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21/06/2012 | FRANCE | N°11PA01158

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 21 juin 2012, 11PA01158


Vu la requête et le mémoire ampliatif, enregistrés les 7 et 28 mars 2011, présentés pour M. Patrice A, demeurant ..., par Me Metin ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0803583/1 en date du 28 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 18 mars 2008 par laquelle l'inspectrice du travail de la 7ème section d'inspection de la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle de Seine-et-Marne a autorisé son employeur, la société Reynaers A

luminium à procéder à son licenciement ;

2°) d'annuler la décision d...

Vu la requête et le mémoire ampliatif, enregistrés les 7 et 28 mars 2011, présentés pour M. Patrice A, demeurant ..., par Me Metin ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0803583/1 en date du 28 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 18 mars 2008 par laquelle l'inspectrice du travail de la 7ème section d'inspection de la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle de Seine-et-Marne a autorisé son employeur, la société Reynaers Aluminium à procéder à son licenciement ;

2°) d'annuler la décision de l'inspectrice du travail de la 7ème section d'inspection de la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle de Seine-et-Marne ;

3°) de mettre à la charge de la société Reynaers Aluminium la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

...................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 juin 2012 :

- le rapport de M. Treyssac, rapporteur,

- les conclusions de M. Jarrige, rapporteur public,

- et les observations de Me Erb, pour la société Reynaers Aluminium ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir soulevée par la société Reynaers Aluminium ;

Considérant qu'en vertu du code du travail, les salariés protégés bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par l'inaptitude physique, il appartient à l'inspecteur du travail, et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge, si cette inaptitude est telle qu'elle justifie le licenciement envisagé, compte tenu des possibilités de reclassement du salarié dans l'entreprise ou d'adaptation de son poste de travail ;

Considérant que M. A, délégué syndical et employé de la société Reynaers Aluminium, a fait l'objet d'une procédure de licenciement pour inaptitude, après avoir été déclaré " inapte au poste et à tout poste dans l'entreprise " par avis du médecin du travail ; que par décision du 18 mars 2008, l'inspection du travail a autorisé son licenciement ; que M. A a alors saisi le Tribunal administratif de Melun, qui par jugement du 28 janvier 2011 l'a débouté de sa demande ; qu'il relève appel dudit jugement devant la Cour de céans ;

Considérant, en premier lieu, que M. A fait grief aux premiers juges de ne pas s'être prononcés sur les manquements qu'il a invoqués à l'appui de l'action en résiliation judiciaire de son contrat de travail dont il a saisi en décembre 2006 le Conseil de prud'hommes de Melun ; que toutefois, le juge administratif, saisi de la légalité de l'autorisation administrative de licenciement, n'était pas tenu de se prononcer sur la gravité des manquements invoqués par M. A à l'appui de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail, mais uniquement, ainsi qu'il l'a fait, de statuer sur les moyens développés par les parties à l'encontre de cette décision en se prononçant ainsi au demeurant sur la discrimination syndicale invoquée également par l'intéressé à l'appui de son action devant le juge judiciaire ; qu'il s'ensuit que ce moyen doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 436-4 du code du travail, devenu R. 2421-5 : " La décision de l'inspecteur est motivée " ; que pour autoriser le licenciement de M. A, ancien délégué syndical au sein de la société Reynaers Aluminium, l'inspectrice du travail de la 7ème section d'inspection de la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle de Seine-et-Marne a considéré que le motif d'inaptitude invoqué par l'employeur à l'appui de sa demande était réel, que le reclassement du salarié était impossible, et que l'audition des parties avait établi que la mesure envisagée ne présentait pas de caractère discriminatoire ; qu'ainsi la décision attaquée comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, et révèle notamment le contrôle effectué par l'autorité administrative sur le caractère discriminatoire du licenciement projeté, sans qu'elle soit tenue d'énoncer les différentes considérations pour lesquelles elle n'a pas accueilli les arguments qu'aurait pu invoquer l'intéressé pour conclure à l'absence d'un tel lien avec le mandat qu'il occupe ; que le moyen tiré du défaut de motivation, manquant en fait, doit donc être écarté ; que contrairement à ce qu'allègue le requérant, le juge de première instance a procédé à une analyse approfondie et exhaustive des manquements qu'il invoquait pour démontrer la discrimination dont il prétend avoir été victime et s'est prononcé sur l'impossibilité alléguée de procéder à son reclassement, comme à l'absence de lien avec son mandat syndical ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 122-24-4 (devenu

