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04/07/2013 | FRANCE | N°12PA04849

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 04 juillet 2013, 12PA04849


Vu la requête, enregistrée le 11 décembre 2012, présentée pour M. C...A...D..., demeurant..., par MeB... ; M. A... D...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1219796/8 du 16 novembre 2012 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 novembre 2012 du préfet de police l'obligeant à quitter le territoire français, refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, fixant le pays de destination et le plaçant en rétention ;

2°) d'annuler cet arrêt

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3°) d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation administrative dans le dél...

Vu la requête, enregistrée le 11 décembre 2012, présentée pour M. C...A...D..., demeurant..., par MeB... ; M. A... D...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1219796/8 du 16 novembre 2012 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 novembre 2012 du préfet de police l'obligeant à quitter le territoire français, refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, fixant le pays de destination et le plaçant en rétention ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente de ce réexamen ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 juin 2013 :

- le rapport de M. Even, rapporteur,

- et les observations de Me B...pour M. A...D... ;

1. Considérant que, par arrêté du 13 novembre 2012, le préfet de police a fait obligation à M. A...D..., ressortissant bolivien, de quitter sans délai le territoire français en fixant le pays de destination et l'a placé en rétention administrative ; que M. A...D...relève appel du jugement du 16 novembre 2012 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions à fins d'annulation :

En ce qui concerne la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. Considérant, en premier lieu, que la décision contestée vise l'article L. 511-1 II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et énonce que M. A...D...ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français et est actuellement dépourvu de titre de séjour ; qu'elle ajoute qu'il existe un risque qu'il se soustrait à l'obligation de quitter le territoire français en ce qu'il ne présente pas de garanties de représentations suffisantes dans la mesure où il ne peut justifier de documents d'identité ou de voyage en cours de validité ; que cette décision mentionne également que compte tenu des circonstances propres au cas d'espèce, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé à sa vie familiale ; qu'ainsi, et alors même que ces mentions sont rédigées à l'aide de formules stéréotypées, cette décision expose les faits et les considérations de droit sur lesquels elle se fonde ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision contestée au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979 doit être écarté ;

3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

4. Considérant que si M. A...soutient être arrivé en France sans visa en 2007 pour rejoindre ses parents chez qui il réside avec sa compagne, les pièces produites ne sont pas de nature à établir sa présence habituelle et continue en France depuis cette date ; que seul son père bénéficiait à la date de la décision attaquée d'un titre de séjour régulier valable un an ; que la seule production d'une attestation médicale datée du 10 août 2012 ne démontre pas que les soins nécessités par son père malade ne soient pas disponibles en Bolivie ; que s'il déclare vivre en concubinage avec une ressortissante colombienne qui était enceinte de leur enfant de quatre mois à la date de l'arrêté, il n'établit pas la réalité de ce concubinage, ni celle de sa paternité ; qu'il ne démontre pas davantage être particulièrement intégré dans la société française ; qu'en conséquence et eu égard à l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision portant obligation de quitter le territoire n'a pas porté une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale de M. A...D... ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ; que le préfet de police n'a pas davantage commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;

En ce qui concerne la légalité de la décision portant refus d'accorder un délai de départ volontaire :

5. Considérant qu'aux termes du paragraphe II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 (...) " ;

6. Considérant que pour refuser d'accorder à M. A...D...un délai de départ volontaire, le préfet de police a considéré que le risque de fuite était établi au seul motif que l'intéressé ne présentait pas de garanties de représentation suffisantes en l'absence de possession de documents d'identité ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier qu'au moment de son interpellation M. A...D...possédait un passeport bolivien, lequel était en cours de validité à la date de la décision attaquée et lui a été confisqué lors de son placement en rétention administrative ; que le préfet de police a ainsi commis une erreur de fait en regardant comme établi le risque de fuite et, par suite, en refusant, en application des dispositions précitées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de lui accorder un délai de départ volontaire ;

En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de destination :

7. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, M. A...D...n'établit pas que la décision portant obligation de quitter le territoire est illégale ; que, dès lors, l'exception d'illégalité de cette décision, soulevée à l'appui des conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination, n'est pas fondée et doit être écartée ;

En ce qui concerne la légalité de la décision portant placement en rétention administrative :

8. Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés ;

9. Considérant en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : (...) 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé " ; qu'aux termes de l'article L. 561-2 du même code : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation. (...) " ;

10. Considérant que s'il est constant que le départ de M. A...D...pour la Bolivie ne pouvait se faire immédiatement en raison des formalités nécessaires à l'organisation matérielle de sa reconduite à la frontière, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé présentait des garanties de représentation suffisantes puisqu'il était en possession d'un passeport bolivien valide à la date de l'arrêté attaqué et justifiait d'une adresse fixe ; que, dans ces conditions, le placement en rétention de l'intéressé n'était pas nécessaire et le préfet a donc commis une erreur d'appréciation en retenant cette mesure au lieu de l'assigner à résidence ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...D...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 13 novembre 2012 refusant de lui accorder un délai de départ volontaire et celle le plaçant en rétention administrative ;

Sur les conclusions à fins d'injonction :

12. Considérant que le présent arrêt, qui infirme le Tribunal administratif de Paris seulement en tant qu'il a refusé d'annuler la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire et la décision de placement en rétention administrative, n'implique ni la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour, ni le réexamen de la situation de M. A...D... ; que, par suite, les conclusions susvisées doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A...D...et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1219796/8 du 16 novembre 2012 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris est infirmé en tant qu'il rejette les conclusions tendant à l'annulation de la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire et la décision de placement en rétention administrative.

Article 2 : L'arrêté du préfet de police du 13 novembre 2012 est annulé en tant qu'il a refusé d'accorder un délai de départ volontaire et a décidé le placement en rétention administrative de M. A...D....

Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à M. A...D...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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N° 12PA04849


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 12PA04849
Date de la décision : 04/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: M. Bernard EVEN
Rapporteur public ?: Mme VIDAL
Avocat(s) : PROVENCE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-07-04;12pa04849 ?
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