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19/10/2015 | FRANCE | N°14PA02604

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 19 octobre 2015, 14PA02604


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 20 juillet 2009 par lequel le préfet de police a prononcé son expulsion ainsi que la décision implicite du 17 avril 2013 refusant l'abrogation de cet arrêté.

Par un jugement n° 1307856/7-2 du 15 avril 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 14 juin 2014, M.C..., représenté par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annu

ler le jugement n° 1307856/7-2 du 15 avril 2014 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 20 juillet 2009 par lequel le préfet de police a prononcé son expulsion ainsi que la décision implicite du 17 avril 2013 refusant l'abrogation de cet arrêté.

Par un jugement n° 1307856/7-2 du 15 avril 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 14 juin 2014, M.C..., représenté par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1307856/7-2 du 15 avril 2014 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté d'expulsion ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'une semaine à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté d'expulsion est entaché d'un défaut d'examen complet de sa situation ;

- l'arrêté d'expulsion repose sur une interprétation erronée du préfet de police de la notion de " menace à l'ordre public " ;

- l'arrêté d'expulsion méconnaît les dispositions de l'article L. 521-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté d'expulsion méconnaît les dispositions de l'article L. 521-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision implicite de rejet est entachée d'une erreur de droit tirée de la méconnaissance des dispositions du 1° de l'article L. 521-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que d'une erreur d'appréciation ;

- le préfet de police a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 décembre 2014, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les conclusions de la requête d'appel dirigées contre l'arrêté d'expulsion du 20 juillet 2009 sont irrecevables compte tenu du caractère définitif dudit arrêté ;

- les moyens développés à l'appui des conclusions dirigées contre la décision de refus d'abrogation ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bonneau-Mathelot,

- et les conclusions de M. Sorin, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., ressortissant algérien, a fait l'objet, le 20 juillet 2009, d'un arrêté d'expulsion du préfet de police au motif que sa présence sur le territoire français, au regard de l'ensemble de son comportement, constituait une menace grave pour l'ordre public au sens de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un courrier du 16 décembre 2012, il a sollicité le réexamen de sa situation ainsi que l'abrogation de cet arrêté. Le préfet de police, qui a gardé le silence sur cette demande, doit être regardé comme l'ayant implicitement rejetée. M. C...relève appel du jugement du 15 avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 juillet 2009 et du refus implicite d'abrogation de cet arrêté.

Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté d'expulsion du 20 juillet 2009 :

2. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. / [...] ". Aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ". Il ressort des pièces du dossier, que l'arrêté du 20 juillet 2009, qui comportait la mention des voies et délais de recours, a été notifié à M. C... le 23 juillet suivant par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception. A la date de la saisine du Tribunal administratif de Paris, soit le 6 juin 2013, ledit arrêté ayant acquis un caractère définitif, les premiers juges ont, à bon droit, rejeté les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté litigieux comme tardives.

Sur les conclusions dirigées contre le refus d'abrogation de l'arrêté d'expulsion :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 524-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'arrêté d'expulsion peut à tout moment être abrogé. [...] ". Aux termes de l'article L. 524-2 dudit code : " Sans préjudice des dispositions de l'article L. 524-1, les motifs de l'arrêté d'expulsion donnent lieu à un réexamen tous les cinq ans à compter de la date d'adoption de l'arrêté. L'autorité compétente tient compte de l'évolution de la menace pour l'ordre public que constitue la présence de l'intéressé en France, des changements intervenus dans sa situation personnelle et familiale et des garanties de réinsertion professionnelle ou sociale qu'il présente, en vue de prononcer éventuellement l'abrogation de l'arrêté. [...] ". Aux termes de l'article L. 524-3 du même code : " Il ne peut être fait droit à une demande d'abrogation d'un arrêté d'expulsion présentée plus de deux mois après la notification de cet arrêté que si le ressortissant étranger réside hors de France. Toutefois, cette condition ne s'applique pas : / 1° Pour la mise en oeuvre de l'article L. 524-2 ; / 2° Pendant le temps où le ressortissant étranger subit en France une peine d'emprisonnement ferme ; / 3° Lorsque l'étranger fait l'objet d'un arrêté d'assignation à résidence pris en application des articles L. 523-3, L. 523-4 ou L. 523-5 ".

