Vu la requête, enregistrée le 27 juillet 2012, présentée pour la commune de Dammarie-les-Lys, représentée par son maire en exercice, demeurant à..., par MeD... ; la commune de Dammarie-les-Lys demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0909085/4 en date du 31 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Melun l'a condamnée à verser à M. A...la somme de 12 000 euros en raison du préjudice moral subi avec les intérêts au taux légal à compter du 5 octobre 2009, les intérêts échus à la date du 5 octobre 2010 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date étant capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts ;
2°) de rejeter la demande de M. A...présentée devant le Tribunal administratif de Melun ;
3°) de mettre à la charge de M. A...une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de procédure pénale ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 juin 2013 :
- le rapport de Mme Bonneau-Mathelot, rapporteur,
- les conclusions de Mme Vidal, rapporteur public,
- et les observations de Me B...pour la commune de Dammarie-les-Lys ;
1. Considérant que la société des Maisons de Maya a construit un pavillon d'exposition à usage commercial sur un terrain, cadastré section A.E. n° 181, au sein du lotissement " Le village exposition " ou " La maisonnerie ", dans la zone d'aménagement concerté dite du Plateau de la Bière créée par la commune de Dammarie-les-Lys en 1988, conformément à un permis de construire délivré le 2 décembre 1996 ; que M. A...a acquis ce pavillon pour un usage d'habitation par acte du 23 juin 2003 ; qu'il a, ensuite, conclu une promesse synallagmatique de vente de ce même bien avec M. et Mme C...par acte sous seing privé du 14 janvier 2005 ; que, par une note de renseignements adressée au notaire le 10 février 2005, confirmée par une lettre du 27 avril 2005, la commune de Dammarie-les-Lys a informé les acquéreurs que le bien en cause ne pouvait être affecté à un usage d'habitation au regard des règles d'urbanisme en vigueur ; que, concomitamment, eu égard à l'irrégularité de certains travaux effectués sans autorisation sur l'immeuble de M.A..., le maire de la commune de Dammarie-les-Lys a dressé un procès-verbal d'infraction à la législation d'urbanisme sur le fondement des dispositions de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme, au visa d'un constat d'huissier établi le 18 mai 2005, puis l'a transmis le 29 mai suivant au procureur de la République ; que M. et Mme C...ayant été assignés par M. A...en exécution forcée de la vente, le Tribunal de grande instance de Melun a, par un jugement du 4 octobre 2005, annulé la promesse synallagmatique de vente pour dol estimant qu'il avait caché aux futurs acquéreurs les difficultés rencontrées auprès de la commune de Dammarie-les-Lys pour obtenir le changement de destination de l'immeuble en litige ; que M. A...a alors engagé, à l'encontre du maire adjoint chargé de l'urbanisme une action en justice pour faux et usage de faux s'agissant de la note de renseignement du 10 février 2005 et de la lettre de confirmation du 27 avril 2005 ; que la Cour d'appel de Versailles, sur renvoi de la Cour de cassation, a, par un arrêt du 18 janvier 2012, relaxé le maire adjoint en l'absence d'élément intentionnel constitutif du délit qui lui était reproché ; que, par lettre du 5 octobre 2009, M. A...a sollicité de la commune de Dammarie-les-Lys d'être indemnisé des préjudices subis à hauteur de 250 000 euros ; que cette demande a été implicitement rejetée par le maire de Dammarie-les-Lys, qui a gardé le silence pendant plus de deux mois ; que, par jugement du 31 mai 2012, le Tribunal administratif de Melun a condamné la commune de Dammarie-les-Lys à verser la somme de 12 000 euros à M. A...en réparation du préjudice moral subi ; que la commune relève appel de ce jugement en tant qu'il a partiellement fait droit aux demandes de M.A... ; que ce dernier conclut au rejet de la requête de la commune et, par la voie de l'appel incident, demande à ce que la somme qui lui a été accordée par le Tribunal au titre de son préjudice soit portée de 12 000 à 250 000 euros ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés " ; que, contrairement à ce que soutient la commune de Dammarie-les-Lys, le jugement attaqué est suffisamment motivé quant à l'évaluation du préjudice moral subi dès lors que les premiers juges ont déclaré faire une " juste appréciation " laquelle n'implique aucune autre précision utile ; que, par suite, la commune de Dammarie-les-Lys n'est pas fondée à soutenir que ledit jugement serait entaché d'une irrégularité de nature à emporter son annulation ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne l'appel principal :
