La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/07/2013 | FRANCE | N°11PA00458

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 03 juillet 2013, 11PA00458


Vu la décision n° 327557 du 19 janvier 2011, enregistrée le 25 janvier 2011 sous le n°11PA00458, par laquelle les 2ème et 7ème sous-sections réunies du Conseil d'Etat ont annulé l'arrêt n° 06PA01969 de la 6ème chambre de la Cour administrative d'appel de Paris en date du 2 mars 2009 et renvoyé à la Cour le jugement de l'affaire ;

Vu la requête, enregistrée le 30 mai 2006, présentée pour MM G...et A...E..., agissant au nom de l'indivision successorale exerçant sous l'enseigne " Les fils de MmeD... ", demeurant..., par Me C... ; MM E...demandent à la Cour :

1°)

d'annuler le jugement n° 0104682/2 du 23 mars 2006 du Tribunal administratif de...

Vu la décision n° 327557 du 19 janvier 2011, enregistrée le 25 janvier 2011 sous le n°11PA00458, par laquelle les 2ème et 7ème sous-sections réunies du Conseil d'Etat ont annulé l'arrêt n° 06PA01969 de la 6ème chambre de la Cour administrative d'appel de Paris en date du 2 mars 2009 et renvoyé à la Cour le jugement de l'affaire ;

Vu la requête, enregistrée le 30 mai 2006, présentée pour MM G...et A...E..., agissant au nom de l'indivision successorale exerçant sous l'enseigne " Les fils de MmeD... ", demeurant..., par Me C... ; MM E...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0104682/2 du 23 mars 2006 du Tribunal administratif de Melun en tant qu'il a limité l'indemnité qui leur était due par la commune de Nogent-sur-Marne à la somme de 2 669 517 euros ;

2°) de condamner la commune de Nogent-sur-Marne à leur verser la somme de 7 233 980 euros, assortie des intérêts prévus par l'article 1378 du code civil et de la capitalisation de ces intérêts ;

3°) de condamner la commune de Nogent-sur-Marne à leur verser la somme de 11 737 425 euros, assortie des intérêts prévus par l'article 1153 du code civil et de la capitalisation de ces intérêts ;

4°) subsidiairement d'ordonner, avant dire droit, une expertise en vue de déterminer la valeur résiduelle des investissements qu'ils ont réalisés en application du traité de concession du parc de stationnement et d'exploitation du stationnement payant de surface conclu en 1991 avec la commune de Nogent-sur-Marne et de déterminer le manque à gagner qui est résulté de la nullité dudit traité ;

5°) d'ordonner, dans le cas où l'expertise serait diligentée, le versement par la commune de Nogent-sur-Marne d'une provision de 9 000 000 d'euros ;

6°) de mettre à la charge de la commune de Nogent-sur-Marne les dépens de l'instance ainsi que la somme de 100 000 euros HT sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code des communes ;

Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 modifiée relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 juin 2013 :

- le rapport de M. Boissy, rapporteur,

- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,

- les observations de MeC..., pour MME..., et celles de MeB..., pour la commune de Nogent-sur-Marne,

- et connaissance prise des notes en délibéré enregistrée le 04 juin 2013, présentée pour MM E... par MeC..., et la commune de Nogent-sur-Marne par MeB... ;

1. Considérant qu'en vertu d'un traité de concession conclu le 28 mars 1991, la commune de Nogent-sur-Marne a confié à MM E...et M.D..., agissant au nom de l'indivision successorale exerçant sous l'enseigne " Les fils de MadameD... ", (ci-après " les concessionnaires ") l'exploitation des parcs de stationnement de la commune et du stationnement payant de surface pour une durée de trente ans à compter du 28 mars 1996 ; que, le 11 février 2002, MM E...ont mis en demeure la commune de Nogent-sur-Marne de mettre fin à divers manquements contractuels qui lui étaient reprochés dans la mise en oeuvre du traité de concession, sous peine d'une démarche juridictionnelle tendant à obtenir la résiliation de la concession, aux torts de la commune, et la condamnation de cette dernière à leur verser une indemnité de résiliation ; que, par le jugement attaqué du 23 mars 2006, le Tribunal administratif de Melun, après avoir constaté la nullité du traité de concession, a notamment condamné MM E... à rembourser à la commune de Nogent-sur-Marne la différence entre une indemnité de 2 669 517 euros et une somme de 6 065 000 euros et a mis à la charge de la commune de Nogent-sur-Marne les dépens ; que MM E... font appel de ce jugement en tant qu'il a limité l'évaluation de cette indemnité à 2 669 517 euros ; que, par la voie de l'appel incident, la commune de Nogent sur Marne conclut, dans le dernier état de ses écritures, à la minoration de cette indemnité et à ce que les dépens de première instance soient mis à la charge de MME... ;

Sur le règlement du litige sur un fondement contractuel :

2. Considérant que lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l'exécution du contrat qui les lie, il incombe en principe à celui-ci, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, de faire application du contrat ; que, toutefois, dans le cas seulement où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, il doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel ; qu'ainsi, lorsque le juge est saisi d'un litige relatif à l'exécution d'un contrat, les parties à ce contrat ne peuvent invoquer un manquement aux règles de passation, ni le juge le relever d'office, aux fins d'écarter le contrat pour le règlement du litige ; que, par exception, il en va autrement lorsque, eu égard d'une part à la gravité de l'illégalité et d'autre part aux circonstances dans lesquelles elle a été commise, le litige ne peut être réglé sur le fondement de ce contrat ;

3. Considérant qu'en vertu de l'article L. 131-4 du code des communes, désormais codifié aux articles L. 2213-2 et L. 2213-3 du code général des collectivités territoriales, le maire a la police du stationnement sur la voie publique ; qu'en application de L. 131-5 du même code, devenu l'article L. 2213-6 du code général des collectivités territoriales, il peut, moyennant le paiement de droits fixés par un tarif dûment établi, accorder des permis de stationnement sur la voie publique ; que le service de la police du stationnement, par sa nature, ne saurait être confié qu'à des agents placés sous l'autorité directe du maire ;

