La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/07/2012 | FRANCE | N°12PA00282

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 31 juillet 2012, 12PA00282


Vu la requête, enregistrée le 16 janvier 2012, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1112181/1-1 en date du 14 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé l'arrêté du 17 juin 2011 rejetant la demande de titre de séjour présentée par M. Hakim A assortie d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et de la décision fixant le pays de renvoi, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à l'intéressé un certificat de résidence d'une validit

é d'un an dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugem...

Vu la requête, enregistrée le 16 janvier 2012, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1112181/1-1 en date du 14 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé l'arrêté du 17 juin 2011 rejetant la demande de titre de séjour présentée par M. Hakim A assortie d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et de la décision fixant le pays de renvoi, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à l'intéressé un certificat de résidence d'une validité d'un an dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement, et enfin, a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Paris ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juillet 2012 :

- le rapport de M. Treyssac, rapporteur,

- et les conclusions de M. Jarrige, rapporteur public ;

Considérant que M. A de nationalité algérienne, entré en France le 7 mars 1999, a fait l'objet le 14 janvier 2000 d'une décision du ministre de l'intérieur rejetant sa demande d'asile territorial et d'une décision de refus de séjour du 27 janvier 2000 assortie d'une invitation à quitter le territoire français ; que la légalité des deux décisions a été confirmée par un jugement du Tribunal administratif de Paris en date 28 juin 2002 ; que M. A a fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière le 24 janvier 2002, lequel n'a pu être mis à exécution dans le délai de rétention ; qu'il a fait l'objet d'un second arrêté de reconduite à la frontière le 12 juin 2008 , annulé le 16 juin 2008 par le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris qui a enjoint au PREFET DE POLICE de réexaminer sa situation ; que par un arrêté du 4 novembre 2008, le PREFET DE POLICE a refusé de délivrer à M. A un certificat de résidence sur le fondement du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié et lui a fait obligation de quitter le territoire français ; que par un jugement du 28 mai 2009, le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 4 novembre 2008 et a enjoint au PREFET DE POLICE de délivrer à M. A un titre de séjour temporaire ; que ce jugement a été néanmoins annulé par un arrêt n° 09PA05247 de la Cour de céans en date du 29 juillet 2010 ; que M. A a sollicité le 10 mars 2011 son admission au séjour sur le fondement des dispositions des articles 6-1° et 6-5° de l'accord franco-algérien ; que par un arrêté du 17 juin 2011, le PREFET DE POLICE a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de cet éloignement ; que le PREFET DE POLICE demande l'annulation du jugement du 14 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté comme ayant porté au droit au respect de la vie privée et familiale du requérant une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision a été prise, en violation des stipulations de l'article 6-5° de l'accord franco-algérien modifié ;

Sur les conclusions du PREFET DE POLICE dirigées contre le jugement du Tribunal administratif de Paris :

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5° Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ;

Considérant que pour annuler l'arrêté du 17 juin 2011 comme ayant méconnu les stipulations précitées, les premiers juges ont relevé, d'une part, que si M. A ne justifie pas d'une présence continue en France depuis plus de dix ans à la date de la décision attaquée, en particulier au titre des années 2004 et 2005, il a, dès le 24 mars 1999, formé en France une demande tendant à obtenir le bénéfice de l'asile territorial, a été admis à l'aide médicale d'Etat à compter du 1er mai 2001, et ayant été mis en possession d'un certificat de résidence d'un an en 2009 en exécution du jugement du 28 mai 2009, a exercé une activité salariée au cours des années 2010 et 2011 ; que, d'autre part, bien que célibataire, sans enfant à charge et n'étant pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où résident sa mère, un frère et une soeur, M. A vit en France chez l'une de ses soeurs, titulaire d'un certificat de résidence valable du 8 août 2005 au 7 août 2015, que l'un de ses frères est également en possession d'un tel titre de séjour, valable du 6 mars 2004 au 5 mars 2014, et que sa soeur aînée est de nationalité française ;