S'agissant de la faute imputable à la commune de Dammarie-les-Lys :
3. Considérant, à supposer même que la transmission à des tiers, le 19 mai 2005, du constat d'huissier établi la veille, sur lequel s'est fondé le maire de Dammarie-les-Lys pour établir, le 29 mai suivant, le procès-verbal d'infraction devant être transmis au procureur de la République en application des dispositions de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme, puisse être regardée comme constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de ladite commune en tant qu'elle aurait méconnu le secret de l'instruction, il n'est pas contesté qu'en omettant de produire au notaire, dans la note de renseignements du 10 février 2005, confirmée par le courrier du 27 avril suivant, l'intégralité des dispositions applicables de l'article ZA 1 du règlement du plan d'occupation des sols, la commune de Dammarie-les-Lys a délivré des renseignements erronés et a ainsi commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;
S'agissant du préjudice moral :
4. Considérant, contrairement à ce que soutient la commune, qu'il ne résulte pas du jugement attaqué que les premiers juges l'auraient entaché d'une contradiction de motifs en jugeant que l'échec de la vente résultant de la faute qu'elle avait commise en communiquant des informations erronées avait causé un préjudice moral à M. A...alors qu'ils n'avaient pas examiné l'existence d'une perte de chance pour ce dernier de vendre son bien ; qu'en effet, indépendamment d'une perte de chance, le Tribunal pouvait indemniser le préjudice moral subi par M. A...résultant de ce que le désaccord entre ce dernier et la commune de Dammarie-les-Lys sur l'affectation de son pavillon, notamment du fait de l'omission fautive de la commune de produire dans ses notes d'urbanisme l'intégralité des dispositions applicables de l'article ZA 1 du règlement du plan d'occupation des sols, avait été source d'incertitudes quant à la signature de la promesse synallagmatique de vente ; qu'en tout état de cause, la circonstance que le présent arrêt ne retienne pas la faute commise par la commune de Dammarie-les-Lys au titre de la méconnaissance du secret de l'instruction pas plus, d'ailleurs, qu'une prétendue immixtion fautive de ladite commune dans les rapports de droit privé unissant M. A...à M. et Mme C..., au demeurant non établie, n'ont d'incidence sur la réparation du préjudice moral subi par M. A...et qui n'est, ainsi qu'il a été dit, pas lié aux différentes actions engagées devant le juge civil ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Dammarie-les-Lys n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun l'a condamnée à verser à M. A...une somme de 12 000 euros en réparation du préjudice moral subi par ce dernier ;
En ce qui concerne l'appel incident :
S'agissant de la faute imputable à la commune de Dammarie-les-Lys :
6. Considérant que le moyen tiré de la responsabilité de la commune de Dammarie-les-Lys du fait du délit de dénonciation calomnieuse dont se serait rendu coupable le maire aux sens des dispositions de l'article 226-10 du code pénal, ne peut qu'être écarté dès lors d'une part, qu'il n'appartient pas au juge administratif de donner une telle qualification aux agissements de la commune et, d'autre part, que le juge pénal n'a pas prononcé de condamnation de la commune de Dammarie-les-Lys pour un tel délit ;
S'agissant des préjudices :
7. Considérant, en premier lieu, que M. A...soutient que les renseignements d'urbanisme erronés transmis à M. et Mme C...leur ont permis de renoncer à l'acquisition de la maison sans s'acquitter du montant de la clause pénale prévu dans la promesse synallagmatique de vente en cas de dédit, lui causant ainsi un préjudice financier ; que toutefois, ladite promesse a été annulée par la Cour de cassation pour réticence dolosive de la part de M. A... qui n'a pas informé les futurs acquéreurs de la position de la commune de Dammarie-les-Lys quant au caractère non habitable du pavillon, abstraction faite de la véracité des informations d'urbanisme transmises par cette dernière ; qu'ainsi, la non-exécution de la clause pénale du fait de sa nullité est sans rapport avec la faute de la commune de Dammarie-les-Lys ; que, par suite, le préjudice financier invoqué sans lien direct avec la faute de celle-ci ne peut être réparé ;