4. Considérant qu'il résulte du chapitre VI du traité de concession, relatif au " régime du personnel ", que le " personnel affecté à la surveillance du stationnement de surface et pour l'effectif pris en charge techniquement par le concessionnaire " recruté, sur un statut de droit public, par la commune de Nogent-sur-Marne, est chargé de faire respecter, par l'usager, les prescriptions relatives au stationnement payant ainsi que de contrôler l'application de l'ensemble de la réglementation concernant le stationnement des véhicules sur certains secteurs de la voie publique et, à cette fin, habilité à constater les infractions au code de la route ; que si ces agents de surveillance sont placés " sous l'autorité du maire ", ils doivent en revanche exécuter les directives données par le concessionnaire " sur le plan de l'organisation de travail (horaires, conditions de travail, sanction des infractions, organisation du travail, tâches à accomplir ...) " ; qu'il résulte tant de l'analyse de ces stipulations que des conditions dans lesquelles les parties au traité de concession les ont interprétées et mises en oeuvre après le début de l'exploitation, en mai 1991, que les concessionnaires et la ville ont bien eu la commune intention de permettre aux concessionnaires, dans la limite des droits qui leur ont été accordés par leur traité, d'exercer de manière autonome les pouvoirs de réprimer les stationnements irréguliers ; que ce traité de concession a ainsi confié aux concessionnaires des prérogatives de police du stationnement sur la voie publique qui ne pouvaient pas légalement leur être déléguées ; que cette clause illicite est, compte tenu tant de sa nature que de son importance dans l'économie générale du traité de concession, indivisible du reste de cette convention ; que, dès lors, eu égard au caractère illicite du contrat, le litige ne peut pas être réglé sur un fondement contractuel ;

Sur le règlement du litige sur un fondement quasi-contractuel et quasi-délictuel :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée par la commune de Nogent-sur-Marne :

5. Considérant, en premier lieu, que MM E... ont produit les actes, en date du 14 mars 2001, par lesquels le troisième coïndivisaire, Mme F...E..., les a constitués comme ses mandataires généraux, aux fins notamment, " à défaut de paiement et en cas de difficultés quelconques, d'exercer toutes les actions et instances nécessaires devant toutes juridictions françaises ou étrangères étatiques ou arbitrales depuis les préliminaires de la conciliation jusqu'à l'entière exécution de tous jugements et arrêts par les voies et moyens de droit " ; qu'il résulte de l'instruction que M. D...n'était plus, à la date d'introduction de la demande, coïndivisaire dans l'indivision exerçant sous l'enseigne " Les fils de Madame D... " ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que si la commune de Nogent sur-Marne soutient que les droits cédés par M. D...sont intervenus sans son accord, en méconnaissance de l'article 55 du traité de concession, un tel moyen est inopérant compte tenu de la nullité du contrat ;

7. Considérant, dès lors, que la fin de non-recevoir soulevée par la commune de Nogent-sur-Marne, tirée du défaut de qualité des requérants à agir au nom des coïndivisaires titulaires du traité de concession en date du 28 mars 1991, doit être écartée ;

En ce qui concerne l'exception de prescription quadriennale :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 modifiée : " La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement " ;

9. Considérant que la commune de Nogent-sur-Marne et les concessionnaires ont poursuivi des relations contractuelles pendant plus de dix ans, entre 1991 et 2002, sans jamais remettre en cause la validité de leurs liens contractuels ; que le litige que MM E...ont porté devant le Tribunal administratif de Melun en novembre 2001 avait également un fondement contractuel ; que la commune de Nogent-sur-Marne n'a opposé la nullité du contrat devant le juge des référés du Tribunal administratif de Melun qu'en 2002 ; que, par une ordonnance du 21 juin 2002, le juge des référés a accordé une provision à MM E...en écartant l'application du contrat ; que, dans ces conditions, malgré la nature de l'illégalité, précisée au point 4, qui conduit la Cour à écarter le contrat pour régler le litige, les requérants, compte tenu du caractère contractuel de la créance réclamée initialement devant les premiers juges et du principe de loyauté des relations contractuelles qui avait prévalu jusqu'en 2002 entre les parties, doivent être regardés, dans les circonstances de l'espèce, comme ayant légitimement ignoré, jusqu'en 2002, d'une part, que le litige qui les opposait à la commune de Nogent-sur-Marne était susceptible de ne pas être dénoué sur un terrain contractuel mais sur un fondement quasi-contractuel et quasi-délictuel et, d'autre part, l'existence de leur créance définie au point 6 qui, découlant exclusivement de la mise en action de la responsabilité quasi-contractuelle et quasi-délictuelle de la commune, n'était pas au nombre de celles susceptibles d'être réclamées par la mise en cause de la responsabilité contractuelle de la commune ; que, dès lors, l'exception de prescription quadriennale opposée par la commune de Nogent-sur-Marne doit être écartée ;

En ce qui concerne les sommes réclamées sur un fondement quasi-contractuel :

10. Considérant que le cocontractant de l'administration dont le contrat a été écarté par le juge peut prétendre, sur un terrain quasi-contractuel, au remboursement de celles de ses dépenses qui ont été utiles à la collectivité envers laquelle il s'était engagé ; qu'il peut notamment, s'agissant d'une concession de service public, demander le remboursement des dépenses d'investissement qu'il a effectuées et qui sont relatives aux biens nécessaires ou indispensables à l'exploitation du service, à leur valeur non amortie et évaluée à la date à laquelle ces biens font retour à la personne publique, ainsi que du déficit d'exploitation qu'il a éventuellement supporté sur la période et du coût de financement de ce déficit, pour autant toutefois qu'il est établi, au besoin après expertise, que ce déficit était effectivement nécessaire, dans le cadre d'une gestion normale, à la bonne exécution du service public et que le coût de financement de ce déficit est équivalent à celui qu'aurait supporté ou fait supporter aux usagers le délégant ; que la personne publique peut également prétendre, sur un terrain quasi-contractuel, au remboursement de celles de ses dépenses qui l'ont indûment appauvri et qui ont été source d'un enrichissement sans cause pour l'entreprise avec laquelle elle avait contracté, sans que les fautes éventuellement commises par cette personne publique antérieurement à la signature du contrat aient une incidence sur son droit à indemnisation au titre de l'enrichissement sans cause de la collectivité, sauf si le contrat a été obtenu dans des conditions de nature à vicier le consentement de l'entreprise contractante ;

