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17/06/2014 | FRANCE | N°13PA02426

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 17 juin 2014, 13PA02426


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 juin et 30 août 2013, présentés pour Mme B...A..., demeurant au... ; Mme A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101470/5-2 du 21 février 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le ministre de l'économie sur sa demande indemnitaire du 17 septembre 2009 relative au préjudice subi du fait de son absence de titularisation, ainsi qu'à la condamnation de l'Etat à lui ve

rser une somme de 300 000 euros assortie des intérêts au taux légal et de...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 juin et 30 août 2013, présentés pour Mme B...A..., demeurant au... ; Mme A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101470/5-2 du 21 février 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le ministre de l'économie sur sa demande indemnitaire du 17 septembre 2009 relative au préjudice subi du fait de son absence de titularisation, ainsi qu'à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 300 000 euros assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, en réparation du préjudice résultant pour elle du retard pris pour l'adoption du décret permettant sa titularisation et des informations erronées qui lui ont été données ;

2°) de condamner l'État à lui verser une indemnité de 300 207,27 euros assortie des intérêts de droit à compter de la date de réception de sa demande préalable et de leur capitalisation ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi qu'une somme de 35 euros sur le fondement de l'article R. 761-1 du même code ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

Vu la loi n° 2001-2 du 3 janvier 2001 relative à la résorption de l'emploi précaire et à la modernisation du recrutement dans la fonction publique ;

Vu le décret n° 99-121 du 15 février fixant les conditions exceptionnelles d'intégration d'agents non titulaires du ministère de l'équipement, des transports et du logement dans des corps de fonctionnaires de catégorie A ;

Vu le décret n° 2001-835 du 12 septembre 2001 portant organisation de concours et examens professionnels réservés d'accès à certains corps de fonctionnaires de l'État des catégories A, B et C pris en application de l'article 1er de la loi 2001-2 susvisée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juin 2014 :

- le rapport de Mme Sanson, président assesseur,

- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,

- les observations de Me Komly, avocat de Mme A...;

1. Considérant que Mme A...a été recrutée par le ministère de l'équipement et du tourisme pour exercer à Londres les fonctions de secrétaire bilingue par un contrat de trois ans à compter du 1er janvier 1969, renouvelable par tacite reconduction ; que ce contrat a été régulièrement renouvelé jusqu'à son départ en retraite le 19 juin 2011 ; que, par lettre du 17 décembre 2009, elle a saisi le ministre de l'économie, désormais compétent aux lieu et place du ministre de l'équipement, d'une demande, restée sans réponse, tendant à la réparation du préjudice résultant pour elle du retard mis par l'État à adopter les décrets permettant sa titularisation; qu'elle a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande d'annulation de ce refus implicite, lequel, par un jugement en date du 21 février 2013 dont elle relève appel, a rejeté sa demande ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre :

2. Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles R. 811-5 et R. 421-7 du code de justice administrative que MmeA..., qui réside à Londres, bénéficiait d'un délai de distance de deux mois, s'ajoutant au délai de recours contentieux ; que sa requête enregistrée au greffe de la Cour le 21 juin 2013, soit moins de quatre mois après la notification du jugement du 21 février 2013, n'est pas tardive ;

Sur la régularité du jugement :

3. Considérant que le jugement attaqué, qui comporte les mentions prévues à l'article R. 741-2 du code de justice administrative n'est pas entaché d'irrégularité ;

Sur les conclusions indemnitaires :

4. Considérant que Mme A...soutient qu'elle avait vocation à bénéficier des dispositions de l'article 73 de la loi susvisée du 11 janvier 1984, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, aux termes desquelles : " Les agents non titulaires qui occupent un emploi présentant les caractéristiques définies à l'article 3 du titre Ier du statut général ont vocation à être titularisés, sur leur demande, dans des emplois de même nature qui sont vacants ou qui seront créés par les lois de finances (...) ", et qu'il appartenait à l'administration de prendre les décrets d'application de cet article dans un délai raisonnable ; qu'elle fait valoir sans être contredite que ce délai était dépassé à la date d'adoption des décrets permettant l'intégration des agents non titulaires du ministère de l'équipement dans des corps de catégorie A, B ou C ; qu'un tel retard constitue une faute engageant la responsabilité de l'État ;

