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19/06/2014 | FRANCE | N°13PA02837

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 19 juin 2014, 13PA02837


Vu la requête, enregistrée le 22 juillet 2013, présentée pour M. B...A..., demeurant..., par Me Garet, avocat ; M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler les articles 1er et 3 du jugement n° 1200348 du 6 juin 2013 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie en tant qu'il a pour partie rejeté sa demande tendant :

- à l'annulation de la décision du 21 septembre 2012 par laquelle le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande d'indemnisation ;

- à la condamnation du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie au versement de la somme d

e 18 677 136 francs CFP, en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du...

Vu la requête, enregistrée le 22 juillet 2013, présentée pour M. B...A..., demeurant..., par Me Garet, avocat ; M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler les articles 1er et 3 du jugement n° 1200348 du 6 juin 2013 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie en tant qu'il a pour partie rejeté sa demande tendant :

- à l'annulation de la décision du 21 septembre 2012 par laquelle le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande d'indemnisation ;

- à la condamnation du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie au versement de la somme de 18 677 136 francs CFP, en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait du refus de le réintégrer effectivement et de la perte de sa rémunération à compter du 1er juin 2011 ;

- à ce qu'il soit enjoint au président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie de le réintégrer en " position normale " ;

2°) d'annuler l'arrêté n° 2011-9702 du 1er décembre 2011 du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ;

3°) de condamner le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie à lui verser la somme de 183 786,76 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter de la décision du 21 septembre 2012 rejetant sa demande, en réparation des préjudices mentionnés ci-dessus ;

4°) d'enjoindre au président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie de reconstituer sa carrière depuis 1986, 1991 ou 2010, dans un délai de trois mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

...................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi organique n° 99-209 et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999, relatives à la Nouvelle-Calédonie, modifiées ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, modifiée ;

Vu l'arrêté n° 68-038/CG du 29 janvier 1968 fixant le régime de rémunération et le régime des prestations familiales applicables aux fonctionnaires des cadres territoriaux de la Nouvelle-Calédonie ;

Vu la délibération n° 418 du 26 novembre 2008 instituant un régime indemnitaire au profit des agents exerçant leurs fonctions au sein des services et institutions de la

Nouvelle-Calédonie ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juin 2014 :

- le rapport de M. Niollet, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Dhiver, rapporteur public ;

1. Considérant que M. B...A..., technicien du cadre territorial de l'économie rurale de la Nouvelle-Calédonie, a été placé en congé de longue durée du 1er octobre 1998 au 28 février 2003, puis en disponibilité d'office à compter du 1er octobre 2003 ; qu'il a été licencié pour inaptitude physique à compter du 1er octobre 2006 par un arrêté du 22 avril 2008 du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ; que cet arrêté a été annulé pour incompétence par un jugement du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie du 18 décembre 2008 ; qu'un nouvel arrêté du 5 août 2009 du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie le licenciant à compter du 1er octobre 2006 a été annulé pour erreur de droit par un jugement du même tribunal du 10 juin 2010 ; qu'une décision refusant implicitement de procéder à sa réintégration à la suite du jugement du 18 décembre 2008 a été annulée par un autre jugement de ce tribunal du 10 juin 2010 qui a également enjoint au président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie de le réintégrer juridiquement ; que, par un arrêté du 30 août 2010, le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a réintégré M. A...dans son cadre d'emploi à compter du 1er octobre 2006, en le plaçant en position d'activité ; que, par un nouvel arrêté du 30 septembre 2010, il l'a " maintenu par ordre dans l'attente de sa comparution prochaine devant la commission d'aptitude " en lui accordant son plein traitement ; que, le 10 mai 2011, il a décidé d'interrompre le versement de son traitement à compter du 1er juin 2011 en raison de son absence d'affectation ; que, par un arrêté du 1er décembre 2011, il l'a promu au 9ème échelon de son grade à compter du 15 mai 2011 ; que, par un courrier en date du 3 septembre 2012, M. A... a demandé au président du gouvernement de le placer " dans une situation régulière " et de l'indemniser des préjudices qu'il estimait avoir subis du fait de son absence d'affectation et de l'interruption du versement de son traitement ; que cette demande a été rejetée par une décision du 21 septembre 2012 ; que, par un jugement du 6 juin 2013, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, faisant droit à la demande de M.A..., a condamné le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie à lui verser la somme de 3 200 000 francs CFP (26 816 euros) en réparation du préjudice financier qu'il avait subi pendant vingt-quatre mois à partir du 1er juin 2011 ; que M. A...fait appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la décision du 21 septembre 2012, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que le surplus de sa demande d'indemnisation ; qu'il demande également à la Cour d'annuler l'arrêté du 1er décembre 2011 mentionné ci-dessus et d'enjoindre au président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie de reconstituer sa carrière ; que le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie demande à la Cour, par la voie de l'appel incident, de réduire le montant de l'indemnité accordée à M. A...par les premiers juges ;

