Vu la requête, enregistrée le 24 août 2010, présentée pour la société ESAF, dont le siège est au Euroflory n° 6 à Berre L'étang Cedex (13130), par Me C... ; la société ESAF demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0712891/3-1 du 1er juin 2010 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a rejeté partiellement sa demande tendant au règlement du lot n° 6 du marché de travaux de renouvellement des voies à la gare de Collonges Fort l'Ecluse passé avec la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) ;
2°) de condamner solidairement la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) et Réseau ferré de France (RFF) à lui verser une somme de 90 907,86 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 20 novembre 2006 et de leur capitalisation ;
3°) de mettre à la charge solidaire de la SNCF et de RFF la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 décembre 2013 :
- le rapport de Mme Sanson, premier conseiller,
- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,
- les observations de MeC..., représentant la société ESAF, et celles de MeA..., substituant MeB..., représentant la SNCF et RFF ;
1. Considérant que la Société nationale des chemins de fer français, agissant en qualité de maître d'ouvrage délégué de Réseau ferré de France, a conclu avec la société ESAF un marché de travaux de renouvellement de voies portant sur quatre lots, dont le lot n° 6 relatif au renouvellement des voies en gare de Collonges Fort l'Ecluse ; que la réception des travaux du lot n° 6 a été prononcée avec réserves au 25 janvier 2006 ; que, par ordre de service du 16 octobre 2006, la SNCF a notifié à l'entreprise le décompte partiel relatif à ce lot ; que le 20 novembre 2006 la société ESAF a signé ce décompte avec des réserves et présenté un mémoire de réclamation ; qu'elle a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à la condamnation du maître d'ouvrage au versement de la somme qu'elle estimait lui être due ; qu'elle relève appel du jugement en date du 1er juin 2010 en tant qu'il a limité la condamnation de la SNCF, agissant pour le compte de Réseau ferré de France, à la somme de 119,60 euros, somme non contestée par la SNCF ;
Sur le renouvellement d'un passage à niveau :
2. Considérant que le bordereau de prix joint à l'ordre d'exécution des travaux fait état, sous le poste PB 12, du renouvellement d'un passage à niveau pour un montant forfaitaire de 4 913 euros ; que la SNCF n'a pas repris cette somme dans le décompte notifié à l'entreprise au motif que seule avait été réalisée une partie des travaux correspondants, prise en compte au titre du poste PB01 ; que, toutefois, le procès-verbal de réception des travaux n'a fait l'objet d'aucune réserve concernant cet ouvrage ; que, par ailleurs, la somme facturée par l'entreprise sous le poste PB01 n'est pas supérieure à celle qui était mentionnée sur le bordereau de prix ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que les travaux de renouvellement du passage à niveau n'auraient été réalisés que de manière incomplète, ainsi que le soutient la SNCF ; que, par suite, la société ESAF est fondée à demander le paiement de ces prestations pour un montant de 4 913 euros hors taxes, soit 5 875,95 euros TTC ;
Sur les pénalités de retard dans la réalisation des travaux :
3. Considérant que les travaux, qui devaient s'achever le 9 décembre 2005, ont fait l'objet d'une réception à effet du 25 janvier 2006 ; que la société requérante soutient que ce retard est imputable aux conditions climatiques et à la grève d'un pilote de la SNCF ;
4. Considérant que la société ESAF invoque le gel du ballast dû à la faiblesse des températures entre le 28 novembre et le 2 décembre 2005, ce qui l'a mise dans l'obligation de casser les conglomérats de ballast gelé avant son déchargement sur les voies et a rendu le déchargement totalement impossible dans la nuit du 1er au 2 décembre ; qu'elle fait valoir que cette difficulté était imputable à la SNCF qui devait fournir le ballast et prendre ses dispositions pour l'entreposer dans des endroits chauffés ; qu'il ressort toutefois du bordereau de prix, sous le poste PB, signé par l'entreprise, qu'il appartenait à celle-ci d'assurer la manutention du ballast stocké à terre à proximité du chantier, sans qu'elle puisse utilement se prévaloir de l'absence de rémunération de cette prestation ; que les rapports journaliers de l'entreprise font apparaître que le ballast a été déchargé depuis les wagons trémies sauf pour la nuit du 1er au 2 décembre pendant laquelle d'autres travaux ont pu être réalisés ;
5. Considérant par ailleurs que, si la société ESAF soutient que la grève du pilote de la SNCF sur le train de ballast K le 21 novembre 2005 n'a pas permis l'acheminement du ballast nécessaire sur le chantier, la SNCF répond sans être sérieusement contredite qu'elle a composé des trains mixtes convoyant de la terre et du ballast, ce qui n'a provoqué qu'un retard de 15 minutes, consacré par l'entreprise à l'exécution d'autres travaux ; qu'ainsi la société requérante n'établit pas que les retards pris dans la réalisation des travaux seraient imputables au maître d'ouvrage ;
