Vu I°) la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés sous le n° 14PA02587, les 13 juin et 12 septembre 2014, présentés pour la société Oddo et Cie, dont le siège est 12 boulevard de la Madeleine à Paris (75009), par le cabinet BL et associes ; la société Oddo et Cie demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1312221/3-2 du 14 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 26 juin 2013 par laquelle l'inspecteur du travail a retiré sa décision du 26 février 2013 et a refusé l'autorisation de licenciement pour motif économique de M. G...E... ;
2) d'annuler ladite décision ;
3) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La société soutient :
- que le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- que la décision de l'inspectrice du travail est illégale en ce qu'elle méconnaît la procédure contradictoire ;
- qu'elle aurait dû être convoquée à l'enquête contradictoire effectuée dans le cadre de la décision du 26 février 2013 ;
- que la notification de la décision du 26 février 2013 est irrégulière ;
- que l'inspectrice du travail l'ayant qualifiée à tort de co-employeur aurait dû l'inviter à solliciter l'autorisation de licencier M.E... ;
- que la circulaire du 30 juillet 2012 relative aux décisions administratives en matière de rupture ou de transfert du contrat de travail des salariés protégés est illégale ;
- que la procédure d'information et de consultation des délégués du personnel est régulière ;
- qu'enfin l'inspectrice a entaché sa décision en retenant la qualification erronée de
co-employeur ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 mars 2015, présenté pour M. E..., par Me B..., qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société Oddo et Cie la somme de 4 000 au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il soutient qu'aucun des moyens n'est fondé ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 20 mai 2015, présenté par le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social qui conclut au rejet de la requête ; il soutient qu'aucun moyen n'est soulevé ;
Vu II°) la requête n° 14PA03019 enregistrée le 9 juillet 2014, présentée pour la société Oddo Opéra SNC, dont le siège est 12 boulevard de la Madeleine à Paris (75009), par la société August et Debouzy ; la société Oddo Opéra demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1312222/3-2 du 14 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 26 juin 2013 par laquelle l'inspecteur du travail a retiré sa décision du 26 février 2013 et a refusé l'autorisation de licenciement pour motif économique de M. G... E... ;
2) d'annuler ladite décision ;
3) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La société soutient :
- que le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- que l'inspectrice du travail ayant qualifié à tort de co-employeur la société Oddo et Cie aurait dû l'inviter à solliciter l'autorisation de licencier M.E... ;
- que le principe du contradictoire n'a pas été respecté dès lors que M. E...n'a pas été convoqué à la nouvelle enquête contradictoire diligentée par l'inspecteur du travail avant le retrait de sa décision initiale ;
- que la décision attaquée est entachée d'un vice de procédure dès lors que l'inspecteur du travail a retiré sa décision sans se fonder sur des éléments nouveaux alors qu'il s'est basé exclusivement sur la note d'information remise aux délégués du personnel lors du lancement de la procédure consultative sur le projet de licenciement de M.E..., élément dont il avait déjà connaissance à l'occasion de sa saisine ;
- qu'elle n'avait pas l'obligation d'informer et de consulter les délégués du personnel préalablement à la prise de décision de céder son activité, les dispositions de l'article L. 2313-1 du code du travail ne prévoyant pas la possibilité pour les délégués du personnel dans les entreprises de moins de 50 salariés de se substituer au comité d'entreprise et, partant, de se prévaloir des attributions économiques et financières de ce dernier ; qu'elle a, en revanche, conformément à l'article L. 1233-28 du même code, consulté les délégués du personnel sur le projet de licenciement pour motif économique, lesquels se sont prononcés favorablement sur le repositionnement des salariés de l'entreprise au sein du groupe ;
- que la procédure d'information et de consultation des délégués du personnel est régulière ;
- qu'enfin l'inspectrice a entaché sa décision en retenant la qualification erronée de
