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04/06/2012 | FRANCE | N°11PA03964

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 04 juin 2012, 11PA03964


Vu la requête, enregistrée le 29 août 2011, présentée pour la SOCIETE ELECTRICITE DE TAHITI, dont le siège est BP 8021, Puurai à Faa'a (98704), par Me Quinquis ; la SOCIETE ELECTRICITE DE TAHITI demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100084 en date du 24 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions n° 2010/136 et 2010/137 du 8 novembre 2010 et n° 2011/20 et 2011/21 du 10 décembre 2010 par lesquelles le directeur général du Port autonome de Papeete a mis à sa charge des red

evances d'occupation du domaine public ;

2°) d'annuler les décisions préc...

Vu la requête, enregistrée le 29 août 2011, présentée pour la SOCIETE ELECTRICITE DE TAHITI, dont le siège est BP 8021, Puurai à Faa'a (98704), par Me Quinquis ; la SOCIETE ELECTRICITE DE TAHITI demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100084 en date du 24 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions n° 2010/136 et 2010/137 du 8 novembre 2010 et n° 2011/20 et 2011/21 du 10 décembre 2010 par lesquelles le directeur général du Port autonome de Papeete a mis à sa charge des redevances d'occupation du domaine public ;

2°) d'annuler les décisions précitées des 8 novembre et 10 décembre 2010 ;

3°) de mettre à la charge du Port autonome de Papeete une somme de 330 000 francs CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 modifiée portant statut d'autonomie de la Polynésie française ;

Vu la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;

Vu la délibération n° 2001-5 APF du 11 janvier 2001 portant dispositions relatives au code des ports maritimes de la Polynésie française ;

Vu la délibération n° 2004-34 APF du 12 février 2004 portant composition et administration du domaine public en Polynésie française ;

Vu la délibération n° 34/2009 du 23 octobre 2009 du conseil d'administration du Port autonome de Papeete fixant le tarif d'occupation du domaine public du Port autonome par les réseaux divers ;

Vu l'arrêté n° 1469 CM du 23 août 2010 portant modification de l'article D. 121-2 du code des ports maritimes de la Polynésie française ;

Vu le code des ports maritimes de la Polynésie française ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mai 2012 :

- le rapport de Mme Briançon, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Vidal, rapporteur public ;

Considérant que la SOCIETE ELECTRICITE DE TAHITI, concessionnaire de la Polynésie française occupe le domaine public dans le sous-sol duquel ont été posées des canalisations de pompage et de rejet d'eau destinées au refroidissement de la centrale électrique de Vairaatoa, ainsi que des câbles de distribution d'électricité ; que par la délibération n° 34/2009 en date du 23 octobre 2009, le Port autonome de Papeete, établissement public à caractère industriel et commercial affectataire du domaine public, a décidé de soumettre au paiement d'une redevance cette occupation du domaine public par l'ensemble des réseaux, y compris ceux qui en étaient exonérés jusqu'alors, et a modifié le mode de calcul de la redevance d'occupation des réseaux divers, y compris les réseaux publics, installés dans son sous-sol en fixant son montant à la somme de 500 francs CFP le m² par an ; que, sur le fondement de cette délibération, le directeur général du Port autonome de Papeete a, par deux décisions du 8 novembre 2010, fixé le montant des redevances dues par la SOCIETE ELECTRICITE DE TAHITI à la somme de 92 000 francs CFP HT pour les canalisations d'eau de cette société et à la somme de 1 316 180 francs CFP HT pour les câbles électriques au titre de l'année 2010 et a, par deux autres décisions du 10 décembre 2010, fixé les mêmes montants pour les redevances à acquitter au titre de l'année 2011 ; que la SOCIETE ELECTRICITE DE TAHITI relève appel du jugement du 24 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions n° 2010/136 et 2010/137 du 8 novembre 2010 et n° 2011/20 et 2011/21 du 10 décembre 2010 par lesquelles le directeur général du Port autonome de Papeete a mis à sa charge ces redevances d'occupation du domaine public ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que le mémoire produit par le Port autonome de Papeete le 5 mai 2011 répond de manière circonstancié à celui produit le 14 avril 2011 ; qu'en se bornant à viser et analyser ce mémoire sans l'avoir communiqué, le tribunal a méconnu le principe du contradictoire et entaché son jugement d'irrégularité ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée devant le Tribunal administratif de la Polynésie française et la requête d'appel de la SOCIETE ELECTRICITE DE TAHITI ;

