Vu la requête, enregistrée le 19 mars 2012, présentée par le préfet de police ; le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1117655/5-2 du 9 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé son arrêté du 7 février 2011 déclarant caduc le droit au séjour de M. B...A...et faisant obligation à ce dernier de quitter le territoire français et a, d'autre part, mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de rejeter la demande de M. A...devant le Tribunal administratif de Paris ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au droit des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des Etats membres ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi du 11 juillet 1979 modifiée ;
Vu la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration ;
Vu le décret n°2007-371 du 21 mars 2007 relatif au droit de séjour en France des citoyens de l'Union européenne, des ressortissants des autres Etats parties à l'Espace économique européen et de la Confédération suisse ainsi que des membres de leur famille ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 octobre 2013 :
- le rapport de Mme Julliard, rapporteur ;
1. Considérant que M.A..., ressortissant roumain né le 1er janvier 1989, a été interpellé par les services de police le 7 février 2011 dans l'enceinte de la gare Montparnasse à Paris où il se livrait à la mendicité ; que, par un arrêté du même jour, le préfet de police estimant que M. A...était entré en France depuis plus de trois mois, qu'il ne pouvait justifier de ressources ou de moyens d'existence pour lui et sa famille et qu'il se trouvait en situation de complète dépendance par rapport au système d'assistance sociale français puisqu'il ne justifiait pas d'une assurance maladie personnelle en France ou dans son pays d'origine, a mis fin à son droit au séjour en déclarant celui-ci " caduc " et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois ; que le préfet de police relève appel du jugement du 9 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé l'arrêté précité du 7 février 2011 et a, d'autre part, mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne (...) a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : 1° S'il exerce une activité professionnelle en France ; 2° S'il dispose pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 4° de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie (...) " ; que le second alinéa de l'article L. 511-1-I de ce code dispose que l'autorité administrative " peut, par décision motivée, obliger un ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse à quitter le territoire français lorsqu'elle constate qu'il ne justifie plus d'aucun droit au séjour tel que prévu par l'article L. 121-1 " ;
3. Considérant qu'il incombe à l'administration, en cas de contestation sur la durée du séjour d'un citoyen de l'Union européenne dont elle a décidé l'éloignement, de faire valoir les éléments sur lesquels elle se fonde pour considérer qu'il ne remplit plus les conditions pour séjourner en France ; que l'administration peut, notamment, s'appuyer sur les déclarations préalablement faites par l'intéressé ; qu'il appartient à l'étranger qui demande l'annulation de cette décision d'apporter tout élément de nature à en contester le bien-fondé, selon les modalités habituelles de l'administration de la preuve ;
4. Considérant que pour annuler l'arrêté du préfet de police du 7 février 2011 mettant fin au droit au séjour de M. A...et lui faisant obligation de quitter le territoire français, le tribunal a considéré que le préfet de police n'avait apporté aucun élément de nature à établir qu'un délai de trois mois s'était écoulé depuis l'entrée sur le territoire national de l'intéressé à la date de la décision litigieuse ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier que si M. A...soutient être entré en France le 3 février 2011, il se borne a produire un billet de train non nominatif au départ de Bucarest à destination de Satu Mare (Transylvanie) portant la date du 3 février 2011 et sans trace d'utilisation ; que ce seul document ne suffit pas à établir la preuve que la durée du séjour de M. A... sur le territoire français était inférieure à trois mois à la date de la décision contestée ; que dès lors qu'il n'est pas contesté que M. A...se livrait à la mendicité dans l'enceinte de la gare Montparnasse au moment de son interpellation, le préfet de police pouvait estimer qu'il ne disposait pas des ressources suffisantes pour pouvoir se maintenir sur le territoire français et, par suite, sur le fondement de l'article L. 511-1 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'obliger à quitter le territoire français ; qu'il en résulte que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a jugé que la durée de séjour de plus de trois mois de M. A...n'était pas établie, et a, pour ce motif, annulé son arrêté du 7 février 2011 ;
5. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le Tribunal administratif de Paris ;
6. Considérant qu'aux termes du 2. de l'article 14 de la directive 2004/38/CE susvisée relatif au maintien du droit de séjour de plus de trois mois : " (...) Dans certains cas spécifiques, lorsqu'il est permis de douter qu'un citoyen de l'Union ou les membres de sa famille remplissent les conditions énoncées aux articles 7, 12 et 13, les Etats membres peuvent vérifier si c'est effectivement le cas. Cette vérification n'est pas systématique " ;
