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06/02/2015 | FRANCE | N°14PA01684

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 06 février 2015, 14PA01684


Vu la requête, enregistrée le 11 avril 2014, présentée pour la société Generali Belgium, dont le siège est 7 boulevard Haussmann à Paris (75009), par la SCP Touraut et Associés ; la société Generali Belgium demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 1301742/8 du 12 février 2014 du Tribunal administratif de Melun en tant que celui-ci a limité à la somme de 6 856 euros, la condamnation de la commune de Trilport à son profit et de confirmer le surplus ;

2°) de condamner la commune de Trilport à lui verser la somme de 33 384 euros, assortie des intérêts

au taux légal à compter du 24 septembre 2012, capitalisés année par année à compt...

Vu la requête, enregistrée le 11 avril 2014, présentée pour la société Generali Belgium, dont le siège est 7 boulevard Haussmann à Paris (75009), par la SCP Touraut et Associés ; la société Generali Belgium demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 1301742/8 du 12 février 2014 du Tribunal administratif de Melun en tant que celui-ci a limité à la somme de 6 856 euros, la condamnation de la commune de Trilport à son profit et de confirmer le surplus ;

2°) de condamner la commune de Trilport à lui verser la somme de 33 384 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 24 septembre 2012, capitalisés année par année à compter du 24 décembre 2013, en application des dispositions de l'article 1154 du code civil ;

3°) de condamner la commune de Trilport à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- en écartant la subrogation de la société Generali Belgium dans les droits de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Seine-et-Marne au motif qu'elle ne répondait pas aux conditions requises par l'article 1250 du code civil, la quittance subrogative ayant été établie postérieurement au règlement, le tribunal a soulevé un moyen d'office sans en informer les parties, en méconnaissance de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;

- il ressort des termes du Protocole d'accord assureurs/organismes sociaux (PAOS) que le subrogeant, en l'espèce la CPAM, a manifesté sa volonté de subroger son cocontractant, la société Generali Belgium à l'instant même du règlement de la créance, en conformité avec les termes de l'article 1250 1° du code civil, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal ;

- la société Generali Belgium est bien subrogée dans les droits de la CPAM de Seine-et-Marne à hauteur de ce qu'elle lui a réglé, soit la somme de 11 780,42 euros ;

- l'absence de signalisation du terre-plein central situé sur la RD 603 rue du Maréchal Joffre caractérise un défaut d'entretien normal de l'ouvrage public qui engage la responsabilité de la commune de Trilport dans l'accident survenu le 2 février 2008, ainsi qu'une faute dans l'exercice des pouvoirs de police de son maire qui ne rapporte pas la preuve contraire aux témoignages produits ;

- c'est à tort que le tribunal a retenu la faute de la victime dans la survenance de l'accident alors que le Tribunal de grande instance de Meaux a, dans son jugement du 19 janvier 2010, écarté cette faute et qu'aucun élément ne vient établir sa connaissance des lieux et le caractère excessif de la vitesse de la moto, que le terre-plein non signalé a été cause de nombreux accidents, qu'enfin, il n'est pas établi que l'éclairage public fonctionnait à l'heure de l'accident ;

- la perte de contrôle du véhicule a été consécutive au heurt du terre-plein et non l'inverse ;

- l'attestation du directeur des services techniques de la commune selon laquelle M. A... aurait reconnu son imprudence, ne revêt pas les formes légales et a été établie le 1er juillet 2013, soit plus de cinq ans après les faits, sans être corroborée par aucun autre élément de preuve ;

- la responsabilité de la commune de Trilport est exclusive ;

- la société Generali Belgium reprend ses conclusions de première instance en ce qui concerne l'évaluation du préjudice ;

- l'assistance d'une tierce personne pour MmeA..., dont la nécessité a été reconnue par le Tribunal de grande instance (TGI) de Meaux est évaluée à 3 216 euros ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a ramené l'évaluation des souffrances endurées par Mme A...à 4 000 euros et celle du préjudice esthétique à 1 200 euros, alors que le TGI les avait estimés à 29 348,42 euros ;

