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21/03/2012 | FRANCE | N°10PA03003

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 21 mars 2012, 10PA03003


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 18 juin 2010, présentée pour M. et Mme José Maria A, demeurant ..., par Mes Foucault et Captier ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0705192 du 22 avril 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2000, 2001 et 2002 et des contributions sociales mises à leur charge au titre des années 2001 et 2002, ainsi que des pénalités et intérê

ts y afférents ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 18 juin 2010, présentée pour M. et Mme José Maria A, demeurant ..., par Mes Foucault et Captier ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0705192 du 22 avril 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2000, 2001 et 2002 et des contributions sociales mises à leur charge au titre des années 2001 et 2002, ainsi que des pénalités et intérêts y afférents ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le remboursement des frais d'instance ;

...........................................................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 mars 2012 :

- le rapport de Mme Dhiver, rapporteur,

- et les conclusions de M. Egloff, rapporteur public ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que M. et Mme A avaient, devant les premiers juges, contesté la procédure d'imposition en faisant uniquement valoir que la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ne leur avait pas été remise ; que, par suite, ils ne sont pas fondés à soutenir que le tribunal administratif a omis de répondre au moyen tiré de ce qu'ils n'ont pas été informés de la faculté de se faire assister par un conseil de leur choix ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : " (...) Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : " Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. / Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix (...) " ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a adressé à M. et Mme A, le 18 septembre 2003, un avis les informant de l'engagement d'un examen de leur situation fiscale personnelle portant sur les années 2000, 2001 et 2002 ; que le pli contenant cet avis a été retourné au service avec la mention "non réclamé" ; que, si cet avis indiquait aux intéressés qu'ils pouvaient se faire assister par un conseil de leur choix et était accompagné de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, le ministre n'établit pas que les requérants ont été avisés de ce que le pli contenant cet avis était à leur disposition au bureau de poste et qu'ils en avaient ainsi reçu notification régulière ; que M. et Mme A ont été informés, par une lettre du 3 novembre 2003, reçue le 5 novembre suivant, de l'engagement du contrôle, des années soumises à vérification et de la date à laquelle était prévu le premier entretien avec le vérificateur ; que cette lettre mentionnait également que les contribuables avaient, au cours de ce premier entretien, la faculté de se faire assister par un conseil de leur choix ; que, si l'administration a limité, dans ce document, le bénéfice de la garantie visée au deuxième alinéa de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales et n'a pas joint à cette lettre la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, elle y indiquait que l'avis d'examen de leur situation fiscale personnelle et la charte seraient remis aux intéressés le jour du premier entretien ; que les requérants soutiennent que ledit avis et ladite charte ne leur ont pas été donnés le 25 novembre 2003, date à laquelle s'est finalement déroulé le premier entretien ; que, toutefois, ils n'établissent pas avoir accompli toutes les diligences nécessaires pour en obtenir communication ce jour-là, avant l'engagement du contrôle, alors même qu'ils avaient été informés de l'existence de ces documents et de ce qu'ils devaient leur être remis ; que, d'ailleurs, M. et Mme A n'ont jamais relevé le défaut de remise des documents, ni au cours du contrôle, ni postérieurement aux notifications de redressements, lesquelles mentionnaient explicitement que les intéressés avaient été informés du contrôle par un avis du 18 septembre 2003 ; que, par suite, les moyens tirés du défaut de remise de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, de l'absence de réception de l'avis de vérification et du fait que la lettre du 3 novembre 2003 ne leur accordait qu'une garantie restreinte ne peuvent qu'être écartés ; qu'enfin, s'agissant de la procédure d'imposition, les requérants ne peuvent utilement invoquer la doctrine de l'administration ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 47 C du livre des procédures fiscales : " Lorsque, au cours d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, sont découvertes des activités occultes ou mises en évidence des conditions d'exercice non déclarées de l'activité d'un contribuable, l'administration n'est pas tenue d'engager une vérification de comptabilité pour régulariser la situation fiscale du contribuable au regard de cette activité " ;

Considérant que l'activité occulte relevant des bénéfices non commerciaux exercée par Mme A a été découverte par l'administration au cours de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle des requérants, à l'occasion de l'exercice de son droit de communication auprès de l'autorité judiciaire le 8 décembre 2003 ; que le moyen tiré de ce que l'administration a entaché la procédure de contrôle d'une irrégularité en n'adressant pas à Mme A un avis de vérification de comptabilité doit, par suite, être écarté ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne les bénéfices non commerciaux :

Considérant qu'aux termes de l'article 92 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme (...) revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices (...) de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus " ;