Sur l'étendue du litige :

2. Considérant que, dans le dernier état de ses écritures, M. A...abandonne expressément ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er décembre 2011 et à la reconstitution de sa carrière ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Considérant qu'il résulte des termes de la demande de M. A...devant le tribunal administratif qu'il y contestait la compétence du signataire de la décision du 21 septembre 2012 par laquelle le président du gouvernement de la Nouvelle Calédonie avait rejeté sa demande tendant à être placé " dans une situation régulière " et à obtenir réparation des préjudices résultant de son absence d'affectation et de l'interruption du versement de son traitement ; que, dans son jugement, le tribunal administratif n'a, ainsi que le fait valoir M. A..., pas examiné ce moyen, qui n'était pas inopérant en ce qu'il était invoqué à l'encontre du rejet de sa demande tendant à être placé dans une situation régulière ; que le jugement attaqué, qui est ainsi entaché d'irrégularité, doit, dans cette mesure, être annulé ;

4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions à fin d'annulation de la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif, mentionnées ci-dessus ;

Sur la demande tendant à l'annulation de la décision du 21 septembre 2012 présentée par M. A...devant le tribunal administratif :

5. Considérant que, sous réserve de dispositions statutaires particulières, tout fonctionnaire en activité tient de son statut le droit de recevoir, dans un délai raisonnable, une affection correspondant à son grade ; qu'en maintenant depuis le 30 aout 2010 M. A...sans affectation effective alors qu'il lui appartenait, compte tenu de sa position d'activité, soit de lui proposer une affectation, soit, s'il l'estimait inapte aux fonctions correspondant à son grade, d'engager une procédure de licenciement, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a méconnu cette règle ; que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. A...est, par suite, fondé à demander l'annulation de la décision du 21 septembre 2012 rejetant sa demande tendant à être placé dans une situation régulière ;

Sur les conclusions de M. A...à fin d'indemnisation :

6. Considérant, en premier lieu, qu'en maintenant M. A...en activité mais sans affectation et sans traitement à partir du 1er juin 2011, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que, si le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie invoque la négligence de M.A..., qui n'a accompli, au cours de la période en litige, aucune diligence en vue de trouver une affectation correspondant à son grade, il résulte des termes de l'arrêté mentionné ci-dessus du 30 septembre 2010 que M. A...a été " maintenu par ordre " dans l'attente de la réunion de la commission d'aptitude, ce qui n'impliquait pas de recherche d'affectation de sa part ; que le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ne fait par ailleurs état d'aucun poste vacant auquel M. A...aurait pu se porter candidat par la suite ; que, dans ces conditions, il n'est pas fondé à demander à être exonéré pour moitié de sa responsabilité ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'en vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre ; que sont ainsi indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente, compte tenu de l'importance respective de cette illégalité et des fautes relevées à l'encontre de l'intéressé, un lien direct de causalité ; que, pour l'évaluation du montant de l'indemnité due, doit être prise en compte la perte du traitement ainsi que celle des primes et indemnités dont l'intéressé avait, pour la période en cause, une chance sérieuse de bénéficier, à l'exception de celles qui, eu égard à leur nature, à leur objet et aux conditions dans lesquelles elles sont versées, sont seulement destinées à compenser des frais, charges ou contraintes liés à l'exercice effectif des fonctions ; qu'enfin, il y a lieu de déduire, le cas échéant, le montant des rémunérations que l'agent a pu se procurer par son travail au cours de la période d'éviction ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que M. A...doit être indemnisé de la perte de son traitement d'un montant mensuel net non contesté par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie de 1 419 euros, pendant trente-et-un mois à partir du 1er juin 2011 ainsi qu'il le demande ;