S'agissant de la valeur non amortie des dépenses d'investissement :

11. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et en particulier du rapport de l'expert et des pièces comptables produites au cours de l'expertise, que les concessionnaires ont dépensé, au titre des investissements concernant l'exploitation des parcs de stationnement de la commune de Nogent-sur-Marne, une somme de 10 000 000 de francs, identifiée à l'origine à l'article 7 1 a) du traité de concession sous le poste " souscription d'un emprunt ", pour " la prise en charge des financements correspondant au parc central et équipements existant " ; qu'ils ont également dépensé une somme de 355 800 francs au titre de la prise en charge de l'indemnité de résiliation due par la commune de Nogent-sur-Marne à l'ancien concessionnaire ; qu'au titre de la " compensation de la reprise des retards sur l'amortissement des prêts afférents d'investissements antérieurs ", identifiée à l'origine à l'article 7 1 b) du traité de concession, ils ont versé à la commune, les 15 novembre 1991 et 16 décembre 1991, des sommes de 1 800 000 francs et 30 686 francs et dépensé une somme de 3 617 300 francs ; qu'il résulte également de l'instruction, et en particulier du rapport de l'expert, qu'au titre de la " prise en charge du financement " de certaines opérations identifiées à l'origine à l'article 7 2° du traité de concession, ils ont dépensé une somme de 9 005 756,56 francs ; qu'il résulte également de l'instruction, et en particulier du rapport de l'expert et du point 7 3° du traité de concession, que MM E...ont réalisé des investissements, au titre du parc de l'ancien marché, d'un montant de 904 557,45 francs ; qu'enfin, il est constant qu'ils ont dépensé, au titre d'un poste intitulé " TVA non récupérée ", une somme de 11 967 francs ; que ces dépenses d'investissement ont représenté un montant total de 25 726 067,01 francs ;

12. Considérant que les concessionnaires ont contracté trois emprunts pour le financement de la réalisation des investissements ; qu'il résulte de l'instruction, et en particulier du rapport de l'expert, qu'au titre du premier emprunt, souscrit auprès de l'Européenne de banque (devenue Barclays), pour un montant de 10 MF, ils ont remboursé 7 540 000 francs de capital pendant la période d'exploitation ; qu'au titre du deuxième emprunt, souscrit auprès du crédit foncier et commercial d'Alsace et de Lorraine (CFCAL), pour un montant de 5MF, ils ont remboursé 2 991 724,61 francs pendant la période d'exploitation ; qu'au titre du troisième emprunt, souscrit auprès de la CFCAL, d'un montant de 3 MF, ils ont remboursé 2 572 046,41 francs pendant la période d'exploitation ; que, toutefois, à la date de l'arrêt de l'exploitation, la commune de Nogent-sur-Marne a repris à son compte le capital des emprunts qui restaient à rembourser auprès des établissements bancaires, pour un montant global de 4 896 228,98 francs ; que le montant des emprunts ainsi repris par la commune de Nogent-sur-Marne doit dès lors être déduit du montant des dépenses d'investissement réellement supportées par MME... ;

13. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et en particulier du rapport de l'expert et des propres écritures des parties, que l'ensemble de ces investissements était amorti, lors de la cessation de l'exploitation des parcs de stationnement et du stationnement payant de surface, en 2002, à hauteur de 17 669 477 francs ; que, dès lors, la valeur non amortie des dépenses d'investissement effectuées par MM E...à ce titre s'élève à 3 160 361,03 francs (25 726 067,01 FRF - 4 896 228,98 francs-17 669 477 francs), soit 481 793,93 euros ;

14. Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu des stipulations de l'article 7 3° du traité de concession, les concessionnaires, dans le cadre du financement des investissements liés à la nouvelle concession signée en 1991, ont apporté des " droits résiduels à exploitation " du parc de l'ancien marché, estimés par les parties au contrat à 3 500 000 F HT, que les intéressés détenaient en vertu d'une concession signée le 20 octobre 1969 ; que si les requérants soutiennent que l'amortissement des investissements ainsi apportés à la nouvelle concession devait s'achever le 30 septembre 2018, ils n'établissent ni même n'allèguent qu'après la conclusion du nouveau traité de concession, les investissements consentis sur le parc de l'ancien marché n'auraient pas continué à être amortis dans le cadre de l'exploitation de la nouvelle concession, en figurant dans les dotations aux amortissements, et que la valeur non amortie de ces investissements n'aurait pas déjà été prise en compte dans la totalisation de la valeur non amortie figurant dans la comptabilité de la concession au titre de l'exploitation des installations et ouvrages liées à la concession signée en 1991, et qui a été évaluée par les parties elles-mêmes à 17 669 477 francs, comme il vient d'être dit au point 13 ; qu'enfin, MM E...ne produisent aucun élément de nature à établir les conditions dans lesquelles ces investissements ont continué, ou non, à être amortis pas plus qu'ils ne justifient de la valeur non amortie desdits investissements ; que, dans ces conditions, MM E...ne sont pas fondés à demander que la somme de 3 500 000 francs soit prise en compte dans l'évaluation de la valeur non amortie des dépenses d'investissement ;

15. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction, et en particulier des écritures de la commune de Nogent-sur-Marne enregistrées le 30 mars 2012, des nombreux procès-verbaux de constat effectués par la commune de Nogent-sur-Marne et du rapport de l'expert, que, lors de l'arrêt des prestations des concessionnaires, de nombreuses installations n'étaient pas en conformité avec les normes de sécurité incendie, que certaines installations connaissaient des dysfonctionnements techniques et que les exploitants n'avaient apporté les modifications techniques nécessaires à l'acquittement des tarifs en euros que pour un horodateur sur deux en surface et pour aucune des caisses automatiques " en ouvrage " ; que la commune de Nogent-sur-Marne a assuré la réparation, la mise en conformité des installations avec les normes de sécurité incendie et les modifications techniques liées au passage à l'euro pour un montant de 254 388,30 euros TTC tandis que MM E...ont procédé aux modifications techniques des horodateurs pour un montant de 220 578 francs, soit 33 626,90 euros ;

16. Considérant que ces dépenses d'investissement aux fins de remise aux normes étaient nécessaires à une exploitation normale des parcs de stationnement et du stationnement payant de surface et auraient dû entièrement être assurées par les concessionnaires avant la cessation de leurs prestations ; que, compte tenu de la date à laquelle ces dépenses d'investissement ont été réalisées, aucun amortissement comptable n'avait été effectué lors de la cessation de l'exploitation ; que la commune de Nogent-sur-Marne est par suite fondée à soutenir que les dépenses d'investissement qu'elle a elle-même assurées en lieu et place des concessionnaires l'ont appauvrie et doivent être déduites des dépenses utiles susceptibles d'être remboursées à MME... ;

17. Considérant, en dernier lieu, que si la commune de Nogent-sur-Marne soutient que, compte tenu de l'état d'" abandon " des installations et ouvrages lors de leur retour à la collectivité, le coût des travaux de remise en état s'élevait à 1 284 582 euros, elle n'établit pas, par les seuls éléments qu'elle produit, que l'état d'usure de ces installations excédait celui correspondant à leur utilisation normale au cours de l'exploitation et que le renouvellement de certains matériels ou la modification des équipements, à l'exception de ceux mentionnés au point 15, auraient normalement dû être assurés par les concessionnaires avant la cessation de cette exploitation ; qu'elle n'identifie aucun poste particulier qui aurait justifié la nécessité de procéder à des travaux de remise en état dès 2002 pas plus qu'elle ne produit au dossier des factures ou tout autre élément justifiant qu'elle aurait effectivement dépensé une somme de 1 284 582 euros au titre des travaux de remise en état ;

18. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le montant total des dépenses d'investissement non amorties à la date de la cessation de l'exploitation dont MM E...sont fondés à demander le remboursement s'élève à 261 032 euros (481 793,93 + 33 626,90 - 254 388,30) ;

S'agissant des dépenses exposées par la commune au titre de la jouissance de longue durée de 61 emplacements dans le parc central et des " amodiations Unidomo " :

19. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction, et en particulier de l'article 7-1 du traité de concession, que la commune de Nogent-sur-Marne a versé à MME..., en 1991, une somme de 3 617 300 francs en contrepartie de la jouissance de longue durée de 61 emplacements dans le parc central ; que les dépenses exposées par la ville au titre de ces emplacements ne lui ont ainsi été utiles que jusqu'en 2002, et non jusqu'au terme de la concession prévu à l'origine par le traité de concession ; que, compte tenu de la méthode de comptabilisation annuelle de ces recettes qui a été retenue par les concessionnaires dans les comptes d'exploitation, et qui a été validée par l'expert, pour un montant total de 1 139 517 francs, il sera fait une juste appréciation du montant des dépenses que la ville a inutilement exposées à ce titre en les évaluant à la somme de 1 910 483 francs soit 291 251,26 euros ;

20. Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction que MM E...ont également perçu de la part de la société Unidomo une somme de 167 930 francs TTC en contrepartie de la jouissance de longue durée de places de stationnement en ouvrage ; qu'il est constant que la commune de Nogent-sur-Marne, après l'arrêt de l'exploitation par MME..., a continué à faire bénéficier la société Unidomo de ces places de stationnement sans lui demander de contrepartie financière ; qu'elle est dès lors fondée à demander que les recettes encaissées par anticipation par les concessionnaires, pour ce qui concerne la période postérieure à l'exploitation, qui ont été source d'enrichissement sans cause pour ces derniers, lui soient remboursées ; que, compte tenu de la méthode de comptabilisation annuel de ces recettes qui a été retenue par les concessionnaires dans les comptes d'exploitation, et qui a été validée par l'expert, pour un montant total de 53 414 francs, il sera fait une juste appréciation de la part de recettes perçues par anticipation MM E... en les évaluant à 114 516 francs, soit 17 457,85 euros ;

21. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le montant total des sommes qui doivent être remboursées à la commune de Nogent sur-Marne au titre de ces locations de longue durée s'élève à 308 709,11 euros ;

S'agissant du déficit d'exploitation :

Quant aux recettes d'exploitation :

22. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert, que les recettes des ouvrages ont été, pour la période allant de janvier à juillet 2002, de 920 000 euros, soit sensiblement supérieures, prorata temporis, aux recettes moyennes constatées pour les ouvrages sur les quatre années précédentes ; qu'en revanche, les recettes du stationnement payant de surface pour la période allant de janvier à juillet 2002, chiffrées par l'expert à 217 683 francs, ne représentent environ que 15 % des recettes moyennes constatées sur les quatre précédents exercices ; qu'il résulte de l'instruction que l'absence d'encaissement de ces recettes est principalement dû au dysfonctionnement des horodateurs, dont une partie n'était pas en conformité, et à une gestion de la concession beaucoup moins rigoureuse de la part de MM E... ; que, dans le cadre d'une gestion normale, les recettes qui auraient dû normalement dû être perçues entre les mois de janvier à juillet 2002 auraient ainsi été environ sept fois supérieures ; qu'il sera fait une juste appréciation des recettes qui auraient dû être normalement perçues au titre de cette période en les évaluant à 1 500 000 francs ; qu'il en résulte que les recettes supplémentaires qu'auraient dû percevoir les concessionnaires au titre d'une exploitation normale du stationnement payant de surface au cours de l'année 2002 doivent être fixées à 1 282 317 francs (1 500 000 - 217 683), soit 195 487,97 euros ;

23. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction, et en particulier du rapport de l'expert, que les recettes de stationnement de surface, au titre de la période d'exploitation, se sont élevées à 27 886 480 francs, que les recettes des parcs de stationnement se sont élevées à 13 291 330 francs tandis que les recettes comptabilisées au titre de la mise à disposition de 61 emplacements et des " amodiations Unidomo " se sont élevées à 1 192 931 francs, ainsi qu'il a été dit aux points 19 et 20 ; que les concessionnaires ont donc perçu des produits d'exploitation pour un montant total de 42 370 741 francs, soit 6 459 377,83 euros ;

24. Considérant, en dernier lieu, que, le 8 novembre 1996, le maire de la commune de Nogent sur-Marne a informé les concessionnaires que l'association syndicale libre " les Arcades " avait accepté " les propositions " qu'il lui avait faites " afin de régler définitivement les problèmes juridiques qui s'opposaient jusqu'alors à l'ouverture du parking public " et qu'il leur demandait de " faire diligence pour ouvrir " rapidement ce parc, même " provisoirement, dans l'attente des travaux définitifs de remise en état " ; qu'il résulte de l'instruction que l'exploitation du parc des Arcades a seulement débuté en 2000 et que les concessionnaires ont perçu des recettes de 52 371 francs en 2000 et 216 355 francs en 2001 ; que les requérants n'apportent aucun élément sérieux de nature à expliquer les raisons du retard à ouvrir le parc des Arcades ; qu'en admettant même que certains travaux étaient nécessaires pour permettre un fonctionnement optimal de ce parc, et qu'une ouverture immédiate n'était pas possible, la mise en service de ce parc aurait dû intervenir, dans le cadre d'une gestion normale, en 1998 au plus tard ; qu'il sera fait une juste évaluation des recettes qui auraient pu être perçues entre 1998 et 2000 en les évaluant à 500 000 francs ; qu'il en résulte que les recettes supplémentaires qu'auraient normalement dû percevoir les concessionnaires au titre de l'exploitation du parc des Arcades doivent être fixées à 447 629 francs (500 000 - 52 371), soit 68 240,60 euros ;

25. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les recettes d'exploitation, découlant d'une gestion normale des parcs de stationnement et des stationnements de surface au titre de la période allant de mai 1991 à juillet 2002, doivent être évaluées à 6 723 106,39 euros (6 459 377,83 + 195 487,97 + 68 240,60 ) ;

Quant aux charges d'exploitation :

26. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 7 c) du traité de concession : " La collectivité fait son affaire de la souscription d'un emprunt (...) de 18 200 000 francs / En contrepartie la ville encaissera une redevance spéciale définie à l'article 38-2° ci-après " ; qu'aux termes de l'article 38-2° du même traité : " la collectivité virera mensuellement au compte du concessionnaire une somme correspondant à la totalité des recettes réalisées sur le stationnement payant de surface après déduction des frais engagés pour son propre compte, à savoir (...) la redevance qu'elle se réserve au titre du remboursement de l'emprunt souscrit pour la réalisation des investissements " ; qu'aux termes de l'article 39 de ce traité : " La collectivité prélèvera à titre de redevance sur les recettes du stationnement de surface (...) une somme correspondant au service de l'emprunt visé à l'article 7 c) soit annuellement un montant forfaitaire de 2 242 000 francs pendant la durée d'amortissement dudit emprunt " ;

27. Considérant que la redevance, telle qu'elle avait à l'origine été prévue par les stipulations combinées des articles 7 c), 38-2 et 39 du traité de concession, dont les concessionnaires se sont acquittés annuellement auprès de la commune de Nogent-sur-Marne et qui a été prélevée sur les recettes encaissées par les concessionnaires, doit être regardée, dans les circonstances de l'espèce, comme une charge d'exploitation pour les concessionnaires ; que cette redevance, qui permettait à la commune de Nogent-sur-Marne de rembourser l'emprunt qu'elle avait souscrit, constituait ainsi une dépense utile pour la commune ; qu'il résulte de l'instruction, et en particulier du rapport de l'expert, que cette charge d'exploitation a été supportée par les concessionnaires, au titre de la période d'exploitation, à hauteur de 22 159 246 francs, soit 3 378 155,28 euros ;

28. Considérant, en deuxième lieu, qu'au titre des trois emprunts, exposés au point 12, qui ont été contractés pour assurer la réalisation des investissements, les concessionnaires ont respectivement remboursé 6 094 453,68 francs, 4 078 974,29 francs et 1 703 820,38 francs d'intérêts d'emprunt pendant la période d'exploitation ; qu'ils ont ainsi supporté, pendant la période d'exploitation, des frais financiers qui se sont élevés à 11 877 247,67 francs, soit 1 810 674,73 euros ; que ces frais financiers supportés au titre des investissements réalisés pour l'exploitation ont été en l'espèce utiles à la commune de Nogent-sur-Marne ; que la commune de Nogent-sur-Marne n'est en revanche pas fondée à demander que soient déduits de ces dépenses les intérêts des emprunts restant à rembourser auprès des établissements bancaires, qui s'élevaient à 107 200 euros lors de la cessation de l'exploitation de la concession, dès lors que le remboursement de ces frais financiers n'a été pris en charge par la commune que postérieurement à l'arrêt de l'exploitation par les concessionnaires et que les dépenses consenties à ce titre étaient en tout état de cause utiles aux dépenses d'investissements qu'elle a finalement supportées ;

29. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction, et en particulier du rapport de l'expert, que les charges courantes de l'exploitation, à l'exclusion du poste " commissions ", se sont élevées, au cours de la période d'exploitation, à 26 133 241 francs, et que les dotations aux amortissements ont représenté 17 669 477 francs ; que si MM E...soutiennent qu'ils ont également supporté une somme de 1 420 247 francs au titre du poste " commission ", correspondant à une forfaitisation des frais généraux et des frais de siège de 7 à 8 %, ils n'établissent toutefois pas, par les seuls éléments qu'ils produisent, que l'exploitation des parcs de stationnement et des stationnements de surface de la commune de Nogent-sur-Marne aurait spécifiquement occasionné des " frais généraux " autres que ceux pris en compte au titre des achats, des fournitures, de l'électricité, de la location, de l'entretien immobilier et mobilier, de la maintenance, du poste télécom, du gardiennage ou des " frais de siège " utiles à l'exécution des prestations accomplies pour le compte de la commune de Nogent-sur-Marne ; que les charges courantes et les dotations aux amortissements exposées par les concessionnaires qui ont été utiles à la commune de Nogent-sur-Marne ont ainsi représenté une somme de 43 802 718 francs, soit 6 677 681, 31 euros ;

30. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les charges d'exploitation des parcs de stationnement et du stationnement de surface qui doivent être regardées comme des dépenses utiles pour la commune de Nogent-sur-Marne se sont élevées, au titre de la période allant de mai 1991 à juillet 2002, à 77 839 211,67 francs (22 159 246 francs + 11 877 247,67 francs + 26 133 241 francs + 17 669 477 francs) soit 11 866 511,32 euros ;

Quant à la détermination du déficit d'exploitation :

31. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui a été dit aux points 22 à 30 que le déficit d'exploitation, dans le cadre d'une gestion normale, nécessaire à la bonne exécution du service assuré par les concessionnaires au titre de la période allant de mai 1991 à juillet 2002 s'élève à 5 143 404,93 euros (11 866 511,32 - 6 723 106,39) ; qu'il n'y a en revanche pas lieu de déduire de ce déficit d'exploitation l'économie d'impôt qui en serait résulté par ailleurs dans les comptes de l'entreprise dès lors que ce déficit doit uniquement être évalué au regard de la seule exploitation en cause ;

32. Considérant, dès lors, que le montant des dépenses utiles à l'indemnisation desquelles ont droit MM E... sur un fondement quasi-contractuel s'élève à 5 095 728,46 euros (5 143 404,93 + 261 032 euros - 308 709,11) ;

En ce qui concerne les sommes réclamées sur un fondement quasi-délictuel :

33. Considérant que, dans le cas où le contrat est écarté en raison d'une faute de l'administration, le cocontractant peut, en outre, sous réserve du partage de responsabilités découlant, le cas échéant, de ses propres fautes, prétendre à la réparation du dommage imputable à la faute de l'administration ; qu'à ce titre, il peut demander le paiement des sommes correspondant aux autres dépenses exposées par lui pour l'exécution du contrat et aux gains dont il a été effectivement privé par la nullité ou l'annulation du contrat, notamment du bénéfice auquel il pouvait prétendre, si toutefois l'indemnité à laquelle il a droit sur un terrain quasi-contractuel ne lui assure pas déjà une rémunération supérieure à celle que l'exécution du contrat lui aurait procurée ;

S'agissant de la période allant de 1991 à juillet 2002 :

34. Considérant, en premier lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction, et en particulier du nombre de verbalisations comptabilisées entre 1991 et 2002, que la commune aurait expressément ordonné aux agents de surveillance dont elle a repris la direction à partir de 1992 de renoncer à assurer normalement leur mission relative à la verbalisation des infractions aux règles de stationnement et qu'elle aurait ainsi commis une faute dans l'exercice de son pouvoir de police ;

35. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des stipulations combinées des articles 36, 37, 40, 41 du traité de concession et de l'annexe 2 à ce traité que les recettes d'exploitation des concessionnaires étaient assurées par la perception des recettes dégagées par les parcs de stationnement et des recettes de stationnement de surface minorée des frais de personnel des agents communaux affectés à la surveillance et d'une redevance ; que les tarifs fixés par le traité de concession pour les parcs de stationnement et les tarifs du stationnement de surface étaient réévalués annuellement, le cas échéant, en application d'une formule de révision ; que, s'agissant du stationnement de surface, la commune de Nogent sur-Marne s'engageait en outre, dans le cas où elle renoncerait à faire adopter par le conseil municipal la révision contractuelle des tarifs, à verser au concessionnaire une somme réputée compenser son manque à gagner résultant de l'absence de modification des tarifs ; que les parties s'étaient également engagées, pour tenir compte de l'évolution des conditions économiques et techniques, et pour s'assurer que la formule de révision était bien représentative des coûts réels, à soumettre, en cas de besoin, cette formule de révision à un réexamen ; qu'enfin, la commune de Nogent-sur-Marne devait assurer, au minium, une revalorisation de l'ensemble des tarifs de stationnement de surface, de manière prédéterminée, au 1er janvier 1996 et au 1er janvier 2000 ;

36. Considérant que le contrat ayant été écarté pour régler le présent litige, MM E... ne peuvent utilement se prévaloir directement des stipulations des articles 36, 37, 40, 41 du traité de concession et de l'annexe 2 à ce traité analysées au point 35 pour soutenir que la commune de Nogent-sur-Marne aurait commis une faute de nature quasi-délictuelle ;

37. Considérant, en dernier lieu, qu'à supposer que la commune de Nogent-sur-Marne ait commis une faute de nature quasi-délictuelle en refusant de réviser à la hausse les tarifs de stationnement pour tenir compte des contraintes pesant sur un fonctionnement économique normal de l'exploitation, il ressort des écritures de MM E...enregistrées le 15 décembre 2011 que ces derniers évaluent leur manque à gagner, pour la période allant de 1991 à 2002, résultant de l'absence de variation des tarifs de stationnement, à 4 973 877 francs pour ce qui concerne le stationnement payant de surface et à 2 974 408 francs pour ce qui concerne les parcs de stationnement ; qu'en admettant même que ces manques à gagner soient justifiés dans leur principe comme dans leur montant et que les modifications techniques apportées aux ouvrages et horodateurs résultant de ces évolutions tarifaires n'auraient pas entraîné de charges supplémentaires, les préjudices subis en raison des fautes de la commune se seraient élevés, selon les requérants eux-mêmes, à 7 948 285 francs, soit 1 211 708,24 euros ; que, toutefois, dans cette hypothèse, compte tenu de ce qui a été dit au point 25, les recettes d'exploitation de MM E... auraient pu atteindre, au maximum, un montant de 7 934 814,63 euros (6 723 106,39 + 1 211 708,24) tandis que les charges d'exploitation auraient toujours été de 11 866 511,32 euros ; qu'ainsi, même dans l'hypothèse la plus optimiste qui a été proposée par MME..., les concessionnaires auraient supporté un déficit d'exploitation de près de 4 millions d'euros au titre de la période d'exploitation ;

