Vu la requête, enregistrée le 25 juillet 2012, présentée pour M. et Mme A...B..., demeurant..., par Me Pailhes ; M. et Mme B... demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1106800 du 8 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2005 et 2006 et des pénalités correspondantes ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 septembre 2013 :
- le rapport de Mme Bernard, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public,
- et les observations de Me Pailhes, avocat de M. et Mme B... ;
1. Considérant que M. et Mme B...ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle au titre des années 2005 et 2006 ; que, concomitamment, ils ont fait l'objet d'une vérification de comptabilité de leurs activités respectives de chirurgien-dentiste et d'ophtalmologue portant sur les mêmes années ; que la vérification de comptabilité de l'activité d'ophtalmologue de Mme B...n'a donné lieu à aucune rectification ; qu'en revanche, des rectifications ont été notifiées à M. B... dans la catégorie des bénéfices non commerciaux à raison de son activité de chirurgien-dentiste ; que, par ailleurs, M. B...a fait l'objet d'une vérification de comptabilité de son activité d'exploitant à titre individuel du restaurant " Le Maestro " au titre de la même période, à l'issue de laquelle des rectifications dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux lui ont été notifiées ; que M. et Mme B...relèvent appel du jugement du 8 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont en conséquence été assujettis au titre des années 2005 et 2006 et des pénalités correspondantes ;
Sur le bien fondé des impositions :
En ce qui concerne les bénéfices non commerciaux :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 93 du code général des impôts, relatif au mode de détermination des bénéfices non commerciaux : " 1. Le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession. (...) " ; que, quelle que soit la procédure d'imposition suivie, il appartient au contribuable, en application des dispositions combinées du 1 de l'article 93 précitées et des articles 96 à 99 régissant le régime de la déclaration contrôlée, de fournir des éléments propres à justifier que les sommes qu'il a déduites de son bénéfice non commercial ont constitué des dépenses nécessitées par l'exercice de sa profession ;
3. Considérant, en premier lieu, que l'administration a remis en cause la déduction par M. B... de frais téléphoniques à concurrence des sommes de 2 151 euros et 2 135 euros au titre respectivement des années 2005 et 2006, au motif que seules les dépenses se rapportant à deux des quatre lignes téléphoniques installées au 83 rue Blanche à Paris correspondaient à son activité de chirurgien-dentiste ; qu'en se bornant à produire une carte de visite professionnelle commune à leurs deux activités, sur laquelle apparaissent quatre numéros de téléphone, et à soutenir " que la partie desdits frais regardée comme ne relevant pas de l'activité de M. B... concerne, par définition, celle de son épouse ", les requérants ne démontrent nullement que M. B... était fondé à déduire les frais téléphoniques litigieux à raison de sa propre activité ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que l'administration a remis en cause la déduction par M. B... de charges immobilières afférentes aux lots 83 et 14/61 de la copropriété du 83 rue Blanche à Paris, à concurrence des sommes de 6 247 euros et 10 551 euros au titre respectivement des années 2005 et 2006, au motif que le lot 83 était affecté à l'activité d'ophtalmologue de Mme B... et que le lot 14/61 était un appartement vide, sans eau ni gaz ; qu'à la différence des lots 6 et 71 correspondant à une cave et à un appartement situé au 1er étage de la même copropriété, les lots 83 et 14/61 n'étaient pas inscrits au registre des immobilisations ; qu'en se bornant à produire des constats d'huissier établis en 2011, les requérants n'établissent pas que les lots 83 et 14/61 étaient affectés à l'exercice de l'activité professionnelle de M. B... au cours des années 2005 et 2006 en litige ; que les requérants ne peuvent pas non plus utilement se prévaloir de l'absence de remise en cause de charges immobilières relatives aux mêmes lots à l'occasion d'une vérification de comptabilité portant sur les années 2009 et 2010, postérieures à celles en litige ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration fiscale n'a pas admis en déduction des bénéfices non commerciaux de M. B... les charges immobilières se rapportant aux lots de copropriété 83 et 14/61 ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'en se bornant à produire la copie de factures, établies annuellement par la pharmacie située place Blanche à Paris, qui ne comportent aucune indication sur la nature des produits achetés, les requérants n'établissent pas que les sommes y figurant correspondraient à des achats nécessités par l'exercice de la profession de M. B... ;
6. Considérant, en quatrième lieu, ainsi que l'a jugé le Tribunal, que les requérants n'établissent pas que la somme de 9 898 euros, dont ils demandent la déduction des bénéfices non commerciaux de M. B... de l'année 2006, correspondrait à des charges de personnel, dès lors qu'ils ne justifient ni de la réalité du versement des sommes en cause, ni des fonctions exercées par leurs bénéficiaires ;
En ce qui concerne les bénéfices industriels et commerciaux :
7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge. (...) " ;
8. Considérant qu'il résulte de l'instruction et n'est pas contesté, que les recettes journalières du restaurant " Le Maestro " étaient comptabilisées de façon globale et qu'aucune pièce justificative de ces recettes n'a pu être produite ; que la comptabilité du restaurant " Le Maestro " doit ainsi être regardée comme comportant de graves irrégularités ; que, par ailleurs, l'imposition a été établie conformément à l'avis rendu par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires le 10 décembre 2009 ; que, par suite, il appartient à M. B... d'apporter la preuve du caractère exagéré des rehaussements qui lui ont été notifiés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, en application des dispositions précitées de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales ;
9. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour reconstituer le chiffre d'affaires du restaurant au cours des exercices clos en 2005 et 2006, le vérificateur a demandé à M. B... de conserver pendant une période de trente jours, à compter du 18 avril 2008, les tickets et rouleaux de caisse et de détailler la nature des produits vendus, le nombre de couverts et de groupes servis, ainsi que le prix individuel facturé à chaque client ; que, cependant, les tickets et bandes de caisse présentés à l'issue de cette période n'étaient pas datés et ne permettaient pas d'identifier précisément les produits vendus ; qu'ainsi, faute de pouvoir dégager un coefficient de bénéfice brut fiable, le vérificateur n'a pas pu reconstituer le chiffre d'affaires en recourant à la méthode des achats revendus ; que le vérificateur a par ailleurs identifié, parmi les pièces comptables du restaurant " Le Maestro ", une facture d'achat d'escargots émise par le fournisseur OMDIC, dont le siège est à Chenove (Côte d'Or), libellée au nom du " café Le Chef d'orchestre " à une adresse parisienne inexistante ; qu'il a alors sollicité la brigade de contrôle et de recherche de la direction des services fiscaux de la Côte d'Or, qui, en vertu des articles L. 80 F à L. 80 H du livre des procédures fiscales, a réalisé, le 24 juin 2008, une enquête auprès de la société OMDIC ; qu'au cours de cette enquête, le directeur de la société OMDIC a indiqué que M. B... lui demandait d'établir deux factures, l'une au nom du " Maestro " et l'autre au nom du " Chef d'orchestre " ; que les bons de livraison saisis dans les locaux de la société OMDIC, correspondant aux factures libellées en 2006 au nom du " Chef d'orchestre ", pour l'achat d'un total de 40 800 escargots, indiquaient que la marchandise devait être livrée au restaurant " Le Maestro " ; que le vérificateur a donc reconstitué la seule fraction des recettes de l'année 2006 correspondant aux repas incluant des escargots ; que, pour ce faire, il a tenu compte des conditions d'exploitation du restaurant, desquelles il ressortait que les escargots étaient uniquement destinés aux groupes, auxquels ils étaient systématiquement servis par six en entrée, dans le cadre d'un menu à 8 euros ; que le vérificateur en a déduit que 6 800 repas avaient été dissimulés sur l'année 2006, pour un chiffre d'affaires de 54 400 euros, dont il a déduit un taux de pertes et d'offerts de 5 %, ainsi que le montant des factures réglées en espèces à la société OMDIC ;
10. Considérant que, pour contester les rehaussements procédant de cette reconstitution, qui lui ont été notifiés au titre de l'année 2006, M. B... fait valoir que les achats non comptabilisés d'escargots résultaient des agissements d'un salarié indélicat, responsable des achats du restaurant, qui avait détourné lesdits approvisionnements pour son compte personnel et dans l'intérêt du responsable commercial et du dirigeant de la société OMDIC et que ces agissements ont entraîné le licenciement de ce salarié pour faute grave le 12 décembre 2008 ; qu'il résulte cependant de l'instruction, ainsi qu'il a été dit au point 9 ci-dessus, que si les factures, dont l'une a été trouvée dans la comptabilité du restaurant " Le Maestro ", avaient été établies au nom du client fictif " Le Chef d'orchestre ", les bons de livraison ont en revanche été établis à l'adresse du restaurant " Le Maestro " ; que, par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que le salarié, qui était employé en tant que " commis de salle ", aurait effectivement été en charge des achats du restaurant ; que le requérant ne justifie donc pas qu'il ignorait l'existence de ces livraisons, nonobstant la circonstance qu'il exerçait par ailleurs une activité de chirurgien-dentiste à temps plein ; que, dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que les rectifications procédant de la reconstitution du chiffre d'affaires du restaurant " Le Maestro ", qui lui ont été notifiées au titre de l'année 2006, procèderaient d'une méthode excessivement sommaire ou radicalement viciée et seraient par suite exagérées ;
11. Considérant, par ailleurs, que M. B... fait valoir que les frais afférents à l'utilisation d'un véhicule " Ford Transit ", dont la déduction de ses bénéfices non commerciaux à raison de son activité de chirurgien-dentiste a été remise en cause par l'administration, devraient être admis en charge au titre de ses bénéfices industriels et commerciaux, dès lors que ce véhicule était en réalité utilisé dans le cadre de son activité de restaurateur ; que, cependant, M. B... n'apporte aucun élément au soutien de cette affirmation ;
Sur les pénalités :
12. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt (...) entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ;
13. Considérant que, pour établir le caractère délibéré des omissions de déclaration en matière de bénéfices industriels et commerciaux au titre de l'année 2006, l'administration se fonde notamment sur la circonstance que M. B... disposait d'un compte client fictif dans les écritures de son fournisseur, la société OMDIC ; qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 9 et 10 ci-dessus, que M. B... faisait effectivement établir certaines des factures de ce fournisseur au nom de l'établissement fictif " café Le Chef d'orchestre ", alors que les marchandises étaient livrées à son restaurant " Le Maestro ", lui permettant ainsi de dissimuler une part importante des achats et, par suite, des recettes du " Maestro " ; que, dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme établissant l'intention délibérée du requérant d'éluder l'impôt à raison des recettes ainsi dissimulées ; qu'il suit de là qu'elle était fondée à assortir les suppléments d'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux de l'année 2006 de la majoration de 40 % prévue par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts précité ;
14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.
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N° 12PA03218