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24/05/2012 | FRANCE | N°12PA00088

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 24 mai 2012, 12PA00088


Vu la requête, enregistrée le 9 janvier 2012, présentée pour M. Said A, demeurant chez ...), par Me Leudet ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1107529/5-2 du 22 septembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 23 novembre 2010 par lequel le préfet de police lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé son pays de destination et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de police, à titre princip

al, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et f...

Vu la requête, enregistrée le 9 janvier 2012, présentée pour M. Said A, demeurant chez ...), par Me Leudet ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1107529/5-2 du 22 septembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 23 novembre 2010 par lequel le préfet de police lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé son pays de destination et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" ou "étudiant" dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour portant la mention "vie privée et familiale" ou "étudiant" dans les quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation administrative dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat de la somme de 2 000 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, ensemble le décret du 3 mai 1974 portant publication de la convention ;

Vu la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985, signée à Schengen le 19 juin 1990, ensemble le décret n° 95-304 du 21 mars 1995 portant publication de cette convention ;

Vu la convention internationale signée à New York le 26 janvier 1990, relative aux droits de l'enfant, publiée par décret du 8 octobre 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, ensemble le décret

n° 91-1266 du 19 décembre 1991 relatif à son application ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 mai 2012 :

- le rapport de M. Bernardin, rapporteur,

- les conclusions de M. Egloff, rapporteur public,

- et les observations de Me Guilmelchain, substituant Me Leudet, pour

M. A ;

Considérant que M. A, né en 1975, de nationalité comorienne, entré en France, selon ses déclarations, le 25 septembre 2002 et reçu en préfecture de police le 22 septembre 2010, a sollicité, sur le fondement de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le renouvellement de son titre de séjour "étudiant" valable jusqu'au 30 septembre 2010 ; que, par un arrêté du 23 novembre 2010, le préfet de police a rejeté cette demande et a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois ; que M. A relève régulièrement appel du jugement n° 1107529/5-2 du 22 septembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la compétence du signataire de l'arrêté du 23 novembre 2010 :

Considérant que M. Philippe B, attaché d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer, adjoint au chef du 6ème bureau de la préfecture de police, signataire de l'arrêté attaqué du 23 novembre 2010, bénéficiait, aux termes d'un arrêté n° 2010-00694 du 20 septembre 2010, régulièrement publié au recueil des actes administratifs n° 19 A du 22 septembre 2010, d'une délégation de signature du préfet de police l'habilitant à signer tous les actes relevant de ses attributions en cas d'absence ou d'empêchement de ses supérieurs hiérarchiques ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que les décisions attaquées contenues dans l'arrêté du 23 novembre 2010 seraient entachées d'incompétence doit être écarté comme manquant en fait ;

Sur la légalité interne du refus de renouvellement du titre de séjour "étudiant" :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire délivrée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention "étudiant" [...] " ; qu'en vertu de l'article R. 313-7 du même code, la carte de séjour en qualité d'étudiant est délivrée à l'étranger qui présente à l'appui de sa demande " 1° La justification qu'il dispose de moyens d'existence, correspondant à 70 % au moins du montant de l'allocation d'entretien mensuelle de base versée, au titre de l'année universitaire écoulée, aux boursiers du Gouvernement français ; 2º Un certificat d'immatriculation, d'inscription ou de préinscription dans un établissement public ou privé d'enseignement ou de formation initiale [...] " ;

Considérant que, d'une part, il ressort des pièces du dossier, et en particulier des termes mêmes de la requête d'appel de M. A, qu'à la date à laquelle celui-ci a sollicité le renouvellement de son titre de séjour "étudiant" valable jusqu'au 30 septembre 2010, il n'était inscrit dans aucun établissement d'enseignement supérieur ; que, d'autre part, le requérant n'établit, ni même d'ailleurs n'allègue, qu'à la date du 23 novembre 2010 à laquelle le préfet a pris sa décision, il avait informé cette autorité de son inscription dans un établissement universitaire ou qu'il justifiait d'une telle inscription ; que, par suite, le préfet de police a pu, à bon droit, retenir que le pétitionnaire, ne disposant pas d'une inscription scolaire pour l'année 2010-2011, ne pouvait prétendre au statut d'étudiant et, pour ce motif, lui refuser le renouvellement du titre de séjour sollicité sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en tout état de cause, il ressort également des pièces du dossier que M. A, arrivé en France le 25 septembre 2002 pour y faire des études, a été mis en possession de titres de séjour en qualité d'étudiant pour l'année 2002-2003 à raison de son inscription en licence de sciences de l'éducation à l'Université Paris VIII, qu'il a obtenue en 2003, puis, pour les années 2003-2004, 2004-2005 et 2005-2006, à raison de son inscription en DEUG et en licence de management et gestion des entreprises à l'Université Paris XIII et, enfin, pour les années 2006-2007 et 2007-2008, à raison de son inscription en 1ère année de master de management de la maintenance des équipements de la sécurité et de l'environnement à l'Université Paris XIII ; qu'ayant obtenu des moyennes générales de 4,85/20 et de 4,92/20, M. A en septembre 2008, s'est inscrit en master santé et société, spécialité "santé et sécurité au travail" et a obtenu une moyenne de 6/20 ; que, dans ces conditions, il ne peut utilement se prévaloir de la circonstance qu'ayant été ajourné en juillet 2010 à l'examen de 1ère année, il a été admis à passer des épreuves de rattrapage, dont les résultats n'ont été proclamés que le 4 octobre 2010, soit postérieurement à son rendez-vous en préfecture, pour soutenir que le préfet aurait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation sa décision du 23 novembre 2010 lui refusant le renouvellement de son titre de séjour "étudiant" ;

Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

Considérant que, si le moyen tiré d'une atteinte au droit à la vie privée et familiale garanti par les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'appui de la contestation d'un refus de renouveler un titre de séjour en qualité d'étudiant, lequel résulte seulement d'une appréciation de la réalité et du sérieux des études poursuivies, dès lors que, pour instruire la demande de M. A de renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étudiant, le préfet a examiné l'atteinte portée par sa décision au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale, celui-ci est fondé à invoquer le moyen tiré de la violation desdites stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à l'encontre de cette décision ;

Considérant que M. A fait valoir qu'il est entré en France en 2002 pour y rejoindre sept de ses frères et soeurs résidant sur le territoire national, dont quatre seraient de nationalité française, qu'il bénéficie d'une bonne intégration du fait de son emploi de vacataire à la mairie de Paris et de son engagement auprès de plusieurs associations et que ses quatre enfants restés aux Comores ont été adoptés par son frère ; que, toutefois, il ne peut être sérieusement contesté que le requérant, célibataire et sans charge de famille en France, où il est arrivé en septembre 2002, à l'âge de 27 ans, pour y poursuivre des études, serait dépourvu de toute attache aux Comores, où il a vécu jusqu'à son départ pour la France et où résident au moins son frère et ses quatre enfants mineurs ; que, s'il n'est pas contesté que M. A a, depuis 2004, occupé divers emplois en tant que vacataire de la mairie de Paris et qu'il a également, parallèlement à son travail pour cet employeur, occupé différents emplois dans le privé en qualité d'agent de propreté, d'agent de sécurité, d'électro-technicien en intérimaire et s'est investi dans la vie associative en participant, notamment, à de nombreuses manifestations sportives et en dirigeant des associations qu'il a lui-même créées, les diverses et multiples activités du requérant, arrivé en France en septembre 2002 pour y faire des études, ne suffisent pas à établir sa bonne intégration dans la société française ; que, dans ces conditions, M. A n'est pas fondé à soutenir que le refus de titre de séjour qui lui a été opposé aurait porté une atteinte manifestement disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; qu'ainsi, le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté, ainsi que celui tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la décision attaquée au regard de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant ;

Sur la légalité interne de l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, qu'en ce qui concerne l'obligation faite à M. A de quitter le territoire français, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité du refus de l'admettre au séjour ne peut, eu égard à ce qui précède, qu'être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que, si M. A soutient qu'en l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet de police a porté une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale et a violé, en conséquence, l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il résulte de ce qui a été précédemment dit s'agissant de la méconnaissance par le préfet de police des stipulations de cet article, que le moyen susanalysé soulevé à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français, alors que le requérant n'apporte aucune élément nouveau, ne peut qu'être écarté ;

Considérant, enfin, que, lorsqu'un étranger se trouve dans l'un des cas où, en vertu de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet peut assortir son refus de délivrer ou de renouveler un titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français et que cet étranger n'est pas au nombre de ceux qui, en vertu de l'article L. 511-4 du même code, ne peuvent légalement faire l'objet d'une mesure d'éloignement, il appartient au préfet d'apprécier si la mesure envisagée n'est pas de nature à comporter, pour la situation personnelle ou familiale de l'intéressé, des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; qu'il incombe au juge de l'excès de pouvoir de contrôler si ladite appréciation n'est pas entachée d'une erreur manifeste ;

Considérant que, si M. A, qui rappelle d'ailleurs qu'il réside sur le territoire français depuis huit années en qualité d'étudiant, fait valoir que, parallèlement à ses études, il s'est inséré à la société française de manière exemplaire par le biais de ses nombreuses et variées activités professionnelles et associatives et qu'en outre, sept de ses frères et soeurs résident sur le territoire français, quatre d'entre eux étant de nationalité française, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police aurait entaché l'obligation de quitter le territoire français qu'il a prise à l'encontre de M. A d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle et familiale de ce dernier ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte comme celles tendant à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, le versement au conseil de M. A de la somme de 2 000 euros doivent être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

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N° 12PA00088


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA00088
Date de la décision : 24/05/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme TANDONNET-TUROT
Rapporteur ?: M. André-Guy BERNARDIN
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : LEUDET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-05-24;12pa00088 ?
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