La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/11/2013 | FRANCE | N°11PA04178

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 19 novembre 2013, 11PA04178


Vu la requête, enregistrée le 16 septembre 2011, présentée pour la SAS Darras et Jouanin, dont le siège est 2, rue des sables BP 26 à Viry-Chatillon (91171), représentée par ses représentants légaux en exercice, par Me Lapp ; la société Darras et Jouanin demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0504656/6-2 du 5 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la Régie Autonome des Transports Parisiens (RATP) à lui verser une somme de 170 591,95 euros TTC assortie des intérêts moratoires contractuels

et de la capitalisation de ces intérêts ;

2°) à titre principal, sur un f...

Vu la requête, enregistrée le 16 septembre 2011, présentée pour la SAS Darras et Jouanin, dont le siège est 2, rue des sables BP 26 à Viry-Chatillon (91171), représentée par ses représentants légaux en exercice, par Me Lapp ; la société Darras et Jouanin demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0504656/6-2 du 5 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la Régie Autonome des Transports Parisiens (RATP) à lui verser une somme de 170 591,95 euros TTC assortie des intérêts moratoires contractuels et de la capitalisation de ces intérêts ;

2°) à titre principal, sur un fondement contractuel, de condamner la RATP à lui verser une somme de 170 591,95 euros TTC correspondant à la différence entre les projets de décomptes définitifs tacitement acceptés par la RATP et les règlements intervenus, assortie des intérêts moratoires contractuels et de la capitalisation de ces intérêts ;

3°) à titre subsidiaire, sur un fondement contractuel, de condamner la RATP à lui verser une somme de 109 549,86 euros TTC correspondant au montant des réclamations régulièrement présentées, assortie des intérêts moratoires contractuels et de la capitalisation de ces intérêts ;

4°) à titre très subsidiaire, sur un fondement quasi-contractuel et quasi-délictuel, de condamner la RATP à lui verser une somme de 170 591,95 euros TTC correspondant aux dépenses utilement exposées par l'entreprise ainsi qu'à la perte de bénéfice, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ces intérêts ;

5°) de mettre à la charge de la RATP une somme de 50 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code du commerce ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu la loi n° 2000-656 du 13 juillet 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 novembre 2103 :

- le rapport de Mme Vrignon, premier conseiller,

- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., substituant Me Lapp, avocat de la société Darras et Jouanin, et de Me Giudicelli, avocat de la RATP ;

1. Considérant que, dans le cadre d'un marché à commandes portant sur des travaux de maçonnerie, d'entretien et de modification d'ouvrages, la RATP a confié à la société Darras et Jouanin, le 30 octobre 1992, le lot n° 2 portant sur l'ensemble des ouvrages en stations et interstations situés sur les lignes 2, 3bis, 11, 12, 13 et 13bis du métro, sur le funiculaire de Montmartre et sur le centre de perfectionnement technique et administratif ; que, par un avenant n° 1 en date du 31 mai 1994, la société Darras et Jouanin s'est également vue confier des travaux de rénovation des stations de métro dans le cadre d'une opération intitulée " RAVIVER " ; que, par la présente requête, la société Darras et Jouanin relève appel du jugement du 5 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande principale tendant à la condamnation de la RATP à lui verser une somme de 170 591,95 euros TTC au titre des décomptes définitifs des différentes commandes dont elle a assuré l'exécution ainsi ses demandes formulées à titre subsidiaire et très subsidiaire ;

Sur la validité du contrat :

2. Considérant que lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l'exécution du contrat qui les lie, il incombe en principe à celui-ci, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, de faire application du contrat ; que, toutefois, dans le cas seulement où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, il doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel ; qu'ainsi, lorsque le juge est saisi d'un litige relatif à l'exécution d'un contrat, les parties à ce contrat ne peuvent invoquer un manquement aux règles de passation, ni le juge le relever d'office, aux fins d'écarter le contrat pour le règlement du litige ; que, par exception, il en va autrement lorsque, eu égard d'une part à la gravité de l'illégalité et d'autre part aux circonstances dans lesquelles elle a été commise, le litige ne peut être réglé sur le fondement de ce contrat ;