5. Considérant toutefois, qu'il résulte des dispositions précitées que la titularisation ne peut être prononcée que sur demande de l'intéressé ; que Mme A...n'établit et ne soutient d'ailleurs pas avoir formulé une telle demande ; qu'ainsi, à supposer que le niveau des fonctions qu'elle exerçait alors lui donnait vocation à intégrer un corps de catégorie B ou C et non, comme l'a jugé le tribunal administratif, l'un des corps visés au décret du 15 février 1999 susvisé, le retard fautif de l'administration n'est pas directement à l'origine des préjudices dont Mme A... demande réparation ; qu'il suit de là qu'en constatant l'absence de lien de causalité entre la faute de l'État et les préjudices allégués, le tribunal administratif n'a pas fondé sa décision sur un motif erroné ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le ministre de l'équipement a ouvert en faveur de ses agents non titulaires, entre 2002 et 2005, les concours et examens prévus par le décret susvisé du 12 septembre 2001; que MmeA..., qui s'est présentée avec succès tant aux examens professionnels d'accès à des corps de catégorie C, qu'aux concours réservés pour l'accès aux corps de secrétaires administratifs et d'attachés d'administration des services déconcentrés du ministère, n'est pas fondée à soutenir que lesdits examens et concours seraient intervenus au-delà d'un délai raisonnable à compter de la publication de la loi du 3 janvier 2001 susceptible d'engager la responsabilité pour faute de l'État ;

7. Considérant toutefois qu'il ressort des termes de la circulaire du ministre de l'équipement et des transports en date du 20 mars 2003, relative à la mise en oeuvre du dispositif de résorption de l'emploi précaire dans les services ministériels, et de la notice explicative relative à la session de 2005 du concours réservé pour l'accès au corps des attachés des services déconcentrés dans le cadre du même dispositif qui ont été adressées à la requérante, qu'il était prévu d'affecter les candidats admis au concours sur le poste qu'ils occupaient précédemment ; que, par ailleurs, la lettre du 4 mars 2005 par laquelle le directeur du tourisme a invité Mme A..., affectée alors à Bruxelles, à lui faire savoir si elle entendait conserver le bénéfice du concours réservé d'accès au corps des secrétaires administratifs déconcentrés, précisait que l'intéressée pouvait choisir d'être titularisée sur son poste à l'étranger ou sur un poste des services déconcentrés du ministère ; que, sur la foi de ces documents, Mme A... a renoncé au bénéfice du concours de catégorie B dont elle était lauréate pour se présenter au concours d'attaché des services déconcentrés qu'elle a réussi; qu'elle a toutefois renoncé également au bénéfice de ce dernier concours en raison de l'impossibilité alléguée par l'administration de l'affecter sur son poste à l'étranger et après avoir vainement postulé à un emploi d'adjoint au directeur à la délégation du tourisme à Montpellier, dans son domaine de compétence ; qu'ainsi elle établit avoir reçu des informations erronées de la part de son administration quant aux suites qui seraient apportées à sa réussite aux concours réservés sans lesquelles elle n'aurait pas pris les mêmes décisions de carrière; que la communication de ces informations erronées constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l'administration à l'égard de la requérante ;

8. Considérant que Mme A...fait valoir, sans être contredite, avoir consenti un investissement important dans la préparation des concours réservés auxquels elle s'est présentée et dont elle a été lauréate ; qu'il sera fait une juste appréciation de son préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence résultant de cet investissement consenti en vain en condamnant l'administration à lui verser une indemnité de 5 000 euros tous intérêts confondus au jour du présent arrêt ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...est fondée, dans cette mesure, à demander la réformation du jugement du 21 février 2013 ;

Sur l'application des dispositions des articles L.761-1 et R.761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme A...et non compris dans les dépens, et le remboursement de la somme de 35 euros versé par la requérante lors de l'introduction de sa requête au titre de la contribution à l'aide juridique ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'Etat versera à Mme A...une indemnité de 5 000 euros tous intérêts confondus à la date du présent arrêt.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif en date du 21 février 2013 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt ;

Article 3 : L'Etat versera à Mme A...une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et une somme de 35 euros sur le fondement de l'article R. 761-1 du même code.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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N°13PA02426


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA02426
Date de la décision : 17/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-04-04 Fonctionnaires et agents publics. Changement de cadres, reclassements, intégrations. Intégration de personnels n'appartenant pas antérieurement à la fonction publique.


Composition du Tribunal
Président : Mme COËNT-BOCHARD
Rapporteur ?: Mme Michelle SANSON
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : SCP ARVIS et KOMLY-NALLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-06-17;13pa02426 ?
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