Vu, I), sous le n° 12PA05027, la requête, enregistrée le 21 décembre 2012, présentée pour la société Poissonnier Ordener Distribution (POD), dont le siège est au 76 rue des Poissonniers à Paris (75018), par la SCP Cornet-Levy ; la société POD demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1115972 - 1115975/3-2 du 24 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite, née du silence gardé sur sa demande reçue le 30 juin 2011, par laquelle le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris a refusé d'abroger l'arrêté n° 90-642 du 15 novembre 1990 relatif à la fermeture hebdomadaire au public dans le département de Paris des établissements vendant au détail de l'alimentation générale, de l'épicerie, de la crèmerie, des fromages, des fruits et légumes et des liquides à emporter ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;
3°) d'abroger l'arrêté n° 90-642 du préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris
du 15 novembre 1990 précité ;
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mars 2014 :
- le rapport de M. Marino, président assesseur,
- les conclusions de M. Ladreyt, rapporteur public,
- et les observations de la SCP Cornet-Levy, avocat des sociétés POD et Avidis ;
1. Considérant que les requêtes susvisées n° 12PA05027 et n° 12PA05030 présentées pour la société Poissonnier Ordener distribution (POD) et la société Avidis sont dirigées contre le même jugement et la même décision, qu'elles présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
2. Considérant que par deux courriers rédigés en termes similaires, reçus le
30 juin 2011, les sociétés POD et Avidis, commerçants détaillants à Paris, ont sollicité du préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, l'abrogation de l'arrêté du 15 novembre 1990 fixant la fermeture totale au public soit le dimanche, soit le lundi toute la journée, de 0 à 24 heures des " établissements ou parties d'établissements, vendant au détail, à poste fixe ou en ambulance (marchés couverts et découverts), de l'alimentation générale, de l'épicerie, de la crèmerie, des fromages, des fruits et légumes et des liquides à emporter " ; que par le jugement du
24 octobre 2012 dont elles font régulièrement appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions implicites de rejet nées du silence gardé par le préfet ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Considérant, d'une part, que la précision faite dans le jugement attaqué que l'accord mentionné à l'article L. 221-7 du code du travail alors en vigueur avait pour seul objet de permettre l'édiction de l'arrêté contesté et qu'il n'avait ni l'effet juridique, ni la nature d'un accord collectif régi par le titre II du livre II de la deuxième partie de l'actuel code du travail et n'avait pas à en respecter les formes, a permis au tribunal d'écarter les moyens tirés notamment de l'absence de représentativité des organisations syndicales du fait des changements de circonstances de droit invoquées par les sociétés requérantes ; que, ce faisant les premiers juges qui ont répondu à l'ensemble des moyens soulevés, n'ont pas fait une interprétation erronée de ces moyens ; que, d'autre part, il n'entre pas dans l'office du juge de se substituer aux parties dans la recherche des éléments de preuve et de procéder à des investigations à cette fin ; que, par suite, les sociétés POD et Avidis ne sont pas fondées à soutenir que le jugement serait irrégulier ;
Sur le bien fondé du jugement attaqué :
4. Considérant que les sociétés requérantes font valoir que l'arrêté contesté du
15 novembre 1990 était illégal dès sa signature et, en tout état de cause, que les changements de circonstances de droit du fait de l'intervention de la loi du 10 août 2008 susvisée l'ont nécessairement rendu illégal ;
5. Considérant que l'autorité compétente, saisie d'une demande tendant à l'abrogation d'un règlement illégal, est tenue d'y déférer, soit que ce règlement ait été illégal dès la date de sa signature, soit que l'illégalité résulte de circonstances de droit ou de fait postérieures à cette date ;
En ce qui concerne la légalité de l'arrêté du 15 novembre 1990 à la date de sa signature :
6. Considérant que l'article L. 221-17 du code du travail alors en vigueur en 1990, devenu article L. 3132-29 du même code, dispose que : " Lorsqu'un accord est intervenu entre les syndicats d'employeurs et de travailleurs d'une profession et d'une région déterminées sur les conditions dans lesquelles le repos hebdomadaire est donné au personnel suivant un des modes prévus par les articles précédents, le préfet du département peut, par arrêté, sur la demande des syndicats intéressés, ordonner la fermeture au public des établissements de la profession ou de la région pendant toute la durée de ce repos. Ces dispositions ne s'appliquent pas aux activités dont les modalités de fonctionnement et de paiement sont automatisées. (...)" ;
7. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la fermeture au public des établissements d'une profession ne peut légalement être ordonnée sur la base d'un accord syndical que dans la mesure où cet accord correspond pour la profession à la volonté de la majorité indiscutable de tous ceux qui exercent cette profession et dont l'établissement ou partie de celui-ci est susceptible d'être fermé ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté litigieux a été pris à la suite d'une réunion qui s'est tenue le 8 juin 1990 à l'issue de laquelle un accord est intervenu sur le principe de la fermeture soit le dimanche soit le lundi des commerces alimentaires de détail signé par six organisations syndicales d'employeurs et trois de salariés, à savoir la fédération nationale CFTC des syndicats de l'alimentaire, du spectacle et des prestations de service (FNSASPS-CFTC), la fédération générale des travailleurs de l'agriculture et de l'alimentation, des tabacs et allumettes et des secteurs connexes (FGTA-FO) et la fédération du personnel d'encadrement des industries et productions agro-alimentaires des cuirs et services connexes (FIPACCS-CGC) ; que les sociétés requérantes font valoir que ces trois organisations syndicales ne pouvaient pas représenter la majorité des salariés ;
8. Considérant, en premier lieu, que, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal, la seule circonstance que la ville de Paris ait indiqué aux requérantes par courrier du 18 avril 2010 que les recherches effectuées parmi les dossiers gérés par le bureau des élections et du recensement de la population n'avaient pas permis de trouver les statuts de la fédération nationale CFTC des syndicats de l'alimentaire, du spectacle et des prestations de services (FNSASPS-CFTC), ne suffit pas à démontrer que cette fédération, n'existait pas à la date de la signature de l'accord du 8 juin 1990, la ville n'ayant pas indiqué que ces statuts n'avaient pas été déposés, d'autant que les requérantes reconnaissent que la fédération dont s'agit avait été signataire de plusieurs conventions similaires ;
9. Considérant, en deuxième lieu, qu'un accord conclu en application de l'article
L. 221-17 précité du code du travail alors en vigueur, qui a pour seul objet de permettre l'édiction d'un arrêté préfectoral réglementant la fermeture hebdomadaire des commerces de la profession concernée, n'a pas d'effet juridique propre et n'a pas la nature d'un accord collectif régi par le titre III du livre Ier du code du travail (titre II du livre II de la deuxième partie de l'actuel code du travail) et n'a donc pas à en respecter les formes ; qu'ainsi, la circonstance que l'arrêté litigieux mentionnait la FIPACCS-CGC, dans son ancienne dénomination, parmi les organisations syndicales figurant à l'accord du 8 juin 1990 alors qu'à la suite du dépôt de ses nouveaux statuts le 6 avril 1990, soit à peine deux mois avant l'accord, elle est devenue la fédération du personnel d'encadrement de la production, de la transformation, de la distribution et de services et organismes agro-alimentaires, et des cuirs et peaux, n'a pas eu d'incidence sur la légalité de cet arrêté ; qu'en outre, il n'est pas établi que du fait de ce seul changement de dénomination, la fédération du personnel d'encadrement du secteur agroalimentaire CGC ne représentait plus les mêmes adhérents alors que, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, l'article 5 des statuts déposés le 6 avril 1990 prévoit que peuvent adhérer à la fédération les syndicats des entreprises de production agroalimentaire ;
10. Considérant, en troisième lieu, qu'en vertu de l'article 4 de ses statuts, la fédération générale des travailleurs de l'agriculture et de l'alimentation, des tabacs et allumettes et des secteurs connexes (FGTA-FO) doit obtenir l'avis favorable de la majorité des syndicats fédérés pour conclure des accords portant sur les conditions de travail des salariés occupés dans les activités de son ressort ; que les requérantes ne démontrent pas davantage qu'en première instance que la fédération n'aurait pas recueilli l'avis favorable de la majorité des syndicats fédérés par la seule circonstance que l'accord du 8 juin 1990 ne fait pas apparaître cet avis ;
11. Considérant, en quatrième lieu, que si les sociétés POD et Avidis font valoir que le défaut de représentativité des organisations syndicales précitées est démontré par la revendication de la paternité de l'accord par les actuels syndicats ou unions CFDT, CGT, CFTC et SUD du commerce d'Ile-de-France, autorisés à agir, par deux ordonnances du juge des référés du Tribunal de grande instance de Paris en date du 2 février 2012, contre les détaillants n'ayant pas respecté les règles de fermeture fixées par l'arrêté du 15 novembre 1990, ce moyen doit être rejeté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges et ce, alors même que par un arrêt du 6 juin 2013, la Cour de céans a admis l'intervention de plusieurs de ces syndicats et unions dans une instance dirigée contre le même arrêté, cette dernière circonstance n'étant pas davantage de nature à établir le bien fondé du moyen ;
En ce qui concerne la légalité de l'arrêté du 15 novembre 1990 à la date de son refus d'abrogation :
12. Considérant, d'une part, ainsi qu'il a été dit précédemment, que le tribunal a répondu à l'ensemble des moyens soulevés par les sociétés requérantes et a notamment indiqué les raisons pour lesquelles la modification des critères de représentativité des syndicats du fait de l'intervention de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 ne constituait pas une circonstance de droit nouvelle justifiant l'abrogation de l'arrêté du 15 novembre 1990 ; que, d'autre part, les sociétés POD et Avidis se bornant à reprendre les moyens soulevés contre le refus d'abroger cet arrêté, il y a lieu de les écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les sociétés POD et Avidis ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les requêtes n° 12PA05027 et n° 12PA05030 des sociétés Poissonnier Ordener distribution (POD) et Avidis sont rejetées.
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