- l'aide humaine nécessaire à M. A... doit être évaluée à la somme de 910 euros ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a ramené l'évaluation des souffrances endurées par M. A..., estimées à 3,5/7 par l'expert, à 3 500 euros alors que le TGI l'avait estimée à 5 300 euros ;

- l'incidence professionnelle de l'accident pour M. A... qui ne peut plus porter de charges lourdes est établie et est évaluée par le TGI à 5 000 euros ;

- la société Generali Belgium renonce à réclamer le remboursement des 3 221 euros réglés à M. A... au titre de son préjudice matériel ;

- les sommes réglées par la société Generali Belgium et pour lesquelles elle bénéficie d'une action subrogatoire à l'encontre de la commune de Trilport s'élèvent à 33 383,74 euros (soit 19 029,98 euros pour les époux A...et 2 073,34 euros pour M. C... réglés à la société Covea Fleet, 11 780,42 euros à la CPAM de Seine-et-Marne et 500 euros à Mme A...à titre de provision) ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 octobre 2014, présenté pour la commune de Trilport par Me Moreau qui conclut au rejet de la requête et à la confirmation du jugement entrepris, sauf en ce qu'il a considéré que les frais et dépens liés à l'instance judiciaire faisaient partie des préjudices indemnisables, ainsi qu'à la condamnation de la société Generali Belgium à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le moyen tiré de ce que l'invocation de l'article 1250 du code civil constituerait un moyen d'ordre public soulevé d'office par les juges sans le soumettre préalablement au contradictoire des parties est infondé, dès lors que le tribunal a informé ces dernières le 6 janvier 2014 de ce qu'il était susceptible de fonder sa décision sur la circonstance que la requérante ne justifiait pas être régulièrement subrogée dans les droits de la CPAM de Seine-et-Marne, moyen portant à la fois sur la preuve de l'existence d'une subrogation régulière et sur la preuve du versement de la somme ;

- la jurisprudence invoquée par la société requérante au soutien de sa thèse que la subrogation pourrait être établie par un document antérieur au paiement est contredite par une jurisprudence plus récente de la Cour de Cassation du 8 février 2006 qui rappelle les exigences de l'article 1250 1° du code civil sont que la subrogation est concomitante au paiement ;

- c'est donc à bon droit que le tribunal a considéré que les dispositions de l'article 1250 1° du code civil avaient été méconnues et qu'en conséquence la requérante n'était pas subrogée dans les droits de la CPAM pour la somme de 11 780,42 euros ;

- si le jugement a retenu un défaut d'entretien normal dans l'absence de signalisation du rond-point, la commune rappelle que la voie était éclairée et la victime a commis de graves imprudences qui sont la cause déterminante de l'accident ;

- une conduite en moto, de nuit et en hiver en agglomération, avec un passager suppose une attention accrue de la part du conducteur ;

- M.A..., qui empruntait régulièrement l'avenue de Verdun, connaissait les lieux ;

- la décision du juge civil n'a à cet égard aucune autorité de la chose jugée à l'égard de la personne publique qui n'était pas partie à l'instance, ni à l'égard du juge administratif ;

- l'attestation de reconnaissance par la victime de sa responsabilité n'est pas une preuve à soi-même mais la retranscription de ses déclarations ;

- la faute de la victime est caractérisée par la configuration des lieux d'où il apparaît que le choc avec l'îlot central n'est possible qu'en cas de franchissement d'une ligne blanche continue ;

- la main courante produite par la requérante indique une perte de contrôle du véhicule et donc un défaut de maîtrise de ce dernier ;

- elle n'entend pas revenir sur l'indemnisation des préjudices retenue par le tribunal administratif dont elle adopte les motifs, à l'exception de la mise à sa charge de 3 500 euros au titre des frais et dépens de l'instance judiciaire dès lors que la requérante n'était pas partie à l'instance et que ce préjudice mis à la charge de la société Covea Fleet n'était ni personnel ni direct ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 17 novembre 2014, présenté pour la société Generali Belgium par la SCP Touraut et Associés qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre que :

- la proximité de la commune de Germigny-l'Evêque où résident les époux A...avec la commune de Trilport ne peut suffire à établir qu'ils connaissaient les lieux et empruntaient la D 603 comme le soutient la commune ;

