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16/07/2015 | FRANCE | N°13PA02934

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 16 juillet 2015, 13PA02934


Vu la requête, enregistrée le 26 juillet 2013, présentée pour la société TAT, dont le siège social est Aérodrome de Magenta, BP 14383, à Nouméa (98803) cedex, par Me A... ; la société TAT demande à la Cour :

1º) d'annuler le jugement n° 1200291 du 23 mai 2013 par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier territorial de Nouvelle-Calédonie à lui verser la somme de 40 189 245 francs CFP, assortie des intérêts de droit, en réparation du préjudice résultant de son éviction irrégulière

de la procédure de passation du marché public de prestations de transports sanit...

Vu la requête, enregistrée le 26 juillet 2013, présentée pour la société TAT, dont le siège social est Aérodrome de Magenta, BP 14383, à Nouméa (98803) cedex, par Me A... ; la société TAT demande à la Cour :

1º) d'annuler le jugement n° 1200291 du 23 mai 2013 par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier territorial de Nouvelle-Calédonie à lui verser la somme de 40 189 245 francs CFP, assortie des intérêts de droit, en réparation du préjudice résultant de son éviction irrégulière de la procédure de passation du marché public de prestations de transports sanitaires du service d'aide médicale urgente (SAMU) et a mis à sa charge le versement au centre hospitalier territorial de Nouvelle-Calédonie de la somme de 200 000 francs CFP sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de condamner le centre hospitalier territorial de Nouvelle-Calédonie à lui verser la somme de 40 189 245 francs CFP, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de sa demande préalable, en réparation du préjudice résultant de son éviction irrégulière ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier territorial de Nouvelle-Calédonie le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier ; en effet, n'ont pas été mentionnés dans ses visas les moyens tirés de la violation du principe de transparence des procédures du fait du caractère ambigu du dossier de consultation des entreprises et de l'absence d'indication des conditions de mise en oeuvre des critères d'appréciation des offres ; de plus, les premiers juges n'ont pas suffisamment motivé leur décision, s'agissant de la pièce ou des pièces du dossier démontrant que les critères de notation des offres avaient été pris en compte par la commission d'appel d'offres ; qu'ils ont omis de répondre aux moyens invoqués dans son mémoire enregistré le 14 février 2013, tirés de la violation du principe de transparence et concernant les ambiguïtés entachant le dossier de consultation des entreprises, de la violation de l'article 27.2 de la délibération du 1er mars 1967 du fait du rejet de ses offres comme irrégulières et de l'absence de prise en compte de critères imposés par cette délibération et précisés dans le règlement particulier de l'appel d'offres, de la violation du principe d'égalité de traitement des candidats et au caractère irrégulier de l'offre de la société INAER, qui a modifié son offre, de la supériorité de ses offres comparées à celles de la société INAER et de l'erreur manifeste d'appréciation ;

- la commission d'appel d'offres n'a pas pris en compte les critères de notation des offres ;

- l'autonomie d'un hélicoptère et son rayon d'action n'augmente pas à raison de sa vitesse de croisière ;

- le principe de transparence a été méconnu ; en effet, le dossier de consultation comporte des ambiguïtés, s'agissant des notions de " vitesse de croisière opérationnelle " et d' " autonomie opérationnelle " ; il ne fait pas état des conditions de mise en oeuvre des critères de notation des offres ;

- le pouvoir adjudicateur a violé les principes de liberté d'accès à la commande publique et d'égalité de traitement des candidats ; en effet, ont été irrégulièrement imposées des spécifications techniques discriminatoires ; un seul type d'hélicoptère correspond aux exigences du pouvoir adjudicateur ; celles-ci ne sont pas justifiées par l'objet et les conditions d'exécutions du marché ; l'article 7 de la délibération du 1er mars 1967 a donc été méconnu ; le pouvoir adjudicateur a négocié avec l'entreprise attributaire après la remise des offres, la variante proposée ayant été modifiée en supprimant l'intéressement aux activités tierces de l'hélicoptère de remplacement, comme le démontre l'absence de communication de la totalité du marché signé par l'administration ; l'offre de l'attributaire était irrégulière, dès lors qu'elle ne comportait aucune indication de durée ;

