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31/12/2012 | FRANCE | N°10PA05997

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 31 décembre 2012, 10PA05997


Vu la requête, enregistrée le 21 décembre 2010, présentée pour Mme C...A..., demeurant..., par Me B...; Mme A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802954/5-3 du 20 octobre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du recteur de l'académie de Paris en date du 14 septembre 2007 prononçant son licenciement à compter du 1er décembre 2007 et à ce qu'il soit enjoint à celui-ci de la réintégrer dans ses fonctions de professeur contractuel,

2°) d'annuler la décision du recteur de l'aca

démie de Paris précitée ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte, au recteur de l'aca...

Vu la requête, enregistrée le 21 décembre 2010, présentée pour Mme C...A..., demeurant..., par Me B...; Mme A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802954/5-3 du 20 octobre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du recteur de l'académie de Paris en date du 14 septembre 2007 prononçant son licenciement à compter du 1er décembre 2007 et à ce qu'il soit enjoint à celui-ci de la réintégrer dans ses fonctions de professeur contractuel,

2°) d'annuler la décision du recteur de l'académie de Paris précitée ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte, au recteur de l'académie de Paris de la réintégrer dans ses fonctions de professeur contractuel, soit dans son ancienne affectation, soit dans une affectation équivalente, dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros à verser à son avocat, en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

..................................................................................................................le ministre, qui invoque dans son mémoire en défense du 22 février 2012 les seules dispositions susmentionnées des lois du 13 juillet 1983 et du 11 janvier 1984 pour justifier le licenciement prononcé

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision en date du 3 décembre 2010 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris accordant à Mme A...le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale dans le cadre de la présente instance ;

Vu la directive 99/70/CE du 28 juin 1999 concernant l'accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée ;

Vu la directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique ;

Vu le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l'Etat pris pour l'application de l'article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 novembre 2012 :

- le rapport de M. Privesse, rapporteur,

- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., pour MmeA... ;

1. Considérant que Mme A...a été recrutée par le recteur de l'académie de Paris à compter du 1er septembre 1993 en qualité de professeur contractuel, sur le fondement de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée ; qu'elle a exercé ses fonctions au sein de l'atelier de restauration de tapisseries anciennes du collège Jacques Prévert à Paris, dans la discipline " tapisserie, couture, décor ", dans le cadre de contrats à durée déterminée régulièrement renouvelés ; qu'à partir de l'année 2004, elle a enseigné dans la formation " maintenance artisanale des articles textiles " à la section d'enseignement général adapté du même collège ; que son engagement a été converti en contrat à durée indéterminée le 27 juillet 2006, en application de la loi du 26 juillet 2005 susvisée ; que, par lettre du 17 juillet 2007, le recteur de l'académie de Paris l'a informée de l'absence de besoin d'enseignement dans sa discipline à compter de l'année scolaire 2007/2008 ; que son licenciement a été prononcé par une décision du 14 septembre 2007 prenant effet au 1er décembre suivant ; que Mme A...relève appel du jugement en date du 20 octobre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette dernière décision ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 113-1 du code de justice administrative : " Avant de statuer sur une requête soulevant une question de droit nouvelle, présentant une difficulté sérieuse et se posant dans de nombreux litiges, le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel peut, par une décision qui n'est susceptible d'aucun recours, transmettre le dossier de l'affaire au Conseil d'Etat, qui examine dans un délai de trois mois la question soulevée. Il est sursis à toute décision au fond jusqu'à un avis du Conseil d'Etat ou, à défaut, jusqu'à l'expiration de ce délai. " ;

3. Considérant qu'il est constant que Mme A...a été recrutée le 1er septembre 1993 sur le fondement des dispositions de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, dans leur rédaction alors en vigueur, aux termes desquelles : " Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 du titre Ier du statut général, des agents contractuels peuvent être recrutés dans les cas suivants : / 1° Lorsqu'il n'existe pas de corps de fonctionnaires susceptibles d'assurer les fonctions correspondantes ; / 2° Pour les emplois du niveau de la catégorie A et, dans les représentations de l'Etat à l'étranger, des autres catégories, lorsque la nature des fonctions ou les besoins des services le justifient. / Les agents ainsi recrutés sont engagés par des contrats d'une durée maximale de trois ans qui ne peuvent être renouvelés que par reconduction expresse. " ; que cet engagement a été reconduit tous les ans jusqu'au 27 juillet 2006, date à laquelle il a été converti en contrat à durée indéterminée ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la loi du 26 juillet 2005 susvisée: " I. - Lorsque l'agent, recruté sur un emploi permanent, est en fonction à la date de publication de la présente loi ou bénéficie, à cette date, d'un congé, en application des dispositions du décret mentionné à l'article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, le renouvellement de son contrat est soumis aux conditions prévues aux quatrième, cinquième et sixième alinéas de l'article 4 de la même loi. / Lorsque, à la date de publication de la présente loi, l'agent est en fonction depuis six ans au moins, de manière continue, son contrat ne peut, à son terme, être reconduit que par décision expresse et pour une durée indéterminée. / II. - Le contrat est, à la date de publication de la présente loi, transformé en contrat à durée indéterminée, si l'agent satisfait, le 1er juin 2004 ou au plus tard au terme de son contrat en cours, aux conditions suivantes : / 1° Etre âgé d'au moins cinquante ans ; / 2° Etre en fonction ou bénéficier d'un congé en application des dispositions du décret mentionné à l'article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée ; / 3° Justifier d'une durée de services effectifs au moins égale à six ans au cours des huit dernières années ; / 4° Occuper un emploi en application de l'article 4 ou du premier alinéa de l'article 6 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée, dans les services de l'Etat ou de ses établissements publics administratifs " ; qu'aux termes de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984, dans sa rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 précitée : " Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 du titre Ier du statut général, des agents contractuels peuvent être recrutés dans les cas suivants : / 1° Lorsqu'il n'existe pas de corps de fonctionnaires susceptibles d'assurer les fonctions correspondantes ; / 2° Pour les emplois du niveau de la catégorie A et, dans les représentations de l'Etat à l'étranger, des autres catégories, lorsque la nature des fonctions ou les besoins des services le justifient. / Les agents ainsi recrutés sont engagés par des contrats à durée déterminée, d'une durée maximale de trois ans. Ces contrats sont renouvelables, par reconduction expresse. La durée des contrats successifs ne peut excéder six ans. / Si, à l'issue de la période maximale de six ans mentionnée à l'alinéa précédent, ces contrats sont reconduits, ils ne peuvent l'être que par décision expresse et pour une durée indéterminée. / Les dispositions de l'alinéa précédent ne s'appliquent pas aux contrats conclus pour la mise en oeuvre d'un programme de formation, d'insertion, de reconversion professionnelles ou de formation professionnelle d'apprentissage. " ; que l'engagement de Mme A... a été renouvelé par un contrat à durée indéterminée en date du 27 juillet 2006 sur le fondement des dispositions précitées ;

