Vu la requête, enregistrée le 18 juillet 2011, présentée pour la société par actions simplifiée (SAS) Groupe Emeraude, dont le siège est 112 bis boulevard Malesherbes à Paris (75017), par Me Fonlupt ; la société Groupe Emeraude demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0911243 du 8 juin 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2004, 2005 et 2006, ainsi que des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer la décharge sollicitée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 novembre 2012 :
- le rapport de Mme Notarianni, rapporteur,
- les conclusions de M. Egloff, rapporteur public,
- et les observations de Me Fonlupt, pour la société Groupe Emeraude ;
1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SAS Société Nouvelle du Casino de Lons-le-Saunier, qui exploite une activité de casino, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à la suite de laquelle le service a remis en cause l'amortissement dégressif pratiqué par cette société sur les machines à sous qu'elle exploite, en lui substituant un amortissement linéaire ; que les compléments d'impôt sur les sociétés résultant de cette substitution ont été notifiés à la société vérifiée par une proposition de rectification du 11 décembre 2007 et mis en recouvrement le 29 janvier 2009 au nom de la société Groupe Emeraude, requérante, société tête de groupe du groupe fiscalement intégré dont fait partie la SAS Société Nouvelle du Casino de Lons-le-Saunier ; que la société Groupe Emeraude demande à la Cour de prononcer l'annulation du jugement n° 0911243 du 8 juin 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt, ainsi que des pénalités y afférentes, auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2004, 2005 et 2006 et de prononcer la décharge des compléments d'impositions et pénalités en litige ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition " ;
3. Considérant que, comme l'ont relevé les premiers juges, il résulte de l'instruction que la proposition de rectification adressée en date du 11 décembre 2007 à la Société Nouvelle du Casino de Lons-le-Saunier indique l'impôt concerné, les années d'imposition, la nature, le motif et le montant des redressements envisagés par le service, ainsi que leur fondement juridique ; qu'elle précise, notamment, que la société n'avait pu pratiquer un amortissement dégressif sur ses machines à sous qu'en méconnaissance des dispositions de l'article 22 de l'annexe II au code général des impôts, dont le texte est reproduit dans le document, lequel indique en outre le détail du calcul des amortissements linéaires déterminant le montant des rehaussements ; que cette proposition de rectification était ainsi suffisamment motivée, quand bien même elle se fondait, pour refuser ledit amortissement dégressif, sur la seule liste énumérée par les dispositions de l'article 22 de l'annexe II au code général des impôts, alors que cette liste a été précisée par l'instruction administrative référencée 4 D 2212 du 26 novembre 1996 ; que, par ailleurs, et contrairement à ce que soutient la requérante, dès lors que ladite proposition de rectification était ainsi suffisamment motivée, le tribunal administratif ne pouvait, en tout état de cause, être tenu de rechercher si l'insuffisance de motivation alléguée était constitutive d'une erreur substantielle au sens des dispositions de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
6. Considérant que l'article 39 A du code général des impôts dispose que : " 1. L'amortissement des biens d'équipement, autres que les immeubles d'habitation, les chantiers et les locaux servant à l'exercice de la profession, acquis ou fabriqués à compter du 1er janvier 1960 par les entreprises industrielles, peut être calculé suivant un système d'amortissement dégressif, compte tenu de la durée d'amortissement en usage dans chaque nature d'industrie. Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités de l'amortissement dégressif. (...) " ; qu'aux termes des dispositions de l'article 22 de l'annexe II au même code : " Les entreprises passibles de l'impôt sur les sociétés ou de l'impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels et commerciaux peuvent amortir suivant un système dégressif - dans les conditions fixées aux articles 23 à 25 - les immobilisations acquises ou fabriquées par elles à compter du 1er janvier 1960 et énumérées ci-après : Matériels et outillages utilisés pour des opérations industrielles de fabrication, de transformation ou de transport ; Matériels de manutention ; Installations destinées à l'épuration des eaux et à l'assainissement de l'atmosphère ; Installations productrices de vapeur, chaleur ou énergie ; Installations de sécurité et installations à caractère médico-social ; Machines de bureau, à l'exclusion des machines à écrire ; Matériels et outillages utilisés à des opérations de recherche scientifique ou technique ; Installations de magasinage et de stockage sans que puissent y être compris les locaux servant à l'exercice de la profession ; Immeubles et matériels des entreprises hôtelières. Sont exclus du bénéfice de l'amortissement dégressif les biens qui étaient déjà usagés au moment de leur acquisition par l'entreprise ainsi que ceux dont la durée normale d'utilisation est inférieure à trois ans " ; qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées qu'elles autorisent les entreprises dont les résultats entrent dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux à amortir suivant un mode dégressif les seuls biens d'équipement acquis par elles qui sont normalement utilisés dans leur activité productive par des entreprises industrielles ;
7. Considérant que les machines à sous, qui sont des appareils automatiques de jeux de hasard et qui, contrairement à ce que soutient la société requérante, ne relèvent d'aucune des catégories de biens énumérées à l'article 22 de l'annexe II au code général des impôts, ne peuvent être regardées comme des biens d'équipement de la nature de ceux qui sont normalement utilisés dans leur activité productive par des entreprises industrielles ; qu'il s'ensuit que la société requérante n'est pas fondée à soutenir, sur le terrain de la loi fiscale, qu'elle était en droit de procéder à l'amortissement dégressif des biens en cause sur le fondement des dispositions précitées ;
En ce qui concerne le bénéfice de la doctrine administrative :
8. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente " ; que, si ces dispositions instituent une garantie contre les changements de doctrine de l'administration permettant aux contribuables de se prévaloir des énonciations contenues dans les notes ou instructions publiées qui ajoutent à la loi ou la contredisent, c'est à la condition que les intéressés entrent dans les prévisions de la doctrine, appliquée littéralement, résultant de ces énonciations ; que, par suite, la société requérante ne peut, en tout état de cause, utilement soutenir que les machines à sous seraient, eu égard notamment à leurs composants, caractéristiques et utilisation, assimilables aux micro-ordinateurs, caisses enregistreuses et appareillages permettant la protection contre le vol ou la détection des vols que les instructions fiscales dont elle se prévaut déclarent éligibles à l'amortissement dégressif ;
9. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la société Groupe Emeraude n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, le versement de la somme que la société Groupe Emeraude demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la société Groupe Emeraude est rejetée.
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N° 08PA04258
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N° 11PA03234