Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 janvier 2010 et 25 mars 2010, présentés pour la Société Commerciale de Taiarapu Est, dont le siège est situé Route de Tautira à Taravao (98719), Polynésie française, par la S.C.P Monod et Colin ; la Société Commerciale de Taiarapu Est demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0900146 en date du 6 octobre 2009 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté n° 11 CM du 23 janvier 2009 par lequel le conseil des ministres a autorisé la société Commerciale de Tahiti Iti à exploiter un hypermarché de 3 460 m2 de surface de vente sous l'enseigne Carrefour sur la commune de Taiarapu Est ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ledit arrêté ;
3°) de mettre à la charge de la Polynésie française la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française ;
Vu la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;
Vu la délibération n° 94-163 AT du 22 décembre 1994 modifiée réglementant l'implantation de certains commerces de vente au détail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 octobre 2012 :
- le rapport de M. Gouès, rapporteur,
- les conclusions de Mme Vidal, rapporteur public,
- les observations de Me K-Jan, pour la Société Commerciale de Taiarapu Est et celles de Me Bouchet pour la société Commerciale de Tahiti Iti,
- et avoir pris connaissance de la note en délibéré enregistrée le 4 octobre 2012, présentée pour la Société Commerciale de Taiarapu Est par la S.C.P Monod et Colin ;
1. Considérant que la Société Commerciale de Taiarapu Est demande au tribunal l'annulation de l'arrêté n° 11 CM du 23 janvier 2009 par lequel le conseil des ministres de la Polynésie française a accordé à la société Commerciale de Tahiti Iti l'autorisation d'exploiter un hypermarché de 3 460 m2 de surface de vente sous l'enseigne " Carrefour " sur le territoire de la commune de Taiarapu Est ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que, contrairement à ce que soutient la société requérante, le jugement attaqué répond avec suffisamment de précision aux moyens tirés de la violation du principe de libre concurrence et du renforcement de la position dominante du groupe Wane dans la zone de chalandise ; que, par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit être écarté ;
Sur le fond :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande de première instance ;
En ce qui concerne la légalité externe de la décision attaquée :
3. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté n° 11 CM du 23 janvier 2009 vise notamment la délibération 94-163 AT du 22 décembre 1994 réglementant l'implantation de certains commerces de vente au détail et l'avis de la commission d'implantation des grandes surfaces commerciales du 11 décembre 2008 ; que la circonstance que l'extrait de l'arrêté publié au Journal Officiel de la Polynésie française le 29 janvier 2009 ne comporte aucun visa est sans incidence sur la légalité de l'arrêté dès lors que les conditions dans lesquelles sont publiées les décisions administratives n'ont pour effet que de fixer le point de départ du délai de recours contentieux ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que la délibération n° 94-163 AT du 22 décembre 1994 réglementant l'implantation de certains commerces de vente au détail n'impose pas la mention dans l'arrêté portant autorisation de l'indication de la parcelle constituant le terrain d'assiette ; que, par suite, l'arrêté portant autorisation a pu se borner à indiquer que " la SARL Société commerciale de Tahiti Iti est autorisée à exploiter un supermarché de 3 460 m² de surface de vente sous l'enseigne Carrefour sur la commune de Taiarapu-Est ", la localisation précise étant par ailleurs mentionnée dans le dossier de demande ;
5. Considérant, en troisième lieu, que si la société requérante soutient que l'avis de la commission serait insuffisamment motivé en tant qu'elle devait se prononcer au vu de l'impact du projet en matière de relations commerciales, il résulte toutefois du dossier que la commission a suffisamment motivé sa décision en écrivant que " le demandeur est en position dominante et que la réalisation de ce projet va la renforcer tant sur l'Ile de Tahiti que sur la zone de chalandise " ; que, par suite, ce moyen doit être écarté ;
En ce qui concerne la légalité interne de la décision attaquée :