- c'est à bon droit que le jugement attaqué a mis à la charge de la commune de Trilport les frais et dépens de l'instance liés à l'instance devant le juge judiciaire qui sont au nombre des préjudices dont l'exposante subrogée dans les droits de la société Covea Fleet, elle-même subrogée dans les droits des épouxA..., peut obtenir réparation devant le juge administratif ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 26 janvier 2015, présentée pour la commune de Trilport par Me Moreau ;

Vu le code civil ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code des assurances ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation ;

Vu le règlement d'application du protocole d'accord conclu le 24 mai 1983 entre les organismes représentatifs des entreprises d'assurance et les caisses nationales d'assurance maladie ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 janvier 2015 :

- le rapport de Mme Julliard, première conseillère,

- les conclusions de M. Roussel, rapporteur public,

- et les observations de Me Moreau, avocat de la commune de Trilport ;

1. Considérant que M. et Mme A... ont été victimes d'un accident de la circulation le 2 février 2008 vers 19 heures 30, alors qu'ils circulaient en moto sur la rue du Maréchal Joffre à Trilport (Seine-et-Marne) ; qu'ils ont heurté un terre-plein séparant les voies de circulation de cette rue, leur moto ayant percuté un véhicule arrivant en sens inverse sur la voie opposée à leur sens de circulation ; que par un jugement du 23 août 2011 rendu après expertise médicale, le Tribunal de grande instance de Meaux a fixé à 29 348,42 euros le préjudice subi par Mme A... et à 23 879,79 euros le préjudice subi par M. A..., et condamné la société Covea Fleet, assureur du conducteur du véhicule impliqué dans l'accident, à indemniser M. et MmeA... ; que par une requête enregistrée le 7 mars 2013 au Tribunal administratif de Melun, la société Generali Belgium, assureur de M. A...et subrogée dans les droits de son épouse en sa qualité d'ayant-droit de M. A..., ainsi que dans les droits de la société Covea Fleet, contre les tiers responsables du dommage, a recherché la responsabilité de la commune de Trilport dans la survenue de l'accident, en invoquant le défaut d'entretien de la voirie, ainsi que la carence dans l'exercice de ses pouvoirs de police par le maire de la commune et demandé la condamnation de la commune de Trilport à lui verser une somme de 36 603,76 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 22 décembre 2012 et de la capitalisation de ces intérêts ; que la société Generali Belgium relève appel du jugement du 12 février 2014 du Tribunal administratif de Melun en tant que celui-ci, tout en retenant un défaut de signalisation du terre-plein constitutif d'un défaut d'entretien normal engageant la responsabilité de la commune à l'égard des époux A...et du conducteur du véhicule, a rejeté la demande de subrogation de la société Generali Belgium dans les droits de la CPAM de Seine-et-Marne et a limité à la somme de 6 856 euros, la condamnation de la commune de Trilport à son profit, la faute du conducteur de la moto laissant à sa charge les trois-quarts des conséquences dommageables de l'accident ; que par un mémoire d'appel incident, la commune de Trilport conclut à la confirmation du jugement entrepris, sauf en ce qu'il a considéré que les frais et dépens liés à l'instance judiciaire faisaient partie des préjudices indemnisables ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 611-7 du code de justice administrative : " Lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement (...) en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu'y fasse obstacle la clôture éventuelle de l'instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué " ;

3. Considérant que la société Generali Belgium soutient qu'en écartant sa demande de subrogation dans les droits de la CPAM de Seine-et-Marne au motif que la quittance subrogative produite ne répondait pas aux conditions requises par l'article 1250 du code civil, le tribunal a soulevé un moyen d'office sans en informer les parties, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ; qu'il résulte, toutefois, de l'instruction que le tribunal a informé les parties le 6 janvier 2014 que le jugement était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité partielle de la requête, notamment en tant qu'elle sollicitait la condamnation de la commune de Trilport au remboursement de la somme de 11 780,42 euros versée par l'appelante à la CPAM de Seine-et-Marne, faute de subrogation et faute de preuve du versement de cette somme, et qu'en réponse, la société Generali Belgium a produit un mémoire et des pièces justificatives enregistrées les 14 et 16 janvier 2014 au greffe du tribunal et communiqués aux autres parties à l'instance ; que ce faisant, le tribunal a implicitement, mais nécessairement, entendu que cette subrogation soit conforme aux exigences légales, en particulier celles résultant de l'article 1250 du code civil ; que par suite, la société Generali Belgium n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait irrégulier faute pour le tribunal d'avoir invité les parties à présenter leurs observations sur le moyen relevé d'office et sur lequel elle s'est fondé pour rejeter une partie de ses conclusions ;