- la violation de l'article 27.2 de la même délibération est caractérisée ; c'est en effet à tort que ses offres ont été rejetées comme irrégulières ; l'exigence relative à la vitesse des appareils est injustifiée ; il n'est pas démontré que les appareils proposés ne peuvent décoller dans les conditions prévues par les pièces du marché ; son offre n°3 n'a pas été examinée par la commission d'appel d'offres ; par ailleurs, aucune comparaison des offres au regard du critère " prix " n'a été opérée, alors que son offre était la plus attractive ;

- son offre étant l'offre économiquement la plus avantageuse, le pouvoir adjudicateur a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

- elle a perdu une chance sérieuse d'emporter le marché et est donc fondée à être indemnisée à raison de son manque à gagner ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 janvier 2014, présenté pour le centre hospitalier territorial de Nouvelle-Calédonie, représenté par son directeur en exercice, par la Selarl Louzier-Fauche-Cauchois, qui conclut au rejet de la requête et à ce que le versement de la somme de 2 500 euros soit mis à la charge de la société TAT sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative;

Il fait valoir que :

- le cahier des clauses techniques particulières annexé à la circulaire interministérielle du 2 juillet 2009 invoqué par l'appelante n'est pas applicable en Nouvelle-Calédonie ;

- l'offre de la société était irrégulière en raison de la non-conformité des deux appareils proposés au regard des exigences justifiées des pièces de la consultation ;

- le pouvoir adjudicateur n'a commis aucune faute, alors même que les critères de sélection des offres n'étaient pas pondérés ou hiérarchisés ; le moyen tiré de l'absence d'information sur les conditions de mise en oeuvre de ces critères, qui n'a pas lésé spécifiquement l'appelante, est inopérant ;

- le moyen tiré du caractère discriminatoire des spécifications techniques du marché est inopérant ;

- l'appelante n'a pas présenté trois offres mais deux offres et une variante très succincte assortie de conditions ; les offres de base de la société n'étaient pas conformes aux exigences de la consultation et la variante ne pouvait être mise en oeuvre qu'à compter de la deuxième année d'exploitation ;

- le moyen tiré de l'absence de comparaison des offres au regard du prix proposé est inopérant, en raison de l'irrégularité des offres de l'appelante ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 19 juin 2014, présenté pour la société TAT par Me A..., qui confirme ses précédentes écritures ;

Elle soutient, en outre, que :

- le pouvoir adjudicateur ne peut procéder de sa propre initiative à la modification ou à la rectification d'une offre ;

- le respect de la Constitution impose au pouvoir adjudicateur d'indiquer aux candidats les conditions de mise en oeuvre des critères de notation des offres ;

- l'absence d'information des candidats quant aux modalités de mise en oeuvre du critère portant sur le prix est de nature à priver ceux-ci d'une chance sérieuse d'emporter le marché ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu les notes en délibéré, enregistrées les 3 et 8 juillet 2015, présentées pour la Sarl TAT par Me A... ;

Vu la loi organique n° 99-209 et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999, relatives à la Nouvelle-Calédonie ;

Vu la délibération n° 136/CP du 1er mars 1967 modifiée portant réglementation des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative dans sa version applicable en Nouvelle-Calédonie ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 juin 2015 :

- le rapport de M. Cantié, premier conseiller,

- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,

- et les observations de Me d'Alboy, avocat de la société TAT ;

1. Considérant que le centre hospitalier territorial de Nouvelle-Calédonie a lancé, le 11 mai 2010, une procédure d'appel d'offres ouvert en vue de l'attribution d'un marché public de prestations de transports sanitaires héliportés du service d'aide médicale urgente (SAMU) ; que, selon les pièces de la consultation, l'objet du marché est la mise à disposition d'un hélicoptère biturbine de catégorie A, exploité en classe de performance 1, ainsi que d'un hélicoptère de remplacement exploité en classe de performance 2 ou 3, pour une durée de cinq ans ou de trois ans ; que les mêmes pièces imposent aux soumissionnaires de déposer une variante consistant à exprimer le prix de la prestation à la minute de vol et non au mile nautique ; que la date limite de remise des offres a été fixée au 2 juillet 2010 ; que, dans sa réunion du 16 juillet 2010, la commission d'appel d'offres a admis à concourir les sociétés TAT et Inaer et a rejeté l'offre de la société Hélicocéan comme formellement non conforme au dossier d'appel d'offres ; que, dans sa réunion du 13 août 2010, la commission d'appel d'offres ont retenu l'offre de la société Inaer ; que le directeur du centre hospitalier a informé la société TAT, par lettre du 21 octobre 2010, du rejet de ses offres en lui indiquant que le marché avait été attribué à une société ayant proposé des offres conformes au cahier des clauses administratives particulières (CCAP) et au cahier des clauses techniques particulières (CCTP) ; que la société TAT relève appel du jugement en date du 23 mai 2013 par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier territorial de Nouvelle-Calédonie à lui verser la somme de 40 189 245 francs CFP, assortie des intérêts de droit, en réparation du préjudice résultant de son éviction irrégulière de la procédure de passation du marché public et a mis à sa charge le versement au centre hospitalier de la somme de 200 000 francs CFP sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'il ressort du dossier de première instance qu'à l'appui de sa demande, la société TAT a soutenu que les ambiguïtés dont étaient entachés le CCTP faisaient obstacle à ce que ses offres soient rejetées comme irrégulières ; que les premiers juges n'ont pas répondu à ce moyen, qui n'est pas inopérant eu égard à l'objet de la demande de l'entreprise ; que, par suite, le jugement attaqué est entaché d'irrégularité et doit être annulé ;

