Vu la requête, enregistrée le 28 novembre 2011, présentée pour Mme Thi Tuyet Mai B, demeurant ..., par Me Bouard ; Mme B demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1112803/8 en date du 29 juillet 2011 par lequel le magistrat désigné par le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté en date du 13 mai 2011 par lequel le préfet de police l'a obligée à quitter le territoire français en fixant le pays de destination et, d'autre part, à l'annulation de l'arrêté du 22 juillet 2011 par lequel le préfet de police a décidé de son placement en rétention ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ces arrêtés ;
3°) à titre subsidiaire, d'annuler la décision implicite de refus d'assignation à résidence ;
4°) d'enjoindre au préfet de police de réexaminer la situation de Mme B dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
5°) d'enjoindre au préfet de police de délivrer à Mme B une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il ait à nouveau statué sous astreinte de 100 euros par jour de retard dans un délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;
6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
..................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 octobre 2012 :
- le rapport de M. Gouès, rapporteur ;
1. Considérant que, par arrêté en date du 13 mai 2011, le préfet de police a opposé un refus à la demande de titre de séjour de Mme B, ressortissante vietnamienne, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois en fixant le pays de destination et, que par un arrêté du 22 juillet 2011 la requérante a été placée en rétention administrative ; que Mme B relève appel du jugement du 29 juillet 2011 par lequel le magistrat désigné par le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 mai 2011 par lequel le préfet de police l'a obligée à quitter le territoire français et l'arrêté de placement en rétention administrative du 22 juillet 2011 ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que si la requérante soutient que le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire en date du 13 mai 2011 a été signée par une autorité incompétente, et qu'elle est entachée d'un défaut de motivation contraire aux dispositions de l'article 12 de la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, il ressort des pièces du dossier que, d'une part, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté n'a été soulevé qu'à l'encontre de l'arrêté du 22 juillet 2011 pour lequel le tribunal a prononcé un non-lieu et que, d'autre part, s'agissant de l'insuffisance de motivation, contrairement à ce que soutient la requérante, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle aurait invoqué à l'audience le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 12 de la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ; que, par suite, Mme B n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'omission à statuer ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II de l'article L. 511-1 peut, dans le délai de trente jours suivant sa notification, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant.(...) III. - En cas de décision de placement en rétention ou d'assignation à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger peut demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision dans les quarante-huit heures suivant sa notification. Lorsque l'étranger a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, le même recours en annulation peut être également dirigé contre l'obligation de quitter le territoire français et contre la décision refusant un délai de départ volontaire, la décision mentionnant le pays de destination et la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant, lorsque ces décisions sont notifiées avec la décision de placement en rétention ou d'assignation. (...) Il est également statué selon la procédure prévue au présent III sur le recours dirigé contre l'obligation de quitter le territoire français par un étranger qui est l'objet en cours d'instance d'une décision de placement en rétention ou d'assignation à résidence en application de l'article L. 561-2. Le délai de soixante-douze heures pour statuer court à compter de la notification par l'administration au tribunal de la décision de placement en rétention ou d'assignation. " ; qu'aux termes de l'article R. 776-17 du code de justice administrative : " Lorsque l'étranger est placé en rétention ou assigné à résidence après avoir introduit un recours contre la décision portant obligation de quitter le territoire ou après avoir déposé une demande d'aide juridictionnelle en vue de l'introduction d'un tel recours, la procédure se poursuit selon les règles [applicables en cas de placement en rétention ou d'assignation à résidence]. (...) Toutefois, lorsque le requérant a formé des conclusions contre la décision relative au séjour notifiée avec une obligation de quitter le territoire, la formation collégiale demeure saisie de ces conclusions, sur lesquelles elle se prononce dans les conditions prévues par la section [portant dispositions applicables en l'absence de placement en rétention ou d'assignation à résidence]. " ; qu'il résulte de ces dispositions que, s'agissant du contentieux des décisions ordonnant de quitter le territoire français, le tribunal juge de cette matière selon la procédure collégiale avec conclusions du rapporteur public dans le délai de trois mois fixé par l'article L. 512-1-I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité ; que par dérogation à cette règle lorsqu'un étranger se trouve placé en rétention avant que le tribunal statue, la juridiction se prononce selon la procédure prévue par l'article L. 512-1-III du même code selon la procédure de magistrat statuant seul sans conclusions du rapporteur public, dans un délai de 72 heures à compter de la notification par l'administration au tribunal de ce placement ;
4. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté contesté a été signé par Mme C, attaché d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer, qui bénéficiait d'une délégation de signature du préfet de police en vertu d'un arrêté n° 2011-00258 en date du 19 avril 2011 régulièrement publié le 22 avril 2011 au bulletin municipal officiel de la ville de Paris ; que si Mme B allègue que le préfet de police n'apporte pas la preuve ni de son absence, ni de son empêchement, il appartient à la partie contestant la qualité du délégataire pour signer l'arrêté attaqué d'établir que le préfet de police n'était ni absent ni empêché ; que la requérante n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 12 de la directive susvisée n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 : " Les décisions de retour et, le cas échéant, les décisions d'interdiction d'entrée ainsi que les décisions d'éloignement sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles " ; qu'aux termes de la dernière phrase du premier alinéa du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction à la date de l'arrêté en litige : " L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation " ;
6. Considérant que les dispositions précitées de l'article 12 de la directive du 16 décembre 2008 sont précises et inconditionnelles ; que, par suite, le délai de transposition de ladite directive ayant expiré le 24 décembre 2010, elles sont d'effet direct ; que les dispositions précitées de la dernière phrase du premier alinéa du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont incompatibles avec celles précitées du 1 de l'article 12 de la directive du 16 décembre 2008 et qu'en conséquence, ces dispositions législatives doivent demeurer inappliquées ; que, toutefois, trouvent dès lors à s'appliquer les dispositions des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979, qui imposent la motivation tant des décisions refusant la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, ou retirant un tel titre que de celles faisant obligation de quitter le territoire français, lesquelles constituent des mesures de police ; que les dispositions de la loi du 11 juillet 1979, en ce qu'elles s'appliquent à une telle obligation, sont propres à assurer la transposition du paragraphe 1 de l'article 12 de la directive du 16 décembre 2008 et ne sont pas incompatibles avec les objectifs de ce paragraphe, ce qui n'est, au demeurant, pas contesté ; que la motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement ; que, dès lors que, comme en l'espèce, ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent de l'assortir d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, la motivation de cette obligation n'implique pas, par conséquent, de mention spécifique pour respecter les exigences de l'article 1 er de la loi du 11 juillet 1979, dispositions légales au regard desquelles doit être apprécié le caractère suffisant ou non de cette motivation ; qu'il suit de là que le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté du 2 mars 2010 en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français doit être écarté ;
7. Considérant que si, en troisième lieu, Mme B soutient que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle pouvait bénéficier d'un titre de séjour en application de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile du fait des violences conjugales dont elle a été victime, elle n'établit pas qu'elle aurait sollicité un titre de séjour sur ce fondement ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté ;
8. Considérant, en quatrième lieu, que la requérante excipe de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour au motif que la commission du titre de séjour n'a pas été réunie ; que, toutefois, il résulte de l'article L. 312-2 que le préfet de police n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11 et L. 314-12 auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non du cas de tous les étrangers qui se prévalent des dispositions de ces articles ; qu'en l'espèce, il ne ressort pas des pièces versées au dossier, que Mme B remplissait effectivement l'une des conditions prévues à cet article ; que, par suite, le moyen ne peut qu'être écarté ;
9. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. Le jugement doit être rendu publiquement(...) " ; que si Mme B soutient que l'obligation de quitter le territoire français l'empêchera de préparer sa défense et d'assister à l'audience de la procédure de divorce engagée par son époux, cette décision ne prive pas la requérante de la possibilité de faire valoir ses droits et n'est pas de nature à faire obstacle, par elle-même, à ce que cette procédure suive normalement son cours ;
Sur la légalité de l'arrêté de placement en rétention du 22 juillet 2011 :
10. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 551-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger est informé dans une langue qu'il comprend et dans les meilleurs délais qu'à compter de son arrivée au lieu de rétention, il peut demander l'assistance d'un interprète, d'un conseil ainsi que d'un médecin " ;
11. Considérant que si Mme B soutient qu'elle n'a pu bénéficier des services d'un interprète lors de la notification de l'arrêté attaqué, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'elle soutient maîtriser la langue française ; que, par suite, ce moyen manque en fait et doit être écarté ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B est rejetée.
''
''
''
''
4
N° 11PA04910