3. Considérant, d'une part, que contrairement à ce que soutient la société Darras et Jouanin, le marché litigieux a été approuvé par une délibération du conseil d'administration de la RATP en date du 25 septembre 1992 ; que, d'autre part, la délégation de pouvoirs consentie par le président directeur général de la RATP le 1er juillet 1989 au directeur général adjoint notamment pour ce qui concerne les marchés a été accordée jusqu'au 31 décembre 1989 ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que, postérieurement à cette date, cette délégation de pouvoirs ait été renouvelée ; que le président directeur général de la RATP n'était dès lors, en tout état de cause, pas dessaisi de son pouvoir de déléguer ses pouvoirs en la matière lorsqu'il a décidé, le 14 octobre 1992, de déléguer au directeur du département des infrastructures et aménagements le pouvoir de conclure et de signer les marchés et contrats, leurs avenants éventuels ainsi que les bons de commande ; qu'à supposer même que cette décision du 14 octobre 1992 devait être régulièrement publiée pour entrer en vigueur, l'absence de publication de cette décision ne constitue pas, en tout état de cause, un vice d'une particulière gravité justifiant que soit écartée l'application du contrat ; que, dès lors, la société Darras et Jouanin, qui ne peut au demeurant pas demander au juge d'écarter le contrat pour régler le litige l'opposant à la RATP seulement pour ce qui concerne la partie pour laquelle elle n'aurait pas obtenu satisfaction sur un fondement contractuel, n'est pas fondée à soutenir que le marché litigieux est entaché de nullité ;

Sur le règlement du litige sur un fondement contractuel :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 2-1 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés de travaux conclus par la RATP (CCAGT-RATP), dans sa version applicable au marché litigieux : " (...) Le maître d'oeuvre est la personne qui, pour sa compétence technique, est chargée par le Directeur concerné ou par son délégué de diriger et de contrôler l'exécution des travaux et de proposer leur réception et leur règlement ; elle signe notamment les ordres de services : c'est le chef du service concerné ou son délégué " ; qu'aux termes de l'article 13-32 du CCAGT-RATP : Le projet de décompte définitif est remis au chef de service ou à son délégué dans le délai de quatre-vingt-dix jours à compter de la date de notification de la décision de réception des travaux telle qu'elle est prévue au 3 de l'article 41-3, ou de trente jours après la publication de l'index de référence permettant la révision du solde. Les délais de quatre-vingt-dix et trente jours précités ne sont pas applicables aux marchés à commandes pour lesquels les délais de présentation des projets de décompte définitifs sont laissés à l'appréciation du chef de service ou de son délégué " ; qu'aux termes de l'article 13-41 : " Le décompte définitif, signé par le chef de service ou par son délégué, doit, être notifié à l'entrepreneur par ordre de service au plus tard quatre-vingt dix jours après la remise du projet de décompte définitif (...). Pour les marchés à commande (...) les délais d'acceptation pourront être supérieurs à ceux-ci-dessus " ;

5. Considérant que, par une lettre en date du 23 juillet 1993, notifiée le 26 juillet 1993, à l'en-tête de la RATP, le responsable de l'unité des aménagements et maintenance des ouvrages ferroviaires du département des infrastructures et aménagements de la RATP a informé la société Darras et Jouanin qu'en application de l'article 13-32 du CCAGT-RATP, le délai de présentation des projets de décompte serait de six mois à compter du jour de la réception des travaux ; que, faute pour la société Darras et Jouanin de respecter ce délai, applicable notamment aux contrats " en cours de validité ", il serait fait application, à compter du 1er janvier 1994, des pénalités prévues à l'article 20 de ce même CCAGT-RATP ; qu'il a également précisé que " Pour la RATP, le délai d'acceptation des décomptes sera de trois mois. Si à compter du 1er janvier 1994, ce délai n'était pas respecté, les décomptes concernés seraient réputés acceptés et ce, quelle que soit la date de présentation " ; qu'il a enfin indiqué que " cette lettre a valeur de lettre-avenant " ;