Considérant qu'à l'issue de l'examen de situation fiscale personnelle dont M. et Mme A ont fait l'objet, l'administration, se fondant sur les éléments révélés par la procédure judiciaire, leur a notifié, selon la procédure contradictoire, des redressements dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ; qu'il résulte de l'instruction que le service a consulté, dans le cadre de son droit de communication visé aux articles L. 81 C et L. 82 C du livre des procédures fiscales, les procès-verbaux d'audition de Mme A des 10 avril et 15 octobre 2003, dans lesquels l'intéressée a reconnu avoir effectué de façon occulte divers travaux domestiques pour quatre personnes, a indiqué le nom de ces personnes et a donné une évaluation des sommes que cette activité lui avait procurées ; qu'il a également eu accès au procès-verbal du 23 mai 2003 comportant le détail des dépôts en espèces et en chèques sur le compte bancaire ouvert au nom de M. A à la banque Caixa Geral de Depositos ; que, compte tenu de l'ensemble de ces éléments, l'administration a estimé que Mme A avait, sur toute la période contrôlée, exercé une activité occulte et a regardé comme des bénéfices non commerciaux les sommes versées en numéraire et en chèques par les quatre personnes désignées dans les procès-verbaux ; qu'ainsi, l'administration établit que Mme A a exercé, au cours des trois années 2000, 2001 et 2002, une activité occulte de service à la personne et que, quelles qu'aient été les conditions d'exercice de cette activité, les revenus qui en ont été tirés se sont élevés aux montants respectifs de 40 329 euros, 4 086 euros et 14 597 euros ; que ces sommes ont pu à bon droit être imposées sur le fondement des dispositions du 1 de l'article 92 du code général des impôts ;

En ce qui concerne les sommes taxées en tant que revenus d'origine indéterminée :

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'après avoir constaté que les montants des crédits enregistrés sur les comptes bancaires de M. et Mme A au cours des années 2001 et 2002 représentaient plus du double des revenus bruts déclarés par les contribuables au titre desdites années, le service leur a régulièrement adressé, le 11 juin 2004, une demande de justifications, sur le fondement des dispositions de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, portant uniquement sur l'origine et la nature de sommes portées au crédit de leurs comptes bancaires ; que l'administration a imposé, par voie de taxation d'office, en tant que revenus d'origine indéterminée les crédits pour lesquels M. et Mme A n'avaient fourni aucune explication, s'élevant respectivement à 25 540 euros et 14 347 euros ; qu'elle n'avait pas, pour fixer ces montants, à tenir également compte des dépenses des contribuables ; que, si les requérants soutiennent qu'une partie des sommes sur la base desquelles ils ont été imposés correspondrait à des versements provenant du frère de Mme A en dédommagement de repas pris à leur domicile, au remboursement de dépenses prises en charge pour le compte de personnes auxquelles ils rendaient divers services, à des dons ou des libéralités de ces personnes, à des étrennes des locataires de l'immeuble dont Mme A était la gardienne, enfin, à des dons de la mère de cette dernière, ils n'apportent aucun commencement de preuve à l'appui de leurs allégations ; qu'ainsi, les requérants ne sont fondés à contester ni la méthode utilisée par l'administration pour déterminer le montant des sommes regardées comme constitutives de revenus d'origine indéterminée, ni les montants finalement retenus par le service ;

Sur les intérêts de retard et les pénalités de mauvaise foi :

Considérant, en premier lieu, que l'intérêt de retard de 0,75 % institué par les dispositions de l'article 1727 du code général des impôts applicables au litige vise essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l'Etat en raison du non respect par les contribuables de leur obligation de déclarer et payer l'impôt aux dates légales ; que, si l'évolution des taux du marché a conduit à une hausse relative de cet intérêt depuis son institution, cette circonstance ne lui confère pas pour autant la nature d'une sanction, dès lors que son niveau n'est pas devenu manifestement excessif au regard du taux moyen pratiqué par les prêteurs privés pour un découvert non négocié ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'il constituerait une sanction infligée en méconnaissance des garanties de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ; que M. et Mme A ne sont, dès lors, fondés à demander ni la modulation de ce taux, ni l'application du principe de l'application immédiate de la loi répressive plus douce ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 p. 100 si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (...) " ;

Considérant qu'en relevant que Mme A avait exercé pendant plusieurs années une activité occulte qu'elle a elle-même reconnue, ainsi que, la volonté de dissimulation par cette dernière des revenus tirés de cette activité et le caractère répété de l'infraction sur l'ensemble de la période vérifiée, l'administration établit la mauvaise foi des contribuables, s'agissant des sommes imposées dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ; qu'en revanche, en se bornant à faire état de l'importance des sommes taxées en tant que revenus d'origine indéterminée et de ce que M. et Mme A n'avaient pas été en mesure de justifier de la nature et de l'objet de ces sommes, l'administration n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, que les requérants ont délibérément cherché à dissimuler des revenus imposables ; qu'il y a lieu, par suite, de prononcer la décharge des pénalités de mauvaise foi appliquées à ces seuls revenus ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a refusé de prononcer la décharge des pénalités de mauvaise foi appliquées aux revenus imposés au titre des années 2001 et 2002 en tant que revenus d'origine indéterminée, d'un montant respectif de 25 540 euros et 14 347 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. et Mme A tendant au remboursement des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : M. et Mme A sont déchargés des pénalités de mauvaise foi qui leur ont été appliquées au titre des années 2001 et 2002 sur les droits résultant de l'imposition en tant de revenus d'origine indéterminée des sommes respectives de 25 540 euros et 14 347 euros.

Article 2 : Le jugement n° 0705192 du 22 avril 2010 du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme A est rejeté.

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N° 08PA04258

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N° 10PA03003


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 10PA03003
Date de la décision : 21/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme TANDONNET-TUROT
Rapporteur ?: Mme Martine DHIVER
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : SCP J-P FOUCAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-03-21;10pa03003 ?
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