6. Considérant que la délibération n° 94-163 AT du 22 décembre 1994 a pour objet de réglementer l'implantation de certains commerces de détail ; que l'article 1er de cette délibération prévoit : " Il est institué un régime d'autorisation préalable en matière de création, extension ou transformation de magasins de commerce de détail dans les cas suivants : [...] 1°. Sur l'île de Tahiti, pour les projets de construction nouvelles entraînant création de magasins de commerce de détail d'une surface de plancher hors-oeuvre supérieure à 1 200m² ou d'une surface de vente supérieure à 600m²(...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de cette délibération : " Il est institué une commission d'implantation des grandes surfaces commerciales chargée de donner son avis sur les projets commerciaux définis à l'article 1er ; " que l'article 5, dans sa rédaction applicable en l'espèce, énonce : " La commission d'implantation des grandes surfaces commerciales, dans la limite de ses compétences, donne un avis sur l'impact du projet en matière : -de relations concurrentielles ;- d'emploi ; d'animation de la vie urbaine ;- et d'équilibre et d'organisation du commerce. Pour fonder son avis, la commission précitée prend connaissance des études et analyses contenues dans un rapport établi par le service instructeur. " ; qu'il résulte de ces dispositions que la commission d'implantation des grandes surfaces commerciales doit veiller, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, au respect des règles tendant à préserver le libre jeu de la concurrence et prévenir les risques d'abus de position dominante ; qu'ainsi, la création d'un centre commercial ne doit pas provoquer des mouvements inappropriés et irréversibles du tissu commercial ni entraver le bon exercice de la concurrence au niveau de l'ensemble de la zone de chalandise ;
7. Considérant, en premier lieu, que la circonstance que la société requérante a, de sa propre initiative, renoncé à l'autorisation qui lui a été accordée par arrêté en date du 21 août 2008 pour implanter un supermarché de 2 035 m² de surface de vente sous l'enseigne " Toa Maire Nui " ne suffit pas à établir que l'autorisation litigieuse accordée à la société Commerciale de Tahiti Iti porterait atteinte au principe de liberté du commerce et de l'industrie ;
8. Considérant, en second lieu, que la société requérante soutient que l'autorisation accordée ne répond pas aux besoins de la population compte tenu des surfaces commerciales existantes ou en construction ; qu'il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport du service des affaires économiques en date du 25 novembre 2008, qu'avec 305 m² pour 1 000 habitants, la commune de Taiarapu-Est concentre une grande partie de l'activité commerciale alimentaire de la presqu'île et des communes avoisinantes et que si le projet Toa Maire Nui se concrétisait, le taux d'équipement de Taiarapu Est atteindrait 781 m² pour 1 000 habitants, enfin que la répartition géographique des surfaces de vente révèle un déséquilibre ; que, toutefois, il ressort de ce même rapport que la zone de chalandise principale connaît une augmentation de population de 2,3 % par an et que le chiffre d'affaires global de la zone de chalandise a progressé de 17,4 % sur deux ans ; que la création d'un pôle commercial dans le secteur de Taiarapu-Est permet par ailleurs un rééquilibrage des équipements commerciaux sur l'île de Tahiti ; que, dans ces conditions, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que l'autorisation litigieuse conduit à un équipement commercial disproportionné par rapport au nombre d'habitant de la presqu'île ;
9. Considérant, enfin qu'il ressort des pièces du dossier que l'autorisation litigieuse, porte à 5 260 m² la surface commerciale exploitée par le " Groupe Wane " qui exploite déjà dans la zone de chalandise un supermarché et un hypermarché à l'enseigne " Champion " et dispose de près de 30 % des surfaces de vente alimentaire des Iles du vent et la moitié du chiffre d'affaires de ces mêmes magasins ; que cette situation, alors même qu'eu égard à la densité des surfaces existantes ou autorisées, dans la zone de chalandise, peut affecter l'équilibre entre les différents commerces, comporte des effets positifs en matière d'emploi ; qu'en effet, il ressort des pièce du dossier que le projet créera plus d'emplois, qu'il n'en détruira, au sein des petits commerces de la zone de chalandise, auxquels s'ajouteront les 70 emplois de la galerie marchande ; qu'en outre il ressort également du dossier que ce projet devrait jouer un rôle favorable s'agissant de l'animation de la vie urbaine ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, la société requérante, qui en outre ne présente pas de données chiffrées concordantes en termes d'années utiles et de lieux, n'est pas fondée à soutenir que l'autorisation litigieuse confère à la société Commerciale de Tahiti Iti une position dominante qui lui permettrait de faire obstacle au maintien d'une concurrence effective sur le marché en cause ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la Société Commerciale de Taiarapu Est n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Polynésie Française a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, les conclusions de la Société Commerciale de Taiarapu Est tendant à l'application de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la Polynésie française et de la société Commerciale de Tahiti Iti présentées sur le même fondement ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la Société Commerciale de Taiarapu Est est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la Polynésie française et de la société Commerciale Tahiti Iti tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 10PA00077