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de la société Generali Belgium de subrogation dans les droits de la CPAM de Seine-et-Marne :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 1249 du code civil : " La subrogation dans les droits du créancier au profit d'une tierce personne qui le paie est ou conventionnelle ou légale. " ; qu'aux termes de l'article 1250 du même code : " Cette subrogation est conventionnelle : / 1° Lorsque le créancier recevant son paiement d'une tierce personne la subroge dans ses droits, actions, privilèges ou hypothèques contre le débiteur : cette subrogation doit être expresse et faite en même temps que le paiement. (...) " ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale relatif aux recours des caisses contre les tiers et de l'article L. 454-1 du même code relatif aux fautes des tiers lors des accidents survenus sur le territoire métropolitain : " Hors le cas où la caisse est appelée en déclaration de jugement commun conformément aux dispositions ci-après, la demande de la caisse vis-à-vis du tiers responsable s'exerce en priorité à titre amiable. Une convention signée par la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, la Caisse nationale du régime social des indépendants et la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole avec les organisations représentatives des assureurs peut définir les modalités de mise en oeuvre de cette procédure. " ;

6. Considérant que la société Generali Belgium soutient que c'est à tort que le tribunal administratif a écarté la quittance subrogative datée du 16 janvier 2014 de la CPAM de Seine-et-Marne et relative au préjudice subi par Mme A..., au motif qu'elle avait été établie postérieurement au règlement de la somme de 11 780,42 euros effectué en deux versements de juin 2009 et février 2011, et qu'elle ne répondrait ainsi pas aux conditions requises par l'article 1250 du code civil, qui exige que la subrogation soit expresse et concomitante au paiement ; qu'elle se prévaut devant la Cour du paragraphe C 2.1. du règlement d'application du protocole d'accord conclu le 24 mai 1983 entre les organismes représentatifs des entreprises d'assurance et les trois caisses nationales d'assurance maladie, qui organise le recouvrement des créances des organismes sociaux auprès des entreprises d'assurances à la suite d'accidents causés par des véhicules terrestres à moteur et des bicyclettes, aux termes duquel : " l'assureur gestionnaire est l'assureur chargé vis-à-vis de la caisse de l'application du protocole pour compte de qui il appartiendra " ; qu'il résulte, en effet, de cette convention à laquelle les articles précités du code de la sécurité sociale ont conféré un fondement légal et dont les dispositions sont invocables dans le présent litige, que le remboursement par les assureurs des dépenses des caisses a pour effet de les subroger dans les droits de ces dernières ; qu'ainsi, comme le soutient la société Generali Belgium, il peut être déduit de ces normes contractuelles à caractère général, élaborées et entérinées par les représentants des assureurs et les organismes sociaux, la volonté de la CPAM de Seine-et-Marne de la subroger dans ses droits, confirmée au demeurant par l'absence de recours de cette caisse dans le présent litige, et que ne fait que traduire la signature ultérieure de la quittance subrogative précitée ; qu'il en résulte que la société Generali Belgium est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a écarté la subrogation de la société Generali Belgium dans les droits de la CPAM de Seine-et-Marne et rejeté ses conclusions tendant au remboursement de la somme de 11 780,42 euros qu'elle établit avoir versé à cette caisse dans les droits de laquelle elle se trouve subrogée ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'annuler le jugement en tant qu'il a rejeté lesdites conclusions ;

En ce qui concerne la responsabilité de l'accident :

