. Magnard, premier conseiller,

Lu en audience publique le 23 octobre 2015.

Le rapporteur,

M. MAGNARDLe président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA01640


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA01640
Date de la décision : 23/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : BOUKHARI-SAOU

Origine de la décision
Date de l'import : 03/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-10-23;15pa01640 ?
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