La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/03/2014 | FRANCE | N°13PA02132

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 12 mars 2014, 13PA02132


Vu la requête, enregistrée le 3 juin 2013, présentée pour Mme C...A..., demeurant..., par Me B...; Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1210652 du 2 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2007, ainsi que des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée;

3°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondemen

t de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..............................

Vu la requête, enregistrée le 3 juin 2013, présentée pour Mme C...A..., demeurant..., par Me B...; Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1210652 du 2 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2007, ainsi que des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée;

3°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution ;

Vu la décision n° 2013-340 QPC du 20 septembre 2013 du Conseil constitutionnel ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 mars 2014 :

- le rapport de Mme Notarianni, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Egloff, rapporteur public ;

1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que MmeA..., qui était salariée de l'association Réalisations Humaines de l'année 1987 jusqu'au 1er janvier 2007, date à laquelle elle a pris sa retraite anticipée, a saisi le 1er février 2007 le Conseil de prud'hommes de Paris d'une demande tendant à la requalification de ce départ à la retraite en licenciement abusif et à la condamnation de l'association Réalisations Humaines à lui verser, à ce titre, diverses indemnités ; que, dans ce contexte, la requérante a conclu avec son employeur, le 20 juin 2007, un protocole d'accord transactionnel en vertu duquel elle s'est engagée à renoncer à l'instance introduite devant le Conseil de prud'hommes de Paris en contrepartie du versement par l'association Réalisations Humaines, en quatre annuités, d'une indemnité globale et forfaitaire de 120 000 euros ; qu'à la suite d'un contrôle sur pièces portant sur l'année 2007, le service a considéré que l'annuité de 30 000 euros perçue cette année là, que Mme A...n'avait pas déclarée au titre de ses revenus imposables, avait la nature d'une indemnité imposable versée à l'occasion de la rupture du contrat de travail au sens des dispositions de l'article 80 duodecies du code général des impôts et, en conséquence, a mis à la charge de Mme A...les compléments d'impôt sur le revenu correspondants pour un montant de 6 313 euros en droits, assortis de pénalités de retard et de mauvaise foi pour les montants respectifs de 581 euros et 2 525 euros ; que la réclamation préalable en date du 13 janvier 2011 de Mme A...a été rejetée par une décision du 19 avril 2012 ; que, par un jugement n° 1210652 du 2 avril 2013, dont Mme A...relève régulièrement appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces compléments d'impôts sur le revenu et pénalités ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, d'une part, qu'à l'appui de sa contestation de la régularité de la motivation du jugement attaqué, la requérante ne peut utilement se prévaloir de la simple erreur de plume par laquelle le Tribunal administratif a mentionné l'accord transactionnel intervenu comme étant daté du 20 janvier 2007 et non du 20 juin de la même année ;

3. Considérant, d'autre part, que le moyen tiré par Mme A...de ce que le Tribunal administratif n'aurait pas motivé la qualification qu'il a donnée à l'indemnité litigieuse en la regardant comme ayant été versée à l'intéressée à l'occasion de la rupture de son contrat de travail au sens des dispositions de l'article 80 duodecies du code général des impôts manque en fait ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

5. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 80 duodecies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " Toute indemnité versée à l'occasion de la rupture du contrat de travail constitue une rémunération imposable, sous réserve de l'exonération prévue au 22° de l'article 81 et des dispositions suivantes. Ne constituent pas une rémunération imposable : 1° Les indemnités mentionnées à l'article L. 122-14-4 du code du travail [...] " ; qu'aux termes de l'article L. 122-14-4, alors en vigueur, du code du travail : " Si le licenciement d'un salarié survient sans observation de la procédure requise à la présente section, mais pour une cause réelle et sérieuse, le tribunal saisi doit imposer à l'employeur d'accomplir la procédure prévue et accorder au salarié, à la charge de l'employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire ; si ce licenciement survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le tribunal peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis ; en cas de refus par l'une ou l'autre des parties, le tribunal octroie au salarié une indemnité. Cette indemnité, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois, est due sans préjudice, le cas échéant, de l'indemnité prévue à l'article L. 122-9. Lorsque le tribunal constate que le licenciement est intervenu alors que la procédure de licenciement est nulle et de nul effet, conformément aux dispositions du cinquième alinéa de l'article L. 321-4-1, il peut prononcer la nullité du licenciement et ordonner, à la demande du salarié, la poursuite de son contrat de travail, sauf si la réintégration est devenue impossible, notamment du fait de la fermeture de l'établissement ou du site ou de l'absence d'emploi disponible de nature à permettre la réintégration du salarié. Lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de son contrat de travail ou lorsque la réintégration est impossible, le tribunal octroie au salarié une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des douze derniers mois " ;

6. Considérant, d'autre part, que les réserves d'interprétation dont une décision du Conseil constitutionnel assortit la déclaration de conformité à la Constitution d'une disposition législative sont revêtues de l'autorité absolue de la chose jugée et lient le juge administratif pour l'application et l'interprétation de cette disposition ; que, par une décision n° 2013-340 QPC du