8. Considérant, en deuxième lieu, que M. A...soutient que les frais engagés dans l'action civile intentée en vain à l'encontre des signataires de la promesse de vente pour obtenir la réalisation forcée, lui ont causé un préjudice directement lié à la délivrance des informations d'urbanisme erronées ; que, toutefois, le fait d'engager une action en justice n'est pas susceptible de générer, à lui-seul, un préjudice indemnisable ; que, par ailleurs, les frais de justice engagés par les parties ont déjà été équitablement répartis par le juge judiciaire dans le cadre des dispositions de l'article L. 700 du nouveau code de procédure pénale ; que, dans ces conditions, ce chef de préjudice, sans lien avec la faute de la commune de Dammarie-les-Lys, ne peut être retenu ;
9. Considérant, en troisième lieu, que M. A...soutient que le comportement fautif et continu de la commune de Dammarie-les-Lys quant à l'affectation de son pavillon, l'a empêché de le revendre ou de le louer de telle sorte que son immobilisation depuis l'année 2005 lui a causé un préjudice financier ; qu'il résulte de l'instruction que M. A...a vendu son bien au cours de l'année 2011 ; que ce retard est imputable à l'absence de régularisation de travaux réalisés sans autorisation postérieurement à la délivrance du permis de construire initial mais antérieurement à la modification du plan local d'urbanisme approuvée le 12 juillet 2005 excluant toute construction à usage d'habitation et donc toute transformation d'un bâtiment existant à un tel usage ; que, dans ces circonstances, le préjudice ainsi invoqué ne peut, en l'absence de lien de causalité avec la faute commise par la commune de Dammarie-les-Lys, être indemnisé ;
10. Considérant, en quatrième lieu, que M. A...fait valoir qu'il a subi un préjudice financier né de la perte de chance d'investir dans un bien immobilier sis à Bagnolet à la suite du refus de prêt de la banque en raison de l'absence de l'apport personnel prévu à l'origine lequel aurait dû résulter de la vente de son pavillon à M. et MmeC... ; que, toutefois, si M. A...avait effectivement signé un contrat de réservation sur un bien immobilier en vue de sa location future, non seulement l'échec de la vente ne résulte pas directement de la faute de la commune de Dammarie-les-Lys mais le refus de prêt bancaire n'était pas motivé par la seule absence d'apport personnel et aurait pu être refusé pour un autre motif ; que ce préjudice revêtait ainsi un caractère éventuel et était sans lien direct avec la faute commise par la commune par la commune de Dammarie-les-Lys ;
11. Considérant, en cinquième et dernier lieu, que M. A...n'apporte aucun élément de nature à établir qu'il aurait subi un préjudice moral à concurrence d'une somme de 35 000 euros ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun n'a fait que partiellement droit à sa demande indemnitaire ;
Sur les conclusions indemnitaires pour procédure abusive :
13. Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 3 000 euros " ; que, la faculté prévue par ces dispositions constituant un pouvoir propre du juge, les conclusions de M. A...tendant à ce que la commune de Dammarie-les-Lys soit condamnée à lui verser une somme de 3 000 euro pour procédure abusive ne peuvent qu'être rejetées comme irrecevables ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
14.Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Dammarie-les-Lys une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, en revanche, de rejeter, sur le même fondement les conclusions présentées par la commune de Dammarie-les-Lys et tendant à ce que soient mis à la charge de M. A...les frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la commune de Dammarie-les-Lys est rejetée.
Article 2 : Les conclusions d'appel incident de M. A...sont rejetées.
Article 3 : La commune versera une somme de 1 500 euros à M. A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 12PA03274