Considérant toutefois que si M. A fait valoir qu'il est entré en France le 7 mars 1999 pour y rejoindre sa famille et y réside depuis plus de douze ans, il ressort des pièces du dossier qu'il s'est irrégulièrement maintenu, à l'exception de la période du 31 juillet au 17 octobre 2008 durant laquelle le PREFET DE POLICE lui a délivré une autorisation provisoire de séjour pour satisfaire à l'injonction de réexamen prononcée par le jugement précité du 16 juin 2008 ainsi que de la période pendant laquelle il a été mis en possession d'un titre de séjour en exécution du jugement du 28 mai 2009, ultérieurement annulé par la Cour, sur le territoire national, en dépit de diverses mesures d'éloignement prises à son encontre ; qu'il est célibataire sans charge de famille en France et ne conteste pas ne pas être dépourvu de toute attache familiale en Algérie où résident sa mère, un frère et une soeur et où il a vécu jusqu'à l'âge de 23 ans ; que, dans ces conditions, et en dépit tant de la présence en France de sa soeur de nationalité française, d'une autre soeur et d'un frère, titulaires de certificats de résidents, et de ses neveux et nièces, que de ses efforts d'intégration, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée et n'a pas méconnu les stipulations précitées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris s'est fondé sur la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler l'arrêté du 17 juin 2011 pris par le PREFET DE POLICE à l'encontre de M. A ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. A devant le Tribunal administratif de Paris et devant la Cour ;

Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1° Au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) " ;

Considérant que M. A est entré en France le 7 mars 1999, ainsi qu'il est attesté par le visa d'entrée apposé sur son passeport ; que toutefois, à l'effet d'établir sa présence habituelle en France au cours des années 2002 à 2004, il se borne à produire, s'agissant de l'année 2002, deux ordonnances médicales et deux bulletins de situation d'un centre chirurgical, pour l'année 2003, quatre ordonnances médicales, quatre courriers de l'hôpital Saint-Louis pour confirmer des rendez-vous, deux fiches de circulation de ce même hôpital et une attestation de passage de l'hôpital Lariboisière et, pour l'année 2004, deux factures d'hôtel ; que ces seuls documents ne sont pas suffisants pour démontrer la présence de l'intéressé sur le territoire national durant ces années ; que M. A ne justifie dès lors pas avoir résidé habituellement en France depuis plus de dix ans le 17 juin 2011, date de la décision contestée, et ne pouvait en conséquence se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement des stipulations précitées ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, (...) ; 2° Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

Considérant que si M. A se prévaut de sa résidence habituelle en France depuis 1999, de son intégration professionnelle, ainsi que des attaches tant amicales que familiales dont il dispose en France, il ressort des pièces du dossier qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, il était, à la date de l'arrêté attaqué, célibataire et sans charge de famille, qu'il a vécu jusqu'à l'âge de 23 ans dans son pays d'origine où résident sa mère et une partie de sa fratrie ; que, par suite, la décision de refus du 17 juin 2011 n'a pas porté au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel elle a été prise et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le PREFET DE POLICE aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision attaquée sur sa situation personnelle et familiale ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 7°Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...). " ;

Considérant que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le PREFET DE POLICE n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ; que si le requérant fait valoir qu'il souffre d'un bec de lièvre, d'un asthme évolutif et d'une dyspnée à trois étages, pathologies pour lesquelles il bénéficie d'un suivi régulier sur le territoire, il ressort des pièces du dossier qu'il a demandé un titre de séjour au titre de sa vie privée et familiale et ne s'est pas prévalu de son état de santé devant l'administration ; qu'il s'ensuit que le PREFET DE POLICE n'était nullement tenu d'examiner sa demande à ce titre ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant que les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 6-1° de l'accord franco-algérien, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences qui reprennent ce qui a été développé à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour, ainsi que celui tiré de l'exception d'illégalité de cette décision doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé l'arrêté du 17 juin 2011 ; que, par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction présentées par M. A et ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DEC I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 14 décembre 2011 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Paris ainsi que ses conclusions d'appel sont rejetées.

''

''

''

''

5

N° 10PA03855

2

N° 12PA00282


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA00282
Date de la décision : 31/07/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: M. Jean-François TREYSSAC
Rapporteur public ?: M. JARRIGE
Avocat(s) : CARRO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-07-31;12pa00282 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award