Vu l'arrêt du 15 octobre 2012, par lequel la Cour administrative d'appel, avant de statuer sur la requête de M. A...B..., a sursis à statuer sur cette requête afin de transmettre au Conseil d'Etat, en application de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, le dossier de l'affaire et lui soumettre les questions suivantes :
1°) L'interruption du délai de recours contentieux devant les tribunaux administratifs par une demande d'aide juridictionnelle est-elle régie par les dispositions de l'article 38 du décret du 19 décembre 1991 ou par son article 39 '
2°) En cas d'application de l'article 38, les délais de recours contre la décision du bureau d'aide juridictionnelle, prévus par l'article 56 du décret du 19 décembre 1991, sont-ils des délais francs '
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 septembre 2012 :
- le rapport de Mme Monchambert, président,
- et les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public ;
1. Considérant que M.B..., de nationalité afghane, relève appel de l'ordonnance du 5 décembre 2011 par laquelle le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 août 2011 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande d'admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif et (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) 4° rejeter les conclusions entachées d'une irrecevabilité manifeste non susceptible d'être couverte en cours d'instance (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II de l'article L. 511-1 peut, dans le délai de trente jours suivant sa notification, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant " ; qu'aux termes de l'article 38 du décret du 19 décembre 1991 susvisé : " Lorsqu'une action en justice doit être intentée avant l'expiration d'un délai devant la juridiction du premier degré, (...) l'action est réputée avoir été intentée dans le délai si la demande d'aide juridictionnelle s'y rapportant est adressée au bureau d'aide juridictionnelle avant l'expiration dudit délai et si la demande en justice est introduite dans un nouveau délai de même durée à compter : (...) / c) de la date à laquelle la décision d'admission ou de rejet de la demande est devenue définitive ; / d) ou en cas d'admission, de la date, si elle est plus tardive, à laquelle un auxiliaire de justice a été désigné " ; qu'enfin, en vertu de l'article 23 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée et de l'article 56 du décret du 19 décembre 1991 précité, la décision du bureau admettant le demandeur au bénéfice de l'aide juridictionnelle ne devient définitive qu'à l'expiration d'un délai de recours de deux mois ouvert au ministère public et au bâtonnier à compter de la date à laquelle cette décision a été prise ou, si un recours a été exercé par l'une de ces autorités, lorsqu'il est statué par le président de la cour administrative d'appel sur ce recours ;
3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'en cas de décision d'admission du bureau d'aide juridictionnelle, le délai recommence à courir le jour où cette décision devient définitive, c'est-à-dire le jour où il n'est plus possible d'exercer contre elle l'un des recours prévus à l'article 23 de la loi du 10 juillet 1991 dans les délais prévus à l'article 56 du décret du 19 décembre 1991 ou, si un tel recours est exercé, le jour où il est statué sur ce recours ; que cependant, en cas d'admission à l'aide et si la désignation de l'auxiliaire de justice intervient postérieurement au jour où la décision statuant sur la demande d'aide juridictionnelle devient définitive, le délai de recours contentieux ne recommence à courir que le jour où l'auxiliaire de justice est désigné ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...a fait l'objet d'un arrêté de refus de titre de séjour en date du 17 août 2011, comportant l'indication des voies et délais de recours ouverts contre celui-ci, qui lui a été notifié le 24 août 2011 ; que le requérant a sollicité le bénéfice de l'aide juridictionnelle le 1er septembre 2011, soit dans le délai de recours imparti par les dispositions précitées de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que cette demande a donc interrompu le délai de recours ; que, le 7 octobre 2011, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé à M. B...l'aide juridique totale en lui indiquant le nom et les coordonnées de Me Valat, avocat chargé de l'assister ; que, contrairement à ce qu'a estimé le premier juge, si, le 19 octobre 2011, l'ordre des avocats à la Cour de Paris a enregistré la désignation de Me Valat en apposant son tampon sur la copie de la décision du bureau d'aide juridictionnelle destinée à l'avocat, cet enregistrement ne saurait être regardé comme correspondant à la désignation du conseil dont la date constitue le point de départ du délai de recours au sens de l'article 38 précité du décret du 19 décembre 1991 ; qu'indépendamment de la date de notification de la décision du bureau d'aide juridictionnelle à M. B...et à son conseil, cette décision ne pouvait acquérir un caractère définitif au plus tôt, par application des dispositions précitées de l'article 38 du décret du 19 décembre 1991, que le 7 décembre 2011 ; qu'à compter de cette date, M. B...disposait d'un délai de trente jours pour contester l'arrêté attaqué ; que par suite, M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que le président du Tribunal administratif de Paris a estimé que, par application des dispositions susrappelées de l'article 38 du décret du 19 décembre 1991, le délai de recours contentieux était expiré à la date du 23 novembre 2011 à laquelle sa demande a été enregistrée au greffe du Tribunal administratif ; qu'ainsi, l'ordonnance en date du 5 décembre 2011 doit être annulée ; qu'il y a lieu de renvoyer M. B...devant le Tribunal administratif de Paris pour qu'il soit statué sur sa demande ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
5. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 75-1 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée, codifié à l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et des articles 37 et 43 de la même loi, que le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle ne peut demander au juge de mettre à la charge, à son profit, de la partie perdante que le paiement des seuls frais qu'il a personnellement exposés, à l'exclusion de la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle confiée à son avocat ; que l'avocat de ce bénéficiaire peut cependant demander au juge de mettre à la charge de la partie perdante la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client, si ce dernier n'avait eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit le recouvrement à son profit de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;
6. Considérant que, d'une part, M.B..., pour le compte de qui les conclusions de la requête relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être réputées présentées, n'allègue pas avoir exposé de frais autres que ceux pris en charge par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été allouée ; que, d'autre part, l'avocat de M. B...n'a pas demandé que lui soit versée par l'Etat la somme correspondant aux frais exposés qu'il aurait réclamée à son client si ce dernier n'avait bénéficié de l'aide juridictionnelle totale ; que, dans ces conditions, les conclusions de la requête tendant à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : L'ordonnance du 5 décembre 2011 du président du Tribunal administratif de Paris est annulée.
Article 2 : M. B...est renvoyé devant le Tribunal administratif de Paris pour qu'il soit statué sur sa demande.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B...est rejeté.
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N° 12PA00030