Sur les pénalités pour absence de respect de vitesses de franchissements :
6. Considérant que la SNCF a appliqué une première pénalité de 1 000 euros faisant suite à une limitation temporaire de vitesse à 10 km/h le 17 novembre 2005, ainsi qu'une deuxième pénalité de 6 000 euros consécutive à un achèvement de travaux le 6 décembre 2005 à 4 h au lieu du 1er décembre à 4 h, la limitation temporaire de vitesse étant levée à 22 h 56 ;
7. Considérant que la première pénalité est due à une panne de la bourreuse de l'entreprise, fait reconnu par cette dernière ainsi qu'il ressort de l'attachement n° 3 ; que l'attachement n° 6 fait également apparaître l'accord de l'entreprise sur le retard sanctionné par la seconde pénalité ; que, toutefois, il ressort de ce document que les travaux de l'entreprise ayant déclenché la fin de la limitation temporaire de vitesse ont été achevés le 6 décembre 2005 à 4 heures, ce qui représente un retard de 5 jours et non de 6, comme retenu par la SNCF ; que la société ESAF est fondé à soutenir que le montant de la pénalité correspondante doit être ramené de 6 000 à 5 000 euros ;
Sur la pénalité pour reddition tardive :
8. Considérant qu'à l'appui de sa contestation de la pénalité de 8 011,71 euros appliquée par la SNCF pour reddition tardive, la société ESAF invoque les manquements du maître d'ouvrage mentionnés ci-dessus et le fait qu'il n'a pas été donné suite à sa proposition d'effectuer le bourrage les nuits des 5, 6 et 7 décembre 2005, ce qui l'a contrainte à procéder à ces opérations de bourrage dans les nuits du 13 au 14 et du 14 au 15 décembre 2005 ; qu'il ressort toutefois d'un courrier adressé le 16 décembre 2005 par la SNCF à l'entreprise et non remis en cause par celle-ci que les dates proposées par elle n'avaient pas pu être retenues par suite de contraintes matérielles et de la brièveté des délais dont disposait le maître d'ouvrage pour y répondre ; qu'ainsi les manquements de la SNCF allégués par la société requérante ne sont pas établis ;
Sur les moyens supplémentaires :
9. Considérant que la société ESAF soutient que les conditions climatiques, la grève du pilote et, plus généralement, la défaillance des services de la SNCF l'ont obligée à mettre en oeuvre des moyens matériels et humains supplémentaires afin de respecter les délais ; que les coûts dont elle se prévaut ne correspondent pas à des demandes complémentaires du maître d'ouvrage mais se rapportent à l'exécution du marché ; qu'il n'est pas établi que les difficultés rencontrées par l'entreprise pour la réalisation des travaux seraient imputables au maître d'ouvrage ; que, par suite, la société ESAF n'est pas fondée à demander la prise en compte du financement des moyens matériels et humains supplémentaires qu'elle allègue ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société ESAF est seulement fondée à demander la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a condamné la SNCF à lui verser une somme inférieure à 6 995,55 euros, correspondant à 5 875,95 euros pour le renouvellement d'un passage à niveau, 1 000 euros en remboursement d'une pénalité pour absence de respect des vitesses de franchissement et 119,60 euros au titre de la condamnation prononcée par le tribunal ;
Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :
Sur les intérêts :
11. Considérant que la société ESAF a droit aux intérêts de la somme de 6 875,95 euros à compter du 20 novembre 2006, jour de la réception par la SNCF de sa réclamation ;
Sur la capitalisation des intérêts :
12. Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée le 24 août 2010 ; qu'à cette date il était dû plus d'une année d'intérêts ; qu'il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 24 août 2010, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SNCF le versement à la société ESAF d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la SNCF présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La Société nationale des chemins de fer français, agissant pour le compte de Réseau ferré de France, est condamnée à verser à la société ESAF une indemnité de 6 995,55 euros. La somme de 6 875,95 euros portera intérêts au taux légal à compter du
20 novembre 2006. Les intérêts échus le 24 août 2010 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 1er juin 2010 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : La SNCF versera à la société ESAF une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête et les conclusions de la SNCF présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
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N° 10PA04306