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22/01/2014 | FRANCE | N°12PA02797

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 22 janvier 2014, 12PA02797


Vu la requête, enregistrée le 29 juin 2012, présentée pour Mme A...D..., demeurant..., par MeC... ; Mme A... D...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 0806268/3, 0908481/3 du 3 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2003 et 2004, ainsi que des pénalités correspondantes, d'autre part, à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le reven

u et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre d...

Vu la requête, enregistrée le 29 juin 2012, présentée pour Mme A...D..., demeurant..., par MeC... ; Mme A... D...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 0806268/3, 0908481/3 du 3 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2003 et 2004, ainsi que des pénalités correspondantes, d'autre part, à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2005, ainsi que des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 janvier 2014 :

- le rapport de Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Egloff, rapporteur public ;

1. Considérant que Mme D...a fait l'objet de deux examens contradictoires de sa situation fiscale personnelle, à l'issue desquels l'administration fiscale a, en application des dispositions combinées des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales, taxé d'office dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée, respectivement au titre des années 2003 et 2004, puis de l'année 2005, des crédits bancaires restés injustifiés en dépit des demandes de justifications à la contribuable ; que Mme D...relève appel du jugement n°s 0806268/3, 0908481/3 du 3 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2003 et 2004, ainsi que des pénalités correspondantes, d'autre part, à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2005, ainsi que des pénalités correspondantes ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements (...) Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés (...) Les demandes visées aux alinéas précédents doivent indiquer explicitement les points sur lesquels elles portent et fixer à l'intéressé le délai de réponse dont il dispose en fonction des textes en vigueur " ; qu'aux termes de l'article L. 16 A du même livre : " Les demandes d'éclaircissements et de justifications fixent au contribuable un délai de réponse qui ne peut être inférieur à deux mois. Lorsque le contribuable a répondu de façon insuffisante aux demandes d'éclaircissements ou de justifications, l'administration lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours en précisant les compléments de réponse qu'elle souhaite " ; qu'aux termes de l'article L. 69 dudit livre : " (...) sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16 " ;

En ce qui concerne la procédure d'imposition afférente aux impositions en litige au titre des années 2003 et 2004 :

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, dans le cadre de l'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle au titre des années 2003 et 2004 et en application de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, Mme D...a été invitée à s'expliquer sur la nature et l'origine de crédits figurant sur ses comptes bancaires ; que la contribuable a été regardée comme n'ayant pas répondu à la demande de justifications du 12 octobre 2006 relative à l'année 2003 et à la mise en demeure qui lui a été adressée à la suite de la demande de justifications du 16 novembre 2006 relative à l'année 2004 ; que l'administration a réintégré dans ses revenus imposables au titre de ces années, dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée, les sommes restées injustifiées figurant au crédit desdits comptes bancaires, selon la procédure de taxation d'office prévue par l'article L. 69 du livre des procédures fiscales ; que la requérante soutient que les impositions supplémentaires en cause ont été irrégulièrement établies au motif que le service, qui disposait d'informations dans le cadre des enquêtes dirigées contre un tiers, ne pouvait écarter comme insuffisante sa réponse à la demande d'éclaircissements ou de justifications ; que, toutefois, la circonstance que l'administration ait pu présumer, à partir d'informations qu'elle détenait dans le cadre d'une procédure distincte concernant ce tiers, que les crédits portés sur les comptes bancaires de Mme D...provenaient pour partie de recettes liées à la vente de parfums ne faisait pas obstacle à ce qu'elle lui demandât de justifier l'origine de ces crédits, à peine de taxation d'office en cas d'absence de réponse ;

En ce qui concerne la procédure d'imposition afférente aux impositions en litige au titre de l'année 2003 :

4. Considérant, en premier lieu, que Mme D...soutient que la procédure de taxation d'office suivie au titre de l'année 2003, en application des dispositions de l'article L. 69 précité, est irrégulière dès lors qu'à la suite de sa réponse à la demande d'éclaircissements et de justifications en date du 12 octobre 2006, le service, avant de taxer d'office les crédits en cause, ne lui a pas envoyé de mise en demeure d'avoir à compléter cette réponse ;

5. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées des articles L. 16, L. 16 A et L. 69 du livre des procédures fiscales que l'administration peut demander au contribuable des justifications lorsqu'elle a recueilli des éléments permettant d'établir que celui-ci peut avoir des revenus plus importants que ceux qui font l'objet de sa déclaration et qu'en cas de défaut de réponse, le contribuable est taxé d'office à l'impôt sur le revenu ; qu'il ressort également de ces dispositions que le contribuable qui répond à une demande de justifications après l'expiration du délai qui lui avait été imparti pour ce faire doit être regardé comme s'étant abstenu de répondre et que l'administration est alors en droit de le taxer d'office ; qu'il en est de même lorsque la réponse fournie en temps utile contient des informations invérifiables ou qui, par leur imprécision, équivalent à un défaut de réponse et que, dans ce cas, l'administration n'est pas tenue de lui adresser, avant de taxer d'office les sommes en cause, une mise en demeure d'avoir à compléter cette réponse ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'en réponse à la demande d'éclaircissements et justifications, portant sur l'année 2003, que lui avait adressée l'administration le 12 octobre 2006, en application des articles L. 10 et L. 16 du livre des procédures fiscales, Mme D...s'est bornée, dans son courrier du 11 décembre 2006, à faire état, pour justifier des crédits relevés sur ses comptes bancaires, de ventes de parfums réglées par chèques ou en espèces et de cadeaux en espèces en provenance de tiers sans assortir ses allégations d'aucune précision utile, ni du moindre justificatif ; que, dans ces conditions, les réponses imprécises et invérifiables apportées par Mme D...ne permettaient pas de justifier tant de l'origine que de la nature des sommes portées au crédit de ses comptes bancaires ; qu'en outre, l'intéressée n'a pas répondu à la demande de justifications portant sur certains crédits bancaires figurant sur les comptes 3539691 F03394 et 04184699329/41 ouverts respectivement auprès de la banque postale et de la caisse d'épargne ; qu'ainsi, Mme D...doit être regardée comme s'étant abstenue de répondre à la demande de justifications ; qu'elle n'est, dès lors, pas fondée à soutenir qu'elle ne pouvait faire l'objet d'une procédure de taxation d'office au titre de l'année 2003 sans mise en demeure préalable, en application des dispositions combinées des articles L. 16, L.16 A et L. 69 du livre des procédures fiscales ;

7. Considérant, en second lieu, que Mme D...soutient que la procédure de taxation d'office suivie au titre de l'année 2003 est également irrégulière, faute pour le service d'avoir conduit un débat oral et contradictoire portant, d'une part, sur l'annulation de la demande d'éclaircissements ou de justifications du 22 septembre 2006, d'autre part, sur le contenu ou la différence de contenu de la nouvelle demande du 12 octobre 2006 ;

8. Considérant que le caractère contradictoire que doit revêtir l'examen de la situation fiscale personnelle d'un contribuable au regard de l'impôt sur le revenu en vertu des articles L. 47 à L. 50 du livre des procédures fiscales interdit au vérificateur d'adresser la proposition de rectification qui, selon l'article L. 48 de ce livre, marquera l'achèvement de son examen, sans avoir au préalable engagé un dialogue contradictoire avec le contribuable sur les points qu'il envisage de retenir ; qu'en outre, dans sa version applicable à la date des opérations de contrôle, la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, rendue opposable à l'administration par l'article L. 10 du même livre, prévoit que, dans le cadre de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'un contribuable, le dialogue joue un rôle très important tout au long de la procédure ; qu'il ne résulte pas de ces dispositions que le vérificateur serait tenu, avant d'avoir recours à la procédure prévue par les dispositions précitées de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, d'engager avec le contribuable un dialogue sur les discordances relevées par lui ;

9. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le service a proposé à Mme D...plusieurs entrevues qui se sont déroulées les 9 juin et 21 septembre 2006 et qu'il lui a adressé le 12 octobre 2006, postérieurement à ces entretiens, une demande de justifications concernant l'origine et la nature de crédits bancaires litigieux annulant et remplaçant une précédente demande du 22 septembre 2006 ; que, dès lors, en proposant deux entrevues, le service a veillé à instaurer un réel débat contradictoire et a ainsi respecté les dispositions précitées du livre des procédures fiscales, sans que la requérante puisse valablement soutenir que l'administration était tenue de s'entretenir avec elle avant de lui adresser, le 12 octobre 2006, la nouvelle demande de justifications ; qu'au demeurant, un entretien de synthèse a été fixé au 22 décembre 2006 auquel la requérante n'a pu se rendre en raison de congés à l'étranger ; que, dans ces conditions, Mme D...n'est pas fondée à soutenir qu'elle aurait été privée d'un tel débat oral et contradictoire avec le vérificateur ;

En ce qui concerne la procédure d'imposition afférente aux impositions en litige au titre de l'année 2005 :

