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01/07/2014 | FRANCE | N°13PA03898

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 01 juillet 2014, 13PA03898


Vu la requête, enregistrée le 25 octobre 2013, présentée pour la société anonyme Electricité de Tahiti (EDT), dont le siège social est sis Faa'a Route de Puurai à Tahiti BP 8021 à Puurai Commune de Faa'a (98703), représentée par son président-directeur général en exercice, M. A...C..., par la SELARL Jurispol, avocats ; la société Electricité de Tahiti (EDT) demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300069 du 3 juillet 2013 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie Française, à la demande de M. D... B..., a annulé, à compter du 1er octobre 201

3, la dernière phrase : " - pour le solaire : 1/r = 1 " figurant à la dernière ...

Vu la requête, enregistrée le 25 octobre 2013, présentée pour la société anonyme Electricité de Tahiti (EDT), dont le siège social est sis Faa'a Route de Puurai à Tahiti BP 8021 à Puurai Commune de Faa'a (98703), représentée par son président-directeur général en exercice, M. A...C..., par la SELARL Jurispol, avocats ; la société Electricité de Tahiti (EDT) demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300069 du 3 juillet 2013 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie Française, à la demande de M. D... B..., a annulé, à compter du 1er octobre 2013, la dernière phrase : " - pour le solaire : 1/r = 1 " figurant à la dernière ligne du deuxième alinéa du 4.1.2 de l'article 1er, l'article 3 et l'article 6 de la convention n° 1455 du 16 mars 2012 portant avenant n° 16 à la convention du 27 septembre 1960 relative à la concession de distribution publique d'énergie électrique de Tahiti, conclue entre la Polynésie française et la SA Electricité de Tahiti ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. D... B...devant le Tribunal administratif de la Polynésie française tendant à l'annulation de ladite convention ;

3°) de mettre à la charge de M. D... B...le versement de la somme de 330 000 FCP sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 juin 2014 :

- le rapport de M. Romnicianu, premier conseiller,

- les conclusions de M. Ladreyt, rapporteur public ;

1. Considérant que, par une convention conclue le 27 septembre 1960, le Territoire de la Polynésie française a concédé la distribution de l'énergie électrique de Tahiti à la société anonyme Electricité de Tahiti (EDT) qui fournit, sur un périmètre d'environ 29 communes, la totalité de l'électricité sur la base de tarifs réglementés ; que, par une convention n° 1455 du 16 mars 2012 portant avenant n° 16 à ladite concession, le Territoire et la société EDT sont convenus d'une nouvelle formule tarifaire, incluant notamment un nouveau " prix de référence " de l'électricité ; que, par le jugement attaqué en date du 3 juillet 2013, le Tribunal administratif de la Polynésie française, à la demande d'un usager du service public, M. D...B..., a annulé, à compter du 1er octobre 2013, certaines clauses tarifaires de l'avenant n° 16, à savoir la dernière phrase : " - pour le solaire : 1/r = 1 " figurant à la dernière ligne du deuxième alinéa du 4.1.2 de l'article 1er, l'article 3 et l'article 6 ; que la société EDT interjette régulièrement appel de ce jugement ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance :

2. Considérant, d'une part, que M. B... se prévalait de sa qualité, non contestée, d'usager du service public de la distribution d'énergie électrique à Tahiti ; que la circonstance, à la supposer établie, que les tarifs résultant de l'avenant attaqué seraient moins élevés, pour la catégorie d'usagers à laquelle il appartient, que ceux antérieurement en vigueur, n'est pas de nature à le faire regarder comme étant dépourvu d'intérêt à demander l'annulation des stipulations de l'avenant fixant des tarifs qu'il estime excessifs ; qu'en outre, la qualité de fonctionnaire du territoire de la Polynésie française, amené à participer, dans l'exercice de ses fonctions, à la préparation de l'avenant litigieux, de M. B... était sans incidence sur l'intérêt à agir de l'intéressé ;

3. Considérant, d'autre part, qu'une personne tierce à un contrat administratif est recevable à demander, par la voie du recours pour excès de pouvoir, l'annulation des dispositions réglementaires contenues dans ce contrat ; qu'en outre, ces clauses réglementaires sont, par nature, divisibles des autres stipulations du contrat ; que si M. B... concluait à l'annulation de l'avenant susmentionné, il soulevait une contestation relative aux seules conditions d'évolution des tarifs de la distribution d'électricité dont il critiquait les modalités de calcul ; que, par suite, cette demande pouvait aisément être regardée comme tendant à l'annulation des clauses de nature réglementaire, et donc divisibles, fixant ces tarifs ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société EDT n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de la Polynésie française a estimé recevable la demande présentée par M.B... ;

En ce qui concerne la légalité des clauses réglementaires annulées de l'avenant n° 16 :