6. Considérant, d'une part, qu'il ne résulte pas de l'instruction que la société Darras et Jouanin aurait, postérieurement à la réception de cette lettre, formulé des réserves sur les nouvelles conditions de présentation des projets de décompte et sur les nouvelles modalités d'acceptation des décomptes figurant dans la lettre du 23 juillet 1993 ; qu'elle est dès lors réputée avoir consenti, ainsi qu'elle le soutient, aux propositions formulées par la RATP ; que, contrairement à ce que soutient la RATP, les clauses de l'avenant n°1 n'ont eu ni pour objet ni pour effet de modifier les termes de cette lettre ; qu'il ne résulte pas davantage de l'instruction que la RATP aurait ultérieurement entendu modifier le contenu de cette lettre du 23 juillet 1993 ; que, dès lors, ce document doit être regardé comme un avenant au contrat liant la RATP et la société Darras et Jouanin ;

7. Considérant, d'autre part, qu'eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, et compte tenu des circonstances de l'espèce, en particulier de l'apparence de compétence que les fonctions qu'il exerçait en qualité de maître d'oeuvre conféraient au signataire de la lettre du 23 juillet 1993, dont il n'est pas établi ni même réellement allégué qu'il aurait pu signer puis appliquer cet avenant pendant plusieurs années sans que sa hiérarchie, et notamment le directeur du département des infrastructures et aménagements, n'en ait été informé, la RATP ne peut pas invoquer, pour écarter l'application de la procédure d'acceptation des projets de décomptes définitifs prévue par ladite lettre, la circonstance que celle-ci n'a pas été signée selon les formes et les procédures requises pour les avenants et que son signataire n'était pas compétent pour engager contractuellement la RATP ;

8. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 13-43 du CCAGT-RATP : "(...) Si la signature du décompte définitif est refusée ou donnée avec réserves, les motifs de ce refus ou de ces réserves doivent être exposés par l'entrepreneur dans un mémoire de réclamations qui précise le montant des sommes dont il revendique le paiement et qui fournit les justifications nécessaires en reprenant, sous peine de forclusion, les réclamations déjà formulées antérieurement et qui n'ont pas encore fait l'objet d'un règlement définitif ; ce mémoire doit être remis au chef de service ou à son délégué dans le délai de quarante-cinq jours indiqué ci-dessus. Le règlement du différend intervient alors suivant les modalités indiquées à l'article 50 (...) " ;

9. Considérant qu'il résulte de l'ensemble des stipulations précitées du CCAGT-RATP ainsi que de la lettre du 20 juillet 1993 que l'entrepreneur doit remettre son projet de décompte définitif dans un délai de six mois à compter de la notification de la décision de réception des travaux ; que la RATP dispose alors d'un délai de trois mois pour accepter, ou non, ce projet de décompte définitif ; que si la RATP ne notifie pas à l'entrepreneur, avant l'expiration de ce délai de trois mois, le décompte définitif du marché ou, à défaut, un document par lequel elle refuse d'accepter ce projet de décompte définitif, ce dernier est réputé être définitivement accepté par la RATP et devient alors le décompte définitif du marché ; que, dans le cas où le projet de décompte définitif n'est pas accepté par la RATP dans ce délai de trois mois, celle-ci établit elle-même le décompte définitif du marché ; que, pour contester le décompte définitif établi par la RATP, l'entrepreneur doit d'abord remettre au chef de service ou à son délégué un premier mémoire de réclamations, conforme aux prescriptions des articles 13-43 et 13-44 du CCAG-RATP, dans un délai de quarante-cinq jours à compter de la date à laquelle le décompte définitif a été notifié ;

10. Considérant, par ailleurs, qu'aux termes de l'article 5-3 du CCAGT-RATP : " Lorsque, en exécution des dispositions du marché, un document doit être remis, dans un délai fixé, par l'entrepreneur à la RATP, ou réciproquement ou encore lorsque la remise d'un document doit faire courir un délai, le document doit être remis au destinataire contre récépissé ou lui être adressé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception postale. La date du récépissé ou de l'avis de réception postal fait foi " ;

