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23/09/2015 | FRANCE | N°13PA03639

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 23 septembre 2015, 13PA03639


Vu le recours, enregistré le 24 septembre 2013, présenté par le ministre de l'économie et des finances qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 1100612/3, 1100613/3, 1100614/3, 1100617/3 du

18 juillet 2013 en tant qu'il vise les requêtes n° 1100613/3 et n° 1100617/3 par lequel le Tribunal administratif de Melun a déchargé M. A...D..., en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2003 et 2004 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au ti

tre de la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2004 ;

2°) de remettre ...

Vu le recours, enregistré le 24 septembre 2013, présenté par le ministre de l'économie et des finances qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 1100612/3, 1100613/3, 1100614/3, 1100617/3 du

18 juillet 2013 en tant qu'il vise les requêtes n° 1100613/3 et n° 1100617/3 par lequel le Tribunal administratif de Melun a déchargé M. A...D..., en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2003 et 2004 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2004 ;

2°) de remettre intégralement les impositions contestées à la charge de M. A...D...;

Il soutient que :

- le vérificateur a mis en oeuvre la procédure d'opposition à contrôle fiscal ;

- les obligations résultant de la mise en oeuvre de cette procédure ont été respectées ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 juin 2014, présenté pour M. A...D..., demeurant au..., par

Me B...C... ; il demande la réformation du jugement rendu et la mise à la charge de l'Etat d'une somme sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il demande que le service communique la preuve des dégrèvements accordés en matière de taxe sur la valeur ajoutée, procède au remboursement des sommes versées assorties des intérêts moratoires et des intérêts au taux légal et lui communique à cet égard le relevé détaillé de son compte ; il soutient que :

- la faculté de recourir à un conseil de son choix ne lui a pas été offerte ;

- le procès-verbal du 12 juin 2006 n'est pas régulier ;

- l'opposition à contrôle fiscal n'est pas constituée au sens de l'article L 74 du livre des procédures fiscales et de la doctrine administrative 13 L 1542 n° 12, les courriers qui lui ont été adressés ne contenant aucune mise en garde ;

- ces courriers mentionnent de manière erronée les articles 1730 et 1737 du code général des impôts et ne mentionnent pas les sanctions prévues à l'article 1732 ;

- l'article 1747 du code général des impôts aggrave les sanctions par rapport à celles annoncées précédemment ;

- l'exactitude des évaluations auxquelles le service a procédé n'est pas certaine ;

- la pertinence des éléments d'appréciation utilisés par l'administration ne peut être appréciée ;

- la fixation de la base imposable n'est pas conforme à la doctrine administrative 13 L 1542 ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 30 septembre 2014, par lequel le ministre des finances et des comptes publics maintient ses conclusions précédentes par les mêmes moyens ; il soutient en outre que :

- les conclusions relatives à 2002 et 2005 sont irrecevables ;

- l'administration n'est redevable d'aucune somme ;

- la procédure d'opposition à contrôle fiscal est régulière ;

- l'intéressé n'a jamais produit de documents comptables et ne démontre pas le caractère exagéré des impositions mises à sa charge ;

Vu la décision par laquelle le président de la 2ème chambre de la Cour a fixé la clôture de l'instruction au 28 octobre 2014 à 12 heures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 septembre 2015 :

- le rapport de M. Magnard, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Egloff, rapporteur public ;

1. Considérant que le ministre de l'économie et des finances fait appel du jugement

n°s 1100612/3, 1100613/3, 1100614/3, 1100617/3 du 18 juillet 2013, en tant qu'il vise les requêtes n° 1100613/3 et n° 1100617/3, par lequel le Tribunal administratif de Melun a déchargé M. A...D..., en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2003 et 2004 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2003 au

31 décembre 2004 ;

Sur les conclusions du ministre de l'économie et des finances :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 67 du livre des procédures fiscales : " La procédure de taxation d'office prévue aux 1° et 4° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure. Toutefois, le délai de régularisation est fixé à quatre-vingt-dix jours pour la présentation à l'enregistrement de la déclaration mentionnée à l'article 641 du code général des impôts. / Il n'y a pas lieu de procéder à cette mise en demeure si le contribuable change fréquemment de lieu de séjour ou séjourne dans des locaux d'emprunt ou des locaux meublés, ou a transféré son domicile fiscal à l'étranger sans déposer sa déclaration de revenus, ou si un contrôle fiscal n'a pu avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers. " ; qu'aux termes de l'article L. 74 du même livre : " Les bases d'imposition sont évaluées d'office lorsque le contrôle fiscal ne peut avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers " ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 76 du même Livre dans sa rédaction alors en vigueur : " Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions. Cette notification est interruptive de prescription. (...) Les dispositions du présent article ne sont pas applicables dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article L. 67. " ;

3. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que, lorsque les bases de l'imposition d'un contribuable ont été évaluées d'office à la suite de son opposition au contrôle fiscal, le législateur a entendu priver l'intéressé, qui s'est de lui-même placé en dehors des règles applicables à la procédure d'imposition, des garanties dont bénéficient les contribuables, qu'ils soient imposés selon la procédure contradictoire ou selon une procédure d'imposition d'office ; qu'il résulte de l'instruction qu'il a été fait usage, au titre de la période en litige, de la procédure prévue par l'article L 74 du livre des procédures fiscales pour opposition à contrôle fiscal ; que c'est par suite à tort que les premiers juges ont prononcé la décharge des impositions en litige au motif que faute pour l'administration d'avoir fourni au contribuable des précisions suffisantes sur les termes de comparaison utilisés pour déterminer son chiffre d'affaires et son résultat, l'intéressé n'avait pas été mis à même de s'assurer que ces éléments de comparaison proposés par l'administration étaient pertinents et qu'ainsi, les propositions de rectification en cause ne satisfaisaient pas aux exigences de motivation découlant des dispositions de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. D...devant le tribunal administratif et devant la Cour ;

