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11/12/2012 | FRANCE | N°12PA03615

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 11 décembre 2012, 12PA03615


Vu la requête, enregistrée le 20 août 2012, présentée pour M. Wilfried A, demeurant chez ...), par Me Stambouli ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1119308/2-1 du 27 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 1er août 2011 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant son pays de destination ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui déli

vrer un titre de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" dans un dé...

Vu la requête, enregistrée le 20 août 2012, présentée pour M. Wilfried A, demeurant chez ...), par Me Stambouli ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1119308/2-1 du 27 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 1er août 2011 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant son pays de destination ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat de la somme de 1 200 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat ;

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée ;

Vu la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 relative à l'immigration, l'intégration et la nationalité ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers malades, pris en application de l'article 7-5 du décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 novembre 2012 :

- le rapport de Mme Mielnik-Meddah, rapporteur,

- et les observations de Me Stambouli, pour M. A ;

1. Considérant que M. A, né en 1966 et de nationalité camerounaise, entré en France, selon ses déclarations, en 2003, a sollicité son admission au séjour dans le cadre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il fait appel du jugement n° 1119308/2-1 du 27 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er août 2011 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé son pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision préfectorale refusant le titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat " ; qu'aux termes des dispositions de l'article R. 313-22 du même code, pris pour l'application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 dudit code, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : " (...) le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis, (...) à Paris, par le médecin chef du service médical de la préfecture de police. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la population et des migrations, du ministre chargé de la santé et du ministre de l'intérieur, au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays

d'origine de l'intéressé (...) " ; que l'arrêté du 8 juillet 1999 pris pour l'application de ces dispositions impose au médecin d'émettre un avis, pris sur le fondement d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un praticien hospitalier, et précisant si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale, si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement médical approprié dans son pays, la durée prévisible du traitement et indiquant, en outre, si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers son pays de renvoi ;

3. Considérant, en premier lieu, que M. A soutient que les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile introduites par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 relative à l'immigration, l'intégration et la nationalité ne lui étaient pas applicables faute de décret d'application ; qu'à la date de la décision contestée, les dispositions de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pris pour l'application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 dudit code, s'appliquaient dans leur rédaction issue du décret n° 2010-344 du 31 mars 2010, lequel a été modifié par le décret n° 2011-1049 du 6 septembre 2011 pris pour l'application de la loi précitée du 16 juin 2011 ; que l'exercice du pouvoir réglementaire comporte non seulement le droit mais aussi l'obligation de prendre dans un délai raisonnable les mesures qu'implique nécessairement l'application de la loi, hors le cas où le respect d'engagements internationaux de la France y ferait obstacle ; qu'en l'espèce, le délai raisonnable qui s'impose au pouvoir réglementaire ne peut être considéré comme dépassé et les nouvelles dispositions du 11° de l'article L. 313-11 étaient suffisamment précises pour permettre leur entrée en vigueur, sans qu'il soit besoin d'attendre la publication du décret d'application, en ce que l'administration est désormais tenue, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle, d'examiner la disponibilité théorique de l'offre de soins, et non plus les possibilités effectives de bénéficier d'un traitement approprié ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que, pour refuser à M. A, atteint d'une hépatite B chronique, la délivrance du titre de séjour sollicité, le préfet de police s'est fondé sur l'avis en date du 16 juin 2011 par lequel le médecin, chef du service médical de la préfecture de police, a indiqué, d'une part, que, si l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ce dernier peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, d'autre part, que son séjour n'est pas médicalement justifié et que le suivi, qui présente un caractère de longue durée, est disponible au Cameroun ; que le médecin de l'administration n'est pas tenu de faire figurer la mention relative à la capacité de voyager sans risque vers le pays de renvoi dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé du demandeur peut susciter des interrogations sur sa capacité à supporter un tel voyage ; que tel n'est pas le cas de l'intéressé ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose que cet avis, qui répond à l'ensemble des prescriptions de l'article 4 de l'arrêté du 8 juillet 1999, soit assorti de pièces justificatives ; qu'en outre, le secret médical interdit audit médecin de révéler des informations sur la pathologie de l'intéressé et la nature de ses traitements médicaux, fût-ce en portant une appréciation sur l'état du système de soins dans le pays d'origine ; que, dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'avis susmentionné du médecin, chef du service médical de la préfecture de police, serait entaché d'irrégularité ;

