Vu la requête, enregistrée le 3 août 2011, présentée pour M. et Mme A...C..., demeurant..., par Me B... ; M. et Mme C... demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0917201 en date du 22 juin 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2005 et 2006, ainsi que des pénalités correspondantes ;
2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses, ainsi que des pénalités correspondantes ;
3°) de condamner l'Etat aux dépens de l'instance ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
.....................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 mai 2014 :
- le rapport de M. Lemaire, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Boissy, rapporteur public ;
1. Considérant que M. et Mme C... ont fait l'objet d'un examen contradictoire de situation fiscale personnelle à l'issue duquel ils ont été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2005 et 2006 ; que le service a notamment taxé d'office, en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, des sommes créditées tant en 2005 qu'en 2006 sur leurs comptes bancaires, dont ils n'avaient pas justifié de la nature, et ce, en dépit de la demande de justifications qui leur avait été adressée conformément à l'article L. 16 du même livre ; qu'ils relèvent appel du jugement en date du 22 juin 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;
Sur l'étendue du litige :
2. Considérant que, par une décision du 23 mai 2012, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur régional des finances publiques d'Île-de-France et du département de Paris a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à concurrence d'une somme totale de 22 520 euros, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme C... ont été assujettis au titre des années 2005 et 2006, ainsi que des pénalités correspondantes ; que les conclusions de la requête de M. et Mme C... sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur le surplus des conclusions de la requête :
En ce qui concerne le bien-fondé des rectifications relatives aux revenus d'origine indéterminée :
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition " ; qu'aux termes de l'article R. 193-1 du même livre : " Dans le cas prévu à l'article L. 193 le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré " ;
4. Considérant qu'en application des dispositions précitées, il appartient à M. et Mme C..., qui ont fait l'objet d'une procédure de taxation d'office en matière de revenus d'origine indéterminée, d'apporter la preuve de l'exagération des bases d'imposition correspondantes ;
5. Considérant que, si l'administration ne peut régulièrement taxer d'office, en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, les sommes dont elle n'ignore pas qu'elles relèvent d'une catégorie précise de revenus, elle peut en revanche procéder à cette taxation d'office si, au vu des renseignements dont elle disposait avant l'envoi de la demande de justifications fondée sur l'article L. 16 du livre des procédures fiscales et des réponses apportées par le contribuable à cette demande, la nature des sommes en cause, et donc la catégorie de revenus à laquelle elles seraient susceptibles de se rattacher, demeure inconnue ; qu'il est toutefois loisible au contribuable régulièrement taxé d'office sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales d'apporter devant le juge de l'impôt la preuve que ces sommes, soit ne constituent pas des revenus imposables, soit se rattachent à une catégorie précise de revenus ;
6. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment de la proposition de rectification du 23 septembre 2008, que le service vérificateur a regardé comme des revenus d'origine indéterminée des sommes versées par le frère de M. C..., pour un montant total de 4 200 euros en 2005 et pour un montant total de 2 000 euros en 2006, portées au crédit des comptes bancaires de M. et Mme C..., qui soutiennent qu'elles correspondent à un prêt d'origine familiale ; qu'il est toutefois constant que M. C... et son frère sont tous deux associés à parts égales de la société à responsabilité limitée Mina ; que les requérants, qui ne peuvent ainsi se prévaloir de la présomption d'existence d'un prêt familial en raison de la relation d'affaires liant M. C... à son frère, n'établissent pas le caractère non imposable des sommes en cause ;
7. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment de la proposition de rectification du 23 septembre 2008, que le service vérificateur a regardé comme des revenus d'origine indéterminée des sommes versées par les parents de M. C..., pour un montant total de 62 122, 46 euros en 2005, arrondi à la somme de 62 122 euros, et pour un montant total de 11 300 euros en 2006, portées au crédit des comptes bancaires de M. et Mme C..., qui soutiennent qu'elles correspondent à un prêt d'origine familiale ; que l'administration ne soutient pas que les requérants seraient en relation d'affaires avec les parents de M. C... ; que, par suite, M. et Mme C... sont fondés à demander la réduction à due concurrence des bases des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2005 et 2006, ainsi que des pénalités correspondantes ;
8. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment de la proposition de rectification du 23 septembre 2008, que le service vérificateur a regardé comme des revenus d'origine indéterminée des sommes correspondant à des chèques et à un virement provenant de la société à responsabilité limitée Mina, pour un montant total de 19 223, 18 euros en 2005, arrondi à la somme de 19 223 euros, et pour un montant total de 84 398, 70 euros en 2006, arrondi à la somme de 84 399 euros, portées au crédit des comptes bancaires de M. et Mme C... ; que les requérants, qui se bornent à faire valoir que la société Mina est une société dont les résultats étaient imposables à l'impôt sur le revenu, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, entre les mains de ses associés, dont M. C..., et à soutenir que les sommes litigieuses correspondent à de la trésorerie disponible appréhendée par celui-ci, n'établissent pas la nature de ces sommes et la catégorie de revenus à laquelle elles se rattacheraient ;
9. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment de la proposition de rectification du 23 septembre 2008, que le service vérificateur a regardé comme des revenus d'origine indéterminée une somme totale de 16 000 euros, portée au crédit des comptes bancaires de M. et Mme C..., correspondant à des virements réalisés par la société civile immobilièreC..., dont les requérants sont tous deux associés ; que si les requérants soutiennent que les sommes litigieuses correspondent à des remboursements d'avances en compte courant d'associé, il résulte de la proposition de rectification que les comptes courant d'associé des requérants ne comportaient aucun mouvement de débit ; que M. et Mme C... n'établissent ni la nature des sommes litigieuses, ni la catégorie de revenus à laquelle elles se rattacheraient ;
10. Considérant, en cinquième lieu, que M. et Mme C... contestent la taxation, au titre des revenus d'origine indéterminée, de crédits bancaires, pour un montant total de 201 342,50 euros en 2005, arrondi par le service vérificateur à la somme de 201 343 euros, et de 70 900 euros en 2006, dont ils soutiennent qu'ils proviennent de clients de la société Francilex, cabinet comptable dont ils sont salariés et dont Mme C... est également associée, et qu'ils correspondent à des " avances sur honoraires au titre de prestations de tenue de comptabilité " ; que, toutefois, en se bornant à se prévaloir d'une lettre du 22 mars 2010 par laquelle le procureur de la République du Tribunal de grande instance de Paris a adressé un rappel à la loi à M. C... en l'invitant " à l'avenir à respecter scrupuleusement le principe de séparation des patrimoines, s'agissant du patrimoine de votre société Francilex, du patrimoine de vos clients et de votre patrimoine personnel ", les requérants n'établissent ni la nature des sommes litigieuses, ni la catégorie de revenus à laquelle elles se rattacheraient ;
11. Considérant, en sixième lieu, que si M. et Mme C... soutiennent que la somme de 3 600 euros, portée le 17 février 2006 au crédit de leur compte bancaire, a déjà été imposée, ils ne l'établissent pas ; qu'ils n'établissent pas davantage qu'ainsi qu'ils le soutiennent, cette somme se rattacherait à la catégorie des traitements et salaires, alors, au demeurant, qu'il résulte de la proposition de rectification du 23 septembre 2008 qu'elle n'est pas mentionnée sur les fiches de paye établies par la société Francilex au nom de M. C..., bénéficiaire du chèque en cause ;
12. Considérant, en dernier lieu, qu'en se bornant à annoncer la production d'" attestations de prêts correspondant à certains crédits taxés d'office ", M. et Mme C... ne donnent aucune précision suffisante sur les crédits dont ils entendent ainsi contester la prise en compte au titre des revenus d'origine indéterminée ;
En ce qui concerne le bien-fondé des autres rectifications :
13. Considérant que les conclusions à fin de décharge présentées par M. et Mme C..., en tant qu'elles se rapportent aux autres chefs de rectification, ne sont assorties d'aucun moyen ; que ces conclusions sont, dans cette mesure, irrecevables, de sorte que la fin de non-recevoir opposée pour ce motif par le ministre de l'économie et des finances doit être accueillie ;
En ce qui concerne les pénalités pour mauvaise foi correspondant aux rectifications relatives aux revenus d'origine indéterminée :
14. Considérant qu'en vertu de l'article 1729 du code général des impôts, les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraînent l'application d'une majoration de 40 % si le contribuable a délibérément entendu se soustraire à l'impôt ; qu'aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs (...), la preuve de la mauvaise foi (...) incombe à l'administration " ;
15. Considérant que l'administration, qui se prévaut de l'importance des revenus d'origine indéterminée, du grand nombre d'opérations et de la qualité d'expert-comptable de M. C..., doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, de l'intention délibérée de M. et Mme C... de se soustraire à l'impôt et, par suite, du bien-fondé des pénalités litigieuses ;
16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a refusé de prononcer la réduction des bases d'imposition à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales au titre des années 2005 et 2006, à concurrence respectivement des montants de 62 122 euros et de 11 300 euros ;
Sur les conclusions tendant à la condamnation de l'Etat aux dépens de l'instance :
17. Considérant que la présente instance n'a entraîné pour M. et Mme C... aucune charge susceptible d'être incluse dans les dépens ; qu'ainsi que le fait valoir le ministre de l'économie et des finances, leurs conclusions tendant à la condamnation de l'Etat aux dépens de l'instance ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
18. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme que M. et Mme C... demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : A concurrence d'une somme totale de 22 520 euros, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. et Mme C....
Article 2 : Les bases de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales assignées à M. et Mme C... au titre des années 2005 et 2006 sont réduites respectivement des sommes de 62 122 euros et 11 300 euros.
Article 3 : M. et Mme C... sont déchargés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales correspondant à la réduction des bases d'imposition définie à l'article 2, ainsi que des pénalités correspondantes.
Article 4 : Le jugement n° 0917201 du Tribunal administratif de Paris en date du 22 juin 2011 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme C... est rejeté.
''
''
''
''
2
N° 11PA03604