7. Considérant que la société Generali Belgium soutient que c'est à tort que le tribunal a retenu la faute de la victime dans la survenance de l'accident alors que le Tribunal de grande instance de Meaux a, dans son jugement du 19 janvier 2010, écarté cette faute et qu'aucun élément ne vient établir ni sa connaissance des lieux, ni le caractère excessif de la vitesse de la moto alors que le terre-plein non signalé a été cause de nombreux accidents, qu'il n'est pas établi que l'éclairage public fonctionnait à l'heure de l'accident, que la perte de contrôle du véhicule a été consécutive au heurt du terre-plein et non l'inverse et qu'enfin, l'attestation du directeur des services techniques de la commune selon laquelle M. A... aurait reconnu son imprudence, ne revêt pas les formes légales et a été établie le 1er juillet 2013, soit plus de cinq ans après les faits, sans être corroborée par aucun autre élément de preuve ;

8. Considérant, toutefois, que s'il est constant que le terre-plein central que la moto de M. A... a heurté ne disposait pas le soir de l'accident d'une signalisation adéquate et avait été à l'origine d'autres accidents de la circulation et que ce défaut de signalisation constitue un défaut d'entretien normal susceptible d'engager la responsabilité de la commune à l'égard des usagers de la voirie, il résulte de l'instruction que l'accident s'est produit alors que le conducteur de la moto, pour doubler deux files de voitures, roulait à l'extérieur des voies réservées aux véhicules circulant dans le même sens, alors qu'il faisait nuit et qu'il transportait une passagère ; que, par suite, c'est à juste titre que le tribunal a considéré qu'il avait commis une imprudence suffisamment grave pour engager sa responsabilité à hauteur des trois-quarts des conséquences dommageables de l'accident ;

En ce qui concerne l'évaluation des préjudices :

En ce qui concerne l'évaluation contestée par la société Generali Belgium des préjudices de MmeA... :

9. Considérant que la société Generali Belgium soutient que c'est à tort que le tribunal administratif a ramené l'évaluation des souffrances endurées par Mme A...à 4 000 euros et celle de son préjudice esthétique à 1 200 euros, alors que le Tribunal de grande instance de Meaux les avait estimés à 29 348,42 euros ; qu'il résulte de l'instruction que l'expert a évalué les souffrances endurées par Mme A...à hauteur de 3,5 sur une échelle de 1 à 7 et son préjudice esthétique à hauteur de 1,5 sur une échelle de 1 à 7 ; que par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif, qui n'est pas lié par l'évaluation des préjudices à laquelle procède le juge judiciaire, a évalué l'indemnisation des souffrances endurées et le préjudice esthétique de Mme A... aux sommes respectives de 4 000 et 1 200 euros ;

En ce qui concerne l'évaluation contestée par la société Generali Belgium des préjudices de M.A... :

10. Considérant que si la société Generali Belgium soutient que l'aide humaine nécessaire à M. A... doit être évaluée à la somme de 910 euros, elle ne conteste pas que les périodes pendant lesquelles l'intéressé a éprouvé des difficultés pour accomplir les actes de la vie courante sont incluses dans les périodes au titre desquelles Mme A... a obtenu une indemnisation pour une assistance par une tierce personne ; que l'appelante n'indique en particulier pas en quoi cette aide principalement destinée aux soins à donner à l'enfant du couple, comme cela résulte notamment du rapport d'expertise médicale du 4 mai 2010 du docteur Piedlièvre désigné par le Tribunal de grande instance de Meaux, ne serait pas commune à M. et MmeA... ; que, par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif a estimé qu'il n'y avait pas lieu de lui accorder d'indemnisation distincte et a rejeté la demande présentée à ce titre ;

11. Considérant que la société Generali Belgium soutient que l'incidence professionnelle de l'accident pour M.A..., qui exerce la profession de livreur-magasinier et ne peut plus porter de charges lourdes, est établie et a été évaluée par le Tribunal de grande instance de Meaux à 5 000 euros ; que toutefois, il résulte du jugement du 23 août 2011 de ce Tribunal que l'expert n'a retenu aucune incidence professionnelle et que le déficit fonctionnel permanent de 3% dont M. A... reste atteint et consistant en un déficit modéré de la force musculaire de préhension de la main gauche, a été indemnisé par la somme de 3 000 euros ; que c'est dès lors à bon droit que le tribunal administratif a rejeté la demande présentée à ce titre ;