4. Il est constant que M. C...a formé sa demande tendant à l'abrogation de l'arrêté d'expulsion dont il a fait l'objet alors qu'il se trouvait en France. Il ressort des pièces du dossier que cette demande ne tend pas à la mise en oeuvre de la procédure de réexamen prévue par les dispositions de l'article L. 524-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, s'applique la condition prévue par les dispositions de l'article L. 524-3 du même code faisant obligation à M. C...de résider hors de France pour qu'il soit, le cas échéant, fait droit à sa demande. Dans ces conditions, le préfet de police était en situation de compétence liée pour rejeter sa demande. Par suite, sont inopérants les moyens invoqués par M. C...à l'encontre de la décision implicite rejetant sa demande d'abrogation à l'exception de celui fondé sur la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

5. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. M. C...fait valoir que sa présence sur le territoire français n'est plus constitutive d'une menace à l'ordre public, qu'il réside en France depuis l'âge de un an et y a développé des liens sociaux et affectifs, qu'il justifie de l'intensité des liens avec sa fille à l'égard de laquelle il exerce conjointement avec son ancienne compagne l'autorité parentale et qu'il contribue à son entretien et à son éducation. Il ressort des pièces du dossier qu'entre 1988 et 2002, M. C...a été condamné à une vingtaine de reprises à des peines de prison fermes pour des faits notamment de vol avec violence, vol en réunion, vol avec circonstances aggravantes, violence et outrage sur personne dépositaire de l'autorité publique, rébellion, menace de mort réitérée. Par un jugement du 11 juin 2004, il a été condamné à une peine de dix ans d'emprisonnement pour des faits de vol avec arme commis en 2001. Il s'est, par ailleurs, rendu coupable de nombreux autres délits postérieurement à l'arrêté d'expulsion pris à son encontre le 20 juillet 2009, notamment pour conduite d'un véhicule sans permis ni assurance et pour rébellion et menace de mort réitérée. Si M. C... fait valoir que les derniers délits commis remontent au mois d'août 2010, cette période de quatre ans ne suffit pas, eu égard à l'ancienneté de son comportement délictueux et à son caractère récidivant, à établir que sa présence en France ne constituerait plus une menace à l'ordre public. En outre, M. C...est célibataire et sans ressources et ne peut justifier d'aucune insertion socioprofessionnelle. S'il se prévaut de la circonstance qu'il est le père d'un enfant de nationalité française, né le 9 décembre 2010, qu'il n'a reconnu que le 13 mars 2012, il ne produit pas suffisamment d'éléments de nature à démontrer la réalité, l'intensité et la stabilité des liens qu'il entretiendrait avec lui. En effet, s'il produit plusieurs " mandats cash " au titre des années 2012 et 2013, il ne peut, en revanche, justifier ni d'une relation affective avec son enfant ni d'une participation effective à son éducation alors que son enfant vit séparé de lui chez son ancienne compagne. Au demeurant, cette circonstance ne suffirait pas, eu égard à la gravité et à la répétition de son comportement, à faire regarder la décision implicite de refus d'abrogation comme portant une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale normale au regard des buts en vue desquels elle a été prise. Dans ces conditions, le préfet de police, en refusant d'abroger l'arrêté d'expulsion du 20 juillet 2009, n'a pas porté au droit de M. C...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excédant ce qui était nécessaire à la défense de l'ordre public. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut dès lors qu'être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 5 octobre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Luben, président assesseur,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 octobre 2015.

Le rapporteur,

S. BONNEAU-MATHELOTLe président,

J. LAPOUZADE

Le greffier,

Y. HERBERLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA02604


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA02604
Date de la décision : 19/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-02-06 Étrangers. Expulsion. Abrogation.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Sonia BONNEAU-MATHELOT
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : NESSAH

Origine de la décision
Date de l'import : 29/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-10-19;14pa02604 ?
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