11. Considérant que si les stipulations précitées de l'article 5-3 du CCAGT-RATP accordent une valeur contractuelle aux mentions figurant sur les récépissés ou les avis de réception postaux qui " font foi " pour ce qui concernent la date de remise de certains documents, elles ne font toutefois pas obstacle à ce que l'une des parties puisse également apporter la preuve, par tous moyens, de la réception de ces documents par l'autre partie ;

En ce qui concerne les décomptes définitifs relatifs aux commandes correspondant aux ordres de service n°IZ577390, n°IZ677142 et n°IZ577403 :

S'agissant de l'opération " RAVIVER ligne 11 " exécutée sur le fondement de l'" OS IZ577390 " :

12. Considérant qu'il ressort des mentions portées sur le document intitulé " décompte définitif ", et en particulier de la mention " le présent décompte définitif a été dressé le 30 novembre 1999 par J. M C...surveillant des travaux ", que le projet de décompte définitif de la SAS Darras et Jouanin concernant cette opération, en date du 3 mars 1997, a été reçu par la RATP au plus tard le 30 novembre 1999 ; que, compte tenu du visa de " R. Malaverne " apposé le 11 avril 2000 et de la mention " bon pour paiement " apposée par la directrice de l'unité le 12 avril 2000, ce document intitulé " décompte définitif " a été transmis au plus tôt à la société Darras et Jouanin le 12 avril 2000 ; qu'à cette date, le délai contractuel de trois mois dont disposait la RATP pour ne pas accepter le projet de décompte définitif de la société était expiré, de sorte que ce projet est réputé être devenu le décompte définitif de cette opération ;

13. Considérant qu'il résulte de l'instruction, d'une part, que la société Darras et Jouanin a perçu des acomptes d'un montant total de 5 240 000 F HT alors que le projet de décompte définitif réputé accepté s'élève à 5 907 304,40 F HT ; que, d'autre part, si la RATP soutient avoir versé à la société Darras et Jouanin la somme de 69 813,52 F HT au titre du solde calculé sur la base du décompte définitif établi, tardivement, par ses soins, elle n'apporte aucune justification à l'appui de ses allégations alors que ce versement est contesté par la société Darras et Jouanin ; que la RATP ne peut pas se fonder, pour justifier sa carence, sur ce que les dispositions de l'article L. 123-22 du code du commerce ne lui imposent de conserver les documents comptables et les pièces justificatives que pendant dix ans, ces dispositions ne faisant nullement obstacle à la conservation de ces mêmes documents et pièces ou de tout autre justificatif au-delà de ce délai ; que, par ailleurs et en tout état de cause, la requête introduite par la société Darras et Jouanin devant le Tribunal administratif de Paris le 16 mars 2005, dans lequel le versement du solde de 69 813,52 F HT est implicitement mais nécessairement contesté, a interrompu le délai de prescription prévu à l'article L. 110-4 du code du commerce ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Darras et Jouanin a dès lors droit, au titre du solde de la commande en cause, à la somme de 667 304,40 F HT, soit 101 729,90 euros HT ;

S'agissant de la commande " République - aménagement des vestiaires local de maîtrise " exécutée sur le fondement de l'OS n°IZ677142 :

15. Considérant qu'il ressort des mentions portées sur le document intitulé " décompte définitif ", et en particulier de la mention " le présent décompte définitif a été dressé le 30 novembre 1999 par J.M. C...surveillant des travaux ", que le projet de décompte définitif de la société Darras et Jouanin concernant cette opération, en date du 17 février 1997, a été reçu par la RATP au plus tard le 30 novembre 1999 ; que, compte tenu du visa de " R. Malaverne ", de la mention " bon pour paiement " de la directrice de l'unité apposés le 30 mars 2000 et de la mention indiquant la " date de passage ", le 5 avril 2000, de la société Darras et Jouanin, le document intitulé " décompte définitif " a été remis au plus tôt à la société Darras et Jouanin le 5 avril 2000 ; qu'à cette date, le délai contractuel de trois mois dont disposait la RATP pour ne pas accepter le projet de décompte définitif de la société était expiré, de sorte que ce projet est réputé être devenu le décompte définitif de cette opération ;

