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28/03/2013 | FRANCE | N°12PA02231

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 28 mars 2013, 12PA02231


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 21 mai 2012, régularisée le 31 mai 2012 par la production de l'original, et le mémoire complémentaire, enregistré par télécopie le 25 juin 2012, régularisé le 27 juin 2012 par la production de l'original, présentés par le préfet de police ; le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1114220/1-2 du 3 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 13 juillet 2011 refusant à M. A...B...la délivrance d'un certificat de résidence, l'obligeant à quitter le territo

ire français, fixant le pays de destination et abrogeant son autorisation provis...

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 21 mai 2012, régularisée le 31 mai 2012 par la production de l'original, et le mémoire complémentaire, enregistré par télécopie le 25 juin 2012, régularisé le 27 juin 2012 par la production de l'original, présentés par le préfet de police ; le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1114220/1-2 du 3 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 13 juillet 2011 refusant à M. A...B...la délivrance d'un certificat de résidence, l'obligeant à quitter le territoire français, fixant le pays de destination et abrogeant son autorisation provisoire de séjour, et lui a fait injonction de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B...devant le Tribunal administratif de Paris ;

..................................................................................................................qui il réside et deux de ses deux soeurs dont l'une est de nationalité française, il ressort des pièces du dossier que l'ancienneté de sa présence en France

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de procédure civile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers malades ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience, en application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 mars 2013 :

- le rapport de M. Niollet, premier conseiller,

- et les observations de Me Stambouli, avocat de M.B... ;

1. Considérant que M. A...B..., ressortissant algérien né le 9 mars 1962 à Sétif (Algérie) qui a soutenu être entré en France le 9 décembre 1999 a demandé à bénéficier de l'asile territorial, ce qui lui a été refusé par une décision du ministre de l'intérieur du 23 mai 2003, puis d'un certificat de résidence en raison de son état de santé, ce qui lui a été refusé par une décision du préfet de police du 25 janvier 2005 assortie d'une invitation à quitter le territoire national ; qu'il a, le 19 avril 2005, fait l'objet d'un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière qui a été annulé par un jugement du Tribunal administratif de Paris du 6 juin 2005 ; qu'il s'est de nouveau vu refuser un certificat de résidence en raison de son état de santé le 22 juin 2006 par une décision du préfet de police qui a été annulée par un jugement du Tribunal administratif de Paris du 8 juin 2010 qui a enjoint au préfet de police de réexaminer sa situation ; qu'il s'est alors vu remettre une autorisation provisoire de séjour qui a été renouvelée à plusieurs reprises ; que le médecin, chef du service médical de la préfecture de police, a estimé dans le cadre du réexamen de sa situation, par son avis du 19 mai 2011, que son état de santé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'il pourrait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que, par un arrêté du 13 juillet 2011, le préfet de police a de nouveau refusé de lui délivrer un certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français en fixant le pays de destination et en abrogeant son autorisation provisoire de séjour ; que le préfet de police relève appel du jugement du 3 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par M.B... :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 776-9 du code de justice administrative : " Le délai d'appel est d'un mois. Il court à compter du jour où le jugement a été notifié à la partie intéressée. Cette notification mentionne la possibilité de faire appel et le délai dans lequel cette voie de recours peut être exercée (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que le jugement du Tribunal administratif de Paris du 3 avril 2012 a été notifié au préfet de police le 18 avril 2012 ; que le délai d'appel d'un mois prévu par les dispositions citées ci-dessus, qui est un délai franc, expirait donc le lundi 21 mai 2012 ; que la requête du préfet de police, enregistrée au greffe de la Cour le 21 mai 2012 par télécopie, n'était pas tardive ;

Sur la requête du préfet de police :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " (...) le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. Par dérogation, à Paris, ce médecin est désigné par le préfet de police. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé (...) " ; que l'arrêté du 8 juillet 1999 pris pour l'application de ces dispositions impose au médecin d'émettre un avis précisant si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale, si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays, la durée prévisible du traitement, et si son état de santé lui permet de voyager sans risque vers son pays de renvoi ;

5. Considérant qu'il ressort du jugement attaqué que, pour annuler l'arrêté du préfet de police refusant un certificat de résidence à M.B..., le tribunal administratif a relevé qu'il souffre de graves troubles psychiatriques et a estimé que, s'il n'était pas démontré que ces troubles ne pouvaient faire l'objet d'un traitement approprié en Algérie, le lien existant, selon les certificats médicaux qu'il avait produits, entre la pathologie de M. B...et les évènements traumatisants qu'il avait vécus en Algérie, ne permettait pas d'envisager un traitement approprié dans ce pays ; qu'il en a déduit que cet arrêté avait méconnu les stipulations du 7°) de l'article 6 de l'accord franco-algérien et reposait sur une erreur manifeste d'appréciation ;

