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31/07/2013 | FRANCE | N°12PA04216

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 31 juillet 2013, 12PA04216


Vu la requête, enregistrée le 25 octobre 2012, présentée pour l'entreprise Julie Moetaua, représentée par son gérant en exercice, dont le siège est B.P. 11369 à Mahina (98709), par Me A... ; l'entreprise Julie Moetaua demande à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement n° 1200137/1 du 25 septembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française l'a condamnée à payer à la Polynésie française, d'une part, une amende de 100 000 francs C.F.P. et, d'autre part, une somme de 6 466 700 francs C.F.P. au titre de la remise en état des lieux ;



2°) à titre principal, de la relaxer des poursuites diligentées à son en...

Vu la requête, enregistrée le 25 octobre 2012, présentée pour l'entreprise Julie Moetaua, représentée par son gérant en exercice, dont le siège est B.P. 11369 à Mahina (98709), par Me A... ; l'entreprise Julie Moetaua demande à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement n° 1200137/1 du 25 septembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française l'a condamnée à payer à la Polynésie française, d'une part, une amende de 100 000 francs C.F.P. et, d'autre part, une somme de 6 466 700 francs C.F.P. au titre de la remise en état des lieux ;

2°) à titre principal, de la relaxer des poursuites diligentées à son encontre du chef de contravention de grande voirie ;

3°) à titre subsidiaire, de rejeter les conclusions de la Polynésie française au titre de l'action domaniale ;

4°) de mettre à la charge de la Polynésie française la somme de 165 000 francs C.F.P. au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut de la Polynésie française ;

Vu la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;

Vu la délibération n° 2004-34 de l'assemblée de la Polynésie française du 12 février 2004 portant composition et administration du domaine public en Polynésie française ;

Vu le code pénal applicable en Polynésie française ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 juin 2013 :

- le rapport de Mme Bonneau-Mathelot, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Vidal, rapporteur public ;

1. Considérant que l'entreprise Julie Moetaua relève appel du jugement du 25 septembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française l'a condamnée à payer à la Polynésie française, d'une part, une amende de 100 000 francs C.F.P. et, d'autre part, une somme de 6 466 700 francs C.F.P. au titre de la remise en état des lieux ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 774-3 du code de justice administrative : " la communication à l'administration compétente du mémoire en défense produit par la personne poursuivie et la communication à la personne poursuivie de la réponse faite par l'administration sont effectuées, s'il y a lieu, par le président du tribunal administratif ou par le greffier en chef agissant au nom et par ordre du président. / Toutefois, le président peut, s'il le juge utile, faire régler ces communications par le tribunal " ; que ces dispositions, propres à cette procédure répressive et dérogatoires par rapport au droit commun, imposent dans tous les cas au tribunal administratif de communiquer à la personne poursuivie le mémoire en réplique de l'administration ;

3. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que le mémoire en réplique produit par la Polynésie française et enregistré le 7 septembre 2012, en réponse au mémoire de l'entreprise Julie Moetaua enregistré le 10 août 2012, ait été communiqué à cette dernière ; que, dans ces conditions, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens tirés de l'irrégularité du jugement attaqué, l'entreprise Julie Moetaua est fondée à soutenir que ledit jugement est entaché d'une irrégularité, à défaut pour le Tribunal d'avoir respecté le principe du contradictoire, de nature à justifier son annulation ;

4. Considérant que, dans les circonstances de l'affaire, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la Polynésie française devant le Tribunal administratif de la Polynésie française et la Cour de céans ;

Sur le fond :

Sur l'action publique :

5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 47 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut de la Polynésie française dispose que " [...]. / Le domaine public maritime de la Polynésie française comprend, sous réserve des droits de l'Etat et des tiers, les rivages de la mer, le sol et le sous-sol des eaux intérieures, en particulier les rades et les lagons ainsi que le sol et le sous-sol des eaux territoriales. / [...] " ;

6. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 2 de la délibération

n° 2004-34 de l'assemblée de la Polynésie française du 12 février 2004 portant composition et administration du domaine public en Polynésie française : " Le domaine public naturel comprend : / - le domaine public maritime qui se compose notamment des rivages de la mer, des lais et relais de mer, des étangs salés communiquant librement ou par infiltration ou par immersion avec la mer, du sol et du sous-sol des eaux intérieures dont les havres et rades non aménagés et les lagons jusqu'à la laisse de basse mer sur le récif côté large, du sol et du sous-sol des golfes, baies et détroits de peu d'étendue, et du sol et du sous-sol des eaux territoriales ; . [...] " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette délibération : " - Le domaine public artificiel comprend : / [...] ; / 3°) le domaine public maritime : / [...] ; / B- les aménagements de littoral réalisés sur le domaine public maritime, notamment, les plages artificielles et les remblais ; / [...] " ; qu'aux termes de l'article 6 de ladite délibération : " - Nul ne peut sans autorisation préalable délivrée par l'autorité compétente, effectuer aucun remblaiement, travaux, extraction, installation et aménagement quelconque sur le domaine public, occuper une dépendance dudit domaine ou l'utiliser dans les limites excédant le droit d'usage qui appartient à tous " ; qu'aux termes de l'article 27 de la même délibération : " - [...]. / Ces infractions constituent des contraventions de grande voirie et donnent lieu à poursuite devant le tribunal administratif, hormis le cas des infractions à la police de la conservation du domaine public routier qui relèvent des juridictions judiciaires. / [...] " ; qu'enfin, selon l'article 131-13 du code pénal applicable en Polynésie française l'amende pour les contraventions de 5ème classe est la contre-valeur en francs pacifiques de 1 500 euros au plus, montant qui peut être porté à 3 000 euros en cas de récidive lorsque le règlement le prévoit ;