16. Considérant qu'il résulte de l'instruction, que la société Darras et Jouanin a perçu des acomptes d'un montant total de 140 000 F HT ainsi qu'une somme de 96 781,17 F HT au titre du solde calculé sur la base du décompte définitif établi, tardivement, par la RATP, soit un total de 236 781,17 F HT, alors que le projet de décompte définitif réputé accepté s'élève à 272 210,17 F HT; que la société Darras et Jouanin a dès lors droit, au titre du solde de la commande en cause, à la somme de 35 429 F HT, soit 5 401,11 euros HT ;

S'agissant de la commande " Plan de propreté-stations diverses " exécutée sur le fondement de l'" OS IZ577403 " :

17. Considérant qu'il ressort des mentions portées sur le document intitulé " décompte définitif ", et en particulier de la mention " le présent décompte définitif a été dressé le 10 juillet 2000 par Guy Carreau " ainsi que de la mention " G. Carreau surveillant des travaux " et de la date du 10 juillet 2000, figurant sur le projet de décompte définitif de cette commande établi par la société Darras et Jouanin le 19 février 1996, que le projet de décompte définitif a été reçu par la RATP au plus tard le 10 juillet 2000 ; que, compte tenu du visa de " M.A... " apposé le 18 décembre 2000, de la mention " bon pour paiement " apposée le 26 décembre 2000 et de la mention indiquant la " date de passage ", le 4 janvier 2001, de la société Darras et Jouanin, le document intitulé " décompte définitif " a été remis au plus tôt à la société Darras et Jouanin le 4 janvier 2001 ; qu'à cette date, le délai contractuel de trois mois dont disposait la RATP pour ne pas accepter le projet de décompte définitif de la société était expiré, de sorte que ce projet est réputé être devenu le décompte définitif de cette opération ;

18. Considérant qu'il résulte de l'instruction, que la société Darras et Jouanin a perçu des acomptes d'un montant total de 550 000 F HT alors que le projet de décompte définitif réputé accepté s'élève à 615 341,29 F HT ; qu'elle a dès lors droit, au titre du solde de cette commande, à la somme de 65 341,29 F HT, soit 9 961,22 euros HT ;

En ce qui concerne les décomptes définitifs relatifs aux commandes correspondant aux ordres de service n° IZ776049, n° IZ577300, n° IZ677238, n° IZ677127 et n° IZ777015 :

19. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que les projets de décompte définitifs relatifs aux commandes correspondant aux ordres de service n° IZ776049, n° IZ577300, n° IZ677238, n° IZ677127 et n° IZ777015, établis respectivement les 29 mai 1997 pour les deux premiers et 23 mai 1997, 22 janvier 1997 et 13 novembre 1997 pour les suivants, ont été reçus, de manière certaine, par la RATP, respectivement les 23 juillet 1997, 4 juin 1997, 19 novembre 1997 et 8 janvier 1998 ; qu'il résulte par ailleurs des mentions figurant sur les décomptes définitifs établis par la RATP et des dates auxquelles la société Darras et Jouanin a établi les mémoire de réclamation relatifs à ces décomptes définitifs, que ces derniers ont été au plus tard remis à la société requérante respectivement les 11 août 1997, 9 juin 1997,

28 novembre 1997 et 16 février 1998 ; qu'à ces différentes dates, le délai contractuel de trois mois dont disposait la RATP pour ne pas accepter les projets de décompte définitif de la société n'était pas expiré ; que, par ailleurs, la date certaine à laquelle le projet de décompte définitif relatif à la commande correspondant à l'ordre de service n° IZ777015 a été reçue par la RATP, qui a établi un décompte définitif notifié à la société Darras et Jouanin au plus tard le 3 avril 2000, n'est pas établie ; que, dès lors, les projets de décomptes définitifs en cause ne peuvent être regardés comme ayant été tacitement acceptés par la RATP ;

