Vu la requête, enregistrée le 2 juin 2014, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par Me Wantou, avocat ; M. A...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1207285 du 10 avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 10 mai 2012, par laquelle le préfet du Val-de-Marne a rejeté sa demande de regroupement familial au bénéfice de ses enfants Elambo Madika et SukamiB..., ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé contre cette décision ;
2°) d'annuler ces décisions ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne d'autoriser le regroupement familial pour ses deux enfants, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la notification de la décision à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- le préfet n'a pas apprécié sa situation particulière et s'est exclusivement fondé sur le non respect des conditions de logement ;
- la décision de refus du regroupement familial est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors, que la différence entre la superficie de son logement qui est de 48 m2 et la superficie exigée par les textes 52 m2, n'est que de 4 m², et qu'un tel différentiel de 4 m2 n'empêcherait pas la famille réunie de vivre décemment dans une situation de confort ;
- compte tenu des démarches qu'il a entreprises pour obtenir un nouveau logement, le préfet ne pouvait estimer qu'à la date d'arrivée de sa famille en France il ne disposera pas d'un logement considéré comme normal ;
- les décisions préfectorales méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, car il a conservé des liens intenses avec ses enfants restés au Congo, qu'il n'a pas abandonnés, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal ;
- ces décisions méconnaissent également les stipulations le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant car elles ont pour conséquence de priver ses filles de la présence de leur père, alors notamment qu'il exerce l'autorité parentale exclusive à leur égard et que son frère, qui s'occupait d'elles au Congo, est décédé ;
Vu le jugement et les décisions attaqués ;
Vu les pièces dont il résulte que la requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 23 avril 2015, présentée pour M.A..., par Me Wantou ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 avril 2015 :
- le rapport de M. Dalle, président,
- les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public,
- et les observations de Me Wantou, avocat de M. A... ;
1. Considérant que M.A..., ressortissant de la République démocratique du Congo, a présenté le 8 octobre 2010 une demande de regroupement familial au bénéfice de ses filles Elambo Madika et SukamiB..., nées respectivement les 12 septembre 1994 et 26 janvier 1996 ; que le préfet du Val-de-Marne a rejeté cette demande par une décision du 10 mai 2012, contre laquelle M. A... a formé un recours gracieux le 25 juin 2012 ; que, par la présente requête, M. A...relève appel du jugement en date du 10 avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 10 mai 2012 et de la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans, et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans " ; qu'aux termes de l'article L. 411-3 du même code : " Le regroupement familial peut être demandé pour les enfants mineurs de dix-huit ans du demandeur et ceux de son conjoint, qui sont confiés, selon le cas, à l'un ou l'autre, au titre de l'exercice de l'autorité parentale, en vertu d'une décision d'une juridiction étrangère. Une copie de cette décision devra être produite ainsi que l'autorisation de l'autre parent de laisser le mineur venir en France " ; que l'article L. 411-5 du même code dispose : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : / (...) / 2° Le demandeur ne dispose pas ou ne disposera pas à la date d'arrivée de sa famille en France d'un logement considéré comme normal pour une famille comparable vivant dans la même région géographique " ; qu'aux termes de l'article R. 411-5 du même code : " Pour l'application du 2° de l'article L. 411-5, est considéré comme normal un logement qui : / 1° Présente une superficie habitable totale au moins égale à : / en zone A : 22m2 pour un ménage sans enfant ou deux personnes, augmentée de 10m2 par personne jusqu'à huit personnes et de 5m2 par personne supplémentaire au-delà de huit personnes (...) " ;
3. Considérant que le préfet du Val-de-Marne a rejeté la demande de regroupement familial présentée par M. A...au triple motif qu'un acte de naissance qu'il avait produit à l'appui de sa demande n'était pas conforme à la législation congolaise, que des certificats de non appel n'étaient pas produits pour les jugements du 28 août 2009 et du 13 avril 2010 par lesquels le tribunal de paix de Songololo avait respectivement prononcé son divorce d'avec la mère de ses deux filles Sukami et Elambo et placé celles-ci sous son autorité parentale et en outre que le logement n'atteignait pas la superficie réglementaire de 52 m² ; que, cependant, devant le tribunal administratif, M. A...a produit, pour chacune de ses filles, un nouvel acte de naissance ainsi que des certificats de non appel pour les jugements des 28 août 2009 et 13 avril 2010 ; que l'authenticité de ces pièces n'est pas discutée par le préfet, qui n'a pas produit de mémoire devant le tribunal et la Cour ; qu'il est constant par ailleurs que la superficie du logement occupé par M.A..., sa nouvelle épouse et leur fille était de 48 m² et n'était inférieure que de 4 m² à la superficie minimum résultant de l'article R. 411-5 précité ; qu'il n'est pas établi que le préfet aurait pris la même décision s'il n'avait retenu que le motif tiré de l'insuffisante superficie du logement ; que, dès lors et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens, M A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
4. Considérant que l'exécution du présent arrêt n'implique pas contrairement à ce que demande M.A..., d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne d'autoriser le regroupement familial ; qu'elle implique seulement que la demande de regroupement familial de M. A...soit réexaminée par le préfet du Val-de-Marne ; qu'il y a lieu de prescrire ce réexamen dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
5. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros que demande M. A...en remboursement des frais qu'il a exposés ;
DÉCIDE
Article 1er : Le jugement n° 1207285 du 10 avril 2014 du Tribunal administratif de Melun, la décision du 10 mai 2012 du préfet du Val-de-Marne et la décision implicite par laquelle celui-ci a rejeté le recours gracieux formé par M. A...contre la décision du 10 mai 2012, sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Val-de-Marne de réexaminer la demande de regroupement familial de M. A...dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à M. A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et au préfet du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 17 avril 2015, à laquelle siégeaient :
Mme Monchambert, président de chambre,
M. Dalle, président assesseur,
Mme Versol, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 30 avril 2015.
Le rapporteur,
D. DALLELe président,
S. MONCHAMBERTLe greffier,
C. MONGIS La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14PA02571