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23/05/2014 | FRANCE | N°12PA01086

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 23 mai 2014, 12PA01086


Vu la requête, enregistrée le 5 mars 2012, présentée pour la société anonyme Dômes Finance, ayant son siège social 11/11 bis, Villa du Parc Montsouris à Paris (75014), par Me Boyer ; la société Dômes Finance demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0906395, 1101814 en date du 30 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2002,

2003 et 2004, ainsi que des intérêts de retard correspondants ;

2°) de pronon...

Vu la requête, enregistrée le 5 mars 2012, présentée pour la société anonyme Dômes Finance, ayant son siège social 11/11 bis, Villa du Parc Montsouris à Paris (75014), par Me Boyer ; la société Dômes Finance demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0906395, 1101814 en date du 30 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2002, 2003 et 2004, ainsi que des intérêts de retard correspondants ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses, ainsi que des intérêts de retard correspondants ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement des intérêts moratoires, en application des dispositions de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales ;

4°) de condamner l'Etat aux dépens de l'instance ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 mai 2014 :

- le rapport de M. Lemaire, premier conseiller,

- les conclusions de M. Boissy, rapporteur public,

- et les observations de Me Boyer, avocat de la société Dômes Finance ;

1. Considérant que la société Laboratoire Thérapeutique Vétérinaire Moderne, qui a pour activité la fabrication de préparations pharmaceutiques et de médicaments destinés aux animaux, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle la société Dômes Finance, société mère du groupe fiscalement intégré auquel elle appartient, a été assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt au titre des exercices clos les 31 août 2002, 31 août 2003 et 31 août 2004, majorées des intérêts de retard ;

2. Considérant que la société Dômes Finance relève appel du jugement en date du 30 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à la décharge de ces impositions, en tant qu'elles se rapportent à la remise en cause de provisions, ainsi que des intérêts de retard correspondants ;

Sur les conclusions à fin de décharge :

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Laboratoire Thérapeutique Vétérinaire Moderne, qui dispose, pour les médicaments vétérinaires qu'elle fabrique, d'autorisations de mise sur le marché délivrées sur la base d'un dossier technique et scientifique, a comptabilisé, aux dates de clôture des exercices clos en 2002, 2003 et 2004, des provisions pour risques et charges correspondant aux coûts d'actualisation de certains de ces dossiers ; qu'à l'issue de la vérification de comptabilité dont cette société a fait l'objet, le service a remis en cause la déduction de ces provisions au motif, d'une part, qu'elles n'avaient pas été constituées en vue de faire face à une charge déductible au titre de l'impôt sur les sociétés et, d'autre part et en tout état de cause, qu'il n'était justifié d'aucun événement en cours à la clôture des exercices en cause rendant probable l'engagement de ces dépenses ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / (...) / 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice. (...) " ;

5. Considérant, en premier lieu, que ne constituent des charges déductibles des résultats en vue de la détermination du bénéfice imposable ni les dépenses qui ont, en fait, pour résultat l'entrée d'un nouvel élément dans l'actif immobilisé d'une entreprise, ni les dépenses qui entraînent normalement une augmentation de la valeur pour laquelle un élément immobilisé figure à son bilan, ni les dépenses qui ont pour effet de prolonger d'une manière notable la durée probable d'utilisation d'un élément de l'actif immobilisé ; que la durée probable d'utilisation d'un tel élément s'apprécie à la date de son acquisition ou de sa création ; qu'en revanche, peuvent être comprises dans les frais généraux et constituer des charges d'un exercice déterminé les dépenses qui n'ont d'autre objet que de maintenir les différents éléments de l'actif immobilisé de l'entreprise en un état tel que leur utilisation puisse être poursuivie conformément à leur objet jusqu'à la fin de la période correspondant à leur durée probable d'utilisation ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des pièces produites en appel par la société Dômes Finance, que les dépenses au titre desquelles ont été constituées les provisions litigieuses correspondent à l'évaluation des dossiers techniques et scientifiques sur la base desquels avaient été délivrées les autorisations de mise sur le marché de médicaments vétérinaires, ainsi qu'à leur actualisation en vue du maintien de ces autorisations ; que, d'une part, ces dépenses, qui portent sur des éléments figurant à l'actif immobilisé de la société Laboratoire Thérapeutique Vétérinaire Moderne, n'ont pas, en fait, pour résultat l'entrée d'un nouvel élément dans l'actif immobilisé de cette société ; que, d'autre part, s'il est constant que l'absence d'actualisation des dossiers aurait entraîné la suppression des autorisations de mise sur le marché et l'impossibilité légale de commercialiser les médicaments vétérinaires correspondants, les travaux d'actualisation des dossiers techniques et scientifiques n'ont pas pour autant prolongé la durée probable d'utilisation des autorisations et des dossiers, telle qu'appréciée lors de leur création ou de leur acquisition, et qui dépend de l'évolution des conditions scientifiques, techniques et économiques du marché des médicaments en cause ; qu'enfin, les travaux, ayant uniquement pour objet de permettre à la société Laboratoire Thérapeutique Vétérinaire Moderne d'éviter la diminution de la valeur de ces éléments d'actif qu'aurait nécessairement entraîné l'impossibilité légale de commercialiser les médicaments correspondants, n'ont pas eu pour effet d'accroître la valeur pour laquelle ces éléments figurent normalement à son bilan ;

