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08/10/2015 | FRANCE | N°15PA01454,14PA01612

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 08 octobre 2015, 15PA01454,14PA01612


Vu I°), la requête, enregistrée le 8 avril 2015, sous le n°15PA01454, présentée par le préfet de police, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1404982/3-1 du 27 janvier 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 10 mars 2014 par laquelle il a rejeté la demande de regroupement familial que Mme A...C...avait présentée au profit de son époux, lui a enjoint, sous astreinte, de délivrer un certificat de résidence au titre du regroupement familial à M. C... dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement e

t mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des disposit...

Vu I°), la requête, enregistrée le 8 avril 2015, sous le n°15PA01454, présentée par le préfet de police, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1404982/3-1 du 27 janvier 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 10 mars 2014 par laquelle il a rejeté la demande de regroupement familial que Mme A...C...avait présentée au profit de son époux, lui a enjoint, sous astreinte, de délivrer un certificat de résidence au titre du regroupement familial à M. C... dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement et mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme C...devant le Tribunal administratif de Paris ;

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, Mme C... ne justifie pas de la suffisance et de la stabilité de ses ressources ;

- c'est à tort que les premiers juges lui ont enjoint de délivrer une carte de séjour à l'époux de Mme C...alors que les conclusions de l'intéressée tendaient uniquement à ce que le regroupement familial au profit de son époux soit autorisé ; le motif d'annulation retenu n'impliquait pas la délivrance d'un titre de séjour dès lors que l'entrée en France de l'époux de Mme C...suppose qu'il obtienne des autorités consulaires françaises un visa à cet effet et qu'il produise un certificat de contrôle médical délivré par l'office français de l'immigration et de 1'intégration ;

- sa décision n'est pas entachée d'une erreur de fait ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas fondé ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 juillet 2015, présenté pour Mme C..., demeurant..., par Me B... ; Mme C... conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la requête du préfet de police est tardive ;

- elle n'est pas fondée ;

Vu II°), la requête, enregistrée le 20 avril 2015, sous le n° 15PA01612, présentée par le préfet de police, qui demande à la Cour de prononcer, en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement n° 1404982/3-1 du 27 janvier 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, Mme C... ne justifie pas de la suffisance et de la stabilité de ses ressources ;

- c'est à tort que les premiers juges lui ont enjoint de délivrer une carte de séjour à l'époux de Mme C...alors que les conclusions de l'intéressée tendaient uniquement à ce que le regroupement familial au profit de son époux soit autorisé ; le motif d'annulation retenu n'impliquait pas la délivrance d'un titre de séjour dès lors que l'entrée en France de l'époux de Mme C...suppose qu'il obtienne des autorités consulaires françaises un visa à cet effet et qu'il produise un certificat de contrôle médical délivré par l'office français de l'immigration et de 1'intégration ;

- sa décision n'est pas entachée d'une erreur de fait ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas fondé ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 juillet 2015, présenté pour Mme C..., demeurant..., par Me B... ; Mme C... conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la requête du préfet de police est tardive ;

- elle n'est pas fondée ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 24 septembre 2015 :

- le rapport de Mme Coiffet, président,

- et les observations de Mme C... ;

1. Considérant que les requêtes visées ci-dessus sont relatives à la situation de Mme C... et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt ;

2. Considérant que Mme C..., ressortissante iranienne, est entrée en France en 1999 ; qu'elle a séjourné entre les années 2004 et 2011 sur le territoire français sous couvert d'une carte de séjour portant la mention " visiteur ", renouvelée à plusieurs reprises, puis a bénéficié à compter de l'année 2011 d'une carte de résident ; que, mariée à un compatriote établi en Iran, elle a sollicité au cours de mois de mars de l'année 2012, le bénéfice du regroupement familial au profit de son époux ; que sa demande a été rejetée par le préfet de police par une décision du 25 juillet 2012, que le Tribunal administratif de Paris, faisant droit à la demande de l'intéressée, a annulée par un jugement du 17 décembre 2013 ; que ce même jugement faisait injonction à l'autorité administrative de procéder à un nouvel examen de la demande de Mme C... ; qu'à l'issue de cet examen, le préfet de police a, par un arrêté du 10 mars 2014, pris une nouvelle décision de refus ; que, par une première requête, enregistrée sous le n° 15PA01454, le préfet de police fait appel du jugement du 27 janvier 2015, par lequel le tribunal a annulé son arrêté du 10 mars 2014, lui a enjoint, sous astreinte, de délivrer un certificat de résidence au titre du regroupement familial à M. C... dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement et mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, par une seconde requête, enregistrée sous le n°15PA01612, il demande à la Cour, sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, d'ordonner le sursis à exécution de ce jugement ;