12. Considérant que la société Generali Belgium conteste l'indemnisation allouée par le tribunal administratif au titre des souffrances endurées par M. A..., estimées à 3,5 sur une échelle de 1 à 7 par l'expert ; que toutefois, les premier juges n'ont pas fait une inexacte appréciation de ce chef de préjudice en l'évaluant à 3 500 euros, nonobstant la circonstance que le Tribunal de grande instance de Meaux l'avait, dans son jugement précité, estimé à 5 300 euros ;

En ce qui concerne la prise en compte des frais de l'instance judicaire dans les préjudices contestée par la commune de Trilport :

13. Considérant que le jugement attaqué a mis à la charge de la commune de Trilport, à proportion de la part de responsabilité qui lui a été reconnue dans la survenue du dommage, les frais de procédure de l'instance engagée par la société Covea Fleet devant le Tribunal de grande instance de Meaux d'un montant total de 7 840,74 euros correspondant à la somme de 3 500 euros, mise à la charge de la partie perdante, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, par le tribunal dans son jugement du 23 août 2011, et aux sommes de 2 690,68 euros et 1 650,06 euros d'honoraires d'avocat et de frais d'expertise et d'assistance à expertise ; que la commune de Trilport conteste la mise à sa charge des frais et dépens de l'instance judiciaire d'un montant de 3 500 euros, supportés par la société Covea Fleet en tant que partie perdante, dès lors que la société appelante n'était pas partie à l'instance et que ce préjudice n'était ni personnel ni direct ;

14. Considérant que les frais et dépens qu'a définitivement supportés une personne en raison d'une instance judiciaire dans laquelle elle était partie, sont au nombre des préjudices dont elle peut obtenir réparation devant le juge administratif de la part de l'auteur du dommage, sauf dans le cas où ces frais et dépens sont supportés en raison d'une procédure qui n'a pas de lien de causalité directe avec le fait de cet auteur ; qu'il résulte de l'instruction que si les frais d'expertise exposés par la société Covea Fleet devant le Tribunal de grande instance de Meaux présentent un lien direct avec le fait de la commune, il en va différemment des frais et dépens de l'instance judiciaire dès lors que cette procédure engagée à l'initiative de la société Covea Fleet, qui refusait à tort l'indemnisation des épouxA..., ne constituait nullement un préalable à la saisine du juge administratif ; que par suite la commune de Trilport est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont considéré que ces frais et dépens devaient être compris dans le préjudice dont la société Generali Belgium lui demande réparation ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et dès lors que les parties ne contestent aucune autre disposition du jugement du 12 février 2014 du Tribunal administratif de Melun, que la société Generali Belgium est seulement fondée à demander le remboursement du quart de la somme de 11 780,42 euros qu'elle a versée à la CPAM de Seine-et-Marne, soit 2 945,10 euros et que la commune de Trilport est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont mis à sa charge le quart de la somme de 3 500 euros correspondant aux frais et dépens judiciaires, soit 875 euros ; que, par suite, la somme de 6 856 euros que la commune de Trilport a été condamnée à verser à la société Generali Belgium doit être augmentée de la différence entre ces deux sommes, soit 2 070,10 euros et portée à la somme de 8 926,10 euros ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter les conclusions des parties présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme que la commune de Trilport a été condamnée à verser à la société Generali Belgium doit être portée à la somme de 8 926,10 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 24 décembre 2012, capitalisés année par année à compter du 24 décembre 2013.

Article 2 : Le jugement n° 1301742/8 du 12 février 2014 du Tribunal administratif de Melun est annulé en tant qu'il a écarté la subrogation de la société Generali Belgium dans les droits de la CPAM de Seine-et-Marne et réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Generali Belgium, à la commune de Trilport et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-et-Marne.

Délibéré après l'audience du 22 janvier 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bouleau, premier vice-président,

- M. Polizzi, président assesseur,

- Mme Julliard, première conseillère,

Lu en audience publique, le 6 février 2015.

La rapporteure,

M. JULLIARDLe président,

M. BOULEAU

Le greffier,

M. B...

La République mande et ordonne au préfet de Seine-et-Marne en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 10PA03855

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N° 14PA01684


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA01684
Date de la décision : 06/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Marianne JULLIARD
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : SCP TOURAUT et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 22/09/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-02-06;14pa01684 ?
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