38. Considérant que, compte tenu de ce qui vient d'être dit aux points 34 à 37, les requérants n'établissent pas avoir subi un préjudice, au titre de la période allant de mai 1991 à juillet 2002, imputable à des fautes éventuellement commises par la commune de Nogent-sur-Marne ;

S'agissant de la période postérieure à juillet 2002 :

39. Considérant qu'ainsi qu'il vient d'être dit au point 37, l'exploitation de la concession a été très largement déficitaire pendant plus de dix ans sans que les fautes éventuellement commises par la commune de Nogent-sur-Marne dans la conclusion d'un traité de concession nul et dans la gestion économique de cette exploitation soient directement à l'origine de l'absence de rentabilité économique de cette concession ; que, dans ces conditions, et compte tenu également des conclusions de l'expert sur ce point, le préjudice résultant de l'absence de bénéfice subi par MM E...au titre de la période postérieure à la cessation de cette exploitation est purement éventuel ; que les requérants, qui avaient d'ailleurs demandé dès novembre 2001 la résiliation judiciaire de la concession, compte tenu de l'absence de rentabilité économique, n'établissent dès lors pas avoir subi un quelconque préjudice, au titre de la période postérieure à juillet 2002, résultant de manière directe et certaine des fautes commises par la commune ;

40. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que MM E...ne sont pas fondés à demander la réparation des préjudices qu'ils allèguent avoir subis sur un fondement quasi-délictuel ;

En ce qui concerne la détermination du montant de la condamnation à la date du présent arrêt :

S'agissant du montant de l'indemnité due à MM E...au principal :

41. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 32, la somme à laquelle MM E...ont droit au titre des prestations accomplies pour le compte de la commune de Nogent-sur-Marne s'élève à 5 095 728,46 euros ;

S'agissant de la détermination du point de départ des intérêts au taux légal et de la capitalisation des intérêts :

42. Considérant, en premier lieu, que lorsqu'ils ont été demandés, et quelle que soit la date de cette demande, les intérêts moratoires dus en application de l'article 1153 du code civil courent à compter du jour où la demande de paiement du principal est parvenue au débiteur ou, en l'absence d'une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine ; que, selon les principes dont s'inspirent les dispositions de l'article 1378 du code civil, il n'y a lieu de fixer le point de départ des intérêts au jour du paiement que lorsqu'il y a eu mauvaise foi de la part de celui qui a reçu les sommes dont il est demandé répétition ;

43. Considérant, d'une part, qu'il ne résulte pas de l'instruction que la commune de Nogent-sur-Marne aurait, de mauvaise foi, perçu de la part de MM E...des sommes en exécution des prestations qui ont été à l'origine été faites en exécution du traité de concession ;

44. Considérant, d'autre part, qu'il ne résulte pas de l'instruction, et en particulier de la demande préalable d'indemnisation adressée par MM E...à la commune de Nogent-sur-Marne, que les requérants auraient demandé à la commune de Nogent-sur-Marne le remboursement de leurs dépenses utiles et l'indemnisation de leur manque à gagner, sur des terrains quasi-contractuel et quasi-délictuel ; que, dès lors, le point de départ des intérêts au taux légal, en application de l'article 1153 du code civil, doit être fixé à la date à laquelle les requérants ont pour la première fois saisi le Tribunal administratif de Melun ;

45. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le point de départ des intérêts au taux légal dus sur la somme de 5 095 728,46 euros doit être fixé au 8 novembre 2001 ;

46. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 1154 du code civil : " Les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière " ; que la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d'une année ; qu'en ce cas, cette demande ne prend toutefois effet qu'à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière ; que, le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande ;

47. Considérant que MM E...ont demandé la capitalisation des intérêts dans leur requête de première instance enregistrée le 8 novembre 2001 ; que, dès lors, cette demande prend effet pour la première fois à compter 8 novembre 2002 ;

S'agissant de l'application de l'article 1254 du code civil :

48. Considérant qu'aux termes de l'article 1254 du code civil : " Le débiteur d'une dette qui porte intérêt ou produit des arrérages ne peut point, sans le consentement du créancier, imputer le paiement qu'il fait sur le capital par préférence aux arrérages ou intérêts : le paiement fait sur le capital et intérêts, mais qui n'est point intégral, s'impute d'abord sur les intérêts " ;

49. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la commune de Nogent-sur-Marne a versé à MM E...des acomptes de 1 800 000 euros et 4 865 000 euros, respectivement les 14 avril 2003 et 14 octobre 2005, en exécution des ordonnances du Tribunal administratif de Melun des 21 juin 2002 et 9 juin 2005, et la somme de 837 293,30 euros, le 14 avril 2011, à la suite de la décision du Conseil d'Etat du 19 janvier 2011 ; qu'en exécution du jugement rendu par le Tribunal administratif de Melun le 23 mars 2006 et des arrêts rendus par la Cour administrative d'appel de Paris les 18 novembre 2003 et 2 mars 2009, la commune de Nogent sur-Marne a obtenu le remboursement des sommes de 600 000 euros, de 2 692 595 euros et de 837 293,30 euros respectivement les 12 février 2004, 11 mai 2006 et 26 février 2010 ;

50. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que MM E...auraient accepté, à supposer que la demande leur en ait été faite par la commune de Nogent-sur-Marne, que les paiements auxquels celle-ci a procédé s'imputent d'abord sur le principal ;