3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société TAT devant le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;

Sur la responsabilité du centre hospitalier territorial de Nouvelle-Calédonie :

4. Considérant que lorsqu'un candidat à l'attribution d'un contrat public demande la réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de l'irrégularité ayant, selon lui, affecté la procédure ayant conduit à son éviction, il appartient au juge, si cette irrégularité est établie, de vérifier qu'elle est la cause directe de l'éviction du candidat et, par suite, qu'il existe un lien direct de causalité entre la faute en résultant et le préjudice dont le candidat demande l'indemnisation ; que l'entreprise qui a été irrégulièrement évincée du marché qu'elle avait des chances sérieuses d'emporter a droit à être indemnisée de son manque à gagner, qui doit être déterminé en prenant en compte le bénéfice net qu'aurait procuré ce marché à l'entreprise ; qu'en revanche, l'entreprise qui était dépourvue de toute chance de remporter le marché ne peut prétendre à aucune indemnité ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 7 de la délibération susvisée du 1er mars 1967 : " Les prestations qui font l'objet des marchés doivent répondre exclusivement à la nature et à l'étendue des besoins à satisfaire. Le service intéressé est tenu de déterminer aussi exactement que possible les spécifications et la consistance de ces prestations avant tout appel à la concurrence ou toute négociation " ; que selon l'article 27-2 de la même délibération, dans sa rédaction applicable à la procédure litigieuse : " La commission d'appel d'offres arrête la liste des soumissionnaires admis à concourir, élimine les offres non conformes à l'objet du marché et propose d'attribuer le marché au candidat dont l'offre correspond le mieux aux besoins exprimés (...) " ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du procès-verbal de la séance du 13 août 2010 de la commission d'appel d'offres, que les offres déposées par la société TAT reposait respectivement sur l'emploi d'hélicoptères de type " Ecureuil " et " Dauphin " ; que la commission d'appel d'offres a estimé que le premier type d'appareil n'atteignait pas la vitesse demandée par le CCTP du marché, tandis que le second ne présentait pas de garanties en termes de décollage par tous temps de l'hélistation du centre hospitalier ; que la commission a considéré que le seul appareil répondant aux critères posés par le CCTP était l' " EC 135 T2+ ", modèle proposé par la société Inaer ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article 6 du CCTP du marché : " Les moyens à mettre en oeuvre, 365 jours par an, par le titulaire pour réaliser les transports sanitaires héliportés conformément au présent marché comprennent : / - la fourniture, pour un usage sanitaire exclusif du SAMU, d'un appareil biturbine de catégorie A exploité en classe de performance 1 au minimum pendant 1 heure et 30 minutes à une température de 20 ° centigrades et à une altitude de 1.000 pieds avec les réserves de carburant réglementaires (...) " ; que selon l'article 5 du même cahier, relatif