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23/05/2014 | FRANCE | N°13PA01981

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 23 mai 2014, 13PA01981


Vu la requête, enregistrée le 24 mai 2013, présentée par le préfet de police de Paris, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1221550 du Tribunal administratif de Paris en date 23 avril 2013 en tant, d'une part, qu'il a annulé ses décisions du 20 juillet 2012 refusant de délivrer un titre de séjour à M. C...D..., lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi, d'autre part, qu'il lui a enjoint de délivrer à l'intéressé un titre de séjour dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement, et, enfi

n, qu'il a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des ...

Vu la requête, enregistrée le 24 mai 2013, présentée par le préfet de police de Paris, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1221550 du Tribunal administratif de Paris en date 23 avril 2013 en tant, d'une part, qu'il a annulé ses décisions du 20 juillet 2012 refusant de délivrer un titre de séjour à M. C...D..., lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi, d'autre part, qu'il lui a enjoint de délivrer à l'intéressé un titre de séjour dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement, et, enfin, qu'il a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. D...devant le Tribunal administratif de Paris ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention d'établissement, conclue entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République du Sénégal, signée à Paris le 25 mai 2000, approuvée par la loi n° 2003-4 du 2 janvier 2003 et publiée par le décret n° 2003-954 du 30 septembre 2003 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 9 mai 2014, le rapport de M. Lemaire, premier conseiller ;

1. Considérant que M.D..., de nationalité sénégalaise, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 20 juillet 2012, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ; que le préfet de police de Paris relève appel du jugement en date du 23 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé ces décisions ;

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) " ;

3. Considérant que M.D..., qui souffre d'épilepsie, soutient qu'il ne pourrait pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié au Sénégal compte tenu de l'indisponibilité, dans ce pays, des médicaments qui lui sont prescrits et en l'absence de structures sanitaires adaptées à sa pathologie ; qu'il ressort toutefois des pièces produites par le préfet de police, et notamment de l'avis du médecin, chef du service médical de la préfecture de police, en date du 29 mars 2012, que si l'état de santé de M. D... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressé peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, qui est doté d'infrastructures médicales, pourvues notamment d'unités de neurochirurgie et d'unités d'imagerie à résonance magnétique, et qui dispose de médecins spécialisés pouvant assurer son suivi médical ; qu'il ressort également de la liste nationale de médicaments et produits essentiels du Sénégal que le principe actif du traitement de M. D... est disponible dans ce pays ; que, si M. D...fait valoir que son traitement pourrait être interrompu par des ruptures de stock, le certificat médical qu'il produit à l'appui de ses allégations n'est pas de nature à remettre en cause l'avis précité du médecin, chef du service médical de la préfecture de police, selon lequel un tel traitement est disponible au Sénégal ; que, dans ces conditions, c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris a retenu, pour annuler les décisions attaquées, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. D... devant le Tribunal administratif de Paris et devant la Cour ;

Sur les autres moyens soulevés par M.D... :

5. Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté n° 2012-00493 en date du 8 juin 2012, régulièrement publié au bulletin municipal de la ville de Paris le 12 juin 2012, le préfet de police a donné à M. A...B..., attaché principal d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer, adjoint au chef du 9ème bureau de la sous-direction de l'administration des étrangers de la direction de la police générale de la préfecture de police, délégation pour signer notamment les décisions de refus de titre de séjour assorties d'une obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les décisions attaquées auraient été signées par un agent n'ayant pas compétence pour ce faire ne peut qu'être écarté ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que les décisions par lesquelles le préfet de police a refusé de délivrer un titre de séjour à M.D..., lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi énoncent les considérations de droit et de fait sur lesquelles elles se fondent ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ces décisions ne peut dès lors qu'être écarté ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin inspecteur départemental de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé et, à Paris, par le médecin, chef du service médical de la préfecture de police. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 susvisé : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; la durée prévisible du traitement. (...) Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, [le médecin de l'agence régionale de santé] peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays (...) " ;

8. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 3, par un avis en date du 29 mars 2012, le médecin, chef du service médical de la préfecture de police, a estimé que si l'état de santé de M. D... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressé pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que M. D...soutient que cet avis est irrégulier dès lors qu'il n'indique ni la durée prévisible de traitement, ni la possibilité pour lui de voyager sans risque vers son pays d'origine ; que, toutefois, dès lors que le médecin a estimé que l'intéressé pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, il n'était pas tenu d'indiquer la durée prévisible du traitement ; qu'il résulte par ailleurs des dispositions précitées de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 que le médecin n'est pas tenu de se prononcer sur la possibilité pour l'étranger de voyager sans risque vers son pays d'origine ; que le moyen tiré de l'irrégularité de cet avis ne peut dès lors qu'être écarté ;

9. Considérant, en quatrième lieu, que M. D...ne peut utilement se prévaloir, à l'encontre de la décision par laquelle le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français, des stipulations de l'article 9 de la convention d'établissement, conclue entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République du Sénégal, lesquelles ne concernent que les mesures d'expulsion ;

10. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi (...) " ;

11. Considérant que, pour les motifs exposés au point 3, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté ;

12. Considérant, en sixième lieu, que les moyens tirés de ce que la décision par laquelle le préfet de police a refusé de délivrer un titre de séjour à M. D... a été prise en méconnaissance des dispositions l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de ce que la décision par laquelle cette autorité lui a fait obligation de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle, de ce que la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et de ce que la décision fixant le pays de renvoi a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne sont assortis d'aucune précision ni étayés d'aucune pièce permettant d'en apprécier le bien fondé ;

13. Considérant, en dernier lieu, que, pour les motifs exposés aux points 2 à 12, le moyen tiré de l'illégalité de la décision par laquelle le préfet de police a refusé de délivrer un titre de séjour à M. D... ne peut qu'être écarté ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police de Paris est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 20 juillet 2012 ; que les conclusions de M. D... à fin d'injonction et celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée, doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1221550 du Tribunal administratif de Paris en date du 23 avril 2013 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. D...devant le Tribunal administratif de Paris et ses conclusions devant la Cour sont rejetées.

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N° 13PA01981


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA01981
Date de la décision : 23/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. COUVERT-CASTERA
Rapporteur ?: M. Olivier LEMAIRE
Rapporteur public ?: M. BOISSY
Avocat(s) : NAVARRO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-05-23;13pa01981 ?
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