Au fond :

Considérant qu'aux termes de l'article D. 121-2 du code des ports maritimes de la Polynésie française, issu de la délibération n° 2001-5 APF du 11 janvier 2001 : " L'établissement [Port autonome de Papeete ] est chargé (...) 2°) de gérer le domaine public dont le territoire le rend affectataire ; dans ce cadre, d'accorder les concessions et autorisations d'occupation (...) dans les conditions fixées aux article D. 112-1 à D. 112-5-4 du présent code... " ; qu'aux termes de l'article D. 112-2-1 du même code : " L'autorisation d'occuper le domaine portuaire est temporaire et délivrée à titre personnel, précaire et révocable. / Elle comporte la délimitation de la zone, définit les conditions de son aménagement, de son exploitation et le montant de la redevance due à raison de l'occupation " ; et qu'aux termes de l'article 10 de la délibération du 12 février 2004 portant composition et administration du domaine public en Polynésie française : " L'autorité compétente fixe les revenus, redevances, droits et taxes de toutes sortes dus à raison des autorisations d'occupation et des utilisations de toute nature des dépendances du domaine public. L'autorité compétente tient compte, pour déterminer le montant des redevances dues, des avantages de toute nature procurés à l'occupant (...) L'exonération ou la réduction du paiement de la redevance peuvent être autorisées par décision de l'autorité compétente au profit des communes et des organismes publics ou d'économie mixte (...) L'autorité compétente peut réviser les conditions financières des autorisations d'occupation à l'expiration de chaque période stipulée pour le paiement de la redevance, nonobstant toutes dispositions contraires de l'acte d'autorisation" ; qu'aux termes de l'article 17 de cette même délibération : " Par dérogation à l'article 16, la conservation et la gestion, tant technique que financière, du domaine public affecté, tel que prévu à l'article 20, incombent à l'affectataire " ; qu'enfin aux termes de l'article 20 : " (...) L'affectation opère un transfert de gestion du bien au profit de l'affectataire (...) " ;

Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de ce que les décisions contestées ne seraient pas suffisamment motivées qui relève d'une cause juridique nouvelle en appel, est irrecevable et ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions précitées des délibérations

n° 2001-5 APF du 11 janvier 2001 et n° 2004-34 du 12 février 2004 donnent compétence au Port autonome de Papeete pour gérer le domaine public dont il a été rendu affectataire, et en conséquence établir et percevoir des redevances, pour l'occupation du domaine dont il est affectataire ; qu'ainsi, le Port autonome de Papeete a pu régulièrement, par la délibération de son conseil d'administration en date du 23 octobre 2009, décider de soumettre l'occupation du domaine public par les réseaux divers, y compris les réseaux publics, au paiement d'une redevance même pour ceux qui en étaient exonérés jusqu'alors ; qu'aucun texte ni aucun principe ne subordonne l'institution de ces redevances à leur justification par l'intérêt général ; qu'en outre, ces redevances répondent à la nécessité d'une meilleure gestion du domaine prenant en compte les avantages de toute nature résultant de son occupation ;

Considérant, en troisième lieu, que si la SOCIETE ELECTRICITE DE TAHITI excipe de l'illégalité de la délibération du conseil d'administration du Port autonome de Papeete du 23 octobre 2009 en faisant valoir qu'elle a été adoptée antérieurement à l'arrêté n° 1469 CM du 23 août 2010 portant modification de l'article D. 121-2 5° du code des ports maritimes de la Polynésie française et autorisant le Port autonome de Papeete à percevoir pour le compte de la Polynésie française tout droit, taxe ou redevance dont elle lui confie l'exécution, les redevances d'occupation domaniales en litige sont établies par le Port autonome à son profit dans le cadre d'un transfert de gestion du bien au profit de l'affectataire en vertu de l'article 20 de la délibération du 12 février 2004 et non pour le compte de la Polynésie française ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'en vertu de l'article D. 121-2 du code des ports maritimes de la Polynésie française et de l'article 10 de la délibération du 12 février 2004 portant composition et administration du domaine public en Polynésie française, l'affectation du domaine public de la zone portuaire au Port autonome de Papeete habilite cet établissement public à prendre tous les actes de gestion relatifs au domaine qui lui est confié ; qu'ainsi, le Port autonome de Papeete a pu, par la délibération n° 34/2009 en date du 23 octobre 2009, décider de soumettre au paiement l'occupation du domaine public par l'ensemble des réseaux y compris ceux qui en étaient exonérés jusqu'alors et modifier le mode de calcul de la redevance d'occupation des réseaux divers, y compris des réseaux publics, installés dans son sous-sol, sans qu'y fasse obstacle, les clauses du cahier des charges de la concession initialement consentie par la Polynésie française ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le Port autonome de Papeete ne pouvait légalement mettre à la charge de la SOCIETE ELECTRICITE DE TAHITI les redevances contestées à raison de l'antériorité de l'occupation ne peut être accueilli ;