L. 1226-2) du code du travail applicable à la date de la décision litigieuse : " Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. / Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. / L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail. " ;

Considérant que si M. A soutient que son employeur n'a pas respecté l'obligation de reclassement prévue par les dispositions précitées du code du travail, il ressort toutefois des pièces du dossier que dans le cadre d'une visite de reprise après la suspension de son contrat de travail pour maladie, M. A a été, lors de la 2ème visite le 9 janvier 2008, déclaré inapte à son poste de coordinateur achats et à tout poste dans l'entreprise par le médecin du travail ; qu'à la suite de la demande formulée par la responsable du personnel de la société Reynaers Aluminium le 14 janvier 2008, notamment à propos d'un possible aménagement du poste de travail occupé par l'intéressé, le médecin du travail a précisé que l'état de santé de M. A ne lui permettait pas de proposer une affectation à un poste ou à des tâches existants dans l'entreprise ; qu'il a par la suite confirmé l'impossibilité pour l'intéressé d'occuper les postes de délégué technique régional, technicien de laboratoire, technico-commercial et magasinier proposés par l'employeur ; que par suite, M. A, qui ne conteste pas son inaptitude, n'est pas fondé à soutenir que la société Reynaers Aluminium aurait méconnu son obligation de reclassement ;

Considérant, en quatrième lieu, que M. A soutient que son licenciement est dû à son activité syndicale, faisant valoir que la discrimination dont il est victime est révélée par plusieurs indices tenant à l'absence d'augmentation de son salaire, à la modification de son contrat de travail du fait qu'il a été privé de son véhicule de fonction, aux diverses pressions, diffamations et agressions verbales de la part de la direction à son encontre dans l'exercice de ses fonctions syndicales, enfin à sa mise à l'écart ; que toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment du rapport établi par les conseillers rapporteurs du Conseil des prud'hommes de Melun dans le cadre de la demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail formée par M. A devant cette juridiction, que ce serait en raison de ses fonctions syndicales que celui-ci n'aurait pas bénéficié d'augmentations individuelles de salaire, l'évolution de son salaire étant identique, sur la période 2003-2007, à celle de deux autres cadres, sur neuf, dont il n'allègue pas au demeurant qu'ils seraient titulaires de mandats de représentation du personnel ; que la circonstance qu'il lui a été demandé de restituer sa voiture de fonction le 15 septembre 2006, alors que son contrat de travail était suspendu depuis le 18 juillet 2006, pendant la durée de son arrêt de travail, soit jusqu'au 27 octobre 2006 et sous réserve de l'arrêt du prélèvement sur salaire auquel cette mise à disposition donnait lieu, ne saurait révéler une quelconque discrimination syndicale ; qu'il en va de même de l'organisation d'une réunion du comité d'entreprise pendant une période de congés de M. A, ou de l'absence d'inscription à une formation ou à un salon professionnel relevant de ses attributions, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'au-delà de ces événements ponctuels, l'exercice de ses mandats syndicaux ait été entravé, ou qu'il ait été privé de tâches, de responsabilités ou de la possibilité d'accéder aux formations auxquelles la loi lui donne droit ; que si M. A fait également état de diverses pressions, agressions verbales, attaques personnelles et propos diffamatoires à son égard de la part de la direction de la société Reynaers Aluminium, durant les années 1999, puis 2004 à 2005, à la suite d'actions syndicales, et produit au soutien de ses allégations plusieurs témoignages rédigés de sa main ou émanant d'anciens salariés de l'entreprise, ainsi qu'une lettre, en date du 1er avril 2005, de la présidente du syndicat national de l'encadrement des commerces et services CFE-CGC dont il était délégué, ces faits, à les supposer établis, ne permettent pas de déduire que le licenciement de l'intéressé, qui n'occupait plus de fonctions syndicales depuis le 17 avril 2007, n'aurait pas eu pour seul motif l'inaptitude physique de M. A, et serait en lien avec celles-ci ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Reynaers Aluminium, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande M. A au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions au profit de la société intimée, en condamnant M. A à lui verser la somme de 1 500 euros ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : M. A versera à la société Reynaers Aluminium la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 10PA03855

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N° 11PA01158


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA01158
Date de la décision : 21/06/2012
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: M. Jean-François TREYSSAC
Rapporteur public ?: M. JARRIGE
Avocat(s) : METIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-06-21;11pa01158 ?
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