51. Considérant que, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, compte tenu des circonstances particulières de l'espèce, la somme que la commune de Nogent-sur-Marne doit être condamnée à verser à MME..., à la date du présent arrêt, sera directement déterminée par le juge en tenant compte, pour l'application des règles posées par les articles 1153, 1154 et 1254 du code civil, des acomptes et des remboursements intervenus depuis le 8 novembre 2001 ;

52. Considérant que la somme de 5 095 728,46 euros, majorée des intérêts au taux légal, pour la période allant du 8 novembre 2001 au 13 avril 2003, et des intérêts capitalisés de la période allant du 8 novembre 2001 au 7 novembre 2002, représente un montant total, le 14 avril 2003, de 5 395 595 euros ; que, compte tenu de l'acompte de 1 800 000 euros versé par la commune le 14 avril 2003 et de l'application de l'article 1254 du code civil, la somme restant due le 14 avril 2003, d'un montant de 3 595 595 euros (5 395 595-1 800 000), majorée des intérêts au taux légal, pour la période allant du 14 avril 2003 au 13 octobre 2005, et des intérêts capitalisés de la période allant du 14 avril 2003 au 13 avril 2004 et du 14 avril 2004 au 13 avril 2005, représente un montant total, le 14 octobre 2005, de 3 824 221,53 euros ; que, compte tenu du remboursement effectué par MM E...le 12 février 2004, s'y ajoute une somme supplémentaire de 600 000 euros, majorée des intérêts au taux légal pour la période allant du 12 février 2004 au 13 octobre 2005 et des intérêts capitalisés de la période allant 12 février 2004 au 11 février 2005, soit un montant total, le 14 octobre 2005, de 621 878,05 euros ; que, le 14 octobre 2005, la commune a versé un nouvel acompte de 4 865 000 euros qui a été supérieur de 418 900,42 euros à la somme, tous intérêts compris, d'un montant de 4 446 099,58 euros (3 824 221,53 + 621 878,05), qui était alors due à MM E...à la date du 14 octobre 2005 ; que les intérêts au taux légal et la capitalisation des intérêts ont donc cessé de courir au profit de MM E...jusqu'au 11 mai 2006, date à laquelle la commune s'est vue rembourser une nouvelle somme de 2 692 695 euros par MME... ; que la somme de 418 900,42 euros qui a à tort été versée à MM E...a en revanche produit intérêts au taux légal, entre le 14 octobre 2005 et le 10 mai 2006, au profit de la commune de Nogent-sur-Marne, pour un montant de 5 006,69 euros ; que la somme due par la commune à compter du 11 mai 2006, d'un montant de 2 268 917,36 euros (2 692 695 - 418 900,42 - 5 006,69), majorée des intérêts au taux légal pour la période allant du 11 mai 2006 au 13 avril 2011 et des intérêts capitalisés les 11 mai 2007, 11 mai 2008, 11 mai 2009 et 11 mai 2010, représente un montant total, le 14 avril 2011, de 2 574 789,01 euros ; que, compte du nouveau remboursement effectué le 26 février 2010 par MME..., s'y ajoute une somme supplémentaire de 837 293,30 euros, majorée des intérêts au taux légal pour la période allant du 26 février 2010 au 13 avril 2011 et des intérêts capitalisés de la période allant 26 février 2010 au 25 février 2011, qui représente ainsi un montant total, le 14 avril 2011, de 842 800,69 euros ; que, compte tenu du dernier acompte de 837 293,30 euros versé par la commune le 14 avril 2011 et de l'application de l'article 1254 du code civil, le montant de la somme qui est due par la commune de Nogent-sur-Marne à la date du présent arrêt est égal à la somme de 2 580 296,40 euros (2 574 789,01 + 842 800,69 - 837 293,30) majorée des intérêts au taux légal à compter du 14 avril 2011 et des intérêts capitalisés à compter du 14 avril 2012 et pour chaque échéance annuelle ultérieure ;

Sur les dépens de première instance :

53. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties (....) " ;

54. Considérant que, compte tenu des motifs du présent arrêt et du montant des condamnations prononcées, la commune de Nogent-sur-Marne doit être regardée comme partie perdante sans qu'aucune circonstance particulière, au sens et pour l'application de l'article R. 761-1, ne justifie de procéder à un partage des dépens ; que, dès lors, la commune de Nogent-sur-Marne n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont mis les frais de l'expertise, d'un montant de 65 098,28 euros, à sa charge définitive ;

55. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que MM E...sont fondés à demander l'annulation de l'article 1er du jugement attaqué et à demander la condamnation de la commune de Nogent-sur-Marne, compte tenu des motifs exposés aux points 41 à 52, à lui verser une somme de 2 580 296,40 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 14 avril 2011 et des intérêts capitalisés à compter du 14 avril 2012 et pour chaque échéance annuelle ultérieure ; qu'en revanche, l'appel incident de la commune de Nogent-sur-Marne doit être rejeté ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

56. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Nogent-sur-Marne le versement d'une somme de 4 000 euros au titre des frais exposés par MM E...et non compris dans les dépens ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font en revanche obstacle à ce que soit mis à la charge de MME..., qui ne sont pas les parties perdantes dans la présence instance, le versement d'une quelconque somme à la commune de Nogent-sur-Marne au titre de ces même frais ;

D E C I D E :

Article 1er : L'article 1er du jugement n° 0104682/2 du Tribunal administratif de Melun est annulé.

Article 2 : La commune de Nogent-sur-Marne est condamnée à verser à MM E...une somme de 2 580 296,40 euros. Cette somme sera majorée des intérêts au taux légal à compter du 14 avril 2011. Les intérêts échus le 14 avril 2012 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts puis à chaque échéance annuelle ultérieure.

Article 3 : La commune de Nogent-sur-Marne versera à MM E...une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions et des demandes présentées par les parties est rejeté.

''

''

''

''

2

N° 11PA00458


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA00458
Date de la décision : 03/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-04-01 Marchés et contrats administratifs. Fin des contrats. Nullité.


Composition du Tribunal
Président : M. PERRIER
Rapporteur ?: M. Laurent BOISSY
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : PIGOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-07-03;11pa00458 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award