Sur la requête n° 15PA01454 :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales et des allocations prévues à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles, à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale et aux articles L. 351-9, L. 351-10 et L. 351-10-1 du code du travail. Les ressources doivent atteindre un montant qui tient compte de la taille de la famille du demandeur. Le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 441-1 fixe ce montant qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel et au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 411-4 du même code : " Pour l'application du 1° de l'article L. 411-5, les ressources du demandeur et de son conjoint qui alimenteront de façon stable le budget de la famille sont appréciées sur une période de douze mois par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance au cours de cette période. Ces ressources sont considérées comme suffisantes lorsqu'elles atteignent un montant équivalent à : - cette moyenne pour une famille de deux ou trois personnes ; (...) " ;

4. Considérant que, pour annuler l'arrêté du 10 mars 2014 du préfet de police, le tribunal administratif a considéré que Mme C...avait justifié de ressources suffisamment stables à l'appui de sa demande de regroupement familial et qu'ainsi la décision de refus qui lui avait été opposée par le préfet de police avait été prise en méconnaissance de l'article R. 411-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5. Considérant qu'ainsi que l'ont relevé les premiers juges, Mme C...justifie avoir perçu en 2012 et en 2013, une pension de 12 000 euros ; que si elle s'est également prévalue devant le tribunal de revenus de source étrangère d'un montant total de 13 000 euros issus de la location d'un appartement et d'une maison situés en Iran et de l'exploitation d'un terrain agricole, il ressort des contrats de bail produits par l'intéressée que l'appartement a été donné en location les 15 juillet 2007 et 10 mai 2009, pour une durée d'un an, non renouvelée et que la maison n'a été louée que du 20 juillet 2012 au 21 juillet 2013 ; qu'elle n'établit pas, par la seule production d'un contrat de gestion et d'administration, daté du 30 septembre 2010, du terrain agricole qu'elle détient en indivision, qui se borne à fixer la rémunération et les obligations du gérant et des propriétaires du terrain, percevoir à titre personnel et de façon régulière des revenus issus de l'exploitation de ce dernier ; que, si l'avis d'imposition de l'année 2013, établi au nom de la contribuable, fait apparaître qu'elle a perçu des revenus de capitaux mobiliers d'un montant de 13 000 euros, elle n'apporte aucune précision sur l'origine et la nature de ces revenus ; qu'enfin, il ressort des pièces du dossier que l'activité qu'elle a créée au cours du mois d'octobre 2012 lui a procuré un revenu de 1 054 euros au titre de l'année 2013 ; que, dans ces conditions, alors notamment que Mme C...n'établit pas que les biens immobiliers qu'elle possède soit seule, soit en indivision, sont donnés de façon régulière en location, et qu'ils constituent ainsi une source pérenne de revenus, elle ne peut être regardée, bien que disposant d'une épargne de près de 28 000 euros, comme justifiant de revenus suffisants et stables au sens de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a, pour le motif ci-dessus rappelé, annulé son arrêté ;

6. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme C... devant le tribunal administratif et la Cour ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et en particulier des mentions de l'arrêté du 10 mars 2014, que, pour refuser de faire droit à la demande de regroupement familial présentée par Mme C... en faveur de son époux, le préfet de police s'est borné à relever que les revenus de l'intéressée n'étaient pas suffisants, ni stables sans effectuer un examen particulier de la situation personnelle et familiale de Mme C... ; qu'en considérant comme il l'a fait qu'il était tenu de rejeter la demande de Mme C...du seul fait que les conditions de ressources fixées à l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'étaient pas respectées, le préfet de police a entaché son arrêté d'une erreur de droit ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté ;

Sur la requête n° 15PA01612 :

9. Considérant que, par le présent arrêt, la Cour statue sur la requête en annulation dirigée contre le jugement du 27 janvier 2015 du Tribunal administratif de Paris ; que, par suite, les conclusions de la requête n° 15PA01612 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont devenues sans objet ; que, dès lors, il n'y a plus lieu d'y statuer ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Considérant, qu'eu égard au motif d'annulation retenu, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris lui a enjoint de délivrer un certificat de résidence au titre du regroupement familial à M. C... ; que l'exécution du présent arrêt implique seulement qu'il soit enjoint au préfet de police de procéder à un nouvel examen de la demande de regroupement familial de Mme C... dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme C... et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 15PA01612.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de procéder à un nouvel examen de la demande de regroupement familial de Mme C..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le jugement susvisé du 27 janvier 2015 du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête du préfet de police est rejeté.

Article 5 : L'Etat versera à Mme C... une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à Mme A...C...et au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 24 septembre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme Coiffet, président assesseur,

- M. Platillero, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 8 octobre 2015.

Le rapporteur,

V. COIFFETLe président,

S.-L. FORMERY

Le greffier,

S. JUSTINE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N°s 15PA01454-15PA01612


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Valérie COIFFET
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : POULY

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Date de la décision : 08/10/2015
Date de l'import : 03/11/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 15PA01454,14PA01612
Numéro NOR : CETATEXT000031389923 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-10-08;15pa01454.14pa01612 ?
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