Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 17 mai et 15 juillet 2011, présentés pour le syndicat des fonctionnaires du Sénat, dont le siège est 15, rue de Vaugirard à Paris (75006), représenté par son président, par Me C... ; le syndicat des fonctionnaires du Sénat demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0915164 en date du 15 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 juillet 2009 par laquelle le conseil de questure du Sénat a décidé de conclure un avenant au marché attribué le 18 février 2009 à la société " Ernst et Young " pour la réalisation d'une étude sur l'adéquation des moyens du Sénat à ses missions ;
2°) d'annuler la décision litigieuse ;
Il soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'il ne justifiait pas d'un intérêt pour agir dès lors que l'acte attaqué est de nature à porter atteinte aux droits et prérogatives des fonctionnaires du Sénat et à affecter leurs conditions d'emploi et de travail ;
- l'avenant en cause constitue en réalité un nouveau contrat, qui ne pouvait être conclu que sous réserve du respect de mesures de publicité et à l'issue d'une procédure de mise en concurrence ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 31 octobre 2011, présenté pour le Sénat, par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, qui conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge du syndicat des fonctionnaires du Sénat de la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- le moyen tiré de ce que le jugement aurait été rendu à l'issue d'une procédure irrégulière n'est pas assorti de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
- pour le surplus, les moyens soulevés par le syndicat des fonctionnaires du Sénat ne sont pas fondés ;
- en tout état de cause, le litige ne relevait pas de la compétence de la juridiction administrative ;
- le président du syndicat des fonctionnaires du Sénat ne justifiait pas de sa qualité pour agir ;
Vu, enregistré au greffe le 5 décembre 2011, le mémoire en réplique présenté pour le syndicat des fonctionnaires du Sénat et concluant aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;
Il soutient, en outre, que le président du syndicat des fonctionnaires du Sénat a justifié avoir été régulièrement habilité à agir par l'assemblée générale de ce syndicat ;
Vu, enregistré au greffe le 8 décembre 2011, le mémoire en défense présenté pour la société " Ernst et Young ", par Me Kern, et concluant au rejet de la requête, à la condamnation du syndicat des fonctionnaires du Sénat aux dépens de l'instance et à la mise à la charge du syndicat des fonctionnaires du Sénat de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- les moyens soulevés par le syndicat des fonctionnaires du Sénat ne sont pas fondés ;
- en tout état de cause, le conseil de questure du Sénat était compétent pour prendre la décision attaquée ; le moyen tiré de ce que la décision serait entachée d'incompétence eu égard à l'article 101 du règlement du Sénat est inopérant ;
- l'arrêté du 19 décembre 2006 ne prévoit pas l'obligation de saisir la commission d'appels d'offres préalablement à la conclusion d'un marché sans publicité ni mise en concurrence ;
- bien qu'intitulé " avenant ", le contrat constitue en réalité un marché complémentaire, qui pouvait être passé sans publicité ni mise en concurrence, conformément à l'article 35 du code des marchés publics ;
Vu, enregistré au greffe le 31 janvier 2012, le mémoire en réplique présenté pour le syndicat des fonctionnaires du Sénat et concluant aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;
Il soutient, en outre, que, contrairement à ce que soutient la société " Ernst et Young " il s'agit bien en l'espèce d'un avenant, et non d'un marché complémentaire ;
Vu, enregistré au greffe le 23 mars 2012, le mémoire en duplique présenté pour le Sénat et concluant aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes motifs ;
Vu, enregistré au greffe le 25 avril 2012, le mémoire présenté pour la société " Ernst et Young " et concluant aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes motifs ;
Elle soutient, en outre, qu'elle ne s'oppose pas à la qualification du contrat retenue par le Sénat ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 octobre 2013 :
- le rapport de M. Lemaire, premier conseiller,
- les conclusions de M. Boissy, rapporteur public,
- les observations de Me A...de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat du Sénat,
- et les observations de MeB..., substituant Me Kern, avocat de la société " Ernst et Young " ;
1. Considérant que le syndicat des fonctionnaires du Sénat relève appel du jugement en date du 15 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 juillet 2009 par laquelle le conseil de questure du Sénat a décidé de conclure un avenant au marché attribué le 18 février 2009 à la société " Ernst et Young " pour la réalisation d'une étude sur l'adéquation des moyens du Sénat à ses missions ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à l'issue d'une procédure d'appel d'offres et par une décision du 18 février 2009, le conseil de questure du Sénat a attribué à la société " Ernst et Young " un marché ayant pour objet " la réalisation d'une étude sur l'adéquation des moyens du Sénat à ses missions ", portant en particulier sur l'adéquation de son organisation administrative générale à ses besoins, l'examen critique de ses effectifs globaux, l'observation de l'efficacité avec laquelle les tâches sont accomplies, l'étude de l'organisation des rythmes de travail et l'évaluation des moyens financiers et matériels, notamment informatiques ; que l'exécution de ce marché a révélé la nécessité de réaliser d'autres auditions que celles qui avaient été initialement prévues ; que, par la décision attaquée du 15 juillet 2009, le conseil de questure du Sénat a, dans ces circonstances, décidé de conclure un avenant au marché attribué à la société " Ernst et Young " ; que cet avenant n'a pour objet que d'assurer la correcte exécution d'un marché ayant lui-même pour objet la réalisation d'un étude assortie de simples préconisations, constituant un " document de travail préalable " à une réflexion générale sur l'organisation et les moyens du Sénat ; qu'ainsi, et alors même que cette étude de la société " Ernst et Young " porte sur des sujets tels que l'examen critique des effectifs globaux, l'efficacité des agents ou l'organisation des rythmes de travail, les stipulations de l'avenant en cause ne sont par elles-mêmes ni susceptibles de porter atteinte aux droits que les fonctionnaires du Sénat tiennent de leur statut ou aux prérogatives attachées aux corps auxquels ils appartiennent, ni de nature à affecter leurs conditions d'emploi et de travail ; que les stipulations de cet avenant n'étant dès lors pas de nature à le léser dans ses intérêts de façon certaine et directe, le syndicat des fonctionnaires du Sénat n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Paris a, pour ce motif, rejeté comme irrecevable la demande dont il avait été saisi ;
Sur les conclusions tendant à la condamnation du syndicat des fonctionnaires du Sénat aux dépens de l'instance :
3. Considérant que la présente instance n'a entraîné pour la société " Ernst et Young " aucune charge susceptible d'être incluse dans les dépens ; que ses conclusions tendant à la condamnation du syndicat des fonctionnaires du Sénat aux dépens de l'instance ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
4. Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du syndicat des fonctionnaires du Sénat le versement au Sénat et à la société " Ernst et Young " d'une somme de 1 500 euros chacun au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du syndicat des fonctionnaires du Sénat est rejetée.
Article 2 : Le syndicat des fonctionnaires du Sénat versera au Sénat et à la société " Ernst et Young " une somme de 1 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions présentées par la société " Ernst et Young " tendant à la condamnation du syndicat des fonctionnaires du Sénat aux dépens de l'instance sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat des fonctionnaires du Sénat, au Sénat et à la société " Ernst et Young ".
Délibéré après l'audience du 4 octobre 2013, à laquelle siégeaient :
- Mme Driencourt, président,
- Mme Couvert-Castéra, président-assesseur,
- M. Lemaire, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 18 octobre 2013.
Le rapporteur,
O. LEMAIRELe président,
L. DRIENCOURT
Le greffier,
J. BOUCLY
La République mande et ordonne au premier ministre, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 11PA02344