7. Considérant que M. A...se prévaut de ce que, contrairement aux stipulations de l'article 14 de la directive 2004/38/CE, le préfet de police a insuffisamment indiqué les raisons pour lesquelles il a été amené à douter de son droit au séjour en France ; que, toutefois, par la décision attaquée, le préfet de police a visé les textes applicables et précisé que M.A..., entré en France depuis plus de trois mois, ne pouvait justifier de ressources ou de moyens d'existence pour lui et sa famille et qu'il se trouvait en situation de complète dépendance par rapport au système d'assistance sociale français puisqu'il ne justifiait pas d'une assurance maladie personnelle en France ou dans son pays d'origine ; qu'il en a déduit que le droit au séjour de l'intéressé ne pouvait être maintenu ; qu'il résulte des termes mêmes de la décision litigieuse, qui comporte donc l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, que le préfet de police a procédé à un examen individuel de la situation personnelle de M. A...et a procédé aux vérifications prévues par les stipulations précitées ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 14 de la directive 2004/38/CE doit donc être écarté ;
8. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'autorité administrative peut, sans avoir été saisie au préalable d'une demande de titre de séjour par le ressortissant communautaire qui n'est pas dans l'obligation d'en posséder un pour séjourner en France, prendre à son encontre une décision l'obligeant à quitter le territoire français dès lors qu'elle constate qu'il ne remplit aucune des conditions énumérées à l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi le moyen tiré de l'absence de base légale de l'arrêté attaqué doit être écarté ;
9. Considérant que la directive communautaire 2004/38/CE du 29 avril 2004 a été intégralement transposée en droit français sous les articles L. 121-1 et suivants et R. 121-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par l'article 23 de la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration et par le décret 2007-371 du 21 mars 2007 ; que le moyen tiré d'un défaut de transposition de ladite directive, notamment de ses articles 14, 28 et 30 qui n'est assorti d'aucune précision permettant à la Cour d'en apprécier le bien-fondé ne peut qu'être rejeté ;
10. Considérant qu'aux termes de l'article 15 de la directive 2004/38/CE du 29 avril 2004 susvisée : " 1. Les procédures prévues aux articles 30 et 31 s'appliquent par analogie à toute décision limitant la libre circulation d'un citoyen de l'Union ou des membres de sa famille prise pour des raisons autres que d'ordre public, de sécurité publique ou de santé publique (...) " ; qu'aux termes du 1 de l'article 28 de ladite directive : " Avant de prendre une décision d'éloignement du territoire pour des raisons d'ordre public ou de sécurité publique, l'Etat membre d'accueil tient compte notamment de la durée du séjour de l'intéressé sur son territoire, de son âge, de son état de santé, de sa situation familiale et économique, de son intégration sociale et culturelle dans l'Etat membre d'accueil et de l'intensité de ses liens avec son pays d'origine " ; qu'aux termes de l'article 31 de cette même directive : " 1. Les personnes concernées ont accès aux voies de recours juridictionnelles et, le cas échéant, administratives dans l'Etat membre d'accueil pour attaquer une décision prise à leur encontre pour des raisons d'ordre public, de sécurité publique ou de santé publique (...) 3. Les procédures de recours permettent un examen de la légalité de la décision ainsi que des faits et circonstances justifiant la mesure envisagée. Elles font également en sorte que la décision ne soit pas disproportionnée, notamment par rapport aux exigences posées par l'article 28 (...) " ; qu'il résulte des dispositions combinées du 1. de l'article 15 précité de cette directive et du 3. de son article 31 que le 1. de l'article 28 s'applique à toute décision d'éloignement d'un ressortissant communautaire, y compris lorsqu'elle n'est pas fondée sur un motif d'ordre public, de sécurité publique ou de santé publique ;
11. Considérant que la décision portant obligation de quitter le territoire français vise le I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indique, ainsi qu'il a été dit, les raisons circonstanciées pour lesquelles M. A...ne pouvait se maintenir en France au-delà d'une durée de trois mois et était ainsi au nombre des étrangers pouvant faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ; que cette décision précise également qu'en l'espèce, il n'a pas été contrevenu aux articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que cette décision comporte ainsi l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et ne contrevient pas aux stipulations de l'article 28 précité de la directive 2004/38/CE, transposée, comme il vient d'être dit, en droit français sous les articles L. 121-1 et suivants et R. 121-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le moyen tiré de son insuffisante motivation doit donc être écarté comme manquant en fait ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 7 février 2011 ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1117655/5-2 du 9 février 2012 du Tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande de M. A...présentée devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée.
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N° 10PA03855
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N° 12PA01325