co-employeur de la société Oddo et Cie ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 mars 2015, présenté pour M. F...par Me B... qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société Oddo Opéra la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il soutient qu'aucun des moyens n'est fondé ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 20 mai 2015, présenté par le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social qui conclut au rejet de la requête ; il soutient qu'aucun moyen n'est soulevé ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 17 juin 2015, présenté pour la société Oddo Opéra, qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juillet 2015 :
- le rapport de Mme Chavrier, premier conseiller,
- les conclusions de M. Roussel, rapporteur public,
- les observations de MeD..., représentant la société Oddo et Cie,
- et les observations de MeC..., représentant la société Opéra SNC ;
1. Considérant que les requêtes n° 14PA02587, présentée pour la société Oddo et Cie, et n° 14PA03019, présentée pour la société Oddo Opéra, présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
2. Considérant que la société Oddo Options, devenue Oddo Opéra SNC, a saisi l'inspecteur du travail, le 18 janvier 2013, d'une demande d'autorisation de licenciement pour motif économique, dans le cadre de la cessation de son activité, de M.E..., salarié depuis le 8 septembre 2008, en qualité de " market maker actions ", et exerçant le mandat de délégué du personnel depuis le 5 octobre 2010 ; que, par décision du 26 février 2013, l'inspecteur du travail a autorisé le licenciement de M.E... ; qu'à l'issue d'une nouvelle enquête contradictoire, l'inspecteur du travail a, par une décision du 26 juin 2013, retiré sa précédente décision et refusé le licenciement du salarié ; que, par les présentes requêtes, les sociétés Oddo et Cie et Oddo Opéra ont saisi le Tribunal administratif de Paris pour obtenir l'annulation de cette décision ; que, par deux jugements en date du 14 mai 2014, le tribunal a rejeté leurs requêtes ; que les deux sociétés relèvent appel de ces jugements ;
Sur la régularité du jugement :
3. Considérant, d'une part, que contrairement à ce que soutient la société Oddo et Cie, les premiers juges ont répondu à l'ensemble des moyens soulevés devant eux ; qu'ils ont ainsi expressément répondu au moyen tiré de la qualité à agir de Mme A...H...pour représenter la société Oddo et Cie en jugeant que cette dernière eu égard à ses fonctions de directrice des ressources humaines de la société Oddo et Cie et de la société Oddo Options, était le représentant de l'employeur de M. E... ; que, par ailleurs, les premiers juges ont également répondu au moyen tiré de ce que l'inspectrice avait d'elle-même décidé que la société Oddo et Cie était
co-employeur sans la mettre en demeure de solliciter le licenciement, en précisant que ce moyen était inopérant ;
4. Considérant, d'autre part, que la société Oddo Opéra SNC ne saurait soutenir que les juges n'ont pas statué sur le moyen tiré des faits nouveaux pouvant justifier le retrait d'une décision illégale ; qu'en estimant que " du seul fait de cette irrégularité de la procédure de consultation des délégués du personnel, l'inspecteur du travail était tenu de retirer sa décision ", les juges ont implicitement mais nécessairement écarté l'argumentation selon laquelle seuls des faits nouveaux pouvaient être à l'origine de la décision de retrait ;
Sur le bien-fondé du jugement :
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1233-3 du code du travail : " Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 2411-5 du même code : " Le licenciement d'un délégué du personnel, titulaire ou suppléant, ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 2421-16 du même code : " L'inspecteur du travail et, en cas de recours hiérarchique, le ministre examinent notamment si la mesure de licenciement envisagée est en rapport avec le mandat détenu, sollicité ou antérieurement exercé par l'intéressé. " ;
6. Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions et de celles du 2° de l'article L. 2411-1 du code du travail applicables aux délégués du personnel, que les salariés légalement investis des fonctions représentatives précitées bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle et ne peuvent être licenciés qu'avec l'autorisation de l'inspecteur du travail ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressé ;