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'avis de vérification adressé le 16 janvier 2006 par un pli envoyé en recommandé a été retourné au service expéditeur avec la mention " avisé- non réclamé-retour à l'envoyeur " ; que le 16 février 2006, l'administration a adressé une copie de cet avis par un nouveau pli recommandé ainsi qu'un courrier simple fixant un rendez-vous au centre des impôts et attirant l'attention du contribuable sur les pénalités encourues en cas d'opposition à contrôle fiscal ; que le pli recommandé a été retourné au service expéditeur avec la mention " avisé- non réclamé-retour à l'envoyeur " ; que M. D...n'a pas donné suite au courrier simple ; que le double envoi du 16 février 2006 a été renouvelé le 14 mars avec les mêmes effets ; que dans ces conditions, c'est par une exacte application des dispositions de l'article L. 74 précitées du livre des procédures fiscales que l'administration a considéré que le vérificateur avait été mis dans l'impossibilité d'engager la vérification de comptabilité de l'intéressé et a mis en oeuvre la procédure d'opposition à contrôle fiscal ;

6. Considérant que la mise en oeuvre de la procédure d'évaluation d'office prévue, en cas d'opposition à contrôle fiscal, par l'article L. 74 précité du livre des procédures fiscales, et qui a été, ainsi qu'il vient d'être dit, à bon droit, appliquée, n'est assortie d'aucune mise en demeure ou autre formalité préalable ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au service, pour la mise en oeuvre de cette procédure, d'informer le contribuable de la faculté de recourir à un conseil de son choix ; que, par ailleurs, les courriers du 16 février 2006 et du 14 mars 2006 ont informé M. D...de ce qu'il s'exposait en sus des intérêts de retard à une majoration de 100 % ; que ni la circonstance que ces courriers ne comportaient pas la mention de " mise en garde " et ne mentionnaient pas l'interdiction de participer aux travaux des commissions instituées par les articles 1650 à 1652 bis et 1653 A du code général des impôts prévue par l'article 1732 du même code, ni celle que la majoration de 100 % était, en l'état de la législation en vigueur, prévue par les dispositions dudit article 1732 et non par celles de l'article 1730 cité dans les courriers susmentionnés, ni enfin celle que lesdits courriers aient fait référence en matière de poursuite correctionnelle à une législation qui n'était plus applicable et qui prévoyait des sanctions inférieures à celles effectivement en vigueur, ne sont de nature à avoir induit l'intéressé en erreur sur les conséquences de son comportement, dès lors qu'en tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction qu'il ait été assujetti à d'autres sanctions ayant un caractère pénal que la majoration de 100 % annoncée par ces courriers ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce qu'en conséquence des erreurs contenues dans ces courriers le procès-verbal du 12 juin 2006 n'est pas régulier ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant que la doctrine administrative 13 L 1542 invoquée à cet égard est relative à la procédure d'imposition et n'est par suite pas invocable sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition " ; qu'il résulte de ce qui précède que M. D...supporte la charge de la preuve de l'exagération des impositions demeurant... ;

9. Considérant qu'en se bornant à rappeler les modalités de reconstitution par le service de son chiffre d'affaires et de son résultat, et à faire valoir que l'exactitude des évaluations auxquelles le service a procédé n'est pas certaine et que la pertinence des éléments d'appréciation utilisés par l'administration ne peut être appréciée, M. D...n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de l'exagération des impositions contestées ; que la doctrine administrative 13 L 1542 invoquée à cet égard ne fait pas de la loi fiscale une interprétation différente de ce qui précède ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie et des finances est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a accordé à M. D...la décharge, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2003 et 2004 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2004 ;

Sur les conclusions de M.D... :

11. Considérant, en premier lieu, que le recours du ministre de l'économie et des finances est dirigé contre le jugement du Tribunal administratif de Melun en tant qu'il a prononcé la décharge de cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles M. D...a été assujetti au titre des années 2003 et 2004 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2004 ; que M. D...n'est pas recevable, dans le cadre du présent litige, à contester les modalités d'exécution du jugement attaqué en tant qu'il a fait droit à ses conclusions relatives aux années 2002 et 2005 ; qu'en ce qui concerne les années 2003 et 2004, le présent arrêt remettant à la charge de l'intéressé les impositions déchargées par les premiers juges, les conclusions présentées par M. D...relatives à l'exécution de la décharge prononcée par le tribunal administratif ne peuvent qu'être rejetées ;

12. Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, une somme au titre des frais exposés par M. D...et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n°s 1100612/3, 1100613/3, 1100614/3, 1100617/3 du Tribunal administratif de Melun en date du 18 juillet 2013 est annulé en tant qu'il a déchargé M.D..., en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2003 et 2004 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2004.

Article 2 : Les impositions mentionnées à l'article précédent sont remises à la charge de M.D.en litige

Article 3 : Les conclusions de M. D...sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D...et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 9 septembre 2015 à laquelle siégeaient :

Mme Brotons, président de chambre,

Mme Appèche, président assesseur,

M. Magnard, premier conseiller,

Lu en audience publique le 23 septembre 2015.

Le rapporteur,

M. MAGNARDLe président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 11PA00434

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N° 13PA03639


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA03639
Date de la décision : 23/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : LE CORRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-09-23;13pa03639 ?
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