5. Considérant que l'article 3 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée dispose que : " Sauf dérogation prévue par une disposition législative, les emplois civils permanents de l'Etat, des régions, des départements, des communes et de leurs établissements publics à caractère administratif sont, à l'exception de ceux réservés aux magistrats de l'ordre judiciaire et aux fonctionnaires des assemblées parlementaires, occupés soit par des fonctionnaires régis par le présent titre, soit par des fonctionnaires des assemblées parlementaires, des magistrats de l'ordre judiciaire ou des militaires dans les conditions prévues par leur statut. " ; que, les emplois civils permanents de la fonction publique ayant vocation à être occupés par des fonctionnaires, ces dispositions ont jusqu'ici été interprétées par la jurisprudence comme impliquant que l'administration puisse mettre fin au contrat d'un agent non titulaire, alors même qu'il disposerait d'un contrat à durée indéterminée, afin d'engager un agent titulaire ; que si, selon les allégations de l'administration, la mesure de licenciement litigieuse n'a pas été prise en considération de la personne de l'intéressée mais pour absence de besoin d'enseignement dans la matière qu'elle enseignait et dans l'intérêt du service, il ressort des pièces du dossier qu'une fonctionnaire titulaire a été affectée à compter du 1er septembre 2007 au poste précédemment occupé par Mme A... pour y dispenser le même enseignement ; qu'ainsi, le besoin d'enseignement n'avait pas disparu, comme l'admet au demeurant...,; qu'il appartient à la Cour de statuer, dès lors, sur la légalité de ce motif ;

6. Considérant que la requête de Mme A...présente ainsi à juger la question de savoir si l'administration peut remplacer par un fonctionnaire un agent contractuel bénéficiant, dans le cadre des dispositions de la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005, d'un contrat à durée indéterminée et, par suite, mettre fin à ses fonctions, eu égard à la nécessaire protection des droits qu'il a acquis en vertu de son contrat ;

7. Considérant, en outre, que, dans l'hypothèse où un agent bénéficiant d'un contrat à durée indéterminée en application des dispositions ci-dessus rappelées pourrait être évincé pour permettre le recrutement d'un fonctionnaire titulaire, se pose la question de savoir si l'administration a l'obligation de reclasser l'agent dans un autre emploi, alors qu'un principe général du droit imposant une telle obligation n'a été reconnu jusqu'ici par la jurisprudence du Conseil d'Etat qu'en faveur de l'agent contractuel atteint d'une inaptitude physique l'empêchant de manière définitive d'occuper son emploi ;

8. Considérant que ces questions, qui sont nouvelles, soulèvent des difficultés sérieuses et sont susceptibles de se poser dans de nombreux litiges ; qu'il y a lieu, en conséquence, de surseoir à statuer sur la présente requête et d'en transmettre le dossier au Conseil d'Etat, pour avis, en application des dispositions précitées de l'article L. 113-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : Le dossier de la requête de Mme A...est transmis au Conseil d'Etat pour avis sur les questions de droit énoncées aux points 6 et 7 des motifs du présent arrêt.

Article 2 : Il est sursis à statuer sur la requête de Mme A...jusqu'à l'avis du Conseil d'Etat ou, à défaut, jusqu'à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la transmission du dossier au Conseil d'Etat.

Article 3 : Tous droits et moyens des parties sont réservés jusqu'à la fin de l'instance.

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N° 10PA05997


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 10PA05997
Date de la décision : 31/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-10-06-02 Fonctionnaires et agents publics. Cessation de fonctions. Licenciement. Auxiliaires, agents contractuels et temporaires.


Composition du Tribunal
Président : Mme SANSON
Rapporteur ?: M. Jean-Claude PRIVESSE
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : VIOLETTE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-12-31;10pa05997 ?
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