Considérant, en cinquième lieu, que toute occupation privative du domaine public est en principe subordonnée à la délivrance d'une autorisation et au paiement d'une redevance ; que la société requérante, concessionnaire de service public, ne peut utilement se prévaloir à l'encontre du Port autonome de Papeete, tiers au contrat, des stipulations, dépourvues de caractère réglementaire, de son contrat de concession alors même que la collectivité a transféré au Port autonome de Papeete la gestion du domaine public portuaire ; qu'en outre, le moyen tiré de la méconnaissance des droits résultant d'un contrat est inopérant à l'appui d'un recours en annulation pour excès de pouvoir d'une décision administrative ; qu'enfin, les conditions d'occupation à titre gratuit du domaine public par les installations de la SOCIETE ELECTRICITE DE TAHITI sont précaires et révocables et ne pouvaient faire obstacle à ce que le Port autonome de Papeete fixe une redevance pour l'occupation du domaine public dont il est devenu affectataire, alors même que les installations situées sur le domaine public serviraient à leur mission de service public de la distribution d'électricité aux usagers ;

Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article D. 112-4-1 du code des ports autonomes de la Polynésie française : " Le titulaire d'une autorisation d'occupation du domaine portuaire a, sauf prescription contraire de son titre, un droit réel sur les ouvrages, constructions et installations à caractère immobilier qu'il réalise pour l'exercice de l'activité autorisée par ce titre. / Ce droit confère à son titulaire, pour la durée de l'autorisation et dans les conditions fixées par la présente section, les prérogatives et obligations du propriétaire. / Le titre d'occupation fixe la durée de l'autorisation en fonction de la nature de l'activité et de celle des ouvrages autorisés et de leur importance, sans pouvoir excéder les durées prévues aux articles D. 112-2-2 et

D. 112-3-1. / Par exception, lorsque les ouvrages, constructions ou installations sont nécessaires à la continuité du service public, les dispositions des alinéas ci-dessus ne sont applicables que sur décision expresse de l'autorité portuaire " ; qu'il résulte de ces dispositions que la SOCIETE ELECTRICITE DE TAHITI dispose d'un droit réel sur les câbles et les installations lui appartenant dans le sous-sol de l'emprise du Port autonome de Papeete et non comme elle le soutient d'un droit au maintien de ses conditions d'occupation du domaine public portuaire jusqu'au terme de sa concession de service public ;

Considérant, en septième lieu, qu'aux termes de l'article 11 de la délibération

n° 2004-34 APF du 12 février 2004 portant composition et administration du domaine public en Polynésie française : " la redevance commence à courir à compter de la date mentionnée dans l'arrêté d'autorisation (...) Dans le cas où l'occupation est antérieure à l'autorisation, la redevance commence à courir à compter de l'occupation effective. " ; que la somme mise à la charge de la SOCIETE ELECTRICITE DE TAHITI par les décisions n° 2010/136 et n° 2010/137 du 8 novembre 2010 porte sur l'occupation du domaine public à compter du 1er janvier 2010 ; que l'occupation effective du domaine au titre de l'année 2010 n'est pas contestée ; que, dès lors, le titre de recette correspondant à l'occupation du domaine public portuaire au titre de l'année 2010, bien qu'émis le 8 novembre 2010, ne saurait avoir un caractère rétroactif ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE ELECTRICITE DE TAHITI n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie Française a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SOCIETE ELECTRICITE DE TAHITI une somme de 1 500 euros en application de ces mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SOCIETE ELECTRICITE DE TAHITI est rejetée.

Article 2 : La SOCIETE ELECTRICITE DE TAHITI versera au Port autonome de Papeete, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 11PA03964


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 11PA03964
Date de la décision : 04/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Claudine BRIANÇON
Rapporteur public ?: Mme VIDAL
Avocat(s) : QUINQUIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-06-04;11pa03964 ?
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