aux demandes d'intervention : " (...) L'appareil sera exploité à une vitesse de croisière opérationnelle d'au moins 135 noeuds (...) " ; que l'article 7 du CCTP intitulé " vitesse de croisière et autonomie opérationnelles de l'appareil " stipule que : " Les performances opérationnelles de l'appareil sont considérées en conditions d'exploitation des missions de transports sanitaires, c'est-à-dire avec la charge utile opérationnelle (équipe SAMU de 2 personnes + équipement médical + patient sur brancard), la réserve de carburant réglementaire et le matériel réglementaire selon les dispositions du Code de l'Aviation Civile. / Avec la charge utile opérationnelle tel que précisé ci-dessus, l'appareil aura : / - une vitesse de croisière opérationnelle d'au moins 135 noeuds ; / - ainsi qu'une autonomie opérationnelle d'au moins 250 Nm à la vitesse de croisière opérationnelle stipulée ci-dessus./ Il est entendu par autonomie opérationnelle, le fait de pouvoir effectuer un aller-retour d'au moins 250 Nm sans procéder à un ravitaillement, en volant à une vitesse de croisière opérationnelle d'au moins 135 noeuds avec la charge utile opérationnelle (équipe SAMU de 2 personnes + équipement médical + patient sur brancard), la réserve de carburant réglementaire et le matériel réglementaire selon les dispositions du Code de l'Avion Civile. / En missions de transports sanitaires, l'appareil devra être en mesure d'effectuer, sans ravitaillement, un aller-retour sur les destinations suivantes : / - Nouméa - Lifou - Nouméa : 204 Nm ; / - Nouméa - Poindimié - Nouméa : 220 Nm ; / - Nouméa - Lifou - Nouméa : 234 Nm. / Le soumissionnaire remettra tous les justificatifs provenant des documents officiels du constructeur de l'aéronef permettant d'appréhender les performances opérationnelles de l'appareil, notamment en matière de vitesse de croisière et d'autonomie opérationnelles du présent CCTP. " ; qu'aux termes de l'article 7.8 : " Le soumissionnaire remettra dans son offre un descriptif des caractéristiques générales, complété de photographies : / - de l'hélicoptère biturbine de catégorie A exploité en classe de performance 1 ; / - de l'hélicoptère proposé en remplacement, exploité en classe de performance 2 ou 3. Le soumissionnaire devra répondre précisément point par point aux stipulations du CCTP avec des extraits des documents officiels de l'aéronef (...) " ; que l'article 9.2.c stipule que : " A titre dérogatoire, l'appareil de remplacement pourra être un appareil satisfaisant les conditions d'exploitation en classe de performance 2 ou 3 avec une vitesse de croisière opérationnelle d'au moins 115 noeuds en condition d'exploitation des missions de transport sanitaire, avec la charge utile opérationnelle. / Cependant, en cas d'indisponibilité de plus de 15 jours calendaires, et pour quelques raisons que ce soit, de l'hélicoptère biturbine de catégorie A exploité en classe de performance 1 tel que prévu au présent CCTP, la société s'engage à mettre à disposition à compter du 16ème jour calendaire d'indisponibilité, et sans condition, un appareil de remplacement conforme à l'objet principal du présent CCTP (...) " ;