20 septembre 2012, le Conseil constitutionnel, saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur la conformité à l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen des dispositions de l'article 80 duodecies précité du code général des impôts dans sa rédaction résultant de la loi du 30 décembre 2000 de finances rectificative pour 2000, a jugé : " qu'il ressort de la jurisprudence constante du Conseil d'État, rappelée dans la décision du 24 juin 2013 de renvoi de la présente question prioritaire de constitutionnalité, que l'article 80 duodecies définit limitativement les exceptions au principe d'imposition qu'il fixe et que les exonérations d'impôt prévues par les dispositions contestées ne sont pas applicables aux " indemnités perçues par un salarié en exécution d'une transaction conclue avec son employeur à la suite d'une "prise d'acte" de la rupture de son contrat de travail, qui ne peuvent bénéficier, en aucune circonstance et quelle que soit la nature du préjudice qu'elles visent à réparer, d'une exonération d'impôt sur le revenu " ; [que] les dispositions contestées définissent les indemnités de licenciement ou de départ volontaire qui, en raison de leur nature, font l'objet d'une exonération totale ou partielle d'impôt sur le revenu ; que ces dispositions ne sauraient, sans instituer une différence de traitement sans rapport avec l'objet de la loi, conduire à ce que le bénéfice de ces exonérations varie selon que l'indemnité a été allouée en vertu d'un jugement, d'une sentence arbitrale ou d'une transaction ; qu'en particulier, en cas de transaction, il appartient à l'administration et, lorsqu'il est saisi, au juge de l'impôt de rechercher la qualification à donner aux sommes objet de la transaction " ; que, par ailleurs, si l'article 80 duodecies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige, a fait l'objet de modifications postérieures à la rédaction dans laquelle il a été soumis au Conseil constitutionnel par la question prioritaire de constitutionalité susmentionnée, cette modification n'a pas privé d'effet la réserve d'interprétation contenue dans la décision précitée n° 2013-340 QPC du Conseil constitutionnel ; qu'il y a donc lieu d'interpréter les dispositions de l'article 80 duodecies du code général des impôts conformément à cette réserve ;

7. Considérant, dans ces conditions, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 80 duodecies du code général des impôts dans sa rédaction applicable au présent litige et des réserves d'interprétation émises par le Conseil constitutionnel dans sa décision précitée du

20 septembre 2013, d'une part, qu'à l'exception des indemnités qui y sont limitativement énumérées, toute indemnité perçue par le salarié à l'occasion de la rupture de son contrat de travail revêt un caractère imposable, sans qu'il importe que cette indemnité compense une perte de salaires ou qu'elle répare un préjudice d'une autre nature et notamment un préjudice moral, et d'autre part, que, dans l'hypothèse où une indemnité est allouée en vertu d'une transaction à un salarié à l'occasion de la rupture de son contrat de travail par son employeur, il appartient au juge de l'impôt de rechercher si la qualification à donner aux sommes ainsi allouées par la transaction permet de les regarder comme relevant de l'une des catégories d'indemnités, limitativement exonérées par l'article 80 duodecies du code général des impôts, dont notamment celles prévues par les dispositions de l'article L. 122-14-4 du code du travail auxquelles renvoie le 1° dudit article 80 duodecies, et qui sont susceptibles d'être accordées par le juge du contrat de travail ;

8. Considérant, en l'espèce, d'une part, qu'il résulte de l'instruction, et notamment des termes de la saisine par Mme A...du Conseil de prud'hommes de Paris, qui tendait à la requalification de son départ à la retraite en licenciement abusif, ainsi que des stipulations du protocole transactionnel du 20 juillet 2007, aux termes duquel " les parties reconnaissent que cette indemnité transactionnelle est versée en réparation des préjudices invoqués par Mme A...et causés par la rupture de son contrat de travail ", que l'indemnité litigieuse a été versée à l'occasion de la rupture du contrat de travail au sens des dispositions précitées du 1 de l'article 80 duodecies du code général des impôts ;

9. Considérant, d'autre part, qu'il ne résulte pas de l'instruction, et, qu'en outre, comme l'a au demeurant expressément relevé le ministre de l'économie et des finances dans ses écritures en défense, il n'est pas même allégué par MmeA..., qui se borne à soutenir que l'indemnité en cause serait exonérée au seul motif qu'elle réparerait son préjudice moral, que ladite indemnité avait un objet similaire à celui de l'une au moins des indemnités limitativement énumérées à l'article 80 duodecies du code général des impôts et notamment à l'une de celles prévues à l'article L. 122-14-4 du code du travail ; que, dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à prétendre que cette indemnité était exonérée de l'impôt sur le revenu ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande de décharge des impositions et pénalités en litige ; que les conclusions aux fins d'annulation du jugement et de décharge présentées par Mme A...devant la Cour doivent par suite être rejetées ; qu'il en va en conséquence de même de celles présentées par la requérante sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'État n'ayant pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

''

''

''

''

5

N° 13PA02132


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA02132
Date de la décision : 12/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme APPECHE
Rapporteur ?: Mme Laurence NOTARIANNI
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : CJ BOT NORMAND CREN ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-03-12;13pa02132 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award