20. Considérant, en deuxième lieu, que la société Darras et Jouanin ne produit aucun élément de nature à établir que les mémoires de réclamation concernant les décomptes définitifs relatifs aux commandes correspondant aux ordres de service n°IZ776049, n° IZ577300,

n° IZ677238, n° IZ677127 et n° IZ777015 ont été remis à la RATP dans un délai de quarante-cinq jours à compter des dates auxquelles ces décomptes définitifs lui ont été notifiés ; que, dans ces conditions, la RATP est fondée à soutenir que les décomptes définitifs en cause sont réputés avoir été acceptés par la société Darras et Jouanin, qui ne peut plus les contester devant le juge du contrat ;

En ce qui concerne les décomptes définitifs relatifs aux commandes correspondant aux ordres de service n° IZ828443, n° IZ826028 et n° IZ828287 :

21. Considérant que si la société Darras et Jouanin soutient avoir transmis à la RATP les décomptes définitifs relatifs aux commandes correspondant aux ordres de service n° IZ828443, n° IZ826028 et n° IZ828287, établis par ses soins respectivement les 25 juin 1999, 31 août 1998 et 28 mai 1999, et qu'aucun décompte définitif ne lui a été notifié en retour, la RATP soutient qu'elle n'a pas reçu ces projets ; que la société Darras et Jouanin, à qui incombe la charge de la preuve, n'établit pas la réalité de la transmission des projets de décomptes définitifs à la RATP ; que, par suite, et alors même que la RATP ne donne aucune explication sur les raisons qui pourraient expliquer que n'ayant pourtant pas reçu les projets de décomptes, elle n'a pas mis en oeuvre la procédure d'établissement d'office des décomptes définitifs en application des dispositions de l'article 13-32 du CCAGT-RATP, la société Darras et Jouanin ne peut pas soutenir que les projets en cause ont été tacitement approuvés par la RATP et demander en conséquence le versement des sommes correspondantes ;

Sur le taux de TVA applicable :

22. Considérant que la loi du 13 juillet 2000 de finances rectificative pour 2000 a ramené le taux normal de T.V.A. applicable aux prestations de service de 20,6 % à 19,6 % ; que l'article 4 de cette loi dispose que ces dispositions " s'appliquent aux opérations pour lesquelles la taxe est exigible à compter du 1er avril 2000 " ; qu'en vertu de l'article 269 du code général des impôts, applicable en l'espèce, le fait générateur en matière de prestations de service se produit " au moment où (...) la prestation de services est effectuée ", alors que la taxe ne devient exigible que " lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération (...) " ; que l'exigibilité de la taxe ne pouvait en l'espèce intervenir qu'après la détermination de la rémunération par le juge administratif, c'est-à-dire en tout état de cause après le 1er avril 2000 ; qu'ainsi, nonobstant le fait que les travaux en litige ont été réalisés antérieurement à cette date, le taux de TVA applicable aux sommes dues à la société Darras et Jouanin est de 19,6 % ; que la société Darras et Jouanin a ainsi droit à la somme de 121 668,96 euros TTC au titre du solde de la commande correspondant à l'OS n° IZ577390, à la somme de 6 459,73 euros TTC au titre du solde de la commande correspondant à l'OS n° IZ677142 et à la somme de 11 913,62 euros TTC au titre du solde de la commande correspondant à l'OS n° IZ577403 ;

Sur les intérêts moratoires et de la capitalisation des intérêts :

23. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 11-7 du CCAG-RATP, relatif au taux d'intérêt des pénalités de retard : " L'entrepreneur a droit à des intérêts moratoires en cas de retard dans les paiements tels qu'ils sont prévus au 22 (paiement de l'acompte) et au 42 (paiement du solde) de l'article 13, sauf si ce retard résulte de l'application des dispositions du 12 de l'article 4 (absence de constitution du cautionnement) ou du 34 de l'article 10 (non-production de la décomposition d'un prix dans le délai prescrit) " ; qu'aux termes de l'article 13-4 du même CCAG, relatif au " Décompte définitif - Solde " : " (...) 13-42 Le paiement du solde doit intervenir en principe dans un délai de soixante jours à compter de la notification du décompte définitif sauf stipulation contraire du marché (...) " ;

