Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 24 janvier 2011, présentée pour M. Harod A, demeurant chez ... par Me Langlois ; M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1017066/12 du 10 décembre 2010 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales du 10 septembre 2010 rejetant sa demande d'assignation à résidence ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ladite décision ;
3°) d'enjoindre au ministre de prononcer son assignation à résidence, assortie d'une autorisation de travail ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 novembre 2011 :
- le rapport de Mme Dhiver, rapporteur,
- et les conclusions de M. Egloff, rapporteur public ;
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : Les présidents de tribunal administratif (...) peuvent, par ordonnance : (...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
Considérant que, pour contester devant le Tribunal administratif de Paris le refus d'assignation à résidence qui lui a été opposé, M. A faisait notamment valoir qu'il avait obtenu le statut de réfugié ; que les termes dans lesquels ce moyen était exprimé permettaient d'en saisir le sens et la portée et étaient suffisants pour permettre au juge d'exercer son office ; que, dans ces conditions, la demande présentée devant le Tribunal administratif de Paris ne pouvait être rejetée par l'ordonnance attaquée, en application des dispositions précitées, par le motif que les allégations de l'intéressé ne pouvaient manifestement pas venir au soutien de son moyen ; qu'il suit de là que M. A est fondé à demander l'annulation de l'ordonnance contestée du vice-président du Tribunal administratif de Paris du 10 décembre 2010 ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Paris ;
Sur la légalité de la décision de refus d'assignation à résidence :
Considérant que M. A, de nationalité ghanéenne, qui a été condamné en 2004 par la Cour d'appel de Paris à une peine de cinq années d'emprisonnement pour proxénétisme aggravé, assortie d'une interdiction définitive du territoire national, a sollicité du ministre de l'intérieur son assignation à résidence à l'effet de présenter une demande de relèvement de cette interdiction ; qu'un refus lui a été opposé le 10 septembre 2010 ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : L'étranger qui est obligé de quitter le territoire français ou qui doit être reconduit à la frontière et qui justifie être dans l'impossibilité de quitter le territoire français en établissant qu'il ne peut ni regagner son pays d'origine, ni se rendre dans aucun autre pays peut, par dérogation aux dispositions du titre V du présent livre, être astreint à résider dans les lieux qui lui sont fixés ;
Considérant que le bénéfice de l'assignation à résidence prévue par les dispositions précitées est subordonné à la double condition que l'intéressé ne puisse pas regagner son pays d'origine et ne puisse pas être admis dans un autre pays ; que, si M. A s'est vu reconnaître par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le statut de réfugié politique, il ne justifie pas avoir, à la date de la décision ministérielle lui refusant l'assignation à résidence, effectué des démarches auprès d'autres pays que le Ghana pour être admis sur leur territoire, ni même avoir envisagé de telles démarches et sollicité à cet effet son assignation à résidence ; que, par suite, le ministre de l'intérieur, en refusant à M. A de l'assigner à résidence, n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Considérant, en deuxième lieu, que les conséquences d'un éloignement du territoire français sur la vie privée et familiale de M. A résultent de la décision judiciaire d'interdiction du territoire dont il a été l'objet et non de la décision par laquelle le ministre de l'intérieur s'est borné à prendre les mesures qu'implique l'exécution de la décision de l'autorité judiciaire ; que l'atteinte excessive portée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale ne peut donc être utilement invoquée à l'appui de cette dernière décision ; que, par suite, le moyen tiré d'une violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant ;
Considérant, en troisième lieu, que M. A ne peut, en tout état de cause, utilement se prévaloir des stipulations de l'article 3-2 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 2 janvier 1990, qui sont dépourvues d'effet direct ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le ministre de l'intérieur aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;
Considérant, en dernier lieu, que la décision querellée ne fixe pas le pays à destination duquel M. A doit être éloigné ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la demande de M. A doit être rejetée ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant que le présent arrêt, par lequel la Cour rejette les conclusions à fin d'annulation de M. A, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de l'intéressé tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur de prononcer son assignation à résidence doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. A la somme qu'il réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : L'ordonnance n° 1017066/12 du 10 décembre 2010 du Tribunal administratif de Paris est annulée.
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N° 08PA04258
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N° 11PA00437