7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 2421-10 du code du travail : " La demande d'autorisation de licenciement d'un délégué du personnel, d'un membre du comité d'entreprise ou d'un membre du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail est adressée à l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement qui l'emploie. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 2421-12 du même code : " La décision de l'inspecteur du travail est motivée. / Elle est notifiée par lettre recommandée avec avis de réception : / 1° A l'employeur ; / 2° Au salarié ; (...) " ;
8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la demande d'autorisation de licenciement pour motif économique concernant M. E... a été adressée à l'inspecteur du travail le 18 janvier 2013 par Mme A...der Werf qui, de par ses fonctions de directrice des ressources humaines de la société Oddo et Cie et de la société Oddo Options, était le représentant de l'employeur de M. E... ; que la décision attaquée du 26 juin 2013 a été notifiée à Mme A... der Werf en cette double qualité ; que, c'est donc à bon droit que le tribunal a estimé que la société Oddo et Cie n'était pas fondée à soutenir que la décision attaquée n'avait pas été notifiée à son représentant légal ; que c'est également à bon droit que les premiers juges ont souligné que la circonstance que seule la société Oddo Options a été destinataire de la précédente décision de l'inspecteur du travail en date du 26 février 2013, était dépourvue d'incidence sur la légalité de la décision attaquée dès lors que cette décision a fait l'objet d'un retrait ;
9. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 2421-11 du code du travail : " L'inspecteur du travail procède à une enquête contradictoire au cours de laquelle le salarié peut, sur sa demande, se faire assister d'un représentant de son syndicat. (...) " ; qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / (...) - retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; (...) " ; qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 susvisée : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. (...) " ; que, sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires, et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l'administration ne peut retirer une décision individuelle explicite créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision ;
10. Considérant que si, en excluant les décisions prises sur demande de l'intéressé du champ d'application de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, le législateur a entendu dispenser l'administration de recueillir les observations de l'auteur d'un recours gracieux ou hiérarchique, ou de la personne susceptible de bénéficier du retrait envisagé de la décision initiale, il n'a pas entendu pour autant la dispenser de recueillir les observations du tiers au profit duquel la décision contestée par ce recours, ou dont l'auteur envisage le retrait, a créé des droits ; qu'il suit de là, que l'autorité administrative ne peut procéder au retrait de la décision par laquelle elle a accordé ou refusé l'autorisation de licenciement de salariés protégés ou ne peut statuer sur un tel recours qu'après que le bénéficiaire de la décision créatrice de droits a été mis à même de présenter ses observations ;
11. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par deux courriers du 14 juin 2013, l'inspectrice du travail a informé les deux sociétés qu'elle envisageait de retirer sa décision autorisant le licenciement de M. E... ; que l'inspectrice n'était pas tenue de convoquer l'autre filiale de la société mère, à savoir la société Oddo Contrepartie, laquelle n'a aucunement la qualité de co-employeur des salariés protégés en cause ; que, par ailleurs, la directrice des ressources humaines des deux sociétés a été convoquée à une nouvelle enquête et ses observations ont été recueillies le 25 juin 2013 ; que, dans ces conditions, il ne peut être soutenue que la procédure contradictoire aurait été viciée ; qu'enfin, la société Oddo Opéra ne saurait soutenir que l'inspectrice du travail aurait dû convoquer les salariés protégés en cause pour recueillir leurs observations avant le retrait de sa décision initiale dès lors que les salariés protégés en cause, dont le licenciement avait été accepté, n'étaient pas les bénéficiaires de la décision créatrice de droits dont le retrait a été envisagé par l'inspectrice du travail de sa propre autorité ; que, dans ces conditions, c'est donc à bon droit que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire et de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;