10. Considérant que Mme D...soutient que le service ne pouvait taxer d'office dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée des sommes qui se rattachaient à son activité commerciale de vente de parfums, laquelle selon elle était patente, et que, dès lors, les impositions supplémentaires correspondantes au titre de l'année 2005 ont été établies à l'issue d'une procédure irrégulière ; que, toutefois, il résulte de ce qui suit que le service a, à bon droit, taxé les crédits litigieux dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée ; que, par suite, ce moyen doit, en tout état de cause, être écarté ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition " ; qu'aux termes de l'article R. 193-1 du même livre : " Dans le cas prévu à l'article L. 193 le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré " ; qu'en application des dispositions précitées, il appartient à MmeD..., qui a fait l'objet d'une procédure de taxation d'office dont elle ne démontre pas qu'elle serait irrégulière, d'apporter la preuve de l'exagération des bases d'imposition correspondantes ;

12. Considérant que, si l'administration ne peut régulièrement taxer d'office, en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, les sommes dont elle n'ignore pas qu'elles relèvent d'une catégorie précise de revenus, elle peut en revanche procéder à cette taxation d'office si, au vu des renseignements dont elle disposait avant l'envoi de la demande de justifications fondée sur l'article L. 16 du livre des procédures fiscales et des réponses apportées par le contribuable à cette demande, la nature des sommes en cause et donc la catégorie de revenus à laquelle elles seraient susceptibles de se rattacher demeure inconnue ; qu'il est toutefois loisible au contribuable régulièrement taxé d'office sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales d'apporter devant le juge de l'impôt la preuve que ces sommes, soit ne constituent pas des revenus imposables, soit se rattachent à une catégorie précise de revenus ;

13. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'en réponse aux demandes de justifications que lui a adressées l'administration, en application des articles L. 16 et L. 16 A du livre des procédures fiscales dans le cadre des procédures de contrôle suivies au titre des années 2003 et 2004, d'une part, et de l'année 2005, d'autre part, Mme D...s'est bornée à affirmer que les sommes constatées au crédit de ses comptes bancaires provenaient pour l'essentiel d'une activité de vente de parfums sans apporter aucun élément de nature à établir la réalité de cette activité et ses modalités d'exercice, afin de permettre à l'administration de connaître la nature ou l'objet desdites sommes et de déterminer, par suite, de quelle catégorie de revenus imposables elles étaient susceptibles de relever ; qu'au vu de ces réponses, l'administration a pu régulièrement taxer d'office lesdites sommes en les intégrant directement au revenu global, en tant que revenus d'origine indéterminée, en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales ; que la requérante, qui supporte la charge de la preuve, n'apporte pas non plus devant le juge de justification suffisante à l'appui de ses allégations en se bornant à se prévaloir de ce que l'administration fiscale était parfaitement informée, dans le cadre des procédures tant judiciaire que fiscale concernant M.B..., des conditions dans lesquelles elle stockait, vendait et livrait les parfums à ses propres clients et du montant de la marge qu'elle percevait sur ces ventes ; qu'en tout état de cause, la procédure engagée à l'encontre de M. B...ne peut être valablement opposée à l'administration en vertu du principe de l'indépendance des procédures ; que Mme D...n'apporte pas plus de preuves à l'appui de ses allégations en invoquant, au demeurant sans l'établir, l'existence d'une société de fait avec M.B..., alors qu'au surplus, il est constant qu'elle n'a jamais déposé de déclarations professionnelles ; qu'à cet égard, elle ne peut se prévaloir utilement de l'autorité de chose jugée attachée aux constatations matérielles de faits par le juge répressif et à leur qualification sur le plan pénal, faute de produire le jugement invoqué ; que, dès lors, les sommes litigieuses ont pu à bon droit être taxées d'office dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales ; qu'il suit de là que Mme D...n'est pas fondée à demander l'imposition de ces sommes dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux à hauteur de la marge qu'elle soutient avoir réalisée sur des ventes de parfums ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité des conclusions de première instance relatives aux cotisations supplémentaires de contributions sociales établies au titre de l'année 2005, que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes ; que les conclusions de sa requête tendant à l'annulation dudit jugement et à la décharge des impositions litigieuses ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à Mme D...d'une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

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N° 11PA00434

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N° 12PA02797


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA02797
Date de la décision : 22/01/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme TANDONNET-TUROT
Rapporteur ?: Mme Anne MIELNIK-MEDDAH
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : CABINET CHEVRIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-01-22;12pa02797 ?
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