6. Considérant, toutefois, que, pour contester ce jugement, le préfet de police fait valoir à bon droit que les certificats médicaux produits par M. B...n'établissent pas qu'il ne pourrait, en raison d'un lien entre sa pathologie et les évènements qu'il aurait vécus en Algérie, bénéficier d'une prise en charge appropriée dans ce pays, et produit une documentation qui établit qu'il dispose de psychiatres et de structures hospitalières aptes à cette prise en charge ainsi que de médicaments adaptés ; qu'ainsi, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur les motifs rappelés ci-dessus pour annuler son arrêté ;

7. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M.B..., devant le Tribunal administratif de Paris et devant la Cour ;

Sur les autres moyens soulevés par M.B... :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

8. Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort pas de la motivation de l'arrêté en litige que le préfet de police ne se serait pas livré à un examen complet de la situation de M.B... ;

9. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / 1) au ressortissant algérien qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) " ;

10. Considérant que, si M. B...se prévaut de l'ancienneté de sa présence en France, qui remonterait au 9 décembre 1999, les attestations émanant de médecins qu'il produit, ne sont pas de nature à établir sa présence pendant les années 2002 et 2004 ; qu'il n'est donc pas fondé à invoquer les stipulations citées ci-dessus ;

11. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

12. Considérant que, si M. B...fait état de la durée de sa présence en France et de la présence de son frère chez qui il réside et deux de ses deux soeurs dont l'une est de nationalité française, il ressort des pièces du dossier que l'ancienneté de sa présence en Francen'est pas établie et qu'il est célibataire et sans charge de famille en France et n'est pas dépourvu de toute attache familiale en Algérie où vivent son père et une partie de ses frères et soeurs et où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-sept ans ; que, dans ces conditions, l'arrêté en litige ne peut être regardé comme portant une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations citées ci-dessus, ni comme reposant sur une erreur manifeste d'appréciation ;

13. Considérant, en quatrième lieu, que, même si le préfet de police n'en a pas fait appel, M. B...ne saurait invoquer l'autorité de chose jugée qui s'attache aux jugements du Tribunal administratif de Paris du 6 juin 2005 et du 8 juin 2010 mentionnés ci-dessus ;

14. Considérant, en cinquième lieu, qu'il résulte des dispositions des articles L. 312-1 et L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à la commission du titre de séjour que l'autorité administrative est tenue de saisir cette commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3 de ce code et, s'agissant des ressortissants algériens, aux articles 6, 7 et 7 bis de l'accord franco-algérien, auxquels elle envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ;

15. Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, le préfet de police n'était pas tenu de soumettre le cas de M. B...à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande de certificat de résidence ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

16. Considérant, d'une part, que, compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, M. B...n'est pas fondé à contester l'obligation de quitter le territoire français que comporte l'arrêté en litige, en excipant de l'illégalité de la décision lui refusant un certificat de résidence, en invoquant les dispositions du 10°) de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et en soutenant que, compte tenu de son état de santé, elle reposerait sur une erreur manifeste d'appréciation ;

17. Considérant, d'autre part, que M. B...ne saurait utilement invoquer les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour contester l'obligation de quitter le territoire français ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

18. Considérant, d'une part, que M. B...n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination aurait été prise au terme d'une procédure irrégulière, l'avis du médecin, chef du service médical de la préfecture de police, mentionné ci-dessus, ne précisant pas si son état de santé lui permettait de voyager sans risque vers son pays de renvoi, alors que sa capacité à voyager sans risque ne suscitait pas d'interrogation ;

19. Considérant, d'autre part, que l'argumentation que M. B...tire de son orientation sexuelle et de la législation algérienne en la matière, pour soutenir que la décision fixant le pays de destination méconnaitrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales aux termes desquelles : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ", est dépourvue de toute précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

En ce qui concerne la décision abrogeant l'autorisation provisoire de séjour de M. B... :

20. Considérant qu'il ressort de l'autorisation provisoire de séjour produite par M. B... devant le tribunal administratif qu'elle est venue à expiration le 12 novembre 2010 ; qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ses conclusions présentées devant le tribunal et tendant à l'annulation de la décision abrogeant cette autorisation ;

21. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 13 juillet 2011 ; que, par voie de conséquence, les conclusions de M. B... tendant au bénéfice des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1114220/1-2 du Tribunal administratif de Paris du 3 avril 2012 est annulé.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. B... présentées devant le tribunal administratif et tendant à l'annulation de la décision abrogeant son autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : Le surplus de la demande présentée par M. B... devant le Tribunal administratif de Paris et ses conclusions devant la Cour sont rejetés.

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N° 12PA02231

Classement CNIJ :

C


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA02231
Date de la décision : 28/03/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe NIOLLET
Rapporteur public ?: Mme DHIVER
Avocat(s) : STAMBOULI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-03-28;12pa02231 ?
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