12. Considérant, en troisième lieu, que la société Oddo Opéra soutient que l'inspectrice du travail a commis une erreur de droit dès lors qu'elle ne s'est pas fondée sur des éléments nouveaux pour retirer sa décision mais qu'elle s'est fondée exclusivement sur la note d'information remise aux délégués du personnel lors du lancement de la procédure de consultation sur les projets de licenciement pour motif économique en cause dont elle avait déjà eu connaissance au moment de la prise de la décision initiale ; qu'il ressort en fait des pièces du dossier que l'inspectrice du travail a été informée de la date de la décision de la vente du portefeuille de la société Oddo Options fixée au 1er octobre 2012 à l'occasion de l'enquête précédant la décision de retrait contestée ; que cette information déterminante ne lui avait pas été fournie par l'employeur avant les décisions initiales du 26 février 2013 ; que, dès lors, l'inspectrice du travail n'a commis aucune erreur de droit en prenant en compte une information nouvelle se rapportant à un élément de fait antérieur à sa décision initiale qui lui permettait d'apprécier correctement la régularité de la procédure préalable aux demandes de licenciement ;
13. Considérant, en quatrième lieu, que si les sociétés requérantes persistent à soutenir à hauteur d'appel que c'est à tort que l'inspecteur du travail a considéré que la société Oddo et Cie, en qualité d'actionnaire de la société la société Oddo Options, était co-employeur de M. E..., il ressort des termes mêmes de la décision attaquée que l'inspecteur du travail ne s'est pas fondé sur ce motif mais sur un motif tiré de l'irrégularité de la procédure de consultation pour retirer sa décision initiale et rejeter la demande d'autorisation de licenciement du salarié, laquelle n'était, au demeurant, sollicitée que par la seule société Oddo Opéra ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que les moyens soulevés par les sociétés requérantes tirés de l'insuffisance de motivation sur la situation de
co-emploi, de l'erreur de droit, de l'erreur de qualification juridique des faits et de l'exception d'illégalité de la circulaire du 30 juillet 2012 relative aux décisions administratives en matière de rupture ou de transfert du contrat de travail des salariés protégés étaient inopérants ;
14. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 2313-7 du code du travail : " Dans les entreprises de moins de cinquante salariés, lorsque l'employeur envisage de procéder à un licenciement collectif pour motif économique, les délégués du personnel sont consultés dans les conditions prévues par le titre III du livre II de la première partie. " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-28 du même code : " L'employeur qui envisage de procéder à un licenciement collectif pour motif économique d'au moins dix salariés dans une même période de trente jours réunit et consulte, selon le cas, le comité d'entreprise ou les délégués du personnel, dans les conditions prévues par le présent paragraphe. " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-29 dudit code : " Dans les entreprises ou établissements employant habituellement moins de cinquante salariés, l'employeur réunit et consulte les délégués du personnel. / Ces derniers tiennent deux réunions, séparées par un délai qui ne peut être supérieur à quatorze jours. " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-31 du même code : " L'employeur adresse aux représentants du personnel, avec la convocation à la première réunion, tous renseignements utiles sur le projet de licenciement collectif. / Il indique : / 1° La ou les raisons économiques, financières ou techniques du projet de licenciement ; / 2° Le nombre de licenciements envisagé ; / 3° Les catégories professionnelles concernées et les critères proposés pour l'ordre des licenciements ; / 4° Le nombre de salariés, permanents ou non, employés dans l'établissement ; / 5° Le calendrier prévisionnel des licenciements ; / 6° Les mesures de nature économique envisagées. " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-32 du même code : " Outre les renseignements prévus à l'article L. 1233-31, dans les entreprises de moins de cinquante salariés, l'employeur adresse aux représentants du personnel les mesures qu'il envisage de mettre en oeuvre pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre et pour faciliter le reclassement du personnel dont le licenciement ne pourrait être évité. (...) " ;
15. Considérant qu'il ressort des dispositions précitées que la procédure de consultation doit donc être déclenchée par l'employeur au moment où a été adoptée une décision stratégique le contraignant à envisager de licenciements collectifs ; qu'en effet, une consultation qui débuterait alors qu'une décision rendant nécessaires de tels licenciements collectifs a déjà été prise ne pourrait plus utilement porter sur l'examen d'alternatives envisageables en vue d'éviter ceux-ci ;
16. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les délégués du personnel de la société Oddo Options ont été convoqués, le 8 octobre 2012, à une réunion devant se tenir le 11 octobre suivant avec pour ordre du jour un point d'" information sur la stratégie du groupe concernant Oddo Options " ; que cette convocation n'était accompagnée d'aucune note écrite ; que les délégués du personnel ont ensuite été convoqués le 11 octobre 2012 à une réunion devant se tenir le 15 octobre suivant en vue de discuter de la méthode de consultation proposée par la direction, consistant en deux phases successives, sur le projet de reclassement et de repositionnement des salariés au sein du groupe Oddo, puis sur le projet de licenciement et les mesures d'accompagnement ; que les délégués du personnel se sont vus remettre, préalablement à cette réunion, une note d'information sur la première phase relative au projet de reclassement et de repositionnement au sein du groupe des salariés d'Oddo Options, indiquant que le groupe Oddo a décidé, sur la base de la dégradation des résultats de la société Oddo Options, de " céder le book à une contrepartie de marché dans le cadre d'une seule et même opération à réaliser sans délai " ; qu'au demeurant, ce document ne contenait pas l'ensemble de l'information prévue par les dispositions précitées des articles L. 1233-31 et 32 du code du travail, notamment le nombre de licenciements envisagés, les catégories socioprofessionnelles concernées, le calendrier prévisionnel des licenciements et les mesures envisagées pour faciliter le reclassement externe du personnel dont le licenciement ne pourrait être évité ; que la cession de ce portefeuille décidée le 1er octobre 2012 a été réalisée dès le 12 octobre avant même la réunion du 15 octobre 2012 ; que les délégués du personnel ont été réunis le 5 décembre 2012 conformément aux dispositions de l'article L. 1233-28 du code du travail et ce n'est qu'à cette occasion que leur a été remise une note d'information comprenant toutes les mentions prescrites par les articles L. 1233-1 et L. 1233-2 du code du travail ; qu'ils ont émis un avis défavorable le 19 décembre 2012 ; que, dans de telles conditions, la consultation des représentants du personnel a été privée de tout effet utile eu égard à la date de la décision stratégique du groupe Oddo motivant les licenciements collectifs en cause, ce qui constitue une méconnaissance de l'obligation de consultation des délégués du personnel prévue par le code du travail ; que, lorsqu'une procédure de licenciement économique a été entachée d'une telle irrégularité, l'inspecteur du travail est tenu de refuser l'autorisation de licenciement qui lui est demandée ; que c'est donc à bon droit que le tribunal a estimé que du seul fait de cette irrégularité de la procédure de consultation des délégués du personnel, l'inspecteur du travail était tenu de retirer sa décision ;
17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les sociétés Oddo et Cie et Oddo Opéra ne sont pas fondées à demander l'annulation du jugement du 14 mai 2014 par lequel le tribunal a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de la décision du 26 juin 2013 par laquelle l'inspecteur du travail a retiré sa décision du 26 février 2013 et refusé l'autorisation de licenciement pour motif économique de M.E... ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
18. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;
19. Considérant que les dispositions précitées font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par les sociétés requérantes au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des mêmes dispositions en mettant à la charge des sociétés requérantes les sommes que demande M. E...au même titre ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les requêtes 14PA02587 et 14PA03019 sont rejetées.
Article 2 : Les conclusions de M. F... tendant au bénéfice des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Oddo et Cie, à la société Oddo Opéra SNC, au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à M. G... E....
Délibéré après l'audience du 2 juillet 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Bouleau, premier vice-président,
- M. Polizzi, président assesseur,
- Mme Chavrier, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 10 septembre 2015.
Le rapporteur,
A-L CHAVRIERLe président,
M. BOULEAU
Le greffier,
N. ADOUANE
La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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