5. Considérant, en troisième lieu, que M. A fait valoir qu'il est atteint d'une hépatite B chronique nécessitant un suivi médical continu et qu'il lui est impossible de bénéficier d'un traitement médical approprié au Cameroun ; que, si l'autorité administrative doit fournir au juge tous éléments permettant d'établir que la disponibilité théorique de l'offre de soins est avérée, il appartient au requérant de contester ce fait par tous moyens ; qu'ainsi, contrairement à ce qu'affirme le requérant, la charge de la preuve en la matière incombe aux deux parties ; qu'il ressort de la documentation produite par le préfet de police que plusieurs hôpitaux existent au Cameroun, en particulier à Yaoundé et Douala ; que ces hôpitaux sont réputés être en capacité de prendre en charge la pathologie dont est atteint M. A ; que M. A n'apporte aucun élément de nature à établir que tel ne serait pas le cas ; qu'en effet, le compte-rendu de consultation du 7 juillet 2011, justifiant du suivi médical de l'intéressé, mentionne que le traitement prescrit depuis le 10 février 2011 consiste en la prise quotidienne de deux médicaments, lesquels, destinés au traitement de la constipation et du reflux gastro-oesophagien, ne présentent pas de lien direct avec la pathologie dont il est atteint ; que le certificat médical du 18 juillet 2011 signé du professeur G. B, chef de service des maladies infectieuses et tropicales à l'hôpital Tenon, se borne à indiquer que le suivi approprié de son traitement ne peut être dispensé dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, ces certificats sont insuffisamment circonstanciés et ne sont dès lors pas susceptibles de remettre en cause l'appréciation portée par le médecin, chef du service médical de la préfecture de police dans l'avis susmentionné du 16 juin 2011 ; que, si M. A a versé au dossier la liste des médicaments et autres produits pharmaceutiques essentiels, établie en 2009 par le ministère de la santé publique du Cameroun, qui constitue un outil d'aide à l'usage rationnel des produits pharmaceutiques et à la standardisation des analyses de biologie médicale, ce document, tout comme l'article de l'Institut Pasteur sur les hépatites virales qui l'accompagnait, ne permet pas de présumer l'absence d'un traitement approprié à sa pathologie dans son pays d'origine ; que le certificat médical daté du 27 septembre 2011, qui fait état de la nécessité de modifier la prise en charge thérapeutique de la pathologie dont est atteint M. A, ne peut être utilement produit à l'encontre de la décision attaquée, dès lors qu'il a été établi postérieurement à son édiction ; qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet a pris en considération la situation personnelle de l'intéressé, son état de santé et la durée de sa présence en France ; que, par suite, M. A, qui ne fait état d'aucune circonstance exceptionnelle tirée des particularités de sa situation, n'est pas fondé à soutenir que la décision du préfet de police lui refusant la délivrance d'un titre de séjour en raison de son état de santé aurait méconnu les dispositions susvisées du 11° de l'article

L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et serait entachée d'une erreur d'appréciation ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'obligation de quitter le territoire et de la décision fixant le pays de destination :

6. Considérant, en premier lieu, que les moyens dirigés contre la décision de refus de titre de séjour ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision, invoquée à l'appui des conclusions de M. A contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, ne peut qu'être écartée par voie de conséquence ; que M. A n'est pas non plus fondé, pour demander l'annulation de la décision du préfet de police fixant le pays de renvoi, à exciper de l'illégalité de la décision de refus de séjour qui en est la base légale ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé " ; que le moyen tiré de la violation des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté par les mêmes motifs que ceux précédemment énoncés au regard de l'application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

8. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent être également rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

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N° 08PA04258

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N° 12PA03615


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA03615
Date de la décision : 11/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme TANDONNET-TUROT
Rapporteur ?: Mme Anne MIELNIK-MEDDAH
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : STAMBOULI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-12-11;12pa03615 ?
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