7. Considérant, en second lieu, qu'il est constant que la société Laboratoire Thérapeutique Vétérinaire Moderne était tenue, pour conserver le bénéfice des autorisations de mise sur le marché de 52 médicaments vétérinaires représentant plus de 98 % de son chiffre d'affaires, d'actualiser les dossiers techniques et scientifiques correspondants pour tenir compte, notamment, des modifications apportées à ces médicaments depuis la délivrance initiale des autorisations, et ce, selon une procédure de régularisation élaborée par l'agence nationale du médicament vétérinaire ; que cette procédure prévoyait le dépôt de dossiers de régularisation pour chacun des médicaments concernés, entre les années 2001 et 2005, sur la base d'un échéancier établi par la société Laboratoire Thérapeutique Vétérinaire Moderne elle-même, qui était ainsi tenue de solliciter tous les ans sur cette période de cinq années la régularisation de dossiers prédéterminés ; que cette procédure prévoyait également la possibilité, pour l'agence nationale du médicament vétérinaire, de solliciter auprès de la société des compléments d'information et, notamment, la réalisation d'études approfondies sur l'innocuité et l'efficacité des modifications apportées aux médicaments ; que l'engagement de cette procédure rendait probable la réalisation de dépenses pour satisfaire aux demandes d'information susceptibles d'être adressées, au cours de l'instruction des dossiers d'actualisation, par l'agence nationale du médicament vétérinaire ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Dômes Finance est fondée à soutenir que c'est à tort que le service vérificateur a remis en cause la déduction des provisions litigieuses et, par suite, que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à la décharge des impositions correspondant à ce chef de rectification, ainsi que des intérêts de retard correspondants ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales : " Quand l'Etat est condamné à un dégrèvement d'impôt par un tribunal ou quand un dégrèvement est prononcé par l'administration à la suite d'une réclamation tendant à la réparation d'une erreur commise dans l'assiette ou le calcul des impositions, les sommes déjà perçues sont remboursées au contribuable et donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 208-1 du même livre, les intérêts moratoires prévus par l'article L. 208 : " sont payés d'office en même temps que les sommes remboursées par le comptable chargé du recouvrement des impôts " ;

10. Considérant qu'il n'existe aucun litige né et actuel entre le comptable et la société Dômes Finance concernant les intérêts mentionnés à l'article L. 208 du livre des procédures fiscales ; que, dès lors, les conclusions présentées directement par la société requérante devant la Cour et tendant au paiement de ces intérêts sont irrecevables ; que la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'économie et des finances doit dès lors être accueillie ;

Sur les conclusions tendant à la condamnation de l'Etat aux dépens de l'instance :

11. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts (...). / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagées entre les parties. / L'Etat peut être condamné aux dépens " ;

12. Considérant qu'en application des dispositions précitées de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu, en l'absence de dispositions ou de circonstances particulières de nature à y faire obstacle, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la société Dômes Finance de la somme de 35 euros correspondant à la contribution pour l'aide juridique dont, contrairement à ce que soutient le ministre de l'économie et des finances, elle s'est effectivement acquittée ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 761 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la société Dômes Finance d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement nos 0906395, 1101814 du Tribunal administratif de Paris en date du 30 décembre 2011 est annulé.

Article 2 : La société Dômes Finance est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 août 2002, 31 août 2003 et 31 août 2004, en tant qu'elles procèdent de la remise en cause de la déduction de provisions pour risques et charges, ainsi que des intérêts de retard correspondants.

Article 3 : L'Etat versera à la société Dômes Finance la somme de 35 euros au titre de l'article R. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : L'Etat versera à la société Dômes Finance une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Dômes Finance est rejeté.

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N° 12PA01086


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA01086
Date de la décision : 23/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-04-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Détermination du bénéfice net. Provisions.


Composition du Tribunal
Président : M. COUVERT-CASTERA
Rapporteur ?: M. Olivier LEMAIRE
Rapporteur public ?: M. BOISSY
Avocat(s) : BOYER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-05-23;12pa01086 ?
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