10. Considérant qu'il ne ressort pas des termes de la délibération n° 418 du 26 novembre 2008, visée ci-dessus, que la prime catégorielle qu'elle a instituée aurait pour objet de compenser des frais, charges ou contraintes liés à l'exercice effectif des fonctions ; qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté par le gouvernement de la

Nouvelle-Calédonie que M. A...aurait eu, s'il avait reçu une affectation correspondant à son grade, une chance sérieuse d'en bénéficier ; qu'il y a donc lieu de tenir compte de cette prime d'un montant mensuel net de 186 euros pour évaluer le montant de l'indemnité due à M. A... ;

11. Considérant qu'il résulte des dispositions des articles 2 et 5 de l'arrêté n° 68-038/CG du 29 janvier 1968, visé ci-dessus, que l'indemnité de résidence et l'indexation qu'elles instituent ont pour objet de compenser des frais, charges ou contraintes liés à l'exercice effectif des fonctions et aux conditions locales d'existence ; qu'il n'y a donc pas lieu d'en tenir compte pour évaluer le montant de la somme due à M.A... ;

12. Considérant, enfin, que M. A...a produit devant la Cour une attestation établissant qu'il n'a pas bénéficié du revenu de solidarité active au cours de la période pour laquelle il demande à être indemnisé ; que le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ne fait état d'aucun autre revenu dont M. A...aurait pu bénéficier au titre de la même période et qu'il y aurait lieu de déduire du montant de l'indemnité à allouer à l'intéressé ;

13. Considérant, par ailleurs, que le requérant ne produit aucun élément de nature à établir la réalité du préjudice correspondant aux frais financiers qu'il soutient avoir dû exposer en raison de la perte de sa rémunération, et du préjudice professionnel qu'il prétend également avoir subis ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, compte tenu également du préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence dont M. A...a souffert, il sera fait une juste appréciation du préjudice total qu'il a subi, en lui accordant globalement la somme de 55 000 euros ;

15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...est seulement fondé à demander que l'indemnité que le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a été condamné à lui verser par le jugement attaqué soit portée à la somme totale de 55 000 euros, et à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a pour partie rejeté sa demande ;

Sur les conclusions de M. A...tendant au versement des intérêts :

16. Considérant que M. A...a droit aux intérêts au taux légal à compter du 6 septembre 2012, date de réception de sa demande par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ; que les intérêts afférents à l'indemnité correspondant aux traitements et aux primes des années 2012 et 2013 doivent toutefois courir à compter du 31 décembre de l'année à laquelle cette indemnité se rapporte ;

Sur les conclusions de M. A...à fin d'injonction :

17. Considérant qu'eu égard au motif d'annulation de la décision du 21 septembre 2012 ci-dessus retenu, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement que le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie propose à M. A...une affectation correspondant à son grade ; qu'il y a lieu, sans assortir cette injonction d'une astreinte, d'enjoindre à cette autorité de proposer au requérant une telle affectation dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur l'appel incident du gouvernement de Nouvelle-Calédonie :

18. Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, les conclusions du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions de M. A...tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

19. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Il est donné acte du désistement de M. A...de ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er décembre 2011 et à la reconstitution de sa carrière.

Article 2 : Le jugement n° 1200348 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie du 6 juin 2013 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de M. A...tendant à l'annulation de la décision du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie du 21 septembre 2012 rejetant sa demande tendant à être placé dans une situation régulière.

Article 3 : La décision du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie du 21 septembre 2012 rejetant la demande de M. A...tendant à être placé dans une situation régulière est annulée.

Article 4 : Il est enjoint au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie de proposer à M. A...une affectation correspondant à son grade dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 5 : Le montant de l'indemnité que le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a été condamné à verser à M. A...est porté à la somme totale de 55 000 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 6 septembre 2012. Les indemnités dues pour chacune des années 2012 et 2013 porteront intérêts au taux légal à compter du 31 décembre de l'année à laquelle elles se rapportent.

Article 6 : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie du 6 juin 2013 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 5 du présent arrêt.

Article 7 : Le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie versera à M. A...une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 8 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A...est rejeté.

Article 9 : Les conclusions d'appel incident du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie sont rejetées.

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N° 13PA02837

Classement CNIJ :

C


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA02837
Date de la décision : 19/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Affectation et mutation - Affectation.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : Mme COIFFET
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe NIOLLET
Rapporteur public ?: Mme DHIVER
Avocat(s) : GARET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-06-19;13pa02837 ?
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