Vu la requête, enregistrée le 21 février 2011, présentée pour M. Brahim A, ayant élu domicile au ..., par Me Bertin ; M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1012271 du 5 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 24 février 2010 du ministre de l'intérieur, de l'outre mer, des collectivités territoriales et de l'immigration refusant, d'une part, d'abroger l'arrêté d'expulsion pris à son encontre le 4 février 1999, d'autre part, de prononcer son assignation à résidence ;
2°) d'annuler cette décision ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur, à titre principal, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans l'attente du réexamen de sa situation administrative, à titre subsidiaire, de prononcer son assignation à résidence à titre probatoire en l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au profit de son conseil, celui-ci renonçant à percevoir l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 mars 2012 :
- le rapport de Mme Versol,
- les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public ;
Considérant que M. A, ressortissant marocain, né le 12 octobre 1974, entré en France en 1983, a été condamné en 1996 pour transport, détention, acquisition, usage et contrebande de produits stupéfiants et a fait l'objet le 4 février 1999 d'un arrêté d'expulsion ; que, par décision du 24 février 2010, le ministre de l'intérieur, de l'outre mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a refusé d'abroger l'arrêté d'expulsion pris à l'encontre de M. A et de prononcer son assignation à résidence ; que M. A fait appel du jugement du 5 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation du refus d'abrogation de l'arrêté d'expulsion :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 524-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'arrêté d'expulsion peut à tout moment être abrogé (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 524-2 du même code : " Sans préjudice des dispositions de l'article L. 524-1, les motifs de l'arrêté d'expulsion donnent lieu à un réexamen tous les cinq ans à compter de la date d'adoption de l'arrêté. L'autorité compétente tient compte de l'évolution de la menace pour l'ordre public que constitue la présence de l'intéressé en France, des changements intervenus dans sa situation personnelle et familiale et des garanties de réinsertion professionnelle ou sociale qu'il présente, en vue de prononcer éventuellement l'abrogation de l'arrêté (...) " ; que si l'article L. 521-3 du même code, dans sa rédaction issue de la loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003, prévoit que ne peut faire l'objet d'une mesure d'expulsion qu'en cas de comportements de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de l'Etat, ou liés à des activités à caractère terroriste, ou constituant des actes de provocation explicite et délibérée à la discrimination, à la haine ou à la violence contre une personne déterminée ou un groupe de personnes, l'étranger qui justifie par tous moyens résider habituellement en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans, ces dispositions ne sauraient être utilement invoquées à l'appui d'une demande tendant à l'abrogation d'une mesure d'expulsion antérieurement prise ; qu'il appartient seulement au ministre, saisi d'une telle demande, d'apprécier en vertu des articles L. 524-1 et L. 524-2 précités, si la présence de l'intéressé sur le territoire français constitue à la date à laquelle il se prononce une menace grave pour l'ordre public ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 521-3 du code précité ne peut qu'être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces au dossier qu'à la suite de la décision d'expulsion du territoire prise le 4 février 1999, M. A s'est rendu coupable de récidives de transport, détention, usage illicite de stupéfiants et contrebande de marchandises prohibées et a été condamné en 2001, 2005 et 2008, à des peines d'emprisonnement, d'une durée respective de trois ans, dont six mois avec sursis, trois ans et quatre ans ; que si le requérant fait valoir, d'une part, qu'a été mis oeuvre, en cours d'incarcération, un traitement substitutif aux opiacés, ainsi qu'en atteste le Docteur B, psychiatre, dans un certificat médical établi le 8 juin 2009, et, d'autre part, qu'il a bénéficié, le 17 décembre 2010, d'une mesure d'aménagement de peine fondée sur son bon comportement en détention et sur ses efforts de réadaptation sociale, mesure retirée le 12 janvier 2011 compte tenu de sa situation irrégulière sur le territoire français, il n'est pas fondé à soutenir que le ministre de l'intérieur a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en estimant que sa présence sur le territoire français constituait à la date du 24 février 2010 une menace grave pour l'ordre public ; que le requérant ne peut pas utilement se prévaloir de la circonstance que, par un arrêt du 16 décembre 2008, la Cour d'appel de Besançon a jugé qu'il n'y avait pas lieu de prononcer à son encontre une peine d'interdiction du territoire national ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
Considérant que si M. A fait valoir qu'il est entré en France à l'âge de neuf ans dans le cadre d'une demande de regroupement familial présentée par son père, que résident en France sa mère et tous ses frères et soeurs, ces derniers étant, sauf un, de nationalité française, avec lesquels il continue d'entretenir des relations, qu'il a suivi la majorité de sa scolarité en France, il ressort des pièces du dossier que, célibataire et sans charge de famille, il n'est pas dépourvu d'attache familiale dans son pays d'origine où réside son père ; que, dans ces conditions, la décision portant refus d'abrogation de l'arrêté d'expulsion n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la mesure a été prise ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation du refus de prononcer une assignation à résidence :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 523-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Peut également faire l'objet d'un arrêté d'assignation à résidence, à titre probatoire et exceptionnel, l'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'expulsion prononcée en application de l'article L. 521-2. Cette mesure est assortie d'une autorisation de travail. Elle peut être abrogée à tout moment en cas de faits nouveaux constitutifs d'un comportement préjudiciable à l'ordre public. Les obligations de présentation aux services de police et aux unités de gendarmerie prévues à l'article L. 513-4 ainsi que les sanctions en cas de non-respect des prescriptions liées à l'assignation à résidence prévues à l'article L. 624-4 sont applicables. " ;
Considérant que si M. A fait valoir sa volonté de réinsertion sociale et professionnelle, en se prévalant de la cure de désintoxication et l'exercice d'une activité rémunérée durant sa dernière incarcération, il n'est pas fondé à soutenir, pour les mêmes motifs que ceux énoncés ci-dessus, que le refus d'assignation à résidence aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excessive et serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
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N° 11PA00957