8. Considérant que, contrairement à ce que soutient la société TAT, les stipulations précitées du CCTP définissent de façon précise les caractéristiques des appareils objet des prestations du marché, en particulier les notions d' " vitesse de croisière opérationnelle " et d' " autonomie opérationnelle " qui pouvaient être aisément appréhendées par une entreprise du secteur alors même qu'elles ne figureraient pas en tant que telles dans la documentation fournie par les constructeurs ; qu'alors qu'il résulte de l'instruction que la société TAT n'était pas habilitée à transporter des personnes et avait indiqué dans ses offres qu'elle s'appuierait sur les compétences de sociétés métropolitaines de transport public, elle n'a posé aucune question au centre hospitalier en ce qui concerne les spécifications techniques prévues par les pièces de la consultation ; que, dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir que ces pièces comportaient des ambiguïtés qui faisaient obstacle à l'appréciation de la régularité des offres par le centre hospitalier territorial de Nouvelle-Calédonie ;

9. Considérant que la société TAT soutient par ailleurs que la spécification imposant que l'appareil principal soit exploité à une vitesse de croisière opérationnelle d'au moins 135 noeuds, qui a motivé le rejet de son offre reposant sur l'emploi d'un appareil de type " Ecureuil ", n'était pas justifiée par l'objet du marché et revêtait un caractère discriminatoire ; que, toutefois, il résulte de l'instruction qu'une telle spécification était justifiée par les nécessités propres aux interventions héliportées du SAMU sur le territoire de la Nouvelle-Calédonie ; qu'eu égard aux particularités de ce territoire, notamment aux conditions atmosphériques auxquelles doivent faire face les appareils affectés au transport médical d'urgence et au rayon d'action des interventions, c'est sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation que le pouvoir adjudicateur a fixé à 135 noeuds la vitesse de croisière opérationnelle attendue de l'appareil principal ; que la société TAT ne peut utilement se prévaloir de ce que cette exigence n'était pas prévue par la circulaire interministérielle DHOS/01 n°2009-188 du 2 juillet 2009 relative aux textes applicables aux transports sanitaires aériens et à leur interprétation, qui est dépourvue de caractère réglementaire ; que la circonstance que l'appareil de type " EC 135 " proposé par la société Inaer était le seul appareil proposé dans le cadre de la consultation à satisfaire aux critères de performance fixées par l'administration ne suffit pas à établir que ces critères ont illégalement limité la concurrence, dès lors qu'il n'est pas démontré qu'aucun autre appareil existant sur le marché ne pouvait remplir lesdits critères ; qu'au demeurant, il résulte de l'instruction que la société TAT a elle-même proposé l'emploi d'un appareil de type " EC 135 ", dans le cadre d'une variante qui, reposant sur une mise à disposition de l'engin à partir de la deuxième année d'exploitation et sur la condition d'un réajustement du prix au nautique parcouru, n'était pas conforme aux pièces du marché ;

10. Considérant qu'il résulte de l'instruction et n'est pas contesté que la société TAT a fait mention dans son offre reposant sur l'utilisation de l'appareil de type " Dauphin " que cet engin n'était pas à même de décoller de l'hélistation du centre hospitalier territorial dans certaines conditions ; que si l'article 8 du CCTP, relatif aux avitaillements de l'appareil, stipule que : " La base principale d'opération de l'appareil sera à proximité de l'aérodrome de Magenta " et qu'aucune des pièces de la consultation ne fait expressément mention du décollage de l'appareil à partir de l'hélistation située sur la toiture du centre hospitalier, l'objet même du marché et la nature des prestations attendues du titulaire impliquaient que l'appareil fourni soit à même d'effectuer un tel décollage en toutes conditions ; que cette exigence a du reste été déduite des pièces du marché par la société TAT qui a formulé la réserve caractérisant la non-conformité de son offre ;

11. Considérant qu'il suit de là que les offres de la société TAT étaient irrégulières et ont été rejetées à bon droit par le centre hospitalier territorial de Nouvelle-Calédonie ; que l'entreprise, qui était dès lors dépourvue de toute chance de remporter le marché, n'est pas fondée à soutenir qu'elle avait des chances sérieuses d'obtenir ce contrat ; que, par voie de conséquence, elle ne peut utilement se prévaloir d'irrégularités ne présentant aucun lien direct avec le rejet de ses offres pour non-conformité, notamment du fait que l'offre de la société Inaer aurait été irrégulière et aurait donné lieu à une négociation portant atteinte à l'égalité de traitement des candidats ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société TAT n'est pas fondée à rechercher la responsabilité du centre hospitalier territorial de Nouvelle-Calédonie ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge du centre hospitalier territorial de Nouvelle-Calédonie qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une quelconque somme au titre des frais exposés par la société TAT et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des mêmes dispositions et de mettre à la charge de la société TAT le versement au centre hospitalier territorial de Nouvelle-Calédonie de la somme de 2 000 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1200291 du 23 mai 2013 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la société TAT devant le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie et ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative de sa requête sont rejetées.

Article 3 : La société TAT versera au centre hospitalier territorial de Nouvelle-Calédonie la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société TAT et au centre hospitalier territorial de Nouvelle-Calédonie.

Délibéré après l'audience du 30 juin 2015, à laquelle siégeaient :

- Mme Coënt-Bochard, président de chambre,

- M. Dellevedove, premier conseiller,

- M. Cantié, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 juillet 2015.

Le rapporteur,

C. CANTIÉLe président,

E. COËNT-BOCHARD

Le greffier,

A. LOUNISLa République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13PA02934


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA02934
Date de la décision : 16/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Formation des contrats et marchés.

Marchés et contrats administratifs - Règles de procédure contentieuse spéciales - Pouvoirs et obligations du juge.


Composition du Tribunal
Président : Mme COËNT-BOCHARD
Rapporteur ?: M. Christophe CANTIE
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : CABINET PALMIER et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 30/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-07-16;13pa02934 ?
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