7. Considérant que les procès-verbaux de contravention font foi jusqu'à preuve du contraire ; qu'il ressort des mentions du procès-verbal établi le 24 janvier 2012 à l'encontre de l'entreprise Julie Moetaua, établi et signé par un agent assermenté, qu'il lui est reproché d'avoir extrait un volume supplémentaire de 1 741 m3 de tout venant au regard du volume autorisé en vertu de l'arrêté n° 2626/M.E.T. du 14 juin 2011 ; que, contrairement à ce que soutient l'entreprise intéressée, le document dressé le 18 octobre 2011, qui ne peut être regardé comme une nouvelle autorisation d'extraction, constitue seulement la mise à jour du levé d'extractions réalisé le 14 octobre 2011, auquel il est d'ailleurs fait référence dans le cadre de l'exécution de l'arrêté du 14 juin 2011 et qui a été signé non seulement du chef de la cellule du représentant " extractions " mais également du contrevenant ; que la circonstance qu'un certain délai se serait écoulé entre le constat et l'établissement du procès-verbal de contravention n'a pas eu davantage pour effet de régulariser l'extraction irrégulièrement opérée ; qu'en tout état de cause, la tolérance dont aurait pu faire preuve l'administration n'était pas de nature à avoir conféré à l'entreprise Julie Moetaua une nouvelle autorisation d'extraction de tout venant ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que l'entreprise intéressée aurait été autorisée à extraire le volume supplémentaire de 1 741 m3 de tout venant du domaine public fluvial ne pourra qu'être écarté ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'extraction d'un volume supplémentaire de tout venant au regard de l'autorisation dont bénéficiait l'entreprise Julie Moetaua constitue une atteinte à l'intégrité du domaine public fluvial constitutive de l'infraction prévue à l'article 6 de la délibération précitée du 12 février 2004 et réprimée par l'article 27 de cette même délibération ; qu'il y a lieu, dès lors, dans les circonstances de l'espèce, d'infliger à l'entreprise Julie Moetaua une amende d'un montant de 178 000 francs C.F.P. ;

Sur l'action domaniale :

9. Considérant, en premier lieu, que le contrevenant ne peut discuter l'opportunité des mesures prises par la collectivité publique pour effacer les atteintes portées au domaine public ;

10. Considérant, en deuxième lieu, que l'auteur d'une contravention de grande voirie doit être condamné à rembourser à la collectivité publique concernée le montant des frais exposés ou à exposer par celle-ci pour les seuls besoins de la remise en état de l'ouvrage endommagé ; qu'il n'est fondé à demander la réduction des frais mis à sa charge que dans le cas où le montant des dépenses engagées en vue de réparer les conséquences de la contravention présente un caractère anormal ;

11. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la Polynésie française a procédé à l'évaluation de la remise en état du site en se fondant, d'une part, quant au coût d'utilisation du matériel, sur le barème B relatif aux taux de location hors taxe du parc de la direction de l'équipement aux entreprises et particuliers fixé par l'arrêté n° 1681 C.M. du 16 novembre 1999 et, d'autre part, quant au coût de la fourniture de tout venant, sur le prix du marché en produisant le devis requis auprès de l'entreprise Taiarapu Agrégats ; que rien ne permet d'établir que cette évaluation serait anormalement élevée ou excessive ; qu'en tout état de cause, l'entreprise Julie Moetaua n'apporte aucun élément permettant de contredire sérieusement le chiffrage du coût des prestations ; qu'il y a donc lieu de condamner l'entreprise intéressée à payer à la Polynésie française la somme de 6 466 700 francs C.F.P. au titre de la remise en état des lieux ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'entreprise Julie Moetaua une somme de 1 500 euros au bénéfice de la Polynésie française en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, les dispositions de cet article font obstacle à ce que soit mise à la charge de la Polynésie française, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que l'entreprise Julie Moetaua demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 25 septembre 2012 du Tribunal administratif de la Polynésie française est annulé.

Article 2 : L'entreprise Julie Moetaua est condamnée à payer à la Polynésie française une amende de 178 000 francs C.F.P.

Article 3 : L'entreprise Julie Moetaua est condamnée à payer à la Polynésie française la somme de 6 466 700 francs C.F.P. au titre de la remise en état des lieux.

Article 4 : L'entreprise Julie Moetaua versera à la Polynésie française la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de l'entreprise Julie Moetaua est rejeté.

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N° 12PA04216


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 12PA04216
Date de la décision : 31/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux répressif

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: Mme Sonia BONNEAU-MATHELOT
Rapporteur public ?: Mme VIDAL
Avocat(s) : SELARL JURISPOL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-07-31;12pa04216 ?
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