24. Considérant qu'en application des stipulations précitées ainsi que de celles de l'article 13-43 du CCAG-RATP et de la lettre du 23 juillet 1993, le défaut de mandatement du solde d'un marché de travaux régi par les stipulations du CCAG-RATP dans le délai de soixante jours à compter de la date à laquelle le projet de décompte définitif de l'entrepreneur est réputé avoir été accepté par la RATP fait courir au bénéfice de ce dernier des intérêts moratoires ; que la circonstance que le solde du marché donne lieu à réclamation est sans incidence sur l'assiette de calcul des intérêts, laquelle doit inclure l'ensemble des sommes restant à payer par la RATP au titre du règlement du marché ;

25. Considérant que, compte tenu de qui a été dit ci-dessus, les projets de décomptes définitifs relatifs aux commandes correspondant aux OS n° IZ577390, n° IZ677142 et n° IZ577403 sont réputés avoir été respectivement acceptés par la RATP le 29 février 2000 pour les deux premiers et le 10 octobre 2000 pour le troisième ; que la RATP était ainsi tenue de mandater le solde des commandes avant l'expiration d'un délai de soixante jours, soit au plus tard le 29 avril 2000 et le 9 décembre 2000 ; que, dès lors, les intérêts moratoires demandés par la société Darras et Jouanin lui sont dus à compter du 30 avril 2000 sur la somme de 121 668,96 euros TTC, du 30 avril 2000 sur la somme de 6 459,73 euros TTC et du 10 décembre 2000 sur la somme de 11 913,62 euros TTC ;

26. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 1154 du code civil : " Les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière " ; que la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d'une année ; qu'en ce cas, cette demande ne prend toutefois effet qu'à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière ; que la société Darras et Jouanin a demandé la capitalisation des intérêts dans sa requête enregistrée au Tribunal administratif de Paris le 16 mars 2005 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 16 mars 2005 puis à chaque échéance annuelle ultérieure ;

27. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la société Darras et Jouanin est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande indemnitaire et à demander l'annulation de ce jugement et la condamnation de la RATP à lui verser les sommes de 121 668,96 euros TTC, de 6 459,73 euros TTC et de 11 913,62 euros TTC, respectivement assorties des intérêts au taux des pénalités de retard contractuel à compter du 30 avril 2000 pour les deux premières de ces sommes et du 10 novembre 2000 pour la troisième, et de la capitalisation de ces intérêts à compter du 16 mars 2005 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

28. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la RATP le versement d'une somme de 2 500 euros au titre des frais exposés par la société Darras et Jouanin et non compris dans les dépens ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font en revanche obstacle à ce que soit mis à la charge de la société Darras et Jouanin, qui n'est pas dans la présent instance la partie perdante, une quelconque somme au bénéfice de la RATP au titre de ces mêmes frais ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0504656/6-2 du 5 juillet 2011 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La RATP est condamnée à verser à la SAS Darras et Jouanin les sommes de 121 668,96 euros, 6 459,73 euros et 11 913,62 euros, respectivement assorties des intérêts au taux des pénalités de retard contractuel à compter du 30 avril 2000, 30 avril 2000 et du 10 novembre 2000. Pour chacune de ces sommes, les intérêts échus le 16 mars 2005 seront capitalisés pour porter eux-mêmes intérêts à compter de cette date et à chaque échéance annuelle ultérieure.

Article 3 : La RATP versera à la SAS Darras et Jouanin la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par les parties est rejeté.

''

''

''

''

2

N° 11PA04178


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA04178
Date de la décision : 19/11/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat.


Composition du Tribunal
Président : M. PERRIER
Rapporteur ?: Mme Cécile VRIGNON-VILLALBA
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : ADDEN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-11-19;11pa04178 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award