Vu la requête, enregistrée le 6 mai 2011, présentée pour M. Roland A, demeurant ..., par Me Bernard ; M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0916515/3-2 du 9 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 17 mars 2009 par laquelle l'inspecteur du travail a accordé à la société Adoma l'autorisation de le licencier, ensemble la décision du 14 août 2009 du ministre du travail rejetant son recours hiérarchique ;
2°) d'annuler la décision du 14 août 2009 du ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, ensemble la décision de l'inspecteur du travail en date du 17 mars 2009 autorisant son licenciement ;
3°) de juger en conséquence que la société Adoma n'est titulaire d'aucune autorisation de le licencier ;
4°) de mettre à la charge de la société Adoma la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement avisées du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juillet 2012 :
- le rapport de M. Treyssac, rapporteur,
- les conclusions de M. Jarrige, rapporteur public,
- et les observations de Me Ghenim, pour M. A et celles de Me Rosenstein, pour la société Adoma ;
Considérant que la société Adoma a sollicité l'autorisation de licencier pour faute M. A, chef du département gestion locative, délégué syndical central ; que, par une décision en date du 17 mars 2009, l'inspecteur du travail a accordé l'autorisation de licenciement ; que, saisi d'un recours hiérarchique par le requérant, le ministre du travail a confirmé la décision de l'inspecteur du travail, par une décision du 14 août 2009 ; que M. A a demandé l'annulation de ces deux décisions au Tribunal administratif de Paris, qui, par jugement du 9 mars 2011, l'a débouté de sa demande ; qu'il relève régulièrement appel dudit jugement devant la Cour de céans ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 2411-3 du code du travail, les délégués syndicaux bénéficient, dans l'intérêt des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables à son contrat de travail et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ;
Considérant que pour engager la procédure de licenciement, la société Adoma a reproché à M. A d'avoir fautivement refusé une modification justifiée de ses conditions de travail ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les trois collaboratrices de M. A ont adressé, le 20 novembre 2008, des courriers à leur employeur lui faisant part du stress qu'elles subissaient sur leur lieu de travail et du fait qu'elles ne pouvaient plus travailler avec leur supérieur hiérarchique, M. A ; que la direction de la société Adoma a saisi de cette plainte le médecin de travail, lequel a constaté que les relations entre ces trois salariées et M. A avaient " atteint un point de non-retour " et a demandé de prendre toutes mesures pour mettre fin à cette situation afin de ne pas aggraver leur état de santé ; que, par un courrier du 18 décembre 2008, la société Adoma a informé le requérant de sa mutation au poste de chef de département au sein de la direction régionale d'Ile-de-France ; que, par un courrier du même jour, M. A a refusé cette mutation ; que c'est dans ce contexte que la société Adoma a demandé à l'inspecteur du travail l'autorisation de licencier M. A ;
Considérant que pour accorder l'autorisation de licenciement, l'inspecteur du travail et le ministre ont estimé que le changement de poste proposé à M. A n'emportait qu'une modification de ses conditions de travail et que le refus du salarié d'accepter le poste en cause constituait une faute dont la gravité justifiait son licenciement ; qu'ils ont par ailleurs constaté l'absence de lien entre la demande d'autorisation de licenciement et le mandat syndical détenu par M. A ;
Considérant, en premier lieu, que M. A soutient que la mutation qu'il a refusée constituait une modification de son contrat de travail en raison notamment de l'absence de fonctions d'encadrement dans le nouveau poste ; que, toutefois, il est constant que ledit poste était équivalent sur le plan des horaires, de la qualification et de la rémunération, à celui que l'intéressé occupait antérieurement ; que la seule circonstance que les nouvelles fonctions de M. A n'incluaient pas la gestion d'une équipe n'est pas de nature à caractériser une modification du contrat de travail du requérant dès lors que la " fiche de poste " des emplois de " chef de département " de la société Adoma précise que le chef de département " assure, le cas échéant, le management d'une équipe " ; qu'ainsi le nouvel emploi qui était proposé à M. A ne constituait pas une modification de son contrat de travail, dont le refus ne saurait être fautif, mais seulement une modification de ses conditions de travail régulièrement décidée par l'employeur dans le cadre de son pouvoir de gestion ;
Considérant, en deuxième lieu, que M. A ne peut davantage soutenir qu'il a finalement accepté le poste le 21 janvier 2009 alors qu'il ressort du courrier électronique qu'il a adressé ce même jour à sa direction, qu'il conditionnait cette acceptation à l'abandon par son employeur des procédures judiciaires en cours ;
Considérant, en troisième lieu, que si la situation de stress éprouvée par M. A peut expliquer en partie son comportement, il n'en appartenait pas moins à l'employeur, conformément aux prescriptions du médecin du travail, de chercher une solution de nature à préserver la santé des trois salariées placées sous son autorité, qu'en tout état de cause le médecin du travail n'a émis aucun avis d'inaptitude de M. A à l'exercice de ses fonctions de chef de département ;
Considérant, en quatrième lieu, que la solution préconisée par l'employeur, contrairement à ce que soutient M. A était bien prévue à l'accord d'entreprise relative à la représentation du personnel syndical du 22 juillet 2003 qui ouvre trois modalités d'aménagement de poste pour permettre l'exercice des mandats syndicaux ; qu'ainsi la société Adoma, en proposant à l'intéressé une nouvelle affectation lui permettant plus facilement l'exercice de ses mandats syndicaux s'est inscrite dans le cadre de cet accord ; que, par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A ait été en conflit avec son employeur dans le cadre des actions syndicales qu'il menait ; que, dans ces conditions, l'inspecteur du travail et le ministre n'ont pas commis d'erreur d'appréciation en retenant l'absence de lien entre la mesure de licenciement et le mandat détenu par le salarié ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 17 mars 2009 par laquelle l'inspecteur du travail a accordé à la société Adoma l'autorisation de le licencier, ensemble la décision en date du 14 août 2009 par laquelle le ministre du travail a rejeté son recours hiérarchique ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions susvisées, d'une part, de rejeter les conclusions de M. A, dont la requête est rejetée, tendant à ce que soit mise à la charge de la société Adoma la somme qu'il réclame au titre des frais qu'il a exposés dans la présente instance et qui ne sont pas compris dans les dépens ; d'autre part, de mettre à la charge de M. A la somme de 1 500 euros qu'il versera à la société Adoma sur le fondement de ces mêmes dispositions ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : M. A versera à la société Adoma la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 10PA03855
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N° 11PA02192