5. Considérant que les tarifs des services publics à caractère industriel et commercial, qui servent de base à la détermination des redevances demandées aux usagers en vue de couvrir les charges du service, doivent trouver leur contrepartie directe dans la prestation fournie par le service ou, le cas échéant, dans l'utilisation d'un ouvrage public et, par conséquent, doit correspondre à la valeur de la prestation ou du service ; que, si l'objet du paiement que l'administration peut réclamer à ce titre est en principe de couvrir les charges du service public, il n'en résulte pas nécessairement que le montant de la redevance ne puisse excéder le coût de la prestation fournie ; qu'il s'ensuit que le respect de la règle d'équivalence entre le tarif d'une redevance et la valeur de la prestation ou du service peut être assuré non seulement en retenant le prix de revient de ce dernier, mais aussi, en fonction des caractéristiques du service, en tenant compte de la valeur économique de la prestation pour son bénéficiaire ; que, dans tous les cas, le tarif doit être établi selon des critères objectifs, rationnels et transparents, dans le respect du principe d'égalité entre les usagers du service public et des règles de la concurrence ;

6. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le prix de référence (P ref), retenu par l'avenant et servant à la fixation des différents tarifs de la distribution de l'électricité appliqués aux différentes catégories de consommateurs, est déterminé par l'application de formules qui surestiment, de façon substantielle, l'ensemble des coûts supportés par le gestionnaire du service, assurant ainsi à celui-ci une marge allant au-delà de la marge raisonnable à laquelle il pourrait prétendre ; qu'en particulier, les premiers juges ont à juste titre relevé que les modalités d'évaluation de l'élément " Autres Charges d'exploitation (ACE) ", servant au calcul de la formule dite " P ref = E + T + ACE ", où P ref est le prix de référence, E le coût de l'énergie, T le coût du transport et ACE le coût des autres charges d'exploitation, ne reposaient pas sur des éléments rationnels, objectifs et transparents ; qu'en effet, cet élément " ACE ", censé rendre compte, à titre seulement résiduel, des charges fixes autres que le coût du combustible et celui du transport, est déterminé à l'aide d'une formule faisant intervenir des indices généraux (prix à la consommation de produits et services divers à hauteur de 60 % et évolution du coût de la vie à hauteur de 40 %) qui ne sont pas spécifiques à l'activité du concessionnaire ; que si un facteur " L ", dit de " partage de la croissance " est appliqué pour compenser cette répercussion des évolutions de la consommation, il est lui-même déterminé en faisant appel à un indice " Cm " dont l'avenant fixe la valeur à 0,015 sans indiquer les éléments ayant servi à cette fixation et sans aucun paramétrage de nature à inciter le concessionnaire à garantir une maîtrise des coûts ; que, dans ces conditions, les modalités d'indexation de l'élément " ACE ", faute d'être représentatives de l'évolution typique des charges fixes d'un opérateur intégré, ne permettent pas de garantir l'adéquation entre le prix de référence et les coûts du concessionnaire, contrairement aux exigences jurisprudentielles sus-rappelées ;

7. Considérant, en second lieu, que, en ce qui concerne l'électricité d'origine solaire, si l'obligation de rachat de la production des installations photovoltaïques à un prix imposé constitue une charge pour la SA EDT, et si cette charge doit être répercutée dans les tarifs, elle est également de nature à éviter des charges d'exploitation qui seraient liées à une production équivalente par des moyens conventionnels, ainsi que des coûts fixes, directs et indirects, de production et de réseau ; que, dans ces conditions, le tribunal administratif a pu, à juste titre, relever que ces " charges évitées " n'étaient pas prises en compte dans la nouvelle formule tarifaire ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le Tribunal administratif de la Polynésie française a pu à bon droit estimer que les clauses réglementaires de l'avenant contesté relatives à la fixation du prix de référence, s'agissant, d'une part, des modalités d'évaluation des " Autres Charges d'Exploitation " (ACE) et, d'autre part, de la prise en compte des charges d'exploitation " évitées " liées à une production équivalente à la production d'énergie solaire par des moyens conventionnels, étaient entachées d'illégalité faute de reposer sur des éléments rationnels, objectifs et transparents ; qu'il s'ensuit que la société EDT n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie Française a annulé, à compter du 1er octobre 2013, la dernière phrase : " - pour le solaire : 1/r = 1 " figurant à la dernière ligne du deuxième alinéa du 4.1.2 de l'article 1er, l'article 3 et l'article 6 de la convention n° 1455 du 16 mars 2012, conclue entre la Polynésie française et la SA Electricité de Tahiti, portant avenant n° 16 à la convention du 27 septembre 1960 relative à la concession de distribution publique d'énergie électrique de Tahiti ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M.B..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la société Electricité de Tahiti demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la SA Electricité de Tahiti une somme de 1 500 euros à verser à M. B...sur le fondement des mêmes dispositions ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société Electricité de Tahiti est rejetée.

Article 2 : La société Electricité de Tahiti versera à M. D... B...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 13PA03898


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA03898
Date de la décision : 01/07/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MILLE
Rapporteur ?: M. Michel ROMNICIANU
Rapporteur public ?: M. LADREYT
Avocat(s